Affichage des articles dont le libellé est Jim Carrey. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Jim Carrey. Afficher tous les articles

31 décembre 2022

Les Banshees d'Inisherin

J'étais resté en mauvais termes avec Martin McDonagh suite à son lourdingue Three Billboards mais je gardais toutefois un agréable souvenir de Bons baisers de Bruges. Il réunit justement ici le même duo d'acteurs, Colin Farrell et Brendan Gleeson, mais, s'amusant de nos attentes de spectateurs conscients de l'alchimie si particulière des deux irlandais, McDonagh nous narre ici une drôle d'histoire de rupture amicale, un anti-buddy-movie en forme de réflexion amère sur le temps qui passe et la condition humaine. C'est un véritable chagrin d'amitié que nous vivons à travers les yeux (et sous les sourcils si expressifs) d'un brave type, gentil mais un peu simple, incarné avec une justesse étonnante par un superbe Colin Farrell qui trouve ici l'un de ses plus beaux rôles. Dès la première scène, celui-ci apprend que son compagnon de tous les jours, Gleeson donc, ne veut tout simplement plus le voir ni perdre davantage de son précieux temps à ses côtés. Nous sommes en 1923, sur une île magnifique aux larges de l'Irlande, Inisherin. Au loin, le pays, en pleine guerre civile, se déchire, nous entendons détonations et explosions. La métaphore n'est pas spécialement légère mais elle n'est guère centrale et ne gâche en rien ce film, à la fois petit, humble mais profond, dont l'ambiance et le ton singuliers nous happent rapidement. 


 
 
Martin McDonagh teinte encore une fois son œuvre de cet humour assez spécial qui est le sien et fonctionne ici plutôt bien, tantôt noir tantôt absurde, alliant discrétion et coups d'éclat, quelques bons mots et petits numéros d'acteurs. À ce propos, si Brendan Gleeson et Colin Farrell sont irréprochables, le premier presque toujours nimbé d'un nuage noir invisible qu'il rend palpable par sa présence intimidante et le second dans un rôle pourtant bien compliqué qu'il rend tout à fait crédible, c'est peut-être au plus jeune Barry Keoghan que revient la plus belle scène du film. La plus touchante à mes yeux en tout cas. C'est une sorte de remake à peine déguisé de l'un des plus grands moments de l'histoire du cinématographe : quand, dans Dumb & Dumber, Jim Carrey demande à Lauren Holly quelles sont ses chances auprès d'elle. Dans un élan de courage similaire mais un contexte tout de même plus romantique, Barry Keoghan pose à peu près la même question à la sœur de Colin Farrell, autre joli personnage joué avec délicatesse par Kerry Condon. Il obtient alors une réponse du même tonneau mais, à la différence de Carrey et bien qu'il n'ait pas non plus la lumière à tous les étages, Keoghan comprend tout le sens de cette réponse et à quel point celle-ci obscurcit son avenir insulaire. Il tente alors de sauver les apparences et lâche cinq mots d'une désarmante sincérité, aussi simples que beaux, avec une élégance gauche qui participe à les rendre d'autant plus poignants : "Well, there goes that dream". 
Quant à moi, je suis désormais réconcilié avec Martin McDonagh.
 
 
Les Banshees d'Inisherin de Martin McDonagh avec Colin Farrell, Brendan Gleeson, Kerry Condon et Barry Keoghan (2022)

11 janvier 2021

Birds of Prey (et la fantabuleuse histoire de Harley Quinn)

Au risque de perdre toute espèce de crédibilité au sein de l'impitoyable blogosphère ciné, je dois vous avouer avoir bien aimé Birds of Prey. Je le dis tout timidement, je ne vous invite guère à vérifier la qualité de la chose par vos soins, craignant trop le retour de bâton... Je suis le premier étonné d'avoir passé un agréable moment devant ce film dont je n'attendais strictement rien. La raison est d'ailleurs peut-être là. Pourtant nettement plus agréable que le tout-venant des productions super-héroïques qui nous inondent depuis des lustres, le film de Cathy Yan s'est fait laminer à sa sortie, en particulier par la presse américaine, elle qui est d'ordinaire si encline à faire l'éloge de daubes XXL plus ou moins apparentées (Black Panther, Wonder Woman et compagnie). C'est plutôt cruel et injuste pour ce film sans grande prétention qui renoue humblement avec les divertissements US des années 90, flirtant régulièrement avec le buddy movie, et n'aborde pas du tout le genre avec le sérieux si plombant trop souvent de mise ailleurs. Il y a certes de sacrées lourdeurs et quelques fautes de goûts, avec notamment des scènes d'action pas assez bien fagotées pour être aussi longues, mais l'ensemble est à mes yeux sauvé par cette modestie et cette légèreté affichées d'emblée, par une énergie bien présente de la première à la dernière minute et, surtout, par une bande de comédiennes sympathiques, à commencer par la meneuse du groupe, Margot Robbie.




Également productrice, l'actrice australienne porte clairement ce film sur ses frêles épaules, elle y insuffle toute son énergie, elle a l'air d'y croire à fond. Elle atteste d'un abattage comique évident qui donne très envie de la revoir dans de plus pures comédies, dans des rôles carrément burlesques, de chtarbée finie. Elle constitue à l'évidence, et de très loin, le meilleur effet spécial de cette production au budget avoisinant les 100 millions de dollars. L'actrice, qui visiblement s'amuse beaucoup, est parvenue à me rendre son plaisir ludique contagieux. Elle est d'une expressivité de chaque instant, faisant preuve d'une précision dans son jeu, dans sa diction par exemple, qui donne tout son intérêt à ses scènes (à vrai dire, on pourrait même effacer du film sans grand regret les rares scènes où elle n'apparaît pas oui, même celles avec MEW, cette actrice attrayante qui, d'habitude, focalise notre attention et se retrouve ici reléguée au second plan). On dirait un personnage de dessin animé dont chaque détail aurait été pensé au préalable et aurait pu être parfaitement maîtrisé dans son exécution. Il y a aussi une autre raison, dans la performance de Margot Robbie, qui explique sans doute pourquoi elle m'a autant plu là-dedans, moi le nostalgique inconsolable de l'âge d'or de Jim Carrey*...



 
Pendant la promotion du film, une émission de télé américaine a confronté l'actrice à Jim Carrey. Ce dernier a alors eu une blague un peu déplacée, ou en tout cas maladroite, en disant avec une ironie pas assez évidente pour les twittos du monde entier que le succès de Margot Robbie devait beaucoup à sa plastique si agréable. L'actrice a alors souri et rougi, rendant le compliment encore plus frappant, et n'a montré aucun signe de vexation, ayant sans doute saisi la gentille taquinerie du trublion Carrey, plus charmeur qu'autre chose. Aussi, il me semble évident que la star d'Ace Ventura et Dumb & Dumber devait être le principal modèle de l'actrice pour son jeu désinhibé dans Birds of Prey, sa plus grande source d'inspiration. Dans sa gestuelle si calculée et parfois outrancière, son bagout dans toutes les circonstances, sa façon d'investir à fond un personnage invraisemblable, son explosivité pas toujours retenue, son contrôle absolu de chacun de ses muscles faciaux, etc. etc., Margot Robbie se présente elle aussi comme une toon à visage humain. Elle qui était déjà le seul intérêt de Scandale, voire de Moi, Tonya, confirme qu'avant d'être un idéal de beauté au sourire enchanteur, elle est d'abord une actrice très douée. On espère que ses choix futurs l'amèneront plus souvent à explorer ce registre comique et, surtout, à sortir de ces productions super-héroïques que, d'ordinaire, j'évite comme la peste. Quoique si elle revient bientôt en Harley Quinn, je devrais sans doute répondre présent...




*il faut d'ailleurs lire à son sujet le superbe livre d'Adrien Dénouette qui vient de paraître aux éditions Façonnage, Jim Carrey ou l'Amérique démasquée, dont la lecture, passionnante de bout en bout, est un pur régal.
 
 
Birds of Prey (et la fantabuleuse histoire de Harley Quinn) de Cathy Yan avec Margot Robbie, Mary Elizabeth Winstead et Ewan McGregor (2020)

18 juin 2019

Thunder Road

Thunder Road est le premier long métrage de Jim Cummings. Très remarqué à sa sortie, récompensé à Deauville et dans quelques autres festivals, il s'agit du prolongement d'un court-métrage déjà acclamé de l'acteur-réalisateur correspondant ici à la scène d'introduction. Filmée en plan séquence, celle-ci nous montre le personnage principal, Jim Arnaud, un flic émotif et un peu simplet, prononcer une interminable et étrange oraison funèbre en hommage à sa défunte mère. Cette introduction tragi-comique a le mérite de nous placer d'emblée face à la personnalité bizarre de cet officier de police au bord de la rupture. Elle annonce sans ambages le ton très particulier du film, que Jim Cummings, dans un numéro d'équilibriste risqué, parviendra à tenir jusqu'au bout. Nous suivrons ensuite les déboires de ce personnage toqué qui s'apprête à traverser une période particulièrement difficile de sa vie, devant donc à la fois gérer la mort de sa mère, son divorce et la garde de sa fille.




Entre rires et larmes, Jim Cummings s'avère assez agile et manie plutôt bien le mélange des registres, nous faisant tour à tour passer d'une légèreté amusante, avec quelques détails comiques franchement réussis, à des moments plus sérieux et quasi dépressifs, où nous ressentons une vraie pitié pour son personnage. "Written, directed and performed by Jim Cummings" précise la première ligne du générique final, pour bien insister sur la véritable performance livrée par le cinéaste, qui porte littéralement son film à bout de bras, quitte à pouvoir être accusé d'un brin d'égocentrisme. Jim Cummings livre une sacrée performance, il faut le reconnaître, évoquant parfois le talent d'un Jim Carrey pour passer d'un registre à un autre avec le plus grand sérieux, sans sacrifier la crédibilité de son personnage. Bien au contraire : il parvient à donner vie à un drôle d'énergumène qui n'a pas l'air d'être une petite fabrication amusante de scénariste mais qui prend peu à peu une réelle épaisseur.




Reconnaissons toutefois que Jim Cummings est peut-être un peu trop dans la performance, justement, nous donnant à admirer toute sa maîtrise de façon un poil ostentatoire lors de longs plans où il vit son rôle à fond les ballons et passe systématiquement par un très large éventail d'émotions. Mais quand bien même l'acteur-réalisateur doit beaucoup aimer se regarder, il n'en reste pas moins véritablement bluffant et doté d'un grand talent. Nous verrons, en gardant un œil attentif à sa carrière, s'il parviendra par la suite à s'intéresser à autre chose qu'à lui-même. Son film souffre peut-être aussi de son démarrage en fanfare : s'il parvient à être régulièrement drôle, avec notamment quelques dialogues imaginatifs et parfaitement placés, Thunder Road s'essouffle un brin et peine à maintenir la cadence. Rien de plus logique et il s'agit là d'un défaut mineur avec lequel on fera preuve d'indulgence, comme avec le reste.




Car il y a là un ton singulier, une vraie personnalité et une espèce de sincérité qui sauvent clairement la mise et permettent au film de ne faire que flirter avec les travers habituels, et insupportables, de ce cinéma indé estampillé Sundance qui lui tendaient pourtant grand les bras. Au bout du compte, Thunder Road est un premier film très encourageant qui, en plus de nous dépeindre le portrait d'un père en devenir, à une étape décisive et charnière de son existence, réussit aussi à nous dépeindre, en creux, une fort belle amitié, celle qui le lie à son collègue flic, toujours fidèle au poste et filmé avec une délicatesse touchante. Nous espérons à présent que Jim Cummings ne sera pas l'homme d'un seul film et qu'il saura puiser vers d'autres ressources pour nous surprendre de nouveau à l'avenir.


Thunder Road de et avec Jim Cummings (2018)

21 janvier 2017

Crazy Stupid Love

Dans quelques jours, sortira sur nos écrans le phénomène La La Land. Au cœur de ce phénomène, un couple vedette qui attire tous les regards et a su redonner à Hollywood tout son charme glamour, j'ai nommé Emma Stone et Ryan Gosling. Couple à la scène comme à l'écran, les deux acteurs s'étaient déjà croisés plus d'une fois sur la toile. Leur première rencontre remonte à Crazy Stupid Love, une comédie romantique réalisée par un autre couple à la campagne comme à la ville, Glenn Ficarra et John Requa. Ces deux-là s'étaient fait remarquer en 2009 avec I Love You Philipp Morris, autre comédie dont nous gardons tous un très mauvais souvenir, qui narrait la romance impossible entre deux hommes : un détenu et un policier, incarnés par des stars sur le déclin (Jim Carrey et Ewan McGregor). Crazy Stupid Love a confirmé la spécialisation dans la comédie bas de gamme du duo de cinéaste d'origine porto-ricaine depuis condamné au silence et dont l'aventure a inspiré le musical West Side Story. #coupledepacotille


Premiers regards croisés entre les deux tourtereaux...

Petit rappel des faits. Lors d'un dîner en tête-à-tête avec sa femme, Steve Carell apprend que celle-ci veut divorcer et qu'elle le trompe. Au bord du gouffre, il noie son chagrin dans l'alcool à 90°, réservé théoriquement au lavage du linge très sale. J'ai par ailleurs fait l'acquisition récente d'une machine à laver 9 litres, ce qui est beaucoup trop pour un homme célibataire bien qu'en couple comme moi, n'hésitez donc pas à envoyer votre linge sale à ilaose-at-gmail-dot-com. Revenons à Carell : bien décidé à ne pas sombrer dans la dépression, il espère rencontrer l'âme-sœur. Pour retrouver confiance en lui et devenir un expert en séduction, il fait appel aux services de Ryan Gosling, qui devient son coach personnel. Tout d'abord proposé à Will Smith, celui-ci aurait décliné la proposition par peur que ce rôle lui colle à la peau, obligeant les réalisateurs siamois à se tourner vers un choix plus risqué. La relation entre Steve Carell et Ryan Gosling, acteur comique confirmé d'un côté et sex-symbol au potentiel humoristique avéré de l'autre, n'offre malheureusement aucune étincelle à l'écran. Non, c'est seulement quand Emma Stone apparaît que le film gagne un brin d'intérêt. Séducteur à qui personne ne résiste, Ryan Gosling se trouve en effet bien incapable de conquérir le cœur de la jeune femme. S'engage alors un jeu de chat et de la souris qui ravira les amateurs de Titi et Grominet.


Tel le paon et ses plumes, le beau Ryan entame sa parade nuptiale. Peu importe : Emma est déjà sous son emprise...

L'histoire de Gosling et Stone prend progressivement le pas sur les tristes mésaventures de Steve Carrell, littéralement mis sur le bas-côté lors d'une scène de route indigne. On ne s'en plaindra pas. Après l'avoir cherché dans de nombreux films, il semblerait que Ryan ait trouvé en la red Emma Stone sa Blue Valentine... C'est le "love at first take". Les deux tourtereaux inscrivent alors leur nom directement dans le panthéon des #coupledelégende. Leur alchimie n'a pas d'égale. Leur charme, leur compatibilité évidente, nous laissent songeur.  En ces temps sombres, ils nous invitent même à reconsidérer les grandes théories panthropiques détaillées par James Blish. Le futur de l'homme passe peut-être par eux. Il faudrait envoyer leur sperme dans l'espace au quatre vents. Si des aliens tombent là dessus, ils voudront forcément nous rencontrer pour nous défoncer. Il faudrait semer la vie sur les exoplanètes étrangères avec leur sperme. S'ils font un gosse, par pitié, qu'ils nous en gardent un... Il faut sauvegarder leurs gênes. Congeler le sperme de Stone, conserver les ovules de Gosling. En attendant, nous nous contenterons de regarder leurs films... #MytheDeCinéma


Moment de complicité rare : Emma rit de Ryan qui vient de croquer dans une pomme en plastique.

On terminera cette critique par une petite astuce, par un petit secret beauté, que le beau Ryan (Ryan Gosling) nous offre dans les boni du DVD zone A. Si vous avez les cheveux gras et que vous ne voulez pas les laver, contentez-vous de suivre la technique suivante : avec un bon gros pinceau (taille 8), appliquez de la maïzena au niveau de vos racines. Attention, cependant, à ne pas abuser de la maïzena. Il en faut simplement tremper le bout du gros pinceau, que vous tapotez bien avant sur le rebord du lavabo. Après l'avoir appliquée avec soin, laissez reposer la mixture 10 minutes environ. Procédez ensuite à un bon petit brossage frénétique. Matez-vous alors dans la glace, et vous découvrirez des cheveux comme neufs ! Vous en doutez ? Demandez à EmmaStone... #MademoiZelle


Crazy Stupid Love de Glenn Ficarra et John Requa avec Ryan Gosling, Emma Stone et Steve Carell (2011)

14 septembre 2016

État second

Il mériterait d'être mieux connu, ce Peter Weir-là, ne serait-ce que pour la performance outstanding de Jeff Bridges. Il faut dire qu'il a le défaut d'être situé à un moment charnière de la carrière du cinéaste australien. Peter Weir l'a sorti juste après ce qu'on a appelé sa "période verte", pas sa plus inspirée, durant laquelle il a simplement réalisé Green Card, et juste avant l'incontournable Truman Show, succès planétaire avec Jim Carrey. Cette situation inconfortable a fait d’État second (aka Fearless) un film obscur, oublié, difficile d'accès. Il s'agit pourtant d'un bon Peter Weir et nous en sommes convaincus dès les premières minutes. La scène d'ouverture est peut-être la plus réussie du film. On se retrouve d'abord plongé dans le brouillard, puis nous devinons progressivement un champ de maïs, duquel nous voyons sortir Jeff Bridges, portant un bébé dans les bras, suivi de quelques personnes mal en point. Tout ça accompagné par une musique terrible, principalement des violons, semble-t-il, s'insultant les uns les autres, dans une ambiance qui scotche littéralement au fauteuil.




Puis la caméra nous révèle petit à petit que nous sommes sur les lieux d'un terrible accident d'avion, nous découvrons les décombres, les restes fumants de la carlingue, les secours en alerte, les corps calcinés, et les quelques rescapés qui assistent à cela, sous le choc, comme nous. Mais Peter Weir est si habile que nous découvrons tout cela sans jamais avoir l'impression d'abandonner Jeff Bridges une seconde. Celui-ci, avec seulement quelques éraflures et un complet gris quasiment impeccable, trimballe une classe pas croyable et a l'air de déjà flotter au milieu des événements, l'air ahuri, comme s'il n'était pas concerné par la tragédie. On suivra ensuite le lent retour à la réalité de son personnage.




Suite au crash aérien dont il ressort parfaitement indemne, Jeff Bridges perd la boule. Il devient littéralement fearless. Il se met d'abord à conduire comme Ace Ventura, la tronche par la fenêtre pour apprécier l'effet de l'air dans ses cheveux, tout en fermant les yeux. Heureusement pour lui, il roule à ce moment-là sur la fameuse route 66, droite comme la justice, aucun risque. Jeff Bridges s'arrête ensuite dans un diner pour se goinfrer de fraises, alors qu'il était allergique avant l'accident et ne pouvait pas les voir en peinture ! Plus incompréhensible encore, il abandonne sa femme, incarnée par une Isabella Rossellini encore au faîte de sa beauté, pour une chicanos rescapée du crash qui ne se remet pas d'avoir perdu son gamin (dont le petit corps brûlé vif a été retrouvé à plus de 10 kilomètres de la carlingue !).




Avouons-le, ce personnage-là, joué par Rosie Perez, est véritablement la plaie du film, son boulet. On en a très vite ras-le-bol de l'entendre gémir et chialer son gosse, très souvent hystérique, toujours inconsolable. Lors d'une scène assez osée, Jeff Brdiges la fait asseoir sur la banquette arrière de sa bagnole et fonce à toute berzingue contre un mur. Il accomplit alors le souhait le plus cher du spectateur, bien qu'en ce qui me concerne, je n'aurais pas pris le soin d'attacher sa ceinture de sécurité. Si elle se tire de ce crash test en pleine forme, elle ressort de cette expérience calmée, apaisée, on s'en contente donc largement. On n'est pas du tout étonné d'apprendre que Rosie Perez n'a rien fait de notable par la suite. On remarquera aussi que le mari de cette triste femme n'est autre que Benicio Del Toro, dans l'un de ses premiers rôles filmés (il était jusque là abonné aux apparitions coupées au montage). Aux côtés d'un Jeff Bridges qui éclipse un peu tout le monde, on peut aussi entrevoir le nez aquilin de John Turturo, dans le rôle d'un psychiatre tout à fait inutile, mais conscient de l'être, alors tout va bien.




En découvrant ce film aujourd'hui, on se dit que Shyamalan a dû tomber dessus avant de réaliser Incassable. Pas de super-héros ici, bien sûr, mais Peter Weir s'attache comme le natif de Pondichéry à décrire les conséquences de la survie à un tel accident sur la personnalité de son héros. Il nous raconte l'histoire d'un inadapté se croyant invincible, immortel et perdant progressivement pied. Au delà de ça, on retrouve un peu une même ambiance, langoureuse et embrumée. La première scène pourrait d'ailleurs tout à fait avoir été signée par un Shyamalan en pleine possession de ses moyens. On suit avec un réel intérêt les élucubrations de Jeff Brdiges dans son entreprise de réadaptation. La très belle scène finale nous prouve qu'il est bien de retour parmi nous, qu'il revient à la raison et donc vers Isabella Rossellini. Le film nous quitte ainsi sur une bonne impression. La scène du crash aérien, que Jeff Brdiges revit en souvenirs lors de cette ultime séquence, est franchement efficace. Peter Weir nous démontre alors qu'il n'est pas n'importe qui. Un bon Peter Weir, j'vous dis !


État second (Fearless) de Peter Weir avec Jeff Bridges, Isabella Rossellini, Rosie Perez, John Turturo et Benicio Del Toro (1993)

6 novembre 2014

Les Frères Solomon

Si j'avais découvert ce film à l'âge de 10 ans, j'aurais certainement été très emballé, j'en garderais encore un souvenir ému, je serais président du fan-club français. Hélas, je l'ai maté presque 20 ans trop tard... Les Frères Solomon est une petite comédie américaine pratiquement de et avec Will Forte : l'acteur en a signé le scénario et a sans doute embauché un simple et sympathique faiseur derrière la caméra pour en assurer la mise en image. Will Forte, on l'aime bien. On l'a aimé en second couteau auprès d'Adam Sandler, il nous a enchantés en MacGruber et il nous a plutôt convaincus dans Nebraska, même si nous le préférons dans un autre registre, le registre comique où on le sent peut-être plus à l'aise. Il forme ici un duo avec Will Arnett, un autre acteur que l'on apprécie et dont on se rappelle surtout des coups d'éclats mémorables dans Hot Rod et Semi-Pro. Autant dire que l'idée de retrouver ces deux zigotos en tête d'affiche d'un film au pitch très simple, propice à tous les écarts comiques, nous mettait l'eau à la bouche.




Dean (Will Forte) et John (Will Arnett) sont deux frères inséparables, totalement débiles et socialement handicapés. Quand leur vieux père tombe gravement malade, ils se donnent pour grand objectif d'accomplir son dernier souhait : lui offrir un petit-fils. C'est ainsi que les deux frères, prêts à tout, se lancent à la recherche d'une femme qui accepterait de devenir la mère de leur enfant... Immédiatement, le film rappelle le grand classique des frères Farrelly, Dumb & Dumber, dont on attend la suite avec la gorge serrée. On sent bien qu'il s'agit de la principale inspiration de Will Forte, qui reproduit parfois des situations tout à fait similaires, par exemple lorsque l'un des deux personnages annonce fièrement avoir accompli un exploit particulièrement idiot et que l'autre réagit en redoublant d'enthousiasme, là où la logique voudrait qu'il l'engueule ou se désespère de sa bêtise.




Le duo formé par Forte et Arnett est, reconnaissons-le, d'une puissance comique incomparable à celle générée par Jim Carrey et Jeff Daniels en son temps, et la sensation de déjà-vu, si elle n'est pas vraiment gênante, annule quelques fois l'effet de surprise. Ces frères Solomon n'en restent pas moins assez attachants et l'on suit sans déplaisir leurs petites mésaventures, ponctuées par une paire de gags bien sentis. Tout cela est très léger, très sympathique, plutôt bien rythmé, ça dure 1h20 et on ne s'ennuie pas. Les acteurs secondaires font bien leur boulot, Kristen Wiig est égale à elle-même et on apprécie tout particulièrement Chi McBride dans la peau d'un gros costaud au physique de nounours mais au langage pas vraiment des plus châtiés... Il faut toutefois bien avouer qu'il manque systématiquement un petit quelque chose pour que le film soit réellement tordant et on se dit que c'est bien dommage, car avec ce petit quelque chose, on aurait pu tenir-là une petite bombe de drôlerie. Tel quel, les frères Solomon plairont surtout aux plus jeunes, aux moins exigeants, découvrant ce film par hasard et ravis de passer un bon petit moment, mais n'attendant pas grand chose de plus.


Les Frères Solomon de Bob Odenkirk avec Will Forte, Will Arnett, Chi McBride et Kristen Wiig (2007)

10 septembre 2014

Les Mangeurs de cerveaux

Série-B de science-fiction de la fin des années 50, produite par Roger Corman, Les mangeurs de cerveau (The Brain Eaters) trempe complaisamment dans le grand bain des films de genre paranoïaques de la période, avec son histoire de vaisseau extra-terrestre sorti de terre (comme dans La Guerre des mondes), contenant de petites bestioles informes, rampantes, qui s’agrippent à la nuque des humains pour contrôler leur cerveau en toute discrétion. Les petits trous que laissent les aliens dans la nuque de leurs victimes ne sont pas sans rappeler Les Maîtres du monde (découvert lors de la fameuse Nuit extra-terrestre présentée par Monsieur Manatane, alias Benoît Poelvoorde, sur Canal+, en l'an de grâce 1997), film de science-fiction sympathique de 1995 signé Stuart Orme, avec Donald Sutherland et l'éternel Keith David de They Live. Mais c’est bien la seule trace que laissent ces bestioles, qui semblent sorties de nulle part et ne font rien, sinon empêcher mollement les secours d’envahir leur zone d’invasion. A la question, jadis posée par Monsieur Manatane en préambule à son documentaire : "Les extra-terrestres sont-ils aussi cons qu'on le dit ?", ce film répond "Oui".


Toujours bien faire gaffe à la petite molette de réglage sur les briquets... C'est pas fait pour les ienchs.

Côté terriens, nous ne suivons que deux ou trois agents gouvernementaux (Leonard Nimoy, aka Spock dans Star Trek, joue paraît-il dans ce film). Ils ne sont d'aucun intérêt mais s'avèrent beaucoup plus alertes que leurs ennemis, pigeant très vite tout ce qui se passe et luttant contre l’envahisseur venu d'ailleurs. Pas de véritable paranoïa donc, pas de personnage central retourné, comme dans L’invasion des profanateurs de sépulture, pas de vrai danger. Rien en fait. Le film ne raconte pas grand chose, alors qu’il était permis, avec une histoire pareille, de créer quelques situations sympathiques. Une des rares idées du scénario : filmer les deux ou trois victimes des extra-terrestres luttant contre leur propre cerveau pour en reprendre le contrôle, fixant du regard leurs propres mains récalcitrantes, mais on est loin de l'auto-baston de Jim Carrey dans les chiottes de Menteur Menteur. Une chose surprend cependant : à la fin du film, l’affaire n’est pas du tout réglée, et les personnages se remettent en route pour aller arrêter une invasion qui ne fait que commencer. L'ennui c’est que ça ressemble moins à une idée de non-fin concertée par des scénaristes malicieux qu’à un simple manque de temps et d’argent pour boucler le film, qui s'arrête faute de pouvoir continuer. Pour finir sur un mot gentil : l’affiche, qui nous vend un film bien meilleur que ce Brain Eaters, a de l'allure !


Les Mangeurs de cerveaux de Bruno VeSota avec Leonard Nimoy, Ed Nelson, Alan Jay Factor et Cornelius Keefe (1958)

31 juillet 2014

Un été à Osage County

Deux statuettes, une de chaque côté, c'est mauvais signe... Voici donc la dernière grosse machine à Oscars rouillée des frères Weinstein, également produite par George Clooney, le gars qui perd tout capital sympathie dès qu'on imagine la gueule de sa dvdthèque. Je m'attendais à une pure horreur, je n'ai pas été déçu. Un été à Osage County... Déjà quel titre ! Quel toupet ont les américains, quand même, à considérer que leur pays est le centre du monde, forcément connu de tous. Les français n'auraient jamais pour idée d'intituler un film voué à l'exportation et porté par une ribambelle de stars "Un automne au Parc de Millevaches" quand bien même le nom du lieu-dit serait beaucoup plus agréable à l'oreille. Osage County, c'est un petit bled perdu dans les Grandes Plaines, en gros, c'est dans l'Oklahoma, soit l'équivalent de notre Limousin, précise-je pour justifier arbitrairement ma comparaison. Un endroit où il ne fait pas bon vivre, où l'on imagine aisément que les gens se créent des problèmes, simplement pour casser leur ennui quotidien. C'est tout à fait le cas de la famille Weston, amenée à se retrouver suite à la disparition du vieux papa.




Au prétexte d'une réunion familiale forcée, Un été à Osage County consiste en une enfilade de scènes d'engueulades qui se succèdent à n'en plus finir, à un rythme infernal, rarement ponctuée par de courts moments d'apaisement d'une niaiserie à toute épreuve, le tout filmé très mécaniquement et interprété dans une sorte d'hystérie collective autosatisfaite tout simplement gerbante. Rassurez-vous, le titre français est mensonger, l'action du film ne se déroule pas sur tout un été, mais seulement le temps d'un week-end. Mais quel week-end ! Une journée de plus au sein de cette famille, et c'en était fini pour moi. Dès la première scène, Sam Shepard fout le camp et on le comprend. Peut-être est-ce lui le Auguste du titre original ? On l'ignore... Le vieil acteur, au flair incomparable, semble sentir la merde venir. Il a tôt fait de décamper. Il est le seul qui ressort presque grandi de cette expérience, puisqu'il a su mettre en avant son sens inné du timing. En revanche, s'il vous reste une once de respect pour Meryl Streep, évitez ce film par tous les moyens. Dans le rôle d'une mère de famille incroyablement tyrannique, l'actrice est tout simplement insupportable. Il faut dire que son personnage, ahurissant de méchanceté gratuite, débitant des horreurs à un rythme effréné, humiliant à qui mieux mieux, entre directement au Panthéon des pires raclures jamais filmées aux côtés de Jason Voorhes et HAL 9000. En cabotinant comme pas possible, la vieille actrice n'arrange rien à son cas. Streep devance même ses répliques, ce qui pose parfois problème... Elle joue totalement à contretemps ! Les autres ne suivent pas, broyés par la mécanique sans faille de l'actrice bicentenaire ! La mégère postulait là pour sa 78ème nomination, on imagine toute sa motivation, toute sa détermination. Ça fait froid dans le dos ! Son atroce personnage est atteint d'un cancer de la bouche, symbole lourdingue des saloperies blessantes qu'elle débite à longueur de temps. Quand on voit ça, on se dit que, finalement, Albert Pacino et Bobby De Niro ont une fin de carrière pas si dégueulasse que ça... C'est dire !




Face à elle, Meryl Streep retrouve Julia Roberts, qu'elle n'avait encore jamais croisée. C'est une première. Nous sommes supposés trouver ça fabuleux. La rencontre de deux géantes. Tu parles... Les deux stars ne trouvent rien de mieux à faire que de s'adonner à un pitoyable combat de coqs. Lors d'une longue scène de repas apocalyptique, le point d'orgue du film entier, les deux femmes finissent littéralement par s'écharper après s'être affrontée dans un concours d'acting ridicule et interminable. Julia Roberts, les cheveux sales, parce qu'elle joue une femme ordinaire, est plus laide que jamais. Elle a beau y aller mollo sur le maquillage, son physique ne colle pas avec le Midwest. Sa bouche pourrait engloutir tout le reste du casting, à commencer par le désespérant et fantomatique Ewan McGregor. Viendra un jour où il faudra faire le bilan de la carrière de cet acteur, et j'espère pour lui que ce jour-là coïncidera avec sa mort, ça lui permettra d'éviter un mauvais moment. A côté de lui, on retrouve la revenante Juliette Lewis. Pendant la première heure, on se demande "C'est quoi ce zombie aux cheveux rouges ? Ce serait pas Juliette Lewis ?!", et pendant la seconde, on ne fait que se répéter "Mais putain oui, c'est Juliette Lewis cette espèce de zombie aux cheveux rouges !". J'apprends à l'instant que Jim Carrey a failli jouer son mari, rôle qui échoit au dénommé Dermot Mulroney, un habitué des pires films indé. C'est donc ça, la plus belle chose qui soit arrivée à Jim dans les années 2010, avoir loupé ce rôle ! Mais on ne va pas s'attarder plus longuement sur les acteurs, cibles trop faciles, même s'il est tout à fait logique de s'en prendre à eux après avoir subi ce festival de cabotinage...




C'est surtout le scénariste qu'il faudrait punir, ou plutôt, Tracy Letts, l'auteur de la pièce de théâtre ici adaptée. C'est aussi à lui, lauréat du prix Pulitzer en 2008, que l'on doit Bug et Killer Joe, toutes deux adaptées par William Friedkin. Dans Killer Joe, il y a un sens de l'excès, un jusqu’au-boutisme assez jouissif, une sorte de second degré et une outrance bien calculée, peut-être permis par Friedkin, je l'ignore, tout cela fait que le film passe plutôt bien et que l'on peut prendre un certain plaisir à voir ses idiots rednecks se massacrer. A Osage County, rien de tout ça. Aucun humour, rien. Si certains ont su rire devant les crises hystériques de cette famille, il s'agissait d'une réaction d'auto-défense tout à fait bienvenue pour survivre à la séance de ciné. Pendant la scène de repas précédemment évoquée, on peut penser que le film s'essaie à l'humour le plus noir à un moment donné, mais c'est aussitôt désamorcé par la lourdeur et le sérieux de l'ensemble. Pendant ce petit week-end en famille, des secrets de famille énormes sont révélés pratiquement à chaque scène. Un seul d'entre eux suffirait à faire imploser la plus solide des familles, mais non, c'est un film américain de la pire espèce, il nous faut le menu XXXL. Face à un tel enchaînement d'horreurs, on finit par prédire le pire, et on est rarement déçus. Elle n'est pas lesbienne, elle couche avec son cousin ! Ah, ce n'est pas son cousin germain, c'est carrément son frère ! Ces révélations grotesques finissent très vite par nous fatiguer. Ces engueulades répétées, se terminant même parfois un pugilat, m'ont même évoqué le Polisse de Maïwenn, curieusement. Les deux films produisent un peu le même effet. Ils terrassent et dégoutent, scotchent et révulsent, répugnent et désespèrent tout à la fois. Devant ça, on est forcément captivés. L'être humain est ainsi fait, nous aimons assister aux empoignades d'autrui. Cela explique le succès d'une certaine télé-réalité. Ces films-là ne valent pas mieux. Une insulte à l'humanité toute entière.


Un été à Osage County de John Wells avec Meryl Streep, Julia Roberts, Ewan McGregor, Chris Cooper, Juliette Lewis, Abigail Breslin, Benedict Cumberbatch et Sam Shepard (2014)

4 avril 2014

MacGruber

Il faut rendre à César ce qui appartient à César, et César porte aussi le nom de Will Forte. On savait l'acteur, issu du SNL (pépinière de talents au même titre que La Beaujoire), capable d'illuminer l'arrière-plan d'une comédie de haute volée par ses saillies comiques au cordeau : on se souvient notamment de lui dans l'excellent Crazy Dad. On le sait maintenant, et rétroactivement, capable de porter sur son dos un film entier et de donner vie à un personnage principal mémorable, de ceux que l'on rêve aussitôt de retrouver dans des suites à n'en plus finir. MacGruber, qui s'inscrit pourtant dans une longue lignée de parodies des grandes figures de films d'action des années 80 (de MacGyver, évidemment, à Rambo), entre au panthéon de nos personnages comiques les plus chéris, aux côtés de certains protagonistes interprétés par Will Ferrell, Jim Carrey ou Adam Sandler (la sainte Trinidad et Tobago, Tobago étant donc Will Forte, si vous suivez).




Même s'il est le pilier de ce film réalisé par Jorma Taccone (également acteur, par exemple dans l'excellent Hot Rod), Will Forte a su s'entourer, et c'est la marque des plus grands. Il est ici épaulé par un Ryan Philippe sans tabou et sans fierté mal placée, ainsi que par Kristen Wiig, actrice rarement décevante et que l'on a déjà appréciée dans Mes Meilleures amies ou Walk Hard. A noter aussi la présence de Val Kilmer, qui se fait plaisir dans le rôle du méchant, et de Powers Boothe, trogne connue du cinéma des années 80, dans le rôle du colonel de service. Mais c'est bien Will Forte qui règne en maître sur le film et qui nous tire des larmes de rire sur un petit paquet de scènes, qu'il éclabousse de sa folie comique et de son talent d'acteur.




Qu'il chiale la mort de ses recrues, qu'il supplie qu'on lui pardonne ses erreurs en proposant toutes sortes de pratiques sexuelles répugnantes ou qu'il fasse l'amour, y compris à un fantôme, en poussant des cris d'ours enroué, dans tous les cas Will Forte crève l'écran et invente des scènes qu'on se repasse en boucle sans jamais se lasser. C'est typiquement le genre d'acteur dont on regarde les scènes coupées en se demandant où s'arrête le talent et où commence le génie, où se tient la frontière entre l'acteur et le personnage, et comment peut-on monter un film porté par un tel acteur sans le faire durer des heures et des heures, façon Béla Tarr, pour se marrer sans fin ?


MacGruber de Jorma Taccone avec Will Forte, Ryan Philippe, Kristen Wiig, Val Kilmer et Powers Boothe (2010)

5 décembre 2013

Bachelorette

Cette comédie américaine a cela de méprisable qu'elle nous fait vaciller sur nos propres certitudes. Le film fait le portrait de trois jeunes femmes, des trentenaires bien d'aujourd'hui, réunies pour le mariage de leur amie commune. La future mariée (Rebel Wilson) a semble-t-il, c'est film qui le dit, le défaut ultime d'avoir moins de sex appeal que ses camarades, et d'être notamment en surpoids. D'où la rage qui naît chez les trois pimbèches chargées d'organiser la fête, jalouses, indignées, révulsées que la moins sexy des quatre soit la première à se caser. Kirsten Dunst joue la working girl overbookée apparemment à l'aise dans sa peau mais à deux doigts de la crise de nerf et terriblement solitaire. Lizzy Caplan interprète la brune dynamique et imprévisible, restée coincée sur un échec amoureux datant du lycée mais incapable de le reconnaître pour ne pas froisser son amour propre. Et enfin Isla Fisher incarne la demeurée de la bande, hystérique nymphomane, suiveuse naïve et délurée qui multiplie les bourdes et les conquêtes pour faire illusion, quitte à sombrer dans une attitude autodestructrice qui l'empêche de voir le bonheur lorsqu'il se présente. Le scénario a l'air plutôt finaud dit comme ça, mais gardez à l'esprit qu'on veut seulement bien dépeindre ces trois personnages et que si un jour Leslye Headland, la réalisatrice et scénariste du film, lisait ces lignes, elle serait elle-même sur le cul, car à l'image vous ne trouverez que trois connasses rivalisant de connerie et impliquées dans une suite de péripéties minables au sein d'un film irritant, sans rythme, sans humour et sans intérêt.




Et pourtant ce triste film nous a bousculés dans nos convictions. D'abord concernant Kirsten Dunst, que nous respections jadis. Cette jeune femme de notre génération a réussi, joué dans quelques films intéressants, fait preuve d'intelligence dans ses choix (elle n'a jamais tourné avec Tarantino), mais elle se ridiculise ici et s'avère incapable de faire sourire son public. Ensuite, et surtout, ce pauvre film a questionné notre propre éthique et notre rapport aux femmes. Le spectateur mâle de cette daube peut finir par s'interroger sur lui-même et s'auto-soupçonner de misogynie si dès le départ, comme nous, il prend en grippe les trois énergumènes épuisantes qui s'agitent à l'écran, et se trouve surpris par une envie de tout casser devant leurs facéties régressives ô combien vulgaires. La pire, dans la course à la grossièreté, étant Lizzy Caplan, qui sort des insanités à intervalles réguliers et finit par créer un malaise palpable. Force est alors de constater qu'on ne supporte pas de voir et d'entendre ces grasseries à longueur de scènes, alors qu'on adore l'immaturité et le langage châtié des personnages incarnés ici ou là par Will Ferrell, John C. Reilly, Adam Sandler, Andy Samberg, Will Forte ou d'autres. Pourquoi rions-nous chez ces messieurs, et pourquoi pleurons-nous chez ces dames ? Au-delà du monde d'humour qui sépare un film comme Bachelorette de films comme Step Brothers, Crazy Dad, Hot Rod, ou MacGruber, ne serait-ce que sur papier, c'est-à-dire avant qu'un homme ou une femme n'interprète les dialogues et les situations en question, au-delà aussi d'un certain talent de comédien essentiel à la comédie (qui pourrait décemment comparer Will Ferrell et Lizzy Caplan ?), on en vient à se demander si une petite pointe de misogynie ne s'en mêlerait pas dès lors que nous ne tolérons pas la vulgarité crasse de ces demoiselles quand nous en redemandons à ces messieurs.




Sauf qu'il se trouve que nous sommes d'authentiques fans de la dénommée Melissa McCarthy qui, dans le registre de l'humour qui tache se place là. L'actrice n'a pas son pareil dans le domaine de l'obscénité débitée sur un flow presque incontinent. Vous nous direz peut-être, et nous y avons nous-mêmes pensé, que, dans notre prétendue misogynie, nous acceptons d'une femme moins immédiatement sexy ce que nous refusons chez des jeunes premières qui correspondent aux standards de beauté des podiums hollywoodiens (Dunst, Caplan, Fischer y correspondent toutes plus ou moins). Mais le fait est que nous rions aussi, quand elle nous y aide un brin, aux facéties de Kristen Wiig (dans Mes Meilleures amies, d'ailleurs aux côtés de Melissa McCarthy, ou dans Walk Hard), comme nous rions des pitreries de Sandra Bullock, actrice hollywoodienne-type (au même titre que Kirsten Dunst), qui a maintes fois élargi son registre à la comédie, souvent pour le pire, parfois pour le meilleur, comme dans Les Flingueuses, en side-kick de la sus-nommée Melissa McCarthy.




En définitive, le vrai problème d'un film comme Bachelorette n'est donc pas notre redoutée misogynie mais bien, d'une part, sa médiocrité (le film n'est jamais drôle), et, d'autre part, ses personnages, qui ne sont rien d'autre que trois parfaites ordures. Le film oublie, avouez que c'est dommage, de nous rendre son trio de trentenaires attachant. Bachelorette veut s'inscrire dans la mouvance du très médiocre Very Bad Trip en tournant le scénario au féminin, sauf que ce film modèle, si imparfait soit-il, pense à ne pas détester ses personnages et présente trois individus très différents mais pas forcément détestables. Si l'on aime certains personnages d'adolescents attardés, de machos débiles, de sales gosses, de prétentieux narcissiques, de grands naïfs ou de désespérés sentimentaux incarnés par Will Ferrell, Steve Carell, Zach Galifianakis, Adam Sandler, Will Forte, Will Arnett ou Jim Carrey, c'est parce qu'ils sont d'abord attachants, sympathiques, aimables et un peu humains. Impossible de rire avec les trois héroïnes infectes de Bachelorette, qui passent le film à mépriser leur amie obèse, à la jalouser, à ruiner consciencieusement son mariage et à sortir des horreurs sur elle sans discontinuer. On s'attendrait à ce que cette attitude ne soit que le point de départ de l'histoire, menant à un rachat quasi immédiat afin que les personnages récupèrent vite notre empathie, mais les trois débiles hautaines et méprisantes du départ sont toujours aussi pourries à la fin, et l'on se demande encore comment des auteurs de comédies (Apatow tombe aussi très souvent dans ce travers, par exemple avec le récent 40 ans mode d'emploi - et la France n'est pas de reste, de l'horrible Le Prénom à la série Platane d'Eric Judor) peuvent espérer nous captiver et nous donner envie de rire à gorge déployée en déployant sous nos yeux, et pendant des heures, une ribambelle de connards et de connasses imbuvables. C'est un peu comme aller à un one man show de Nicolas Bedos. Comment rire ?


Bachelorette de Leslye Headland avec Kirsten Dunst, Lizzy Caplan, Isla Fisher et Rebel Wilson (2012)

25 août 2013

Elysium

Les temps sont rudes pour ceux qui aiment se divertir au cinéma. L'été 2013 nous a vus fouiller les programmes ciné, éplucher le web, scrobbler les bandes-annonces de tous les gros blockbusters annoncés sur FrontRow, in vain comme dit Morgan Freeman à la fin de La Guerre des mondes. L'un de nous a même fini devant Godzilla versus Mécawarrior à la sauce de Guillermo del Burrito, les lunettes 3D - ne voyez pas là un quelconque smiley souriant, parce qu'il faudrait plutôt me dessiner comme ça :-(( - bien vissés sur le nez et le sac à dos rempli d'Ercefuryl et de Romarinex, pour prévenir une éventuelle diarrhée aiguë de type "zombie tsunami" (mon régime de l'été à base de pastèque, de melon, de melon espagnol et de melon d'eau ne me réussit pas toujours, et la moindre contrariété me "fait aller"). Ou comment atterrir devant la plus grosse daube du siècle par pur désœuvrement, la faute à une livraison de blockbusters affligeante. On ne va pas se lancer dans un article bilan sur le phénomène, avec références et chiffres à l'appui. Il suffit de s'intéresser de très loin au ciné pour savoir que ce n'est plus comme avant, que les gros films produits pour ramasser le pactole sont de plus en plus insultants pour le quidam en mal de sensations fortes. On a tous les jours une pensée pour ceux qui sont nés en 95 et qui n'ont pour ainsi dire grandi qu'avec ça, en plus de n'avoir qu'un souvenir très flou de la finale du mondial 98...




Aussi, et malgré l'épreuve Pacific Rim pour l'un, Pain and Gain pour l'autre, nous avons longuement hésité à aller nous empaler sur Elysium au cinéma (à vrai dire on a hésité pour pas mal de gros colis du même acabit, sauf, et c'est à noter, pour Lone Ranger : plutôt crever). Nos échanges de mails et de textos à ce sujet sont un équivalent épistolaire et numérique du Necronomicon, en ce sens que quiconque les lit peut y passer. Tous les arguments ont défilé. Du "tu me payes McDo si on y va, même si je suis déjà en train d'en bouffer un !", au "on profite de l'offre cinéday ! Demain c'est le fameux cinéday !", pas suffisant pour un sou quand l'autre répond : "C'est tous les jours le cinéday sur utorrent et sous Hollande". La veille on s'est même réunis à domicile pour peser le pour et le contre et en finir, mais on s'est quittés sur un collégial et pathétique : "La nuit porte conseil". Le lendemain, on n'y voyait pas plus clair et la pluie de messages d'insultes a continué à déferler sur nos portables respectifs. A un simple texto disant : "Alors, la nuit porte conseil ?", la réponse ne se fit pas attendre : "Va te faire foutre". 




Entre midi et deux, la décision n'étant toujours pas faite, les vieux subterfuges ont refait surface. La première idée consistait à indiquer son envie d'aller voir le film sur une échelle de 0 à 5 (on fera le point sur cette échelle qui nous tient à cœur et que l'on sollicite une fois sur deux dans un autre article, où le film traité sera abordé de manière plus superficielle). Si nos deux notes dépassaient la moyenne, on devait y aller. L'un, véritable tronche cramée, a mis 3/5, l'autre, poule mouillée label rouge nos régions ont du talent, 2,5/5, soit un total de 5,5/10. On devait y aller, logiquement. Mais, aussitôt, celui qui avait proposé le jeu et qui avait donné la meilleure note s'est rétracté, en regrettant d'avoir mis au point des règles aussi peu claires et en invoquant l'interdiction d'utiliser les décimales, ainsi que l'absence notoire d'un notaire au moment de la transaction. Tout était à refaire. Nous nous sommes donc rendus chez l'huissier de justice le plus proche pour tirer à pile ou face, faire chou-fleur, pierre-caillou-ciseau, chifoumi, etc. On a fini la journée assis côte à côte dans des fauteuils à répéter en boucle, "ciné, pas ciné", comme Jim Carrey dans Ace Ventura quand il récite "Finkle et Einhorn, Einhorn et Finkle...", dans ce qui restera l'une des plus grandes scènes de l'histoire du 7ème art, selon les dires de Jean-Luc Godard himself.




A 23 heures passées, l'un de nous envoyait à l'autre par texto : "Alors t'as chopé ton code cinéday ?", et l'autre de répondre un très définitif : "Qu'est-ce que tu me fais ?". Bilan des courses, on n'a pas vu le film. Notez bien qu'on l'a vu quand même étant donné qu'on a tous les deux enduré la bande-annonce, qui dit tout à la manière de ces sketchs rarement drôles qui foisonnent sur le net et qui consistent à résumer l'intégralité d'un film en trois minutes dans un dessin animé hideux. Et c'est sûr que ça donne pas spécialement envie de voir la version longue. Même les fans absolus de District 9 n'ont pas su nous intriguer, nous donner envie tant soit peu, allumer l'étincelle de curiosité en nous, alors qu'ils étaient là pour nous attiser sur une daube intégrale telle que Pacific Rim. Nous invitons les fans d'Elysium, s'il en existe en dehors de Neill Blomkamp et de toute sa fratrie, à nous faire regretter ce putain de cinéday qui nous tendait les bras. Soyons honnêtes, l'un d'entre nous a eu la flamme pendant environ deux minutes, en marchant seul au soleil, peut-être une insolation mais il jure d'avoir eu nettement envie, pendant deux minutes, d'aller voir le film au ciné, une joie ultra fugace s'est emparée de lui à l'idée d'y aller. Constatant qu'elle était fugace, il a repensé aux fougasses que prépare sa mère et c'en était fini du ciné, il avait juste envie de s'en faire une.


Elysium de Neill Blomkamp avec Matt Damon et Jodie Foster (2013)

23 juin 2013

Tape

Tape, sorti en 2001, est un huis clos captivant et bien ficelé adapté d’une pièce de théâtre à succès. Son réalisateur, Richard Linklater, est une figure respectée du cinéma indépendant américain. On lui doit notamment Slacker, un film flâneur mais diablement ingénieux qui eut une influence considérable sur le monde alors en pleine éclosion du ciné indé US, à l'orée des années 90 ; une sorte d'équivalent filmique au Slanted & Enchanted de Pavement, le laisser-aller fauché et décontracté ayant toutefois plus de charme étendu sur les 38 minutes de l'album du groupe culte californien que sur les 97 minutes du film qui fit d'Austin un paradis pour hippies. Richard Linklater est depuis devenu un véritable touche-à-tout, aussi bien capable de torcher des comédies sympathiques tout public (School of Rock) que de produire des films indépendants plus ou moins audacieux, se déroulant souvent en un temps très limité (la trilogie Before Sunrise, Before Sunset, et Before Midnight où son acteur fétiche Ethan Hawke tente de séduire la belle Julie Delpy en 24h) ou employant des méthodes de filmage parfois un peu douteuses ou, au contraire, terriblement ambitieuses (A Scanner Darkly, Waking Life et le futur Boyhood - curieux projet dont le tournage s'est étalé sur douze années). 


Tape ne déroge pas à la règle de l'unité de temps réduite à un minimum puisque l’action du film se déroule en temps-réel, soit en l'espace d'un peu moins de deux heures. Le film prend entièrement place dans une chambre de motel miteuse qui est le théâtre de l’affrontement psychologique à couteaux tirés entre deux anciens potes de fac, incarnés par l'inévitable Ethan Hawke et l'énigmatique Robert Sean Leonard, un acteur brun ressemblant étrangement à Jim Carrey. L'arrivée d'Uma Thurman, troisième et dernier personnage au cœur d’une intrigue dont je ne vous dirai rien pour ne pas vous gâcher le plaisir, ne survient qu’à la moitié du film.




Tape met peut-être quelques petites minutes à démarrer, le temps que l’on saisisse les tenants et les aboutissants de ce thriller psychologique. Les premiers dialogues sont donc un peu assommants, il faut d'ailleurs souligner que le film est ultra causant, mais il améliorera votre anglais tant vous serez très vite découragé à l'idée de lire des sous-titres défilant à toute vitesse. Passée cette mise en place indispensable et un peu laborieuse, Tape se mate avec un grand plaisir et nous propose une étude de caractères très prenante et crédible. Le trio d'acteurs est impeccable, tout particulièrement ceux qui formaient alors un couple glamour à la ville : Ethan Hawke et Uma Thurman. C'est d'ailleurs l'un des films où cette dernière m'a le plus convaincu. Quant au metteur en scène, il parvient avec brio à s'affranchir de la difficulté de tourner tout un film dans une même petite piaule et il réussit parfois avec audace à faire grimper la tension. Pas mal du tout donc, et certainement idéal pour un dimanche soir !


Tape de Richard Linklater avec Ethan Hawke, Robert Sean Leonard et Uma Thurman (2001)

7 septembre 2012

Moi, député

C'est avec un peu d'appréhension, comme toujours quand on va voir un film de notre idole, celui dont on attend monts et merveilles, que nous sommes allés découvrir Moi, député en salles. On craignait un film trop balisé, sous cloche, un film à la Ben Stiller, où rien ne dépasse et rien ne se passe, où l'humour passe après le script à cause des impératifs d'un budget trop conséquent. On craignait un film où notre star aurait à jouer avec le frein à main et nous apparaîtrait malheureuse, comme Jim Carrey dans certains films récents qui ne laissaient pas suffisamment de place à son génie, ou comme un Zizou menotté et obligé de faire la passe à Stéphane Guivarc'h. Cette crainte n'était pas tellement justifiée tant il est vrai que Ferrell est habitué à brûler les planches y compris dans des films à priori plus sages que les siens et où il se contente d'un rapide caméo (rappelez-vous sa brève mais divine apparition dans le par ailleurs assez fade Wedding Crashers). Mais crainte il y avait, et principalement à cause des récents opus du grand comique américain (Land of the lost (2009) The Other Guys (2010)) qui, sans être totalement ratés, ne nous avaient pas autant fait rêver que ses principaux chefs-d’œuvre : Anchorman (2004), Ricky Bobby (2006), Semi-Pro (2008), et Step Brothers (2008). On peut être fan au dernier degré et rester critique envers les films mineurs, ainsi de Old School en 2003 (où Ferrell n'a pas assez d'importance malgré de grandes scènes), Blades of Glory en 2007 (film trop écrit, même si encore une fois il y a une paire de scènes à retenir), et puis surtout Casa de mi padre cette année, pour lequel on peut vraiment parler de ratage complet et de souvenir douloureux. Heureusement Moi, député est venu juste après et l'a vite fait oublier, nous rassurant immédiatement sur la santé de celui avec lequel on rêverait de passer ne serait-ce qu'un petit quart d'heure, notre quart d'heure de gloire warholien, pour le serrer dans nos bras et lui assurer qu'en France aussi, et malgré un mépris généralisé de la critique et d'une grande partie du public, il a au moins un putain de pied-à-terre.



Comme tous les Ferrell, et c'est une leçon que beaucoup d'auteurs de comédies devraient retenir, le film démarre tout de suite et très fort quand Cam Brady (notre cher Ferrell) répète les mots "America, Jesus and Freedom" avant un speech, en avouant qu'il n'a aucune idée de ce que cela signifie mais que ça marche à tous les coups. Puis l'histoire part immédiatement sur des chapeaux de roue quand le même candidat se trompe de numéro et laisse un message des plus craspecs destiné à sa maîtresse à une famille de catholiques bigots pour ensuite s'en justifier ridiculement auprès des médias. Le rythme du film ne baisse pas d'un iota et l'humour ne se fait pas attendre quand on passe à la présentation du personnage de Zach Galifianakis, acteur en grande forme ici et qu'on espère revoir aux côtés du Dieu de la comédie. Il parvient à camper un personnage évidemment grotesque, comme celui de son binôme en or, qui prend vie et corps dans le récit et qui crève l'écran. L'un et l'autre acteur se mettent idéalement au service de leurs protagonistes (pourtant pas faciles à tenir), si bien que l'on n'a jamais le sentiment de regarder des comédiens faisant leur petit numéro : ce sont bien des personnages qui s'inventent sous nos yeux et que l'on suit avec intérêt et en riant presque sans discontinuer, d'un rire franc et entier.



La satire politique est aussi franche et massive que notre rire et ne fait pas dans la dentelle, mais jamais au détriment de l'humour du film et de son ton léger (contrairement à The Other Guys qui se voulait une comédie sur la crise et s'en voyait pénalisé lourdement par un scénario inutilement chargé). Seul le dernier quart d'heure retombe un peu, et l'humour s'y voit davantage forcé, résolution d'intrigue et conclusion moraliste obligent vis-à-vis d'un sujet forcément un peu contraignant. Mais jusque là on a ri sans cesse devant un film sans retenue et on a retrouvé avec délectation la marque de fabrique des comédies de Will Ferrell dans de nombreuses scènes mémorables qu'on brûle déjà de se repasser en boucle. Nous sommes aujourd'hui des fans comblés regardant sereinement droit devant, vers l'avenir de notre step bro Will Ferrell, dont la longévité fait figure d'exception et dont la carrière compte déjà un nombre conséquent de pépites, avec la certitude qu'il y aura longtemps quelqu'un au volant et qu'on n'a pas fini de se marrer devant les prouesses de ce sacré bonhomme.


Moi, député (The Campaign) de Jay Roach avec Will Ferrell et Zach Galifianakis (2012)

2 juillet 2012

Beginners

Pourquoi je regarde ça, moi ? C'est typiquement le genre de film qui me donne envie d'arrêter le ciné. Très franchement. Quand je vois Ewan McGregor broyer du noir dans son pull à rayures trop "cute" en singeant Jim Carrey dans Eternal Sunshine et l'affreuse Mélanie Laurent débiter les dialogues les plus creux du monde avec un accent anglais insupportable, j'ai réellement des envies radicales qui s'imposent à moi comme autant d'échappatoires salvateurs. J'ai en outre déjà pensé à une reconversion dans la blogosphère... Je compte devenir chasseur de petites culottes. Je prendrai des photos en douce avec mon portable. J'en ai déjà un petit stock de côté, de quoi facilement alimenter un tumblr pour les prochains mois, à raison d'une dizaine de photos volées par jour. Mon terrain de chasse favori, ce sont les escalators, à la sortie des stations de métro. Je profite du retour des beaux jours pour mitrailler sous tous les angles, principalement en contre-plongée, les jeunes demoiselles légèrement vêtues. Un soleil rasant m'aide parfois à découvrir de bien jolies choses, que j'aimerais vraiment partager avec vous, par pur altruisme, puisque l'adresse de mon tumblr devra bien entendu rester secrète, ne serait-ce que pour préserver mon couple de ma "dark side". En me renseignant un peu auprès de mon frère avocat (non pas parce qu'il est avocat, mais parce qu'il s'est déjà fait prendre pour le même genre de pratiques), j'ai appris qu'il est purement et simplement interdit de photographier des culs à leur insu. Quelque chose que l'on nomme le "droit à l'image" est supposée protéger toutes ces jeunes filles. Des sites absents de mes marque-pages, mais parmi les plus fréquentés de ces 36 derniers mois si j'en crois mon historique web Google, me font toutefois réaliser qu'il s'agit apparemment d'une protection bien peu efficace. Cette règle de pacotille ne va donc pas suffire à me faire oublier ce beau projet que le film de Mike Mills a ravivé dans mon esprit. Je reste tout de même sur mes gardes, car je ne veux pas finir en taule. Je veux continuer à pouvoir librement télécharger des films et photographier des culs.


Beginners de Mike Mills avec Ewan McGregor, Mélanie Laurent et Christopher Plummer (2011)