27 septembre 2023

La Machine à explorer le temps

On lave son linge sale en famille chez les Wells ! Dans ce film sorti en 2002 qui écœura unanimement la critique et le public, le petit Simon Wells s'en prenait sans vergogne à l’œuvre incontournable de son arrière grand-père, le si délicieusement nommé Herbert George. En choisissant de régler ses problèmes de famille sur pelloche et écran géant, pour mieux les jeter à la face du monde dans le cadre d'une psychanalyse d'envergure internationale, l'attitude de Simon Wells se rapproche clairement de celle d'une Maiwenn le Besco. C'est elle qui, dans son premier film intitulé Pardonnez-moi, filmait caméra au poing un Pascal Greggory moribond, dans le rôle de son paternel, qu'elle accusait de tous les maux. En plus d'avoir voté Sarko, elle lui reprochait principalement d'avoir abusé de sa frêle personne alors qu'elle n'avait même pas encore atteint la puberté... Sordide histoire, que le cinéma payait au prix fort.
 
 
Simon West, dans la machine inventée par son arrière-grand-père
 
Pour en revenir à La Machine à me faire paumer mon temps, la question que l'on se pose ici est la suivante : qu'a donc fait grampa' Herbert George pour mériter ça ? La question est en effet laissée en suspens car on nage ici dans le domaine de l'implicite puisque Simon Wells choisit une voie plus insidieuse que Maiwenn et se contente tout simplement d'assassiner le bouquin d'HG (prononcez "Ei-ch'-Jay" pour les intimes ou encore "Hèrbère" pour les fans allemands). Il ridiculise l'histoire de son bisaïeul, bien aidé par un Jeremy Irons survolté dans la peau de l'Über-Morlock, le chef des Morlocks qui martyrisent les petits Eloi (nota bene : il y avait justement un petit blond nommé Eloi dans ma classe de sixième, Eloi Lachuer, et coïncidence, c'était aussi le souffre-douleur de la classe je tiens à vous préciser que je n'ai pas participé à l’hallali, je faisais profil bas parce que j'étais relativement bien positionné sur la liste des souffres-douleur alternatifs). Bref, le film est très très mauvais et depuis, Simon Wells s'est spécialisé dans le film d'animation en participant notamment à Madagascar, Souris City et Gang bang de requins. Je pense que ça en dit long. A ce piètre film, préférez la version de 1960 signée George Pal qui, elle, rendait un bel hommage à l’œuvre cinégénique de Wells. 
 
 
Après les succès de Vorace et Memento, Guy Pearce enchaînait les mauvais choix
 
De mon côté, j'appellerai mes deux gosses Herbert et George, non pas en l'honneur de l'écrivain anglais ou pour réparer l'erreur commise par Simon Wells, non non, seulement parce que je trouve ces deux prénoms d'une classe folle ! Mon frère a prévu d'appeler ses gosses Matt et Damon quel que soit leur sexe ! Il est à deux doigts de réaliser ce rêve, il ne lui manque qu'une femme consentante.
 
 
La Machine à explorer le temps de Simon Wells avec Guy Pearce et Jeremy Irons (2002)

20 septembre 2023

Robot & Frank

Dans un futur proche, un vieil homme vit seul dans une belle baraque en bois. Son quotidien est fait d'aller-retour à la bibliothèque pour baver sur la plastique encore bien conservée de Susan Sarandon, de petites promenades en plein air au milieu de la chaussée pour gêner la circulation et de visites chez l'antiquaire du coin pour commettre quelques larcins sans conséquence. Car ce vieil homme est apparemment cleptomane, un cleptomane qui perd peu à peu la boule. Alzheimer pointe le bout de son nez. Son fils lui amène donc un robot qui l'aidera dans les petits gestes du quotidien et donnera du sens à sa triste vie. D'abord imposé au vieux pour lui éviter un placement prématuré en EHPAD, le robot va progressivement se faire une place dans le cœur du vieil homme et, surtout, trouver une utilité fort appréciable et plutôt étonnante pour celui qui s'avérera être un ancien gentleman cambrioleur qui a passé une bonne partie de sa vie en cabane. 


 
 
Première surprise : Angela Frank est un mec, c'est Frank Langella, qui joue donc Frank, le vieux type physiquement très en forme mais mentalement à la traîne. Autre surprise, à la vingtième minute, le film prend la tournure inattendue d'un heist movie (ou caper movie) croisé avec un buddy movie décapant où le duo de braqueurs est donc constitué d'un vieillard sénile et d'un robot servile ; un virage bienvenu qui donne un second souffle à ce long métrage d'abord très long. Frank décide donc de faire de son robot un voleur de grand chemin, son assistant personnel dans tout ce qui concerne les larcins, les vols à la tire, les forçage de coffres, les crochetages de serrures et compagnie. Malgré ses agissements borderline, le robot de ce film met un point d'honneur à respecter les fameuses lois de la robotique inventées par Isaac Asimov. Il fait donc le boulot proprement.


 
 
On pense d'abord que leur plan est de voler les bouquins de la bibliothèque avant que ceux-ci ne soient numérisés et disparaissent définitivement. On croit que le grand-père est un amoureux des livres, mais on a tout faux ! Lors du casse, le robot demande naïvement "Tu veux que je chipe quoi ? Jane Eyre ? Don Quichotte ? Et si c'était vrai ?", et le vieux lui répond "Prends le meilleur rapport poids/valeur pour pas t'encombrer, ça finira de toute façon sur eBay". En réalité, Frank est un braqueur de banque sans remord qui fait croire qu'il est gâteux, auquel on file un putain de robot dont il se sert pour préparer un putain de casse bien plus important. La bibliothèque n'est qu'un coup d'essai. Prochaine étape : le cambriolage de l'immense villa du salopard qui rôde autour de Susan Sarandon.


 
 
Ça y'est, vous savez presque tout de ce petit film inoffensif qui vous réservera une dernière surprise, un twist final qui n'ajoute toutefois aucune valeur ajoutée à l'ensemble. Ce que nous avons aimé dans Robot and Frank, c'est avant tout sa durée : 1h19 sans le générique de fin, que l'on coupe toujours immédiatement (on signale cependant que celui-ci nous propose un rapide documentaire du style "C'est pas sorcier" sur les avancées de la robotique en 2012, des images qui ont pour effet de nous glacer le sang et de nous prévenir des dérives futures). On a aussi aimé ces courtes scènes, hélas trop rares, où le robot part, à sa façon, à la découverte de son foyer d'adoption et fait connaissance avec son propriétaire fatigué. Ce dernier met du temps à apprécier la compagnie du robot mais finit par lui confier tous ses secrets et par le tenir en plus haute estime que ses propres enfants (incarnés par James Marsden, hideux mais parfois presque drôle dans le rôle du fils toujours à bout, et Liv Tyler, dont la tronche liftée et botoxée la fait de plus en plus ressembler à une vieille star du porno). 


 
 
Dans sa nouvelle maison, le robot se met très rapidement à l'aise. Il flashe d'entrée sur la machine à café, une magnifique Nespresso chromée aux couleurs chatoyantes qu'il emporte souvent avec lui dans un coin sombre pour quelques acrobaties mécaniques. Chaque mouvement du robot est accompagné par un bruit de sifflement, ce qui a pour effet de bousiller la bande sonore de ce film par ailleurs étonnamment silencieux. On ne compte plus le nombre de fois où on surprend le robot se gratter le cul, et quid de cette scène où Frank se plaint de l'odeur qui se dégage du tas de ferraille en se servant d'une de ses grosses paluches comme d'un éventail salvateur. Le robot est effectivement campé par un type d'1m60 planqué dans un costume, un pauvre gars qui devait beaucoup suer et qui a accepté de souffrir considérablement pour le rôle. On salue le courage de cet acteur non-crédité au générique et on apprécie le choix du réalisateur d'avoir su refuser la facilité, c'est-à-dire les effets spéciaux numériques. 


 
 
On peut se prendre de sympathie pour les deux protagonistes atypiques de ce film, mais on regrettera quand même sa lenteur extrême et toutes ces occasions manquées de faire davantage d'humour. Robot & Frank n'est jamais sorti au cinéma, mais il s'est taillé au fil des ans une bonne réputation chez les vieillards fans de robotique. Une niche comme une autre.


Robot & Frank de Jake Schreier avec Frank Langella, Susan Sarandon, James Marsden, Liv Tyler et Peter Sasgaard (2013)

13 septembre 2023

L'Astronaute

Deuxième film de et avec Nicolas Giraud, l'acteur-réalisateur avec la tronche et le patronyme les plus banals du monde. Après ça, pas dit que je rattrape son premier opus. Sur le papier, pourtant, l'accroche me branchait bien. Un type qui tente de réaliser le premier vol spatial habité amateur de l'histoire. Et je n'ai guère trop souffert durant le film, fenêtre ouverte, il faisait super beau, pas trop chaud, pas besoin du ventilo, j'avais pour une fois bien pris l'air, je pouvais donc à l'aise supporter un truc si grisâtre et terne pour boucler ma journée. C'est passé sans souci. En revanche, quelques temps après, avec un peu de recul, je me suis dit "tout ça pour ça ?!". Le pire, c'est que le pitch est menteur. Le type en question est un brillant ingénieur en aéronautique, recalé de peu au concours pour devenir astronaute (on lui a préféré un dénommé Thomas Pesquet). Nicolas Giraud, qui se fait ici appeler Jim, taffe chez Ariane et pique en loucedé tout le matos reçu à son boulot pour reconfigurer une fusée dans la grange de sa grand-mère. Je ne vois donc pas où réside l'exploit et l'amateurisme là-dedans, vu que notre petit génie frustré et ambitieux chourrave du matériel de pro et qu'il bénéficie en outre de beaucoup d'aide extérieure. Giraud s'entoure en effet d'une fine équipe de bras cassés, à commencer par Matt Kassovitz, plutôt crédible en vieille gloire du tennis français, Bruno Lochet, l'ancien Deschiens reconverti fournisseur de kérosène, et une jeune étudiante ultra douée mais un brin chtarbée, qui finira évidemment sous le charme de l'irrésistible chef de projet. Sans compter l'indispensable Mamie Gâteau, jouée sans effort par Hélène Vincent, qui nourrit, loge et blanchit tout ce beau monde, les abreuvant de cookies délicieux et de petits plats mitonnés avec amour. Là où ça coince, c'est du côté des parents de Jim, et Giraud nous sert de la psychologie de comptoir à base de relations filiales conflictuelles et de grandes réconciliations finales.

 
 
 
Bref, le film est donc ultra gris, sa photographie semble s'échiner à décliner toutes les nuances de la chevelure de son auteur. Il est prévisible de bout en bout et, surtout, sérieux comme c'est pas permis. Pas une touche d'humour là-dedans, malgré les petits sourires en coin de Kassovitz, que l'on sent bridé, presque constipé, peut-être malade. Ah si, il y a un petit moment drôle, d'une durée de 3 secondes, lorsque Kassovitz surprend Giraud en pleine méditation solitaire contre un arbre : ils buguent et se regardent en ayant l'air de se dire "What the fuck ?!". Faut pas louper ce passage-là, ça paraît pas raconté comme ça, mais c'est une bouffée d'air frais. À la fin, nous voyons évidemment Giraud s'accorder quelques minutes d'autosatisfaction dans l'espace (comme si tout le film ne suffisait pas), conclusion silencieuse mais très attendue d'un suspense mort-né. Il se rabiboche avec tout le monde, ferme pas mal de bouches, cloue d'autres becs et, enfin, fait le deuil de son grand-père, son inspirateur, mordu d'astronomie. Et l'on se dit que Nicolas Giraud aurait très bien pu rester prothésiste dentaire sans que l'art cinématographique n'y perde grand chose. 


L'Astronaute de Nicolas Giraud avec Nicolas Giraud, Mathieu Kassovitz, Bruno Lochet et Hélène Vincent (2023)

6 septembre 2023

Susie et les Baker Boys

Jeff et Beau Bridges sont les Baker Boys, un duo de pianistes de jazz qui, depuis des années, arpentent les petits clubs de Seattle pour y divertir une audience de plus en plus clairsemée. Peinant désormais à rejoindre les deux bouts, ils doivent trouver un moyen de relancer leur carrière. Ils décident alors d'embaucher une chanteuse. C'est ainsi qu'ils rencontrent Susie, Michelle Pfeiffer, une ancienne escort girl à la voix de velours qui leur permettra de soulever les foules mais mettra à rude épreuve leur fraternité... Nous sommes en 1989 et Susie et les Baker Boys ressemble à ces films, sans étiquette clairement définie, dont Hollywood a paumé la recette. Ce n'est pas vraiment une comédie romantique ni un film musical, bien qu'il y ait quelques éléments comiques appréciables et qu'une bonne place soit faite à la musique, c'est un peu tout ça et rien à la fois. On se demande d'ailleurs comment un tel titre serait vendu aujourd'hui, à notre époque où chaque chose doit pouvoir rentrer dans une case facilement identifiable par des spectateurs considérés comme des consommateurs qu'il faut satisfaire. Modeste relique oubliée d'un temps révolu, The Fabulous Baker Boys se laisse encore regarder sans souci, et c'est bien là le plus important. On est certes loin du chef-d'œuvre ou du grand film à redécouvrir, quand bien même il s'agirait, selon la National Board of Review, d'un des dix meilleurs de l'année 1989. Nous tenons simplement là un film honnête, décent, respectueux de son audience, d'humble ambition. Dans son premier long métrage, Steve Kloves, qui deviendra plus tard le scénariste attitré de la saga Harry Potter, a surtout le mérite de s'intéresser de près à ses trois personnages principaux, bien écrits et campés par de très bons acteurs.



 
 
La bonne idée du film, c'est d'avoir choisi Beau Bridges pour interpréter le frère de Jeff Bridges. Certes, ça l'air de couler de source dit comme ça, mais c'était pourtant pas joué d'avance, comme nous l'apprend le superbe article Wikipédia anglais consacré au film - un article estampillé d'une étoile d'argent récompensant la qualité de son contenu, effectivement fort bien documenté et riche en informations, qui contraste avec les trois pauvres lignes lisibles sur sa version française et semble nous indiquer que l’œuvre de Steve Kloves jouit d'un certain statut outre-Atlantique (à moins que son seul fan hardcore soit un fervent contributeur de l'encyclopédie en ligne). Bref, Beau Bridges incarnent donc le grand frère de Jeff Bridges et cette trouvaille géniale, cette idée de casting du tonnerre, on ne la doit pas à Kloves, qui aurait préféré diriger le bien plus "bankable" Eddie Murphy, mais à Jeff Bridges en personne. C'est le futur Big Lebowsky qui a indiqué au réalisateur et scénariste débutant que son propre grand frère serait un choix excellent pour incarner son grand frère. Steve Kloves a été convaincu dès sa première rencontre avec Beau Briges : "C'était lui, le frère de Jeff, je l'ai su à l'instant même où il est entré dans la pièce !" nous raconte-t-il plein d'enthousiasme dans les commentaires audio du dvd d'un film qui le renvoie à la période la plus créative de sa triste carrière.



 
 
La réunion des deux Bridges à l'écran vaut en effet mille mots et remplace toutes les scènes d'exposition du monde. Jeff et Beau dégagent d'emblée une alchimie naturelle à l'écran, en atteste par exemple cette étonnante scène de bagarre qui, soit dit en passant, ressemble bel et bien à une bagarre entre frères : on cherche à se foutre la race mais on ne veut surtout pas se faire vraiment mal. Cette rixe est si spontanée que Beau Bridges a manifestement surpris l'équipe de tournage : le perchman s'invite furtivement dans le cadre d'une caméra maladroite et mouvante qui s'efforçait de suivre les gesticulations imprévisibles de l'aîné de la fratrie. Le motif de cette querelle ? Susie, évidemment. On sait tout de suite que celle-ci va venir perturber le tandem déjà fragile composé par les deux pianistes dans le creux de la vague. Jeff Bridges a beau fumer clope sur clope, rien n'apaise les sentiments et l'attirance qu'éveille en lui la belle blonde, et que l'on comprend tout à fait. Car l'autre attraction du film, au-delà de l'harmonie discrète des deux frères, c'est bien sûr Michelle Pfeiffer. Son interprétation nuancée donne vie à un personnage pas si simple à cerner, qui échappe comme il faut aux clichés. Il y a quelque chose de félin dans le caractère insaisissable, le regard pénétrant et les yeux presque un peu globuleux de celle qui, une paire d'années plus tard, prêtera ses traits si bien dessinés et son allure si svelte à Catwoman. Les quelques scènes où elle pousse la chansonnette ne sont jamais de mauvais moments, bien au contraire, la plus réussie du lot étant indiscutablement celle où, vêtue d'une robe rouge qui lui sied à merveille, elle émoustille les spectateurs par son chant délicat et ses poses lascives, sur le piano, pour mieux allumer celui qui en joue... Une performance qui vient couronner la meilleure partie du film, celle qui se concentre sur l'idylle entre ces deux personnages solitaires qui, jusque là, se contentaient de se jauger de loin, freinés par la présence dissuasive du grand frère. Débarrassés de Beau Bridges, exceptionnellement absent pour motif familial, Jeff et Michelle se retrouvent donc enfin seuls. Ils se tourneront longtemps autour avant de se laisser aller... Et à nous de constater que l'alchimie n'est pas que fraternelle dans The Fabulous Baker Boys. On a aucun mal à croire que Jeff Bridges et Michelle Pfeiffer relancent encore régulièrement Steve Kloves pour qu'il imagine une suite à leurs aventures inachevées.


Susie et les Baker Boys de Steve Kloves avec Jeff Bridges, Beau Bridges et Michelle Pfeiffer (1989)

30 août 2023

White Noise

On n'a pas grand chose à dire de White Noise, d'autant plus qu'un seul de nous deux prétend l'avoir vu. Adam Driver est quasiment the whale d'Aronofsky : il est bedonnant, grimé en prof de fac, marié à Greta Gerwig, affublé(e ?) d'une perruque rousse malaisante. Ils ont trois gamins et ça baragouine non-stop, l'un n'a pas fini sa question que l'autre a répondu trois fois et en a posé six autres, effet mitraillette ô combien pénible digne d'une série télé écrite par le démon et baron de la coke Aaron Sorkin. Parlant d'écriture, le film est nettement divisé en trois parties : une première introductive qui plante le décor, pose les premiers enjeux, débute le métrage et nous invite à entrer dedans, d'une main tendue vers le récit qui se fait jour ; une deuxième partie plus récréative et charnière, tel un pont entre les deux autres parties, où se déroulent les péripéties et autres actions des personnages, partie considérée en général comme "centrale" (d'autant plus quand il y en a trois), consécutive à un élément déclencheur que l'on peut librement qualifier de perturbateur et qui ne manquera pas de déboucher sur un élément de résolution provisoire conduisant tout droit à une autre étape de l'histoire ; puis une troisième en guise conclusion, qui amène à une situation finale précédant un générique dit, par conséquent, de "clôture", et terminant l'œuvre entamée dans une forme d'aboutissement et de fermeture avant un écran noir qui signifie clairement que l'on peut enchaîner sur une autre activité humaine que celle consistant à regarder ce film-là. Après cette analyse structurelle de la narratologie, un petit point sur le fond, le sujet : le thème qui rejoint le début à la fin est la peur du temps qui passe, la peur de la mort, la peur du prochain qui y passe, la peur d'y passer au prochain film de Baumbach. Gerwig et Driver sont obsédés par l'idée de leur mort prochaine, au point d'en faire le thème unique et récurrent de leurs échanges au moment d'aller au dodo, et nous nous sentons gagnés par cette angoisse à travers eux. Petite parenthèse : franchement, là, vous ne pouvez pas nous dire qu'on ne cause pas du film, car vous tenez une de nos analyses les plus sérieuses et organisées. On opère le film à cœur ouvert et si ces mots se retrouvent dans des copies d'étudiants, eh bien cette phrase-là pourra se retourner contre eux.


 
 
Étonnamment, la meilleure partie est celle du milieu, encore faut-il tenir jusque-là. Dans celle-ci, un camion se paye un train de marchandises qui contenait des produits explosifs et toxiques. Baumbach veut faire de cet accident un moment artistique, une proposition de cinéma, presque une performance dans le sens premier du terme : cela passe par un montage alterné entre un cours magistral (dans les deux sens du terme) de Driver devant des étudiants et collègues médusés par son charabia imbitable et la collision proprement dite, amenée par la négligence d'un chauffeur routier trop occupé à s'en tailler une pour capter les sirènes hurlantes et les gyrophares survoltés d'un passage à niveau. Suite à l'incident, un nuage électrique se déplace au-dessus de la ville, menaçant les personnages, qui n'en finissent pas pour autant de blablater comme jamais. La famille de Driver trace à travers champs pour sauver sa peau et doubler trois bagnoles embouteillées dans un clin d'oeil à la fameuse séquence dite "du champ de maïs" d'Interstellar, dans une vibe (première fois qu'on emploie cette notion) très Rencontres du troisième type. Leur bagnole échoue dans une rivière, ce qui nous vaut le meilleur moment du film : l'échange de regards entre Gerwig et Driver lorsque ce dernier tourne en vain le volant du véhicule pour le guider dans sa dérive sur les eaux. Ce moment-là m'a flyé.


 
 
L'histoire se déroule en 84, voie royale pour un régal de memory lane à travers cette époque bénie des dieux où on avait le gazole à pas cher, une 4 saisons pour 1 franc, le plein-emploi, des usines à gogo, PPDA au 20h, Ricard à Matignon et une pollution totalement bénigne des dieux, avec Tchernobyl dans le rétro. Baumbach nous livre tous les poncifs des années 90 : la casquette à visière, la gouffa-permanente qui a mal viré, les baskets dégueulasses, les blue-jeans plus très blue, les fameux breaks que nous autres français ne pouvons admirer que dans les films et séries ricaines des années 70... Sans parler des Air Jordan, des futals Waïkiki, de la zique de Toupak dans les oreilles, des bananes autour de la taille avec le nécessaire de toilettes de l'époque : rasoir Gilette et savon déjà solide, revenu à la mode aujourd'hui. Mais surtout ces magnifiques breaks qui volaient la vedette à n'importe quelle star des sixties. Je rêve de conduire un tel engin à travers champs, quitte à décapiter quelques taupes...


 
 
Bien qu'assez peu recommandable, ce White Noise s'inscrit plutôt dans le haut du panier de la filmographie de Noah Baumbach malgré ses trois idées sur la société de consommation et ses personnages toujours revenus de tout, tellement intellectuels, donc suicidaires, tant ils ont compris que la vie était dure. Range ton carnet Baumbach, on a compris que l'existence était une chienne, tes films n'ont pas à nous le rappeler de par leur contenu à proprement parler et, plus grave, par leur qualité intrinsèque. Te fatigue pas à nous adapter La Tabula Rasa Connexion de Saul Bellow ni Porte-manteau et son complexe de Philip Roth, on sait déjà que tu les as lus et aimés, pas besoin de nous l'indiquer, on sait lire autant que toi. Nous sommes allés à la faculté nous aussi. Alors certes, ça n'était pas Oxford ni Harvard, plutôt l'UT2 du Mirail, mais on a eu de sacrés bons profs également ventrus et vêtus de tweeds et on a surtout pu croiser de jolies pépées. Fin de critique et on constate amèrement que l'on n'a pas mentionné le parrain Don DeLillo, auteur du bouquin dont Baumbach livre ici une adaptation, ce qui jure un peu dans une telle analyse. Nul doute que l'écrivain du Bronx se retourne déjà dans sa tombe alors qu'il est encore parmi nous. Entre deux séances de psy et deux allers-retours à la cinémathèque de New York, Don DeLillo maudit ce jour où il a accepté le chèque en bois signé Baumbach & Gerwig (rappelons qu'ils ont un compte commun au Crédit Mutuel).


White Noise de Noah Baumbach avec Adam Driver, Greta Gerwig et Don Cheadle (2023)

15 août 2023

Christophe / Trilogie pour un homme seul / Le Come-back de Baquet

Trois films de montagne, trois films de Nicolas Philibert, parmi ses premiers, trois films avec Christophe Profit, alpiniste principalement connu pour totaliser 10 ascensions de la face Nord de l'Eiger et pour avoir accompli la première ascension de l'arête Nord-Ouest du K2 avec Pierre Béghin le 15 août 1991. Mais les trois films dont il est question ici ont été tournés avant ça. Respectivement en 85, 87 et 88. Le premier, Christophe (je l'aurais plutôt intitulé Profit, car le patronyme de notre grimpeur originaire de Normandie sonne bien : personnellement je prononce Profit avec le 't', contrairement à ce qu'il faut faire, en hommage au titre de cette série des années 90, Profit, avec Adrian Pasdar dans le rôle éponyme), le premier donc, Christophe, est un film d'une demi-heure qui suit en toute simplicité et sur un rythme vif l'ascension en solitaire et en escalade libre, par un beau jour de soleil, de la face ouest des Drus, gigantesque façade de 1100 mètres au cœur du massif du Mont-Blanc. Le film est, quelque part, vaguement proche de Cerro Torre Cumbre, sorti la même année, par sa vivacité, sa légèreté de ton et son côté musical, jovial, effréné, mais en moins beau, il faut le dire, et avec une part de scénarisation en plus, peut-être en trop.
 


C'est un film quasiment sans paroles, sauf celles que l'on entend au début du film, préenregistrées par Christophe Profit sur son répondeur, demandant de lui laisser un message pendant son absence, et celles, d'encouragement ou de réconfort, que l'on entend sur une cassette de répondeur emportée en montagne et que l'alpiniste écoute lors d'une pause. Les seuls mots que prononce Profit pendant l'ascension sont "merde" et "bordel de merde", lors d'un passage particulièrement difficile où l'alpiniste semble coincé (guère longtemps). A part ça, on entend très fort son souffle, et il y a de quoi se sentir épuisé pendant 30 minutes à le regarder se démener sur la face presque lisse des Drus qu'il escalade sans sécurité. La fin du film, un peu surfaite, où Christophe escalade la paroi d'un immeuble pour rejoindre des amis qui festoient sans lui, comme s'ils l'avaient oublié, surligne une solitude déjà bien présente dans le film et qu'il n'était pas besoin de rappeler.

 


Le chiffe trois, c'est aussi le nombre de personnages de ces trois films. Il y a Profit, bien sûr, fil conducteur, absolument seul dans Christophe, mais plus seul du tout dans les deux suivants : le deuxième film, Trilogie pour un homme seul (encore trois), est un film de montagne et un film d'amour. C'est d'une triple ascension dont il est question ici, réalisée en deux jours et une nuit, les 12 et 13 mars 1987. Profit est alors âgé de 26 ans, et il a déjà accompli l'enchaînement qu'il tente à nouveau, mais cette fois-ci l'ascension sera hivernale. En 40 heures, il escalade les trois plus grandes faces nord des Alpes : Grandes Jorasses, Eiger et Cervin. Encore une fois, c'est de l'escalade libre, et Profit n'est assisté que pour redescendre des sommets (belles séquences de sauts en parapentes, où tout paraît soudain si léger) et pour être transporté du pied d'un sommet à un autre, en général en hélicoptère.

 


Si l'ascension des Drus, dans Christophe, paraissait facile, malgré un passage compliqué, filmé de près et dans la durée, ici on sent vraiment la difficulté. Non pas que la caméra passe beaucoup de temps avec Profit sur la paroi (l'escalade est plutôt filmée de loin, ou en hélicoptère), mais le film se focalise sur ses arrivées aux sommets. On voit alors l'alpiniste épuisé, vidé, frigorifié. Cela ne dure que quelques minutes, car un thé chaud semble suffire à le requinquer et notre homme, frais et dispos, de repartir à l'aventure. Mais ce qui le remet sur pied, c'est surtout sa femme, Sylviane, qui l'aidait à s'entraîner pour cet exploit dans les premières séquences du film, et qui est toujours là au sommet pour l'attendre, l'accueillir, le prendre dans ses bras, l'embrasser, le réchauffer, le nourrir et l'encourager. 

 


Le titre est donc trompeur, Profit n'étant jamais véritablement seul, par opposition à l'image ébauchée par Philibert dans Christophe. Son épouse, Sylviane, est aussi là pour parler à Profit par talkie walkie, notamment quand, en pleine nuit, ses deux piles au lithium le lâchent, le laissant sans lampe frontale, obligé d'interrompre l'escalade pendant trois heures à flanc de montagne, dans le noir et le froid : l'une des séquences les plus fortes, où Profit est réduit à une voix tandis que nous sommes avec Sylviane, qui lui donne du courage.



 

Ayant accompli la triple ascension en un temps hallucinant, Profit redescend en hélicoptère, cerné par les journalistes qui ont suivi sa geste. On lui pose alors tout un tas de questions auxquelles il peine parfois à répondre, expliquant qu'il rêvait de faire ça depuis trois ans (italiques pour mettre en valeur cette récurrence du chiffre 3, hautement symbolique, et pour m'éviter d'avoir à insister encore là-dessus par une lourde et longue parenthèse ; symbolique de quoi ? je n'en sais rien, peut-être du triangle, forme simplifiée de la montagne, ou du tabouret, ode à sa fiabilité isostatique ?). Profit dit aussi qu'il n'aurait rien pu faire sans sa femme et qu'il dédie cette victoire à un ami alpiniste disparu peu de temps auparavant.

 


 

Ce qui nous amène au troisième film, Le Come-back de Baquet, et au troisième personnage, Maurice Baquet. Après l'alpiniste solitaire, et l'alpiniste amoureux, l'alpiniste ami. Dans ce film, Christophe Profit n'est plus le personnage central, il joue le rôle de guide (ce qu'il fut dans la vie) et d'intermédiaire. Le personnage principal, c'est Baquet Maurice, violoncelliste et acteur (apparu chez Renoir, Grémillon, Becker, Losey, Lamorisse, Costa-Gavras ou Varda). Petit homme trapu au sourire géant, Baquet a un vague air d'Ernest Borgnine, croisé avec Jean-François Stévenin (dont on aurait pu causer dans ce dossier consacré aux films de montagne). Dans une mise en scène au ton de comédie, on voit le bonhomme débarquer au pied des Alpes 32 ans après sa première escalade de la façade sud de l'Aiguille du Midi, en 1956. Le film de Philibert insère des images d'archives, tirées d'un autre film, Étoiles et tempêtes, où l'on voyait Baquet dans les mêmes lieux à 32 ans de distance. S'il est là, c'est pour refaire la même escalade, en hommage à l'ami qui l'avait emmené en haut à l'époque, le célèbre alpiniste cinéaste Gaston Rébuffat, qu'on ne présente plus. 
 
 

 
Ces temporalités superposées ont quelque chose de touchant, et la personnalité rieuse de Maurice Baquet emporte le morceau, comme dans cette étrange conversation à flanc de montagne où il échange avec un alpiniste japonais qui manifestement ne comprend pas grand chose aux blagues du Français, mais semble bien connaître le nom de Rébuffat, que l'on revoit avec joie dans quelques images, avec sa bonne gueule qui ressemblait vaguement à celle d'Edmund Hillary, dont j'ai déjà parlé ici, lui aussi membre d'un beau duo de grimpeurs. La grimpe, justement, n'est clairement pas au centre de ce film de Philibert, l'amitié si. Et l'émotion de Baquet, quand il embrasse le sommet pour son ami Gaston, est belle à voir.

 


En réalité il existe un quatrième film consacré par Nicolas Philibert à Christophe Profit, La Face nord du Camembert (1985), tourné peu après le premier, Christophe, mais je ne l'ai pas vu et il ne s'agit pas d'un film de montagne : Profit y joue les cascadeurs et escalade la façade lisse d'un bâtiment pour les besoins d'un film. Mais les trois films de montagne de Philibert avec Profit, belle trilogie pour un seul homme (et sa femme, et Maurice Baquet, et deux fantômes d'alpinistes disparus), dessinent un beau portrait de la figure de l'alpiniste, l'arpenteur de roches, aventurier solitaire porté par l'amour des vivants et la mémoire, l'amitié, la présence fantomatique de ses pareils tombés. 

 


L'ultime séquence du Come-back de Baquet, où l'on voit Maurice Baquet et Christophe Profit, de retour de leur ascension, jouer ensemble et en tenue de ville du violoncelle, assis sur des tabourets (à quatre pieds, petit raté de Philibert et de son staff déco), au milieu d'un parterre fleuri et au-devant des montagnes, au cœur d'un plateau des Alpes, n'est pas sans rappeler le dernier plan du Master & Commander de Peter Weir, qui aura réuni de la même façon Russell Crowe et Paul Bettany dans une autre célébration de l'aventure et de l'amitié, non pas sur les sommets, mais en pleine mer, ce qui est du pareil au même.

 

Christophe / Trilogie pour un homme seul / Le Come-back de Baquet de Nicolas Philibert avec Christophe Profit et Maurice Baquet (1985/1987/1988)

29 juillet 2023

Mission : Impossible – Dead Reckoning Partie 1

La saga Mission : Impossible, c'est un peu comme les Jason, on finit par avoir un mal de chien à les identifier, à les dissocier les uns des autres. C'est un bon test cognitif pour soi-même. Le premier, c'est facile, c'est celui de De Palma où Tom Cruise joue encore collectif, avec Jean Reno, Béart et compagnie. Le TGV dans le tunnel sous la Manche, la goutte de sueur qui menace de déclencher l'alarme. Ok, facile, on a pu en causer ici sans souci en s'appuyant seulement sur nos très vagues souvenirs. Je l'ai revu depuis dans le cadre de ma réhabilitation personnelle de Brian de Palma et je considère toujours que ce film est loin de faire partie de ses meilleurs et qu'il correspond hélas au début du déclin de l'auteur de Body Double. Quant à Mission : Impossible II, la bande-annonce, à l'époque laborieusement téléchargée en 56k, m'avait scotché : on y voyait Tom Cruise escalader en solo intégral une falaise verticale et se mettre en danger de mort inutilement suite à une glissade, pour mieux se rattraper à une corniche dans un geste impossible, nous montrer ses muscles saillants et nous adresser un regard-caméra plein de défi. J'étais alors facilement impressionnable et le remix du fameux thème musical de la série, plutôt chiadé, jouait aussi son rôle. Le reste était à chier. John Woo et ses quelques envolées de colombes. Tom Cruise et ses cheveux longs qui le rapetissent encore davantage. Thandie Newton aux abois. Bref, un raté. 


Représentation abstraite de ma mémoire à l'évocation d'un Mission : Impossible ? Non, représentation signée McQuarrie de l'Éntité, l'intelligence artificielle malfaisante du film. Mouais...

Dès le troisième opus, ça se corse davantage, ma mémoire me joue des tours, et je ne peux pas lui en vouloir. Je ne garde quasi aucun souvenir de l'épisode signé JJ Abrams (comme  tout ce qu'a fait cet homme-là), si ce n'est de brèves images de Phil Seymour Hoffman sous-exploité en vilain, de Michelle Monaghan en épouse éplorée, et de Tom Cruise glissant arme au poing dans les lens flares. Peut-être le pire. À partir du 4, l'amalgame nous tend encore plus les bras. Peut-être parce que Christopher McQuarrie, le lieutenant de Tom Cruise, passe aux commandes, d'abord au scénario. Ghost Protocol, c'est un générique en CGI en forme de clin d’œil à la maison Pixar dont est issu Brad Bird, le réalisateur embauché par la gigastar pour redonner du peps à sa saga. Une escapade à Dubaï, la robe fendue de Paula Patton, une apparition délicate de Seydoux. Voilà tout ce qui m'en reste. Le 5, le 6 et à présent le 7 forment dans mon esprit une seule et même bouillie. Tout à fait digeste mais sans réelle saveur. Il y a une grosse baston dans des toilettes, peut-être dans le 6. Une course à motos, peut-être dans le 5. Et aussi le 6. Je ne sais plus. L'arrivée de Rebecca Ferguson, un atout non-négligeable, sacrifiée bêtement cette année, est à noter. Et encore et toujours les mêmes pesants défauts. Malgré cela, les M:I demeurent légèrement au-dessus du lot. Faut dire que quand la concurrence se nomme Fast & Furious XII, c'est pas si difficile.


Il y a à peu près la même ambiance dans la voiture quand je prends le volant sur les routes des vacances...

Cette fois-ci, Tom Cruise et sa bande sont donc à la recherche d'une clé ridicule qui permettrait de désactiver une intelligence artificielle aux idées de grandeur de plus en plus inquiétantes. Cette quête mène l'autoproclamé sauveur du cinéma de divertissement hollywoodien aux quatre coins du monde, comme d'habitude. Toujours aidé par les fidèles Simon Pegg (ici adorable) et Ving Rhames (en mode moins j'en fais, mieux je me porte), il s'associe à une pickpocket professionnelle, incarnée par Hayley Atwell, une recrue bienvenue : c'est bien simple, quand ce n'est plus elle qui dicte le tempo du film, celui-ci retombe dans la médiocrité. Les antagonistes que Tom Cruise croise sur son chemin sont, principalement, deux agents de la CIA au courant de rien, une mystérieuse mercenaire nommée Paris parce qu'elle est française, et un individu malfaisant surgi du lointain passé du héros. Ce soldat zélé au service de l'IA est le grand vilain du film et l'on peut s'étonner qu'il soit incarné par un latino a l'air goguenard, le teint hâlé, en chemise pastel légère et pantalon blanc en lin, on dirait un touriste qui profite d'un moment de tranquillité, débarrassé de femme et enfants. Tom Cruise doit être fan de La Bamba, c'est comme cela que j'explique qu'il ait pu filer ce rôle à Esai Morales, la co-star de Lou Diamond Phillips dans le biopic de Ritchie Valens. Vous l'aurez compris : il est l'un des boulets du film. Bien sûr, on ne sait rien de ses motivations personnelles, ce qui ne comble donc en rien le manque de charisme de ce vilain de pacotille.


Quand Tom Cruise prend le train, ça finit souvent sur le toit...

On connaît l'ambition de Tom Cruise d'écraser la concurrence quand il sort un nouveau film de sa saga fétiche, d'où son goût pour des scènes d'action interminables qui en offrent toujours plus. Cela donne ici lieu à quelques bons moments, il faut bien le reconnaître, mais ceux-ci sont parfois bien planqués, coincés entre deux passages plus fastidieux, déjà vus et revus, ou refoulés à l'issue d'une longue séquence d'action assommante, sans grand intérêt. On se tape ainsi une énième baston peu emballante sur le toit d'un train lancé à pleine vitesse, où Cruise et son ennemi font toujours bien attention à se balancer à tour de rôle dans le sens de la longueur, triste moment qui atteste de nouveau l'incapacité de McQuarrie à filmer convenablement les bagarres quand celles-ci ne se déroulent guère dans des teuchios (auparavant, des échauffourées dans les ruelles et sur les ponts étroits de Venise auront eu le temps de nous saouler). Mais, à la suite de cette bagarre minable, Cruise et Atwell se retrouvent prisonniers de wagons dont ils doivent s'extirper un à un avant qu'ils ne chutent dans le vide, et cela devient enfin très plaisant. Je retiendrai deux autres scènes où McQuarrie semble s'être sorti les doigts (excusez cette expression familière). Je pense d'abord à la longue séquence de l'aéroport d'Abou Dabi où l'on suit une double filature (Tom Cruise pourchassant la pickpocket tandis qu'il est lui-même marqué à la culotte par la CIA) parallèlement à la désactivation, par l'astucieux Pegg (ne me demandez pas pourquoi, je l'aime bien là-dedans, il sue tout le temps, panique, s'énerve, pète les plombs, il est le seul à paraître humain), d'une bombe nucléaire cachée dans un des bagages qui transite en sous-sol. Tous les événements s'enchaînent agréablement via un montage efficace. On ressent alors le plaisir que l'on était venu chercher en consentant de passer le seuil de la porte vitrée du multiplexe inhumain. Et il y a ensuite la course-poursuite en voiture, en deux temps, dans les rues de Rome, qui prend une tournure comique et amusante à partir du moment où, menottés, Atwell et Cruise conduisent ensemble une Fiat 500 jaune étonnamment pimpée. On y casse pas mal de matériel, ce qui est toujours une chose appréciable. 


Du jamais vu, même à la SNCF !

Dans les 163 minutes que comptent cet épisode, il y en a donc bien 20 de bonnes, ce qui est déjà pas mal quand on espérait rien. Le reste est soit passable, plombé par un scénario qui perd progressivement en limpidité, soit carrément médiocre, flingué par le manque d'imagination et d'audace de l'équipe réunie autour du projet, pilotée de trop près par un acteur démiurge qui uniformise à présent tout ce dans quoi il tourne, ne laissant plus leur chance à des cinéastes qui n'obéiraient pas au doigt et à l'œil. Dans le pire de Dead Reckoning, il y a cette longue et lourde scène de discussion dans une boîte de nuit vénitienne : la tension est aux abonnés absents et l'on ne peut s'empêcher de trouver criante de pauvreté la façon du réalisateur de filmer, sous des angles ridicules et entre une succession de gros plans usants sur des tronches qui bavardent, les écrans et projections d'images virtuelles abstraites qui décorent la pièce, ceci afin de rendre palpable et menaçante la présence de l'intelligence artificielle malveillante, qui cernent littéralement les personnages (on préfère l'Entité de Sidney J. Furie). Le pari était certes compliqué sur le papier et, sans surprise, McQuarrie, en bon artisan limité qu'il est, n'a pas su le relever. Heureusement, il y a là-dedans une petite touche d'humour, d'autodérision, qui participe pour beaucoup à notre indulgence. Éternel héros, de plus en plus pris de vitesse mais toujours là de justesse, Tom Cruise veut nous amuser et nous divertir, il n'y parvient que trop rarement, par intermittence, mais, dans le contexte actuel du gros cinéma hollywoodien, c'est déjà ça. 


Mission : Impossible – Dead Reckoning Partie 1 de Christopher McQuarrie avec Tom Cruise, Simon Pegg, Rebecca Ferguson, Esai Morales et Hayley Atwell

19 juillet 2023

The Appointment

À l'heure où les tops pullulent toujours autant sur les réseaux, déclinés dans mille variantes au point d'en devenir absurde, repris à toutes les sauces au risque d'en dégoûter le moindre cinéphage, cet obscur film fantastique anglais sorti au début des années 80 pourrait aisément prétendre à figurer en très bonne place dans quelques-uns de ces futiles classements. Par snobisme enquiquineur, je le placerais en effet volontiers dans le top dédié aux plus glaçantes scènes d'accident de voiture, voire dans celui consacré aux meilleures scènes de cauchemars. C'est pas mal, pour le premier et seul long métrage du cinéaste britannique Lindsey C. Vickers, qui a passé sa carrière en tant qu'assistant de réalisation et nous démontre ici qu'il aurait amplement mérité d'être bien plus souvent aux commandes de la mise en image d'histoires sordides issues de son cerveau malade. The Appointment est hélas son seul bébé, mais il mérite franchement d'être redécouvert, et pas seulement pour cet accident de bagnole terrible que tout cinéphile averti citerait donc parmi les plus mémorables jamais filmés. 
 



The Appointment nous captive d'entrée de jeu avec son introduction efficace dont le cadre verdoyant et champêtre contraste avec l'étonnante brutalité (une scène quasiment digne de figurer parmi les meilleures ouvertures du cinéma d'horreur, mais il faut que j'arrête avec ça, je m'agace moi-même...). Une voix off monocorde nous lit un rapport de police succinct concernant la mort inexpliquée d'une jeune fille, disparue à la sortie de l'école alors qu'elle empruntait un raccourci à travers bois pour rentrer chez elle, pendant qu'à l'écran, nous suivons donc cette écolière et voyons l'inexplicable se produire soudainement, dans une ambiance déjà mystérieuse à souhait. Un effet saisissant et surnaturel clôt ces petites minutes inaugurales qui annoncent ces images chocs dont le cinéaste usera avec soin et intelligence dans les pics d'angoisse à venir de son récit. Une ellipse nous projette ensuite trois ans plus tard. Et nous comprenons bien vite que l'étrange scénario de Vickers nous propose une relecture appliquée du complexe d'Électre : un père incarné par Edward Woodward, l'éternel policier aux abois de The Wicker Man, entretient une drôle de relation avec sa fille, joueuse de violon, et celle-ci, profondément vexée, voit d'un très mauvais œil son absence annoncée à son concert de fin d'année. Le papa n'a malheureusement pas le choix : il doit remplacer un collègue et partir en bagnole pour un long déplacement professionnel. C'est tout ce que l'on peut dire pour résumer ce film.
 
 
 

Sous ses dehors nébuleux et ses contours particulièrement difficiles à cerner, le scénar de Vickers s'avère finalement d'une grande simplicité, il est même tout à fait limpide si l'on sait interpréter les ultimes images (ce qui ne demande pas un effort surhumain). Le rapport policier est une fausse piste, l'ellipse initiale est trompeuse, l'atmosphère onirique est un voile enveloppant, l'image, elle, ne ment pas, ou rarement. Le récit se déroule principalement en deux temps, sur une durée somme toute très resserrée : une longue nuit d'insomnie, où l'on se trouve aussi impuissant et désorienté que les personnages en présence, suivie d'un trajet en voiture, où l'on est sur le qui-vive non-stop en raison des visions de cauchemars prémonitoires que l'on aura eues précédemment. Tout le long, Lindsey C. Vickers nous déconcerte par sa gestion du temps. Son histoire pourrait faire l'objet d'un court métrage, mais ce serait gommer tout l'intérêt du film et négliger cet art précieux, ici maîtrisé jusqu'à l'excès par Vickers, celui de la dilatation du temps. Rarement nous aurons autant eu la sensation de partager la couche moite, de vivre la nuit interminable et de se réveiller des rêves si troublants de notre couple en plein tourment nocturne avant-coureur. Une longue partie qui pourrait presque être pénible si elle n'était pas ponctuée par des idées visuelles et sonores superbes, où la mise en scène ingénieuse de Vickers peut compter sur la partition endiablée de Trevor Jones, et si nous ne récoltions guère les fruits de nos efforts lors du suspense cruel que nous fait vivre le réalisateur dans la tortueuse partie suivante, road movie angoissant. 
 
 
 
 
Il paraît que la scène de l'accident de bagnole est devenue virale, qu'elle a été un temps partagée en boucle sur Twitter et compagnie. Elle est en effet d'une telle efficacité qu'on l'imagine aisément fonctionner sortie de son contexte. Mais c'est tout de même dommage. Il faut voir avec quel soin maniaque nous l'amène le cinéaste. Le suspense grimpe progressivement tandis que les éléments des rêves trouvent leur place les uns après les autres. On pense inévitablement à Duel lors d'un bref stop dans une cabine téléphonique, qui pourrait être un temps mort mais n'en est donc pas un, puisque l'on guette l'arrière-plan avec une grande anxiété. Et, lors de l'accident à proprement parler, le temps semble à la fois suspendu et glisser, inexorablement, vers le pire. Là encore, la partition inquiétante de Trevor Jones marche main dans la main avec la mise en scène vicieuse de Vickers, peut-être influencée par Les Choses de la vie de Claude Sautet. La scène est ponctuée d'inserts qui s'impriment sur nos rétines comme autant d'images marquantes, dans un montage ma foi assez virtuose. On n'oublie pas, non plus, cet enchaînement de plans rapides de la voiture tenant en équilibre sur la glissière de sécurité, vue sous différents angles, avant sa chute inéluctable. Un moment de sidération, qui nous scotche et nous laisse coi, le point culminant d'effroi de cette pépite inclassable du cinéma de genre.
 
 
The Appointment de Lindsey C. Vickers avec Edward Woodward, Jane Merrow et Samantha Weysom (1981)

12 juillet 2023

The Covenant

Voilà un film que la plupart des observateurs ont découpé en deux parties, préférant généralement la première, jugée efficace et prenante, à la deuxième, considérée plus brouillonne et convenue. Je suis plutôt d'accord avec ça mais j'apporterai plus tard ma contribution à cette analyse pointue. Dans la première partie, qui se déroule entièrement en Afghanistan, en mars 2018, le sergent américain campé par Jake Gyllenhaal essaie de débusquer et démanteler les dépôts de munitions et de construction de bombes des talibans à l'aide de son interprète, qui dépasse largement ses fonctions en s'avérant être un sacré opérateur de terrain quasi doué d'un sixième sens. Suite à une intervention qui tourne mal, lors de laquelle la petite troupe menée par Gyllenhaal est presque totalement décimée, ce passable film d'action et de guerre tourne au survival pur et simple puisque notre interprète deluxe, joué par un acteur charismatique (Dar Salim), se donne pour mission de sauver le sergent fort mal en point, en le ramenant à sa base. Pour cela, il lui faudra traverser en toute discrétion et en vitesse le territoire hostile, escarpé et désertique des talibans, ce qui ne sera pas une mince affaire. Cette première partie est menée tambour battant, elle nous accroche forcément, malgré quelques fautes de goût notables de la part d'un Guy Ritchie que l'on a toutefois connu capable de bien pire, et en dépit d'un traitement des scènes d'action assez digne du plus sommaire des jeux vidéos, avec ces talibans qui arrivent par vagues successives et tombent comme des mouches sous les tirs plus précis et létaux des américains. Une ellipse de plusieurs semaines nous mène vers la deuxième partie, qui nous propose d'assister aux efforts monumentaux entrepris par Jake Gyllenhaal pour rendre justice à son interprète zélé : il ira pour cela jusqu'à le retrouver en Afghanistan afin de le rapatrier en Amérique avec un visa pour toute sa famille, comme promis initialement. Il faut bien que l'américain se montre héroïque, lui aussi !


 
 
Au milieu de ces deux grandes parties que les plus fins cinéphiles ont su repérer, je tiens pour ma part à mettre en avant le pont qui les sépare et qui constitue, à mes yeux, le meilleur moment de ce film, un film qui vous fera passer une soirée mais dont vous pouvez très bien vous passer. Je veux par là mettre en lumière ces longues minutes d'un comique involontaire discret mais salvateur où Jake Gyllenhaal se perd dans un véritable cauchemar bureaucratique, noyé sous des démarches administratives pénibles qui vont même l'empêcher de trouver le sommeil. C'est qu'il se bat pour obtenir un visa à son sauveur puis pour avoir le droit de retourner en personne le dénicher en Afghanistan. Il faut voir notre sergent revenu d'entre les morts essayer de garder son calme au téléphone, où il est renvoyé d'un standard à un autre, avant de perdre totalement ses nerfs et d'hurler des menaces terribles à ses pauvres interlocuteurs ! Lui qui a flirté avec la Grande Faucheuse ne s'attendait sans doute pas à ce que la pire épreuve l'attende dans l'intimité et le calme apparent de son salon, au bout du fil. Ce passage-là a placé mon père, qui a gentiment regardé ce truc-là à mes côtés (c'est le genre de film à voir en bonne compagnie), face au si douloureux souvenir de ses propres démarches administratives auprès d'Agirc-Arrco et sa longue bataille pour faire valoir l'intégralité de ses droits à la retraite. Jake Gyllenhaal nous propose une prestation habitée comme il en a le secret. Drôle d'acteur, d'ailleurs, que ce Jake Gyllenhaal, auquel un bel avenir était jadis promis lorsqu'on le voyait évoluer devant la caméra, faussement prometteuse aussi, de Richard Kelly, et qui perd hélas son temps aujourd'hui dans des collaborations au mieux anecdotiques avec des pointures du cinéma au rabais tel que Antoine Fuqua, Michael Bay et donc Guy Ritchie. Notons toutefois que sa présence ici permet au piètre réalisateur britannique et ex boyfriend de Madonna de torcher un de ses films les plus matables. Bien entendu, je ne vous le conseille pas pour autant. On est simplement toujours un peu surpris, aujourd'hui, quand on arrive au bout d'une telle production américaine, sans avoir eu envie de tout arrêter, et en ayant été relativement captivé.
 
 
The Covenant de Guy Ritchie avec Jake Gyllenhaal et Dar Salim (2023)

5 juillet 2023

Master Gardener

On l'aime bien Paul Schrader, mais il faut reconnaître qu'il tire un peu sur la corde là... Master Gardener est donc le troisième volet de ce que certains ont nommé sa "trilogie bressonnienne" pour tout ce qu'elle emprunte à l'auteur du Journal d'un curé de campagne ; trilogie qui risque même de bientôt devenir une tétralogie, si l'on en croit les derniers indices donnés par le cinéaste. Autant de films mettant en scène un personnage central abîmé par la vie, en quête de rédemption, et qui, chaque nuit, dans sa chambre, à la seule lumière d'une lampe de bureau, note ses pensées plus ou moins sombres dans son journal intime (d'autres ont intitulé cette trilogie "Man in a Room", mais rappelons-nous que Willem Dafoe griffonnait déjà des carnets entiers pour y étaler ses réflexions de dealer de drogue en pleine crise existentielle dans l'excellent Light Sleeper). Bref, Master Gardener s'inscrit donc dans la droite lignée de First Reformed et The Card Counter mais force est de constater que l'inspiration du cinéaste paraît cette fois-ci clairement sur le déclin. Si ce nouveau film se regarde sans aucune souffrance, Schrader restant appliqué et plein d'estime pour son spectateur, un léger ennui pointe parfois. Le vieux cinéaste paraît fatigué, trop sûr de sa recette, en roue libre, bien tranquille sur ses rails habituels.



 
On suit ce coup-ci un ancien membre actif (Joel Edgerton) d'un groupe de suprémacistes blancs, désormais sous protection judiciaire et jouissant d'une nouvelle identité après avoir aidé le FBI à nettoyer ses anciens rangs. Apparemment vacciné de ses orientations politiques passées, il s'est reconverti horticulteur des plus méticuleux pour les besoins de l'entretien quotidien de l'immense jardin d'une riche veuve (Sigourney Weaver). Leur relation va au-delà du simple rapport patronne / employé et leurs existences et routines bien huilées vont gripper un brin quand la veuve demandera à son jardinier de prendre sous son aile sa petite-nièce (Quintessa Swindell) pour lui transmettre son art et son savoir de jardinier hors pair. Ce décor et ce contexte, intrigants et plutôt singuliers, sont adroitement posés par Paul Schrader. On est content de retrouver Sigourney Weaver dans un rôle a priori intéressant et devant la caméra d'un réalisateur respectable. Joel Edgerton semble lui aussi faire l'affaire. Nous avons envie d'y croire et on espère encore avoir droit à un film au moins aussi bon que The Card Counter et First Reformed. En réalité, la première partie du film s'avèrera de loin plus réussie que tout ce qui suit l'arrivée de la petite-nièce...


 
 
Tout semble alors cousu de fil blanc. Le triste passé du personnage principal nous est révélé à coups de brefs flashbacks dont on aurait peut-être pu se passer. On ne croit pas une seconde en l'espèce de romance surgie de nulle part entre cet ancien skinhead et la petite-nièce métisse. L'actrice qui l'incarne est plutôt mignonne mais, la pauvre, son rôle est épais comme du papier à rouler ; elle n'amène avec elle que des lieux communs : ex-boyfriend violent à qui il va bien falloir régler son compte, addiction à la drogue trop bien dissimulée et vieilles rancœurs familiales qui vont faire éclater ce petit monde. Si l'on pouvait avoir une certaine curiosité pour les liens un peu malsains entre Weaver et Edgerton, on en a aucune pour ce qui se noue entre le jardinier et son élève. On ne comprend même pas ce que cette dernière peut trouver à son prof. Schrader ne s'y consacre tout simplement pas assez. Mais c'est bien dans le maître jardinier du titre que réside sans doute le plus gros souci. Nous avons là un acteur, Joel Edgerton, qui fait son maximum mais dont on finit par se dire qu'il n'est peut-être pas de la trempe d'un Ethan Hawke (forcément !) ou même d'un Oscar Isaac. Surtout, son personnage intéresse nettement moins, ne nous fascine guère. Car franchement, Paulo, tes histoires de rédemption, on commence à les connaître par cœur, on en a soupé. Reviens plus tard, et avec autre chose !


 
 
Bon, restons mesuré, Master Garderner n'a tout de même vraiment rien de honteux et n'est pas un mauvais film, mais il y a comme un décalage entre le sérieux et l'emphase que met Paul Schrader à nous raconter cette histoire et son réel intérêt. Le retour en forme et l'état de grâce du cinéaste américain sont-ils déjà derrière nous ? Réponse définitive lors de notre prochain rencard avec lui. On lui laisse encore le bénéfice du doute, lui qui a connu des bas tellement plus bas, et on continue de suivre avec plaisir sa grosse moue boudeuse sur les réseaux.
 
 
Master Gardener de Paul Schrader avec Joel Edgerton, Sigourney Weaver et Quintessa Swindell (2023)