Affichage des articles dont le libellé est Nicolas Roeg. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Nicolas Roeg. Afficher tous les articles

17 mars 2020

The Nightingale

The Nightingale, Color Out of Space, Cutterhead, Dragged Across Concrete, The Beach Bum… tous ces films ont un malheureux point commun, celui de ne pas avoir été distribué dans nos salles de cinéma. Même pas pour une simple sortie technique, très limitée, ne serait-ce que pour la forme. Rien. Dans le meilleur des cas, ils ont fini par être disponibles sur une plateforme VOD ou sont sortis directement en vidéo. Malgré un Prix spécial remporté à la Mostra de Venise en 2018, une flopée de récompenses glanées en Australie et en dépit de l’accueil positif réservé à son premier long métrage, le déjà très réussi Mister Babadook, The Nightingale, précieux parangon d'un cinéma alternatif, radical et ambitieux, demeurera hélas totalement invisible par chez nous, et ne le sera jamais dans les meilleures conditions possibles. Après l’avoir enfin découvert, en catimini, grâce aux joies interdites permises par les sorties vidéos étrangères, on se dit qu’il s’agit là d’une sacrée anomalie, d’une énorme injustice, tant le deuxième film de Jennifer Kent est effectivement digne de tous les honneurs et devrait pouvoir être découvert sur grand écran.




Mais s’il vient confirmer tout le talent de la cinéaste, et bien plus encore, admettons toutefois que The Nightingale n’est peut-être pas fait pour un public non averti et qu’il constituait très vraisemblablement un pari fort risqué pour un distributeur lambda. Avec cette ténébreuse histoire de vengeance située dans la Tasmanie du début du XIXème siècle, Jennifer Kent n’y va pas avec le dos de la cuillère et il y a de quoi être sonné par toutes les horreurs qui nous attendent au programme. Celles-ci nous sont pourtant toujours montrées sans aucune complaisance, sans aucun voyeurisme et à la juste distance, mais l’on peut tout de même ressentir une sorte de trop-plein face à la violence parfois insoutenable des faits. Certains spectateurs, dans un réflexe d’auto-défense légitime et compréhensible, pourront ne pas le supporter. On ne doute cependant pas une seule seconde du réalisme historique du scénario solide écrit par Jennifer Kent, qui opère un rapprochement osé et audacieux entre le sombre destin d’une jeune irlandaise envoyée à l’autre bout du monde pour purger sa peine et placée à la merci d’un infâme officier de l’armée qui refuse de lui rendre sa liberté, et la situation de celui qui deviendra son guide et son compagnon de route, l’un de ces aborigènes de l’île opprimés, massacrés, résignés à devoir mener chez eux une guerre déséquilibrée contre les colons britanniques. On reste coi devant le portrait terrible qui nous est dressé de l’Australie naissante, baignant dans le sang et les larmes.




La réalisatrice prend son temps pour planter le décor, installer les enjeux du film et faire pleinement exister ses différents personnages, en particulier l’héroïne, dont on épouse le plus souvent le point de vue. Nous sommes donc d’autant plus sous le choc quand l’impensable survient et qu’elle assiste, impuissante, à la mort des siens. Nous comprenons forcément les motivations de cette jeune femme désormais animée par le seul désir de vengeance, par un insatiable et mortel appétit revanchard, qui se lance à la poursuite désespérée de son persécuteur à travers les forêts et le bush tasmaniens, embauchant pour cela un jeune aborigène qui doit lui servir de guide et qu’elle considérera d’abord avec la plus grande méfiance, avant que leur relation n'évolue. La réalisation de Jennifer Kent est d’une grande beauté formelle, sa mise en scène est limpide, minutieuse, elle exploite parfaitement le format choisi par un sens du cadrage indéniable, et la lumière, naturelle, est parfaitement saisie. L’image est donc resserrée, rigoureuse, à l’instar d’un récit assez long qui suit patiemment son déroulement implacable et réussit à nous tenir en alerte, sur le qui-vive, du début à la fin. Ne comptez pas sur ces quelques parenthèses oniriques surprenantes, hallucinations de l’héroïne en plein délire, pour respirer un peu d’air frais, il s’agit soit de cauchemars sordides soit de rêves éphémères qui rendent son réveil encore plus brutal. L’absence quasi totale de musique, en dehors des chants rituels aborigènes et des comptines irlandaises entonnées par la jeune femme, participe d’une même volonté immersive. Tout cela mis bout à bout pourrait être particulièrement austère et rebutant, mais le talent de Jennifer Kent est tel qu’il n’en est rien et que l’on a aucun mal à accrocher. Si Mister Babadook attestait déjà d’une belle maîtrise, la réalisatrice, en pleine possession de ses moyens, franchit un palier et nous surprend encore, traçant un chemin plus autonome, personnel, moins référencé.




La tension est presque permanente, l’action est toujours d’une parfaite lisibilité, ce qui était la condition sine qua none pour que l’on puisse accepter de se plonger dans une telle randonnée, dans une si éreintante excursion : nous savons toujours où se situent les personnages, où ils se trouvent les uns par rapport aux autres, pour ne jamais perdre le fil de leur funeste avancée. Jennifer Kent a cependant l’intelligence de déjouer régulièrement les attentes du spectateur, de désamorcer les situations attendues. La violence éclate littéralement à l’image lors d’une seule scène, point de bascule de ce western atypique et si sombre qui prend alors le risque de s’éloigner du schéma habituel, tout tracé. Quand notre héroïne assouvit sa soif de vengeance, après s’être acharnée sur une victime elle-même hantée par un fort sentiment de culpabilité, elle se retrouve ensuite vidée, sale et répugnante, dégoûtée de la vie comme d’elle-même, ayant presque du mal à soutenir le regard incrédule de son compagnon de route, écœuré, depuis longtemps habitué aux horreurs commises sur ses terres. Jennifer Kent atteste alors d’une position morale nuancée et pertinente sur la vengeance, « œil pour œil dent pour dent », à des années lumière des scénarios douteux et terre à terre que l’on nous ressert encore trop souvent, un choix bien plus intelligent et subtil que la majorité des rape & revenge et autres revenge movies auxquels on pourrait en toute logique rattacher The Nightingale étant donné la chronologie des événements contés. Passé cette scène cruciale, où le sang éclabousse notre héroïne aussitôt dépossédée de sa pulsion de vie, morte-vivante devenue fantôme, la poursuite se mue en errance, l’objectif de la chasse semble incertain, remis en question, et le face-à-face final ne ressemblera en rien à ce que l’on pouvait imaginer. Des éléments fantastiques s'invitent par petites touches, accompagnant le chemin de croix du personnage, pour des images et des instants fascinants que l'on croirait issus d'un conte.




La cinéaste australienne ne tombe jamais dans le sentimentalisme et la facilité, alors que l’on aimerait naïvement assister à un rapprochement et une union plus définitive entre l’héroïne et son guide aborigène. La première est incarnée par Aisling Franciosi, une actrice admirable que l’on découvre pour la première fois et qui parcourt ici un large éventail d’émotions, bien peu, il est vrai, penchant vers la joie et l’allégresse... Tour à tour fragile ou pleine de rage, brisée ou apathique, Aisling Franciosi impressionne progressivement par sa capacité étonnante à passer d’un état à l’autre en étant toujours aussi juste, crédible et convaincante. A ses côtés, Baykali Ganambarr évoque inévitablement l'inoubliable David Gulpilil, l’acteur aborigène qui endossait également un rôle de guide lors d'une traversée de l'outback australien au début du XXème siècle dans The Tracker de Rolf de Heer et que l’on avait auparavant vu, tout jeune, dans le sublime Walkabout de Nicolas Roeg puis dans La Dernière vague de Peter Weir. C’est avec une finesse similaire que le jeune Baykali Ganambarr incarne ce guide qui porte, dans son profond regard noir, à la rage et à la tristesse contenues, la lourde connaissance des crimes odieux commis par les blancs. On a aucun mal à s’intéresser à ces deux personnages, à croire en leur solidarité possible, à marcher, à trembler et à souffrir avec eux. Face à eux, le plus terne Sam Claflin ne s’en tire pas si mal en essayant d’apporter un peu d’ambiguïté dans un rôle bien plus difficile d’officier détestable seulement motivé par la volonté de monter en grade et l’espoir de rentrer ainsi plus vite au pays, quitte à tout écraser sur son passage. C’est justement là que le bât blesse, car ce personnage est si négatif que l’on a presque du mal à y croire, il cristallise quasiment à lui seul le défaut du film.




Comme je l’ai déjà évoqué, on pourra en effet légitimement regretter que la réalisatrice ait autant chargé la barque. Il y a là quelques morts et quelques crimes cruels dont on aurait peut-être pu se passer, pour un effet identique sur un public de toute façon déjà groggy. Et, bien que la toute fin soit très belle et sensée, avec ce lever de soleil qui éclaire progressivement nos deux personnages meurtris et déracinés, on se demande aussi si l’assaut final vengeur était indispensable. Mais ça ne sont là que des réserves mineures pour un film imposant qui ne manque pas de nous marquer au fer rouge. Une œuvre étonnamment riche et hardie que l’on sent être celle d’une cinéaste sûre d’elle, remontée et habitée, dont il est important de saluer tout le courage et l’audace de s’être attelée à un tel projet et d’avoir si brillamment su relever le défi qu’elle s’est elle-même imposé avec son ambitieux scénario. Après avoir exploré les affres de l’horreur psychologique monoparentale dans Mister Babadook, un film à la filiation plus évidente, qui parvenait toutefois à se démarquer et qui faisait du bien au cinéma de genre en se présentant comme une alternative adulte et salutaire à la majorité des productions actuelles, Jennifer Kent a donc su changer de registre, monter en régime, tout en gardant la même démarche, clairement teintée d’un féminisme résolu auquel elle parvient à donner ici une résonance nouvelle. On a désormais hâte de découvrir ce que nous réservera la suite de sa carrière, en espérant qu'elle ne succombe jamais aux sirènes hollywoodiennes et puisse continuer à affirmer sa si forte personnalité de cinéaste.




The Nightingale de Jennifer Kent avec Aisling Franciosi, Baykali Ganambarr et Sam Claflin (2019)

24 novembre 2018

Petulia

Quel chouette film de Dick Lester ! Il faut dire que lorsqu'on dispose de Julie Christie et George C. Scott en tête d'affiche, Nicolas Roeg en chef op' et John Barry à la musique, on met toutes les chances de son côté ! Petulia donne en effet l'impression d'être la conjugaison du talent de tout ce beau petit monde et un fruit bien de son époque, encore délicieux aujourd'hui. Richard Lester nous narre la rencontre et l'histoire d'amour compliquée qui s'ensuit entre la jeune, pétillante et ravissante Petulia (Julie Christie) et le calme et beau docteur Archie Bolen (George C. Scott). Tous deux appartiennent à la bonne société de San Francisco, tous deux sont plus ou moins en instance de divorce. Pour Archie, ça n'est plus qu'une histoire de papiers à signer, mais c'est acté : il vit désormais seul dans un appartement hi-tech à l'agencement très étrange, s'occupe un week-end sur deux de ses gamins et, quand il revoit sa femme, ça fait souvent des étincelles... Mais du côté de Petulia, ça n'est pas encore ça : elle clame sa passion pour Archie alors que tout reste à faire avec son actuel mari (Richard Chamberlain), encore bien accroché à elle... Nous suivons donc avec plaisir ces deux personnages dans leurs vies désordonnées, cherchant peut-être un équilibre et un peu de tranquillité dans l'agitation ambiante.





Comment, en effet, ne pas s'intéresser au récit d'une romance contrariée quand celle-ci concerne deux superbes personnages incarnés par de tels acteurs ? Julie Christie magnétise littéralement la caméra avec son si grand regard d'un bleu foncé hypnotisant, elle prête ses traits délicats à ce qui peut d'abord apparaître comme un personnage léger, farfelu ("a kook" comme le dira Archie), qui deviendra petit à petit une figure tragique réellement poignante. Quant à George C. Scott, ici particulièrement classe et dans un registre que je lui connaissais peu, il impressionne encore une fois en héros romantique, tout en sobriété. L'alchimie entre les deux acteurs fonctionne à plein régime et ceux qui les entourent semblent contaminés par leur charisme et leur intensité, à l'image de l'élégante et gracile Shirley Knight, dans le rôle de l'ex-femme d'Archie, qui nous offre quelques scènes marquantes elle aussi. Cerise sur le gâteau, la musique de John Barry est superbe, à commencer par son thème principal (samplé par The Cinematic Orchestra, il me disait bien quelque chose !), vecteur dès le générique d'ouverture d'un spleen qui ira comme un gant à l'histoire contée.





Richard Lester, qui avait fait ses preuves sur les films des Beatles (A Hard Day's Night et Help !), se montre ici très inspiré et adopte un style qui n'est pas sans rappeler celui que choisira plus tard son directeur photo du moment, Nicolas Roeg (entre autres pour Don't Look Now, Walkabout et Bad Timing). Le cinéaste fait preuve d'une inventivité formelle de chaque instant et met en place une narration déroutante, menée à un rythme plutôt soutenu, régulièrement ponctuée par des inserts de flashbacks ou de flashforwards qui ont toujours du sens. Richard Lester renforce ainsi un sentiment, en replaçant un bref moment passé, ou glisse des images quasiment subliminales qui préparent et provoqueront de drôles d'impressions de déjà-vu. Ces tours de passe-passe agréables et déconcertants participent au pouvoir de fascination évident d'un film qui prend les allures d'un puzzle très simple à suivre et progressivement doté d'une vraie envergure. Car si Richard Lester et toute sa bande ont l'air de s'être bien amusés, parvenant notamment à capter une des facettes de leur époque (on note également les apparitions de Janis Joplin et du groupe The Grateful Dead), ils n'en ont pas moins oublié de nous émouvoir, de nous toucher pour de bon. La dernière scène empreigne même durablement nos esprits, nous restons pendus à la destinée indécise de ces deux êtres.





Au-delà de leur histoire personnelle, c'est aussi l'air du temps saisi, ce parfum si propre à la fin des années soixante, lourd de ses questionnements et de ses remises en cause, qui réussit à nous emplir d'émotions contradictoires, nimbées d'amertume. Petulia a un ton vraiment étonnant, tour à tour léger et amusant ou grave et acerbe. Pendant que les personnages se débattent dans leurs relations tumultueuses et leurs logements chics et confortables, la télé ou la radio diffusent en arrière-plan des infos sur la guerre du Vietnam qui, de l'autre côté du monde, bat son plein. Et que cachent la frivolité séduisante, la fantaisie permanente et les extravagances surprenantes de la si belle Petulia ? Nous découvrons peu à peu la véritable nature du lien qui l'unit à son mari et tout n'est pas si rose... Tout à fait à l'image de ses deux acteurs principaux, à leur zénith, le film de Richard Lester possède donc un charme fou. Plein de couleurs, de détails tantôt comiques tantôt sordides, d'idées de mise en scène et de montage en veux-tu en voilà toujours pleinement au service du récit, Petulia déborde de vie et s'impose finalement comme un puissant mélodrame.


Petulia de Richard Lester avec Julie Christie, George C. Scott et Richard Chamberlain (1968)

25 août 2017

My Cousin Rachel

Bien triste film que ceci. Tiré d'un roman de Daphné du Maurier déjà adapté, mais forcément mieux, en 1952, par Henry Koster, avec Olivia de Havilland et Richard Burton, My Cousin Rachel nouvelle mouture ne fera pas date. En même temps, Roger Michell n'est pas vraiment Alfred Hitchcock, ni Nicolas Roeg (qui portèrent à l'écran Rebecca et Don't Look Now, de la même écrivaine). Non Roger Michell est principalement connu pour avoir tourné Coup de foudre à Nothing Hill, et plus récemment Morning Glory. Et ce n'est pas son dernier fait d'arme qui bouleversera l'histoire du cinéma. L'intrigue tourne autour de la fameuse cousine Rachel (Weisz). Le personnage masculin de cette histoire, Philip, interprété par le médiocre Sam Claflin, en veut à cette Rachel qui a tourné la tête de son parrain lors d'un voyage en Italie et qu'il soupçonne d'avoir rincé le pauvre homme avant de causer sa perte. Il se trouve justement que la Rachel entend débarquer chez lui sous peu, et Philip lui garde un chien de sa chienne. Mais une tasse de thé plus tard, le crétin est sous le charme de l'italienne et suit le parcours de son parrain, assurant ainsi au spectateur de n'être jamais surpris jusqu'au bout du film.




Quand Philip monte dans la chambre de Rachel pour la première fois, au bout d'une grosse demi-heure de film, nous nous apprêtons à la voir apparaître enfin à l'écran. On s'attend à un truc. Peut-être pas à la première séquence consacrée à Kim Novak dans Vertigo, mais un truc du genre. Or, je me suis d'abord dit : "Tiens, j'ai raté le premier plan sur elle ?". Alors je suis monté dans la cabine du projectionniste, qui utilise une Kinoton (première fois que j'en vois une), et je lui ai demandé de rembobiner. Or non, je ne l'avais pas raté ce plan, il était tout simplement anodin, invisible. La messe était dite. Quand tout le film repose sur le charme ambivalent d'une femme, sur un mystère éternel et sans réponse autour de sa véritable nature, sorcière manipulatrice et cupide ou victime passionnée de l'intérêt des hommes, et que le premier plan sur elle, survenant au bout d'une certaine attente, est un plan aussi parfaitement plat et inintéressant que tous ceux qui ont précédé, il n'y a plus rien à espérer. Et de fait.


My Cousin Rachel de Roger Michell avec Rachel Weisz et Sam Claflin (2017)

24 mars 2014

Ne te retourne pas

Faut-il être au fond du trou pour lancer un film pareil. Il y aurait une thèse à écrire sur l'état dans lequel on se trouve quand on appuie sur "Play" pour lancer un film comme ça. Sauf pour ceux qui l'ont fait en croyant avoir téléchargé Don't look now de Nicholas Roeg. Tous les autres sont des fumiers et nous en faisons partie ! L'idée de ce film ? Réunir Bellucci et Marceau. Les deux actrices partagent la particularité de cumuler une bonne vingtaine d'années de fantasmes masculins nourris, soit quarante piges de désir inassouvis et plus rarement effleurés, comme par Bertrand Tavernier qui, rappelons-le, avait un regard tout ce qu'il y a de plus normal avant de tourner La Fille de D'Artagnan (pur souvenir de cinéma). Sur le tournage de ce film, le cinéaste français s'est littéralement fracturé les yeux. Qui ne se souvient pas de cette scène où Sophie Marceau retire le haut (sa chemise explose, plus précisément) sous les yeux encombrés de son père incarné par un Philippe Noiret plus ripoux que jamais ? Après cette séquence, vue au cinéma à la sortie du film, sur écran géant, nous étions nombreux à avoir besoin de changer de caleçon !


A chaque coup de clap de Bertrand Tavernier (dont les mirettes commencèrent à cet instant précis à zieuter dans tous les sens), l'acteur ci-dessus, qui à la réflexion n'est pas peut-être pas Philippe Noiret, passait en une fraction de seconde de la position couchée, yeux mi-clos, à la position raidie, arborant les billes les plus exorbitées du monde, celles du clebs de Tex Avery.

Lycéenne au Lycée Henri IV (un assez bon bahut, l'équivalent de la Mosson à Montpellier ou du collège La Reynerie à Toulouse), Marina de Van, la réalisatrice de cette rognure filmique, a ensuite fait la Fémis, avant d'enchaîner les scénarios pour François Ozon (Sous le sable et surtout 8 femmes, qu'elle qualifie de "personal favorite") et Pascal Bonitzer (Je pense à vous). Et puis la voilà propulsée cinéaste, et la jeune femme fait parler d'elle avec ce thriller français (chose assez rare il est vrai) qui se fait fort de réunir deux actrices célébrissimes dans un coup médiatique de grande ampleur. Le film est irregardable, on le sait au bout de quelques secondes, mais il enfonce le clou dans une scène d'un ridicule inimaginable, où Marina de Van a le toupet d'insérer son propre faciès au cœur d'un morphing hideux entre les visages de Sophie Marceau et Monica Bellucci, comme si l'association miraculeuse de ces deux stars internationales à la plastique appréciée depuis la pointe de la Patagonie jusqu'en Terre Adélie devait aboutir à Marina de Vans. L'actrice-scénariste-réalisatrice veut bien sûr placer là un clin d’œil du genre "Emma Bovary, c'est oim", mais, ce faisant, elle se présente comme le chaînon manquant entre la madone méditerranéenne aux formes faramineuses et le charme bien "à la française" de Sophie Marceau, faite égérie de William Wallace par un Mel Gibson plutôt à l'affût sur ces coups-là. Marina de Vanne à deux balles prétend partager un peu de l'ADN de ces deux bombastics, simply fantastics. Let me laugh.


Entre l'idéal italien et l'élégance française : Beetlejuice.

Rappelons que ce film fut sélectionné hors-compétition à Cannes en 2009. Merci Thierry Frémaux. Cette projection cannoise, où le film reçut un accueil congelé, fut vécue comme un cauchemar par Marina de Van qui, une chance pour elle, n'a pas assisté à la projection sur notre canapé, dont elle ne se serait certainement pas remise. Toujours est-il que la réalisatrice poursuit son petit bonhomme de chemin puisqu'elle vient de sortir Dark Touch, titre anglais dont on sent bien qu'il a été trouvé par une francophone à la ramasse. Un autre long métrage irregardable à l'actif de De Van, dont la date de sortie aurait dû rester "prochainement" jusqu'en 2030 au bas mot.


Ne te retourne pas de Marina De Van avec Sophie Marceau et Monica Bellucci (2009)