23 mai 2019

Girl

J'ai découvert ce film dans le cadre d'une de ces soirées-débats que mon cinéma de quartier organise une fois par mois depuis maintenant deux mois. Je ne suis pas trop friand de ces soirées-là car je suis plutôt du genre à la boucler en public et à attendre que ça passe, mais ce film m'avait plus ou moins été conseillé par un pote danseur étoile, qui a travaillé dessus en tant que figurant, et comme il m'avait refilé une place gratis, j'y suis allé la fleur au fusil. L'affichette de l'événement indiquait "SOIRÉE CINÉ-DÉBAT #2 : Sexualité et adolescence : une période décisive - organisée par l'association TenPensesKoi, A He or a She et le collectif Parentalité du centre social.  Programme : 19h : projection du film de Lukas Dhont, GIRL. Caméra d'Or au Festival de Cannes 2018, Prix d'interprétation Un Certain Regard, Queer Palme Cannes 2018, Prix de la critique internationale FIPRESCI. 20h45 : débat + buffet dînatoire". Le tout était accompagné d'un synopsis très succinct dudit film : Lara, 15 balais, rêve de devenir danseuse étoile. Avec le soutien de son padre, elle se lance à corps perdu dans cette quête d'absolu. Mais son corps ne se plie pas facilement à la discipline ; car elle est née garçon. De mon côté, j'attendais de pied ferme le buffet dînatoire.




Le film est pas si mal, même s'il ne méritait pas tous ces prix, faut pas pousser. A la rigueur, quelques récompenses pour Victor Polster, qui est véritablement bluffant(e?) dans le rôle de cette ado si troublée par son identité sexuelle. Lukas Dhont filme convenablement la danse et l'on ressent bien tous les efforts et toutes les difficultés de son personnage principal. N'empêche qu'au bout d'une heure, le cinéaste belge finit par tomber des deux pieds, un par un, dans les pièges qu'il avait jusque-là réussi à éviter. C'est trop. Trop pour moi en tout cas. Et si l'extrait de la critique du Monde promet un film "doux, solaire et pudique", je m'inscris en faux contre ces trois qualificatifs totalement mensongers. "Pudique", le film ne l'est pas suffisamment dans ses derniers instants fatidiques, et c'est bien dommage, car c'est là qu'il touche le fond. "Solaire", à part peut-être la jolie crinière de Lara, je ne vois pas, il ne faut pas oublier que ça se passe en Belgique... Et "doux", tout est subjectif, certes, mais perso, ça m'a plutôt fait l'effet d'un uppercut dans le bas ventre. Pour choper un peu d'air frais devant ce genre de films, j'essaie toujours de trouver des branches auxquelles me raccrocher. Là, pas de doute possible, c'était le père de l'ado (sublime Arieh Worthalter). Ce personnage toujours positif, patient, compréhensif, délicat. Ça fait plaisir de croiser un si beau personnage dans un tel film. Celui du psy, bien que plus secondaire, est très agréable aussi. Merci à eux de m'avoir accompagné jusqu'au bout.




Après le générique de fin, un gros silence de mort régnait dans la salle à demi remplie de mon cinéma de quartier. Puis la lumière s'est rallumée péniblement, et l'animateur du débat a fait son apparition timide sur scène, le pas hésitant, le dos courbé, se frottant les mains l'air gêné. Il a peiné comme jamais à lancer les discussions. "Bon... hum... C'est pas un film facile hein ?... Pas un feel good movie comme on dit, ahah !... On peut parler d'un choc. Qu'est-ce que vous en dites ?... Y'en a qui veulent prendre la parole ?... Oui ?... Non... Personne ?... Bon... Alors moi j'ai une p'tite anecdote amusante à vous raconter... En me rendant au cinéma j'ai croisé une maman opossum sur la route, suivie de ses huits petits, ils étaient là, en file indienne... Un beau tableau. Ils ne sont pas passés loin de ma roue." Difficile de rebondir après ça et son intervention a fait un flop complet mais, heureusement, le buffet, préparé par le chinois du coin, était excellent. La première soirée-débat proposée par mon ciné de quartier, autour du film Les Chatouilles et du thème "Pédophilie et abus sexuel : déni, silence et aveuglement parental" avait, paraît-il, rencontré le même succès. 


Girl de Lukas Dhont avec Victor Polster et Arieh Worthalter (2018)

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