31 mars 2012

Les Adoptés

On accueille à nouveau Thomazinette, désormais habitué du blog, pour fusiller à bout portant le dernier film de Mélanie Laurent dans un article à lire "avec une pince à linge sur le nez", selon ses propres mots. Vos deux serviteurs n'ont pas eu le courage de s'infliger le bébé de Mélanie Laurent et sont heureux de laisser la place à leur acolyte, qui s'en charge avec brio :

Dans l'élan masochiste du dernier article du blog sur Mélanie Laurent (Je Vais bien ne t'en fais pas), j’ai maté Les Inadaptés, de la seule façon dont on peut mater ce film, c'est-à-dire de loin et en avance rapide. J'ai passé la durée du film le nez plongé dans le manche d'une guitare, à gratouiller trois accords pour couvrir le bruit, relevant de temps à autre la tête pour mieux la détourner à nouveau.


Lorsqu'on lui demande la définition de l'égoïsme, M.L. répond : "Un égoïste, c'est quelqu'un qui ne pense pas à moi !"

Premièrement, et pour laisser tout de suite derrière soi les questions épineuses de propriété intellectuelle, je tiens à faire remarquer que ce film est un cas sans précédent de « plagiat de plagiat », et cela à deux reprises. Je laisse les juristes s’arracher les cheveux là-dessus, je leur laisse le soin de rabibocher la loi face à ce cas complètement hors-norme, et me cantonnerai au rôle de « whistleblower », du troufion qui indique la faille puis se barre en se tapant les mains. D’une part, une des protagonistes est libraire et se fait draguer éhontément par un illettré réfugié dans sa tanière de papier pour soi-disant éviter la pluie. Cette scène est un plagiat de Mes amis mes amours, film qui a lui-même plagié Coup de foudre à Notting Hill. D’autre part, cinq minutes après cette première rencontre, les deux protagonistes ont bien évidemment déjà fait l’amour pendant toute une nuit. On pourrait penser à un plagiat de Les Bien-aimés, puisque ce dernier film est une partouze géante où les amorces d’occasions de pratiquer le sexe sont réduites au « string minimum ». Mais le plagiat est ailleurs, au réveil, où la libraire se croit délaissée et découvre en fait un jeu de pistes, concocté à l’aide de slips et de capotes, qui l’emmène depuis son plumard jusqu’à une table basse où il y a une lettre. Vous aurez reconnu le plagiat, c’est bel et bien Amélie Poulain qui nous est douloureusement donné à revivre, Amélie Poulain qui est lui-même un plagiat d’Alien 4, un « film-jeu-de-piste » où les pancartes sont remplacées par de la bave d’alien. Plagiats au carré donc pour Mélanome Laurent, doublés d’un auto-plagiat de Jean-Pierre Jeunet, qui s’était attaqué lui-même en justice il y a quelques années, et avait réussi l’exploit de perdre à la défense comme à l’accusation. Mais je m’égare et il y aurait légitimement lieu de se paumer dans la généalogie de toutes les « inspirations » de Les Adoptés, tant il est perméable à tout ce qui se fait de pire en cinéma – et quand ce n’est pas ce qui se fait de pire, Mélenchon Laurent s’occupe avec aisance de bousiller l’idée, comme avec ce découpage artificiel en « chapitres » qui chacun s’attardent sur un des trois attardés peuplant le film.


Je ne m’attarderai pas non plus sur la nullité des rôles et des acteurs, qui vient contredire l’idée mathématique universelle selon laquelle « moins par moins donne plus ».

Disons qu’avec cette cueillette aux petits effets clipesques, Les Avortés s’inscrit dans une sale lignée de « films à gadgets », qui remplissent leurs nonante minutes en petites séquences de jouets dans le bain, de maquillage à la mousse au chocolat et autres cache-cache sous le bureau. Quand la première protagoniste se fait choper par une bagnole en sortant de sa librairie, l’effet est le même : oh, non, encore un de ces gadgets… range donc tes jouets Thierry Roland… Mais ce dernier gadget va durer les deux-tiers du film, le temps qu’il faut à cette libraire pour passer l’arme à gauche, et aux autres pour exposer leur égoïsme hystérique face à la situation. Si j'ai bien pigé c'est l'effet Donzelli, effet qui consiste à faire clamser un personnage duquel tous les autres tirent leur gloire en étant trop forts car trop soudés dans la mort du sacrifié – alors qu’ils passent exclusivement leur temps à soit 1) se plaindre, soit 2) avoir la classe parce qu’ils ont arrêté de se plaindre. Passons outre le fait que ce type de comportements inscrit quant à lui Les Trépanés dans la lignée des films hystériques comme Et soudain tout le monde me manque, où la moindre attention donnée à quelqu’un, même à ton plus proche parent, est perçue comme un acte de bravoure infini pour dépasser ta petite personne, engendrant une dette irréparable pour son bénéficiaire, et donc une dispute. Maladie Laurent nous avait habitués à cela depuis belle lurette, et on encaisse la reprise tant bien que mal.


Ce gamin "trop mignon trop con" est un peu le spectateur fantasmé par M.L., qui voudrait qu'on accepte qu'elle nous tartine de merde en en redemandant !

Plus révoltant, il y a l’usage récurrent de ces personnages morts ou malades dans le cinéma des trentenaires français. Ça en dit long sur ce à quoi sont prêts ces cinéastes, appelés "nouvelle nouvelle vague", pour donner une bonne image d'eux-mêmes. Ils sont prêts à buter leurs plus proches amis, à faire sauter par dessus-bord leur propre mère s'il le fallait, pour ensuite jouer les endeuillés à toute épreuve qui ont tout vu tout connu et que ça a rendus sages. C’est la kénose à l’envers, c’est-à-dire que plus les gens meurent autour de vous, plus vous êtes entourés de défaillants dénués et de comateux irrécupérables, plus vous bénéficiez de leur sacrifice comme d’un regain d’aura personnelle. Ça fait un peu penser à Sarkozy l'endeuillé vis-à-vis des tueries de Montauban & Toulouse, c'est tout aussi gerbant, sauf que dans ces films, les ficelles sont en outre indubitablement tirées par ceux qui en retirent de la "gloire". Les Petits mouchoirs : Jean Dujardin crève et tout le monde en est glorifié (sauf François Cluzet) ; La Guerre est déclarée : le gamin survit mais il a beau en avoir chié, ce sont ses parents les héros ; Les Adoptés : la sœur crève après une agonie qui dure les deux-tiers du film, et la plus forte c'est Mélanie Grosland, actrice de son propre film, personnage irréprochable de connerie, petite fille de trente ans qui rétrécit sur elle-même au lieu de penser à ce qu'elle est en train de faire, et qui reproduit spontanément, disons même innocemment, les horreurs qui sont véhiculées autour d’elles.


Les Adoptés de Mélanie Laurent avec Mélanie Laurent (2011)

26 commentaires:

  1. VU aussi. Je dirais plutôt SUBI :(

    J'ai rarement vu autant de clichés réunis dans un film. Plus tard, cette "oeuvre" sera diffusée dans les écoles de cinéma pour apprendre aux étudiants ce qu'il ne faut surtout PAS faire. C'est abyssal de niaiserie, de nullité et d'indigence.

    Maintenant il faut arrêter, passer à autre chose. Quelque chose de non médiatique, pour le bien de l'humanité. Merci d'avance.

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    1. Tu t'adresses à qui dans ton dernier paragraphe ? :)

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    2. A Mélanie bien sûr, à Mélanie ! Je suis sûr qu'elle nous lit.
      Je lui réitère un vieux conseil : devenir potière dans la vallée d'Aspe dans le petit village d'Accous. Ca permet d'aller faire des jolies balades au pied des pics majestueux des Pyrénées et d'admirer les parapentistes et au deltaplanois. Ca la ressourcera, lui fera un bien fou, lui changera les idées et la rendra moins égoïste.

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    3. Un conseil plein de bon sens :D

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  2. Joli.

    J'aime particulièrement la légende de la dernière tof. :D

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  3. Vu également, et cet article d'anthologie me venge (NOUS venge) de ces quatre-ving dix minutes perdues devant cette niaiserie fourrée à l'égotisme, gros spot de pub "auteurisant" - forcément - farci de jolis flous et de décadrages mignonnets. Et pour quelle cause "Les Adoptés" fait-il campagne ? Un parfum, un chocolat, une assurance auto (ou scooter) ? Mais pas pour Mélanie et ses manies, pour Mélanie et ses amis, pardi.

    La légende de l'image 3 est énorme :D

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  4. Merci Thomazinette d'avoir pris une balle pour nous tous !

    Je te lève mon verre ;)

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  5. Cette jeune femme imbu d'elle-même mérite le fouet !

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  6. Encore un film qu'on m'a invité à aller voir en avant-première (c'est le cas pour tous les films de Mélasse laurent) et que j'ai évité comme la peste.

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    1. Heureux toi qui as la possibilité de vider un siège de ses avant-premières et qui l'emploies à bon escient !

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  7. Quel film de merde !

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  8. Article simpliste denué de toute objectivité, c'est bien dommage.

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  9. J'aime bien la note que se trimballe ce film sur Rate Your Music grâce à nous, Thomaziz' :D

    http://rateyourmusic.com/film/les_adoptes/

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    1. ça fait plaisir à voir et il l'a pas volée !! :-)

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    2. Merci pour le geste Poulpard :D

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  10. Même si l'on admet que Les Adoptés est un concentré de clichés, qu'il est niais, simpliste et totalement dénué d'intérêt, cette critique, certes bien écrite, est je trouve encore un niveau en-dessous du film, ne serait-ce que parce que dès le deuxième paragraphe elle est complètement discréditée.

    Comment peut-on se permettre d'émettre une critique - qu'elle soit positive ou négative - sur un film que l'on a regardé "de loin et en avance rapide", "le nez plongé dans le manche d'une guitare", "relevant de temps à autre la tête pour mieux la détourner à nouveau".

    Même si le film est "nul", la seule façon dont le film a été visionné pour en rédiger la critique est profondément irrespectueuse, et je trouve cela parfaitement inacceptable.

    Et c'est sans compter sur le fait que votre avis sur le film était de toute manière connu d'avance de par votre vision extrêmement négative de Mélanie Laurent - ce qui est votre droit mais ne vous donne pas celui d'émettre une critique vis à vis d'un de ses films sans même l'avoir réellement vu.

    Enfin, un film niais et bourré de clichés n'est pas forcément un mauvais film dénué d'intérêt. Le but du cinéma est de divertir et de procurer des émotions. Cela ne vous plaît peut-être pas, mais tout le monde ne se diverti pas en regardant des chefs d'oeuvres. D'ailleurs, aimer un navet n'empêche pas d'aimer un chef d'oeuvre.

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  11. Même si l'on admet que Les Adoptés est un concentré de clichés, qu'il est niais, simpliste et totalement dénué d'intérêt, cette critique, certes bien écrite, est je trouve encore un niveau en-dessous du film, ne serait-ce que parce que dès le deuxième paragraphe elle est complètement discréditée.

    Comment peut-on se permettre d'émettre une critique - qu'elle soit positive ou négative - sur un film que l'on a regardé "de loin et en avance rapide", "le nez plongé dans le manche d'une guitare", "relevant de temps à autre la tête pour mieux la détourner à nouveau".

    Même si le film est "nul", la seule façon dont le film a été visionné pour en rédiger la critique est profondément irrespectueuse, et je trouve cela parfaitement inacceptable.

    Et c'est sans compter sur le fait que votre avis sur le film était de toute manière connu d'avance de par votre vision extrêmement négative de Mélanie Laurent - ce qui est votre droit mais ne vous donne pas celui d'émettre une critique vis à vis d'un de ses films sans même l'avoir réellement vu.

    Enfin, un film niais et bourré de clichés n'est pas forcément un mauvais film dénué d'intérêt. Le but du cinéma est de divertir et de procurer des émotions. Cela ne vous plaît peut-être pas, mais tout le monde ne se diverti pas en regardant des chefs d'oeuvres. D'ailleurs, aimer un navet n'empêche pas d'aimer un chef d'oeuvre.

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    1. Étant l'auteur de cette chronique, responsable de cette tranche de vie passée devant l'écran, je me sens tenu de te rendre des comptes.
      Pour l'argument du manche de guitare, je tâcherai de le neutraliser en citant Pascal :

      "Si on est trop jeune on ne juge pas bien,
      trop vieil de même.
      Si on n'y songe pas assez, si on y songe
      trop, on s'entête et on s'en coiffe.
      Si on considère son ouvrage incontinent après l'avoir fait
      on en est encore tout prévenu, si trop longtemps après
      on (n') y entre plus.
      Ainsi les tableaux vus de trop loin et de trop près.
      Et il n'y a qu'un point indivisible qui soit le véritable lieu.
      Les autres sont trop près, trop loin, trop haut ou trop
      bas."

      Pour moi, ce point indivisible a été le manche de guitare.

      Pour le reste, je trouve qu'on est d'accord sur pas mal de points, et je te remercie de ton commentaire !

      Thomazinou

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  12. apres avoir lu cette critique, je ne vais certainement pas aller voir ce film.

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  13. Je trouve cette critique d'une violence inouïe. Mélanie Laurent signe son premier film, ce qui devrait déjà susciter de l'indulgence. Après qu'on aime ou qu'on n'aime pas (ce qui a été mon cas), il n'est en aucun cas nécessaire de fustiger l'artiste en l'affublant de sobriquets dégradants et en critiquant sans une once d'humanité le résultat de son travail. D'autant que comme vous l'avez dit vous même, vous avez survolé le film sans vraiment le regarder... Je trouve terrible d'insulter ainsi les artistes (oh et ne marchandez pas sur l'usage du terme artiste en arguant que ML n'en est pas une; la définition du mot en lui-même vous contredirait. Vous n'aimez simplement ni le personnage ni son oeuvre). Et votre critique est si acerbe qu'elle devient insultante même pour ceux qui pourraient être charmés par ce film. Je trouve dommage qu'une jolie plume comme la vôtre soit au service d'un article aussi aigre, ouvertement méchant, et sans une ombre de délicatesse. C'est tellement facile de critiquer aussi méchamment, qui ne le pourrait pas? Ce qui me fait doucement sourire, c'est que les premiers à taxer ML et consorts de néo-bobo prétentieux parisiens mytho-intello sont ceux qui démontent avec persistance le cinéma populaire juste parce qu'il n'est pas porteur d'une grande idée philosophique et qu'il est à la portée de tous, et qui ont besoin d'une sacrée dose de masturbation intellectuelle pour trouver un peu de plaisir au cinéma, à croire qu'il n'y a que de cette façon qu'ils arrivent encore à nouer avec ce concept...

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    1. T'as raison, j'ai succombé à l'exercice trop répandu et stérile du dénigrement, du latin denigrere, qui veut dire noircir, teindre en noir, salir le tableau, pester sur quelqu'un et lui saloper ses baskets. On se salit soi-même en participant à ce sport national, je suis bien d'accord, on n'en sort pas purgé, je l'admets, on a plongé les mains jointes dans la mélasse. Je note toutefois qu'étymologiquement, Mélanie veut aussi dire noire, en grec cette fois-ci. Il y a donc un juste retour des choses à dénigrer Mélanie Gros-flancs. C'est pas un argument du tout mais ça fait bien de le dire.
      Je me console en tout cas avec l'idée que ça pourra éviter à des gens qui auraient comme moi vomi ce film s'il l'avaient vu, de ne pas avoir à le faire. Alors oui, je participe à couler le film, je le tacle pour qu'il n'aille pas plus loin, mais ça relève pour moi du respect de l'artiste de dire publiquement ce que son boulot inspire aux âmes, et l'avenir qu'on lui souhaite, que ça soit positif ou négatif.

      Je tiens à préciser que si je trouve ce film prétentieux, je ne le trouve à aucun moment intelligent, bien au contraire.

      Et les appels à la clémence, ainsi qu'au jugement selon les critères propres à la catégorie des films "inoffensifs et divertissants", sont selon moi bien plus irrespectueux envers l'artiste, dès le moment où celui-ci arbore quelque prétention (dont Malaria Laurent ne manque pas), ET envers le cinéma, dès lors qu'on lui assigne une tâche qu'un feu de bois pourrait suffire à exécuter.

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  14. Pour appuyer le propos de mon dernier paragraphe, la responsable de ce film admet en interview que la morale de son grand-œuvre est que pour se séparer de sa famille, pour jouir de son indépendance, il ne faut pas hésiter à éliminer ceux qui s'accrochent trop, du genre les sœurs, les enfants, les mères, tout ce qui gêne. Là c'est tombé sur la sœur, mais ça aurait pu être vous les enfants ! Faut pas hésiter à ramasser le pactole de gloire, la "palme d'endurance" au passage, ajouterait-elle presque. Pas si innocente que ça sur son boulot la folle ! Va relire Moïse hé !

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