5 juillet 2021

Sans un bruit 2

Sans un bruit 2
s'ajoute à la trop longue liste de ces titres qui, dans leurs versions françaises, passent assez mal à l'oral avec l'ajout d'un chiffre au titre initial : je pense au fameux cas Blade 2 déjà évoqué ici, à la saga Saw, très problématique passé l'épisode 5, et au plus méconnu mais encore plus disgracieux direct-to-video Troie 3 – et défaite aux tirs au but contre la SUISSE, que tout le monde veut chasser de sa mémoire. Sans un bruit de...? De pet ? On nous incite donc à évoquer auprès de la charmante ouvreuse de notre cinéma favori un pet silencieux mais très odorant ? Ceci dit, ce titre abscons n'est pas le plus gros handicap de cette suite qui m'a tout de même parue moins insupportable que l'original. Ça tient à peu de chose, une seule en réalité, et je sais que je n'ai pas un regard tout à fait objectif sur ce machin-là. Je n'aime pas les films d'horreur pop-corn, si grand public, c'est antinomique. J'ai une dent contre ces purs produits de conso conçus pour les ados et réalisés par des guignols opportunistes. Entre John Krasinski et moi, c'est viscéral, le courant ne passe pas. Ou ne passe plus, car je le trouvais tout à fait à sa place, sympathique, presque mignon, assis derrière son bureau, dans The Office. Mais depuis, il a enchaîné les développés couchés, il a pécho Emily Blunt, il a joué au petit soldat chez Michael Bay, il a explosé le box office, bref, il a pris le melon gravos, et ça suinte à présent de tous ses pores. Son souci, c'est qu'il s'était sacrifié en héros à la fin du premier opus, et qu'il ne pouvait donc plus apparaître à l'écran dans cette suite directe. Il était coincé.
 
 
 
 
Après quelques nuits blanches à se creuser la tronche, il a trouvé la parade pour nous faire de nouveau subir sa grosse tête d'idiot du village en démarrant son film par un long flashback qui nous raconte le premier jour de l'invasion d'aliens aveugles tel que l'a vécu sa petite famille. Un dimanche lambda où ils étaient tous allés assister amoureusement au match de baseball de l'aîné. C'est qu'il en faut de l'amour pour se taper ça. C'est interminable et le gosse est une véritable brèle. Heureusement les choses finissent par se gâter, l'occasion pour Krasinski de se prendre encore une fois pour une vedette d'action et d'en faire des caisses dans des postures déjà vues et revues des milliards de fois dans les pires bande-annonces de films catastrophes ou d'invasion extraterrestres où des américains débiles regardent tour à tour, impuissants, la menace débouler droit sur eux. Je dis ça, mais cette introduction constitue peut-être le meilleur moment du film, ou en tout cas le plus prenant. Après ça, on revient dans le présent du récit et l'on retrouve notre petite famille de survivants, chapeautée par la seule Emily Blunt, de nouveau réduite à dire "chut !" à ses cons de gamins pendant 80 minutes (la qualité principale du film : sa courte durée, mais c'est déjà beaucoup quand on a rien à raconter). Se sentant visiblement un peu seuls depuis la mort tragique du saint père, ils décident d'aller à la rencontre d'autres rescapés. Et c'est ainsi qu'ils atterrissent dans la vieille usine désaffectée pourrie où Cillian Murphy, habitué à jouer les derniers survivants (28 jours plus tard, Retreat) grâce à son élégant profil de pithécanthrope, a décidé de passer le restants de ses jours à attendre, oklm. Ouf, un nouvel homme fort est là pour protéger les plus faibles ! Ayant trouvé le talon d'Achille des aliens (les sons basse fréquence et tout ce qui est larsens ou grésillements – ils sont un peu comme oim), la gamine muette de la tribu décide de son propre chef de partir à l'aventure pour faire goûter aux envahisseurs le plaisir collectif des ultrasons grâce à une diffusion sur cette fréquence radio que d'autres humains utilisent depuis une île...


 
 
Disons-le tout net : Sans un bruit 2 est un épisode de transition où il ne se passe quasiment rien d'intéressant. On est souvent plus proche du jeu vidéo que du cinoche, avec des personnages réduits à leurs maigres attributs distinctifs qui parcourent un monde post-apo archi rebattu, envisagé comme une série de niveaux à dépasser. Mais c'est dans l'air du temps, c'est ce qui plaît actuellement. On repense aussi à l'adaptation de La Route, en moins glauque toutefois, et ce n'est pas là un compliment tant plus personne aujourd'hui n'aurait envie de se replonger dans le film faisandé de John Hillcoat. On a ici droit à une succession de scènes répétitives, au montage alterné systématique, où John Krasinski essaie laborieusement de faire grimper notre trouillomètre en nous montrant les mésaventures simultanées d'individus tous plus teubês les uns que les autres (la palme revenant à l'aîné, qu'un piège à loups ne suffit pas à rendre moins remuant). Les créatures, crachats de CGI ambulants, sont toujours aussi mal conçues et foutent toujours aussi peu les j'tons. Sans idée d'écriture ni de mise en scène, Krasinski nous ressert son beau discours sur la famille. Chaque génération est donc prête à se sacrifier l'une pour l'autre, les enfants finissent par prendre les armes sous les regards admiratifs de leurs parents lors d'un final mollasson qui annonce évidemment un troisième chapitre. Cela plaira sans doute à ceux qu'un rien satisfait, aux spectateurs peu regardants qui avaient déjà passé un bon moment devant le premier. Et si j'ai de mon côté moins souffert, je l'admets, cela ne tient donc qu'à une chose, comme je le disais plus haut : on se tape cette fois-ci la vieille ganache de John Krasinski durant seulement 10 minutes au lieu de 80.


Sans un bruit 2 de John Krasinski avec Cillian Murphy, Noah Jupe, Millicent Simmonds, Emily Blunt et tout de même John Krasinski (2020)

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