On souligne toujours la "performance" de ces films qui donnent la part belle aux enfants ou aux animaux. La millième adaptation de Belle et Sébastien réunit ces deux gageures, et on l'en félicite en l'applaudissant des deux mains. Mais des deux bestiaux, disons-le, l'un est tout de même plus facile à manœuvrer que l'autre. On veut bien évidemment parler du clebs, puisque qu'il en existe des wagons, autant de Sébastien interchangeables à souhait. C'est le truc à ne pas dire pour ne pas faire retomber la magie du film, surtout aux yeux des gamins qui raffolent de ce genre de contes humanistes. Dès qu'on leur avoue que ce chien des quais qu'ils ont tant adoré n'était jamais le même à chaque contrechamp, et que le réalisateur devait composer avec toute une portée de clébards identiques, choisissant toujours le premier à avoir vidé sa gamelle pour le propulser devant la caméra à l'aide d'un grand coup de pied au cul, les enfants ont envie de crever. Tout l'intérêt du film s'estompe en effet, on leur a menti, on les a trompés, on les a pris pour des cons.
Nicolas Vanier, aka "Nicolas Vanilla Sky", sur le plateau du film, en compagnie de Sébastien 1, Sébastien 5, Sébastien 7, Sébastien 4, Sébastien 2, Sébastien 3, Sébastien 6 et Sébastien 18.
A ce petit jeu-là, seul Annaud, Jean-Jacques Annaud, est resté droit dans ses baskets, portant Bart the Bear au pinacle dans L'Ours. Bart the Bear n'est autre, rappelons-le aux plus jeunes, que l'ours éponyme du petit chef-d’œuvre d'Annaud, un bestiau unique en son genre et fringuant tous les matins. C'est aussi le dernier grizzly d'Europe, qui a assisté à la mort de sa mère pour les besoins du spectacle, et qui nous a livré à cette occasion l'un des regards-caméra les plus troublants de l'histoire du cinéma. Bart the Bear a ensuite traversé l'Atlantique à la nage pour assiéger Hollywood, vaisseau-mère de l'industrie du 7ème Art, afin de révéler au monde l'horreur de ces élevages en masses de clones animaliers destinés à se partager le devant de la scène dans tous ces films vendus aux enfants naïfs. Bart, à cette occasion, a brisé ses chaînes et fait irruption sur le plateau du film A Couteaux tirés (At a arm left) pour niaquer Sœur Anthony Hopkins, dont il avait peu goûté la prestation minable en Van Helsing dans le Dracula de Coppola, adapté de son roman de chevet. Par chance, Lee Tamahori, réalisateur de son état, était là, caméra au poing, œilleton vissé au front, et a capté la scène pour ensuite construire un film autour de cette image-choc.
Sur ce cliché, Sébastien 3, après une rude journée de tournage, prépare déjà le spin-off du film, annoncé pour 2016. On peut déjà voir que deux futurs Sébastien seront mis de côté à cause d'un mince défaut de pelage à la naissance du zob, et seront abattus puis dépecés. On ne gardera d'eux que leur pelage qui, même imparfait, servira à l'isolation des murs d'un orphelinat. La peau de Berger des Pyrénées est un isolant inflammable de première qualité que le jeune public du film sera ravi d'avoir dans ses murs.
Pour revenir au film, Belle et Sébastien est donc beaucoup moins honnête et puissant que n'importe quel Annaud. D'ailleurs, en passant, procurez-vous toute sa filmo, ses neuf films, et surtout l'avant-dernier, Sa Majesté Minor, l'Annaud de pouvoir, parce qu'il faut se l'enquiller, faut se le foutre au doigt sans verser la larme, un Annaud pour les gouverner tous, un Annaud pour les trouver, un Annaud pour les mater tous et dans les ténèbres les lier, et pour être invisible en soirée aussi, parce que si vous avez l'intégrale d'Annaud à la maison vous êtes certain d'être poliment ignoré même à domicile. En parlant de Jean-Jacques Annaud, on notera la présence au casting de Tchéky Karyo, son acteur fétiche, venu sur le plateau du nouveau film de Nicolas Vanier entre deux gardes-à-vue pour stationnement sur passage clouté, et qui incarne ici l'abominable bonhomme des neiges sans maquillage. L'acteur a sans doute accepté le rôle avant qu'un réalisateur ne soit appelé à la rescousse suite au refus de l'auteur de La Guerre du feu, que Tchéky vénère et qu'il appelle "Le Nécromancien". Un mot sur Belle quand même, la gamine du film, qui quant à elle a passé du bon temps sur le tournage, à cheval sur le dos de Séb', qu'elle appelait "Bastien" quitte à systématiquement faire tressaillir toute la meute de clébards du film. La petite Belle, avare en images chocs mais gourmande en DéliChocs, de Delacre, est assez masculine d'aspect et rend donc peu hommage au prénom de son personnage, tout comme son prédécesseur, Mehdi El Glaoui, qui a bien vieilli mais qui joue dans le film. C'est le problème de toutes ces filles qui s'appellent Linda ("bonne" en portugais), sauf qu'ici le contraste est encore plus saisissant entre le sens du prénom et l'horreur de ce gosse recouvert de poils blancs et cavalant à quatre pattes dans la neige.
Belle et Sébastien de Nicolas Vanier avec Félix Bossuet, Tchéky Karyo, Margaux Chatelier et Mehdi El Glaoui (2013)
(enculé de blogspot)
RépondreSupprimerDans le très beau film El Perro aka The Dog aka Very Bad Chien aka Piecek, le rôle du dogue argentin n'est joué que par un seul clebs, dont le nom apparait au générique de début (Il s'appelle Gregorio en "civil"). Grand acteur, il est capable de jouer sans rechigner le chien timide, agressif, sérieux (ou plutôt, le chien qui sent bien que c'est sérieux donc qui essaye de se tenir à carreaux). C'est magnifique. Et c'est lui le vrai acteur du film, les autres acteurs ont leur nom normal dans le film! Ce n'est que justice
Depuis je ne veux plus des films avec plusieurs chiens différents pour le même rôle. Quand un acteur meurt, le remplace-t-on par un autre? Le frère de Paul Walker est pressenti pour reprendre le rôle dans Fast and Furious. Considère-t-on le papouilleur de husky d'Antartica comme un des leurs? Ca serait finalement lui rendre un bien plus bel hommage, car dans ce monde de chiens, les Canis Lupus sont bien la dernière part d'humanité. Fidèle, pas fourbe, à l''écoute...
J'ai pas vu le film
Tu as bien raison, Vincent !
SupprimerJ'aurais aussi dû citer le beau Bombon El Perro en contre-exemple dans cette critique !
Un superbe rôle de clébz dans le premier long-métrage de Guillaume Brac, un chienbard mélancolico-poète. Vous allez kiffer ! Moi j'ai aimé.
SupprimerC'est pas bien de tuer le mythe :-(
RépondreSupprimer"Un Annaud pour les gouverner tous, un Annaud pour les trouver, un Annaud pour les mater tous et dans les ténèbres les lier"
:D :D :D :D :D :D :D
Sébastien => Glaoui !!!!???
RépondreSupprimerLe monde ne tourne pas rond, et la preuve n'est ni dans des équations (je dis ça pour Nico Cagé) ni dans un nombre finissant par trois (je dis ça pour Jim Triangle Rectangle) mais dans la révélation ci-dessus.
Je suis fatigué.
Comprends pas... "Belle" c'est le nom du chien, je crois... Sébastien, c'est le petit garçon, non ? J'ai dû louper un trait d'humour ou je ne sais quoi dans l'article (j'espère)...
RépondreSupprimerC'est comme pour Boule et Bill, le gamin c'est celui qui a un prénom de chien !
SupprimerBill et Sébastien ? Je comprends rien...
SupprimerC'est bizarre parce que dans TV 2 semaines, ils disent qu'il n'y a qu'un chien, et que le gosse a vécu 6 mois en autarcie avec lui, pour qu'ils apprennent à se connaître, Actors Studio style!
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