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1 mai 2023

John Wick : Chapitre 4

Nous laissons aujourd'hui la parole à Julien F. aka MythSciences et Tristan G. aka Turlog's Production, deux jeunes fans de John Wick issus des quartiers chauds d'une ville du sud de la France qu'on ne citera pas mais que les médias nomment souvent "the French Detroit". Un lien familial assez direct nous oblige à les laisser s'exprimer tout en respectant et en acceptant leur regard sur un film que nous finirons sans doute également par regarder mais dont nous n'avions pas prévu de tant faire l'éloge...
 
Une séance riche en émotions et en frissons. Que dire ? Nous sommes définitivement sur le cul. Ce John Wick Chapitre 4 est la digne succession d'une trilogie déjà mythique.

Nous commençons dans le désert, assez dépaysé, en ne sachant pas tellement ce qu'on fait là. Cette introduction est une suite directe à John Wick : Parabellum. Mais il faut dire que quatre ans après, difficile de joindre les deux bouts. Fort heureusement, ce passage sera de très courte durée et on remarquera cependant le petit clin d'œil à la dinguerie Lawrence d'Arabie


John Wick dans le désert, faisant le point sur sa vie. Le personnage est encore incarné par Keanu Reeves.
 
Tout d'abord, il faut impérativement parler de la photo du film, absolument magnifique. Les couleurs sont travaillées et recherchées, avec des mélanges de lumières naturelles, néons et  lueurs de type LED judicieusement planquées et orientées. Ce John Wick 4 a une aura particulière et unique au sein de sa propre saga. Nous sommes plongés dans une ambiance cyberpunk en osmose avec des références westerns que l'on pourrait retrouver sur les étagères de Papi et Mamie. Cet opus nous offre des curiosités visuelles et de nombreux détails dans la lignée des précédents épisodes qui nous proposaient déjà un univers mettant à l'honneur des objets physiques uniques à la saga : pacte de sang, pièces du Continental, pièce du Prédicateur. Nous avons droit cette fois-ci à des armures de samouraï modernes stylisées qui vont donner du fil à retordre à notre bon vieux John lors de son séjour au Continental d'Osaka... A ce propos, ce Continental est une vraie réussite : les décors montés de toutes pièces sont sublimes et nous donnent directement envie d'y séjourner lors de notre prochain voyage au pays du soleil levant. 
 
 
Il se fait pisser dessus plus tard dans le film, ce qui nous a cloué le bec. On ne sait toujours pas qui est cet homme.
 
Le directeur de ce Continental nippon a un charisme fou, ce n'est pas compliqué : il est le Samouraï rêvé à poil sous son kimono. Hiroyuki Sanada dans son personnage de Koji Shimazu a la classe, il maîtrise parfaitement le sabre et nous sommes subjugués de la façon dont il transforme ses ennemis en sushi ou en origami selon les scènes. D'après ses dires "Une belle mort arrive après une belle vie" et on est persuadé qu'il a eu une tendre et heureuse existence lorsque l'on assiste à son dénouement. Sa fille, Akira Shimazu, nous a conquis : elle est incarnée par la délicieuse Rina Sawayama, qui apparaît ici dans son premier long métrage de fiction (hors sextapes et autres vidéos de famille). C'est une déesse de l'arc tout comme notre amie numérique Lara Croft et elle aussi rend hommage à ce matériau élastique élaboré par transformation d'un suc végétal qu'est le latex. Elle nous a particulièrement captivé lorsqu'elle grimpe avec ses lames sur un bonhomme à forte corpulence qui vit là le meilleur moment de sa vie (et hélas le dernier).    


Le daron et sa fille, ici dans leurs tenues traditionnelles, la classe à la japonaise. Pour info, nous sommes allés voir le film dans le même accoutrement.

Keanu Reeves, dans la force de l'âge, nous fait toujours autant rêver. Il nous offre une version encore plus sombre et violente du personnage qu'il incarne : Jonathan Wick. Force est de constater que son jujitsu et son judo s'améliorent, contribuant largement à nous offrir 2h50 de pur plaisir visuel. Il maîtrise de nouvelles armes tels que le nunchaku ou encore un fusil avec balles au phosphore... Les scènes de fight sont à couper le souffle, chacune résulte d'un long travail de chorégraphie qui nous procure un sentiment de jubilation. On aurait presque envie de participer à cette boucherie tellement c'est satisfaisant.


Keanu à Paris... Nous aurions bien voulu le rencontrer et lui demander de nous faire un enfant.

Nous avons droit à plusieurs antagonistes : le principal est campé par Bill Skarsgård, acteur que nous avions croisé en clown dans Ca, qui va ici vous donner l'envie de l'étriper avec son personnage imbuvable du Marquis de Gramont (un gosse pourri gâté qui sous-estime le personnage éponyme de la franchise). Le second, et pas des moindres, est le fameux Killa qu'on retrouve à Berlin. Killa va s'avérer être un ennemi de taille, et va faire virevolter notre Jonathan. Scott Adkins, 1 mètre 79, nous offre une prestation excellente dans une scène de poker très tendue. Celle-ci va aboutir à un fight des plus épiques avec des clins d'œil au chapitre numéro un dans le Red Circle Club (la boîte de nuit/bordel fréquentée par les tueurs solitaires en quête de compagnie). Durant cette scène de combat, il y a de nombreux SFX mis en avant par les 12 images par seconde, nous montrant une fois de plus la technique et le travail abattu en post prod. Des ralentis lorsque Killa met des coups à John Wick rendent la scène d'autant plus impressionnante et dur à vivre pour un supporter de Keanu Reeves. Malgré son animosité, Killa est un personnage qui nous a beaucoup amusés ; notamment en raison de sa Ventoline en or qui symbolise son immortalité : il l'utilisera jusqu'à son dernier souffle.


Le Marquis : un guignol pur jus qu'on déteste et qu'on aimerait défoncer. L'image est floue car cette scène est floue.

Notre majordome préféré paye le prix fort son professionnalisme et sa loyauté dans une scène touchante et tragique. On a eu les poils qui se sont hérissés, et notre haine envers cet impitoyable Marquis s'est terriblement envolée. Petit hommage au si regretté Lance Reddick qui nous a quittés il y a quinze jours, rendant ce passage d'autant plus riche en émotion : Lance, ta prestance n'avait d'égal que ton talent, tu as marqué au fer rouge la saga, tu es dans nos cœurs cet éternel gentleman dont l'étoile ne pâlira jamais.
 
 
RIP la légende. Lance Reddick. On reste solennels pour cette légende car nous éprouvons un immense respect pour cet acteur hors pair.
 
Il faut également que l'on parle de Donnie Yen dans le rôle de Caine. L'acteur, connu pour ses prouesses en art martiaux et ses talents de cuistot, ne vas pas y aller de main morte. En dépit de sa cécité, l'ami de John Wick est violent et méthodique. Sa rage placide et son calme intérieur transparaissent de chaque plan et nous laisse dans un état de pitié : cet homme souffre en silence et nous y croyons grâce à la prestation d'un comédien qui a trouvé rôle à son pied. 
 
 
Comme le prouvent les lunettes : cet homme est aveugle. Comme le prouve le flingue : il est armé. Comme le prouve la canne : il ne sait pas se diriger.

 Parlons maintenant de Shamier Anderson, aka the Shrimp la Crevette, dans son rôle de Mister Nobody accompagné de son malinois (Noisette ?). Il fera un pacte avec le Marquis de Gramont que celui-ci ne respectera pas (c'est décidément un SALOP). Monsieur Personne va vagabonder tout au long du film, agissant comme un "ange gardien" pour John tout en voulant toucher sa prime de 40 millions de dollars. C'est véritablement un cowboy solitaire largement inspiré de l'univers western de Papi et Mamie précédemment évoqué, il agit tel un chasseur de primes sans vergogne. Il est équipé notamment d'une carabine type Winchester ainsi que d'un sac à dos déployable en gilet pare-balles, qui est on peut le dire très ingénieux et que nous comptons aller nous dégotter à Décathlon, au rayon tentes. Un peu plus tard, on retrouvera une scène comique où le malinois urine sur la tête d'un ennemi mort, qui avait auparavant essayé de le tuer. Ce Mister Nobody aime la bière, on ne vous en dit pas plus !
 
 
Deux majestueux profils au soleil couchant : ce quatrième John Wick est un poème visuel.

Cerise sur un gâteau bien copieux : on a le bonheur de retrouver Laurence Fishburne dans son rôle du Roi de Bowery. La complicité entre les deux acteurs, qui entretiennent une relation d'amour platonique depuis Matrix, suinte littéralement de l'écran, à tel point que nous sommes parfois un peu gênés. L'apparition de Fishburne est brève mais parsemée de cet humour cher à l'acteur facétieux, si apprécié des plateaux de ciné. Il va aider notre héros dans sa quête de justice en lui fournissant un flingue de la plus grande qualité et un nouveau costume parfait pour les rendez-vous galants. Un véritable rayon de soleil.
 
 
Rencontre au sommet station Porte des Lilas : nous aurions TOUT donné pour sortir malencontreusement du métro à ce moment-là.
 
Chaque scène de fight est accompagnée d'une bande originale dynamique et parfaitement coordonnée. Pas de surprises à ce niveau-là, c'est du pur John Wick : EDM, phonk et rock épique. Cette BO nous offre également des remix des opus précédents. Vous la retrouverez facilement sur Spotify dans les playlists créées par les internautes conquis.


Scott Adkins, méconnaissable dans sa "fat suit" : on parle d'un Oscar pour cette performance saisissante.
 
La troisième partie se passe dans notre capitale bien-aimée. C'est en effet à Paris que John Wick va terminer sa course pour en finir avec le Marquis. La chasse à l'homme se poursuit dans la capitale, et plusieurs scènes impressionnantes vont s'y dérouler. Au menu des réjouissances : une scène en voiture extraordinaire sur la Place de l’Étoile. On notera ensuite un long plan-séquence avec une prise de vue zénithale, où notre John Wick va utiliser un fusil à balle incendiaire. La scène, rythmée et particulièrement bien réalisée, nous fait penser au jeu vidéo Hotline Miami (que l'on vous recommande chaleureusement).


La fameuse Mustang que nous enviions dans le premier film sert ici de bouclier pare-balles.

John Wick va finir sa course au Sacré-Cœur et là, des escaliers n'auront jamais été aussi compliqués à monter... Ces multiples cascades dans les escaliers nous montre encore une fois les risques pris par des cascadeurs surdoués qui ont encore accompli un travail exceptionnel. La scène finale nous attend au sommet des légendaires marches plus vraiment immaculées. Volontairement minimaliste, le dénouement prend la forme d'un duel de cowboys au pistolet qui ravira de nouveau Papi et Mamie… On regrettera toutefois un couché de soleil très artificiel obtenu sur fond vert : il rend la scène moins réaliste et moins poignante que ce qu'elle devrait être…


Cette scène tournée en studio dans l'Ontario est supposée se dérouler à Notre-Dame : on y croit.

Pour conclure, allez le voir tant qu'il est au cinéma car malgré une VF au ras des pâquerettes, l'expérience est à vivre sur grand écran pour une immersion des plus exquises. De nôtre côté, on compte même y retourner pour mieux vivre l'attente jusqu'à John Wick 5 avec espérons-le, de nouvelles idées qui, espérons-le, ne nous laisserons pas indifférents…
 
 
John Wick : Chapitre 4 de Chad Stahelski avec Keanu Reeves (2023)

5 novembre 2019

John Wick Parabellum

Bon, ils tirent un peu sur la corde là, non ?... Autant j'avais pu éprouver un certain plaisir régressif devant les deux premiers volets, autant j'ai trouvé celui-ci très long et laborieux. La saga John Wick tient à bien peu de choses. Nous ne sommes jamais très impliqués émotionnellement dans ces films portés par un acteur connu pour être un type en or en dehors des plateaux, et c'est tant mieux, mais aussi pour n'avoir qu'un jeu extrêmement limité devant la caméra, et il me semble que c'est d'abord ce qui nous intéresse. Son personnage est une feuille blanche, que nous ne voyons que survivre et tuer, une ombre invincible, dont la fin nous confirme ici qu'elle ne pourra jamais mourir ni montrer le moindre signe d'affaiblissement. Après une chute terrible et quelques balles dans le costard, Wick se relève, encore et toujours, pour la promesse de nouvelles aventures à venir (suite au succès toujours plus grand, un nouvel épisode est déjà prévu pour 2021). Un chien abattu, une voiture volée... on l'a compris, ce n'était que des prétextes débiles à un enchaînement de scènes d'action plus ou moins imaginatives et chorégraphiées avec soin. Si, dans le numéro 2, la gradation par niveaux, digne d'un véritable jeu vidéo et accompagnée d'une modeste mais bien réelle inventivité formelle, était très nette et parvenait à nous maintenir curieux grâce aussi à un univers qui s'enrichissait de manière plutôt intéressante, ici, c'est beaucoup plus pauvre et redondant. Ce Parabellum commence pile poil là où s'arrêtait le précédent, en nous replongeant immédiatement dans cet univers parallèle peuplé d'assassins désormais familier. Nous retrouvons un John Wick pris en chasse par tous les tueurs du monde dans les rues de New York qu'il parvient sans trop de souci à fuir pour trouver refuge chez une vieille connaissance et continuer sa marche mortelle.




Ne cherchez pas plus de justifications scénaristiques, même accessoire et minime, à ce déluge de balles et à cet empilement d'action : il n'y en a pas, ou bien le prétexte de respecter tel ou tel ordre idiot, par loyauté envers la bureaucratie bien établie qui gouverne ce petit monde d'assassins. L'univers de John Wick est encore enrichi mais, là aussi, dans un procédé facile et lassant de superposition. Nous apprenons ainsi qu'une institution nommée la Table Haute disposant, si besoin, de sa propre unité d'élite, est à la tête de toute cette organisation bien huilée, elle a notamment le droit d'intervenir dans la gestion des fameux hôtels Continental ; au-dessus de cette table règne un Grand Maître (interprété par Saïd Taghmaoui, cocorico !) qui, du haut de son pouvoir a priori absolu sur ses sujets, a tout de même choisi de vivre dans le désert avec quelques tapis persans pour tout confort. Bref, plus on en sait, moins on veut en savoir. Le film tente vaguement de légitimer ce jeu de massacre par un romantisme naïf quand Keanu Reeves délivre ce qui doit être son plus long dialogue : face au Grand Maître auquel il demande grâce, John Wick dit qu'il veut vivre encore simplement pour pouvoir continuer à se souvenir de l'être aimé. C'est beau, un peu de poésie dans ce monde de brutes... Après une si touchante déclaration, il lui est tout de même demandé de se couper l'un des doigts et de tuer son seul ami, le gérant récalcitrant du Continental de New York (Ian McShane, fidèle au poste) afin d'effacer son ardoise auprès de la Table Haute. C'est donc encore une loyauté stupide envers un système absurde qui justifiera tout le reste, à la poursuite d'une tranquillité dont on se demande bien à quoi elle peut ici rimer.




Face à un tel néant narratif, seule une grande prise de risque en termes de mise en scène pourrait justifier ces 131 minutes de fusillades et d'affrontements en tout genre. Le seul suspense réside là-dedans : que nous réservent-ils pour la suite ? Où et comment vont-ils se battre ? Et, surtout, comment cela va nous être montré ? Hélas, force est de reconnaître que les chorégraphies sont très répétitives et la caméra de Chad Stahelski particulièrement statique et en cruelle manque d'inspiration. Rien de très impressionnant, on s'ennuie, c'est toujours la même chose. Pour ce qui est des décors, on a droit aux jeux de miroirs et de reflets habituels, déjà présents et mieux exploités dans le deuxième opus. Quand un tel film peine autant à se renouveler, il essaie pathétiquement de trouver son salut par des innovations très terre-à-terre qui passent par des détails d'importance aux yeux de l'aficionado. C'est par exemple un chien, particulièrement attiré par les services trois pièces de ses ennemis, qui va jouer un rôle clé dans l'une des scènes. Dans le même registre, on essaie de diversifier les armes utilisées : c'est plutôt sympa quand John Wick use du sabre de samouraï pour couper en deux un adversaire, ou d'un gros livre pour en assommer un autre ; c'est en revanche très ridicule quand il se sert de chevaux pour administrer des ruades sur demande. Cela passe aussi par la diversité des engins empruntés pour se déplacer : un canasson justement, que John Wick chevauche en pleine ville et au milieu des voitures, ce qui nous rappelle Schwarzy dans True Lies lors d'une scène qui avait autrement plus de gueule. On a également droit à une courte course poursuite en scooter, un passage très nul puisqu'il n'y a pas de circulation, on a juste quelques guignols les uns derrière les autres sur leurs deux roues et notre héros décidément imprenable qui les fait voltiger ou les flingue les uns après les autres, de façon particulièrement surréaliste. Cette scène apparaît en outre comme une mauvaise redite du récent actioner sud-coréen The Villainess qui nous proposait exactement la même chose mais avec une toute autre énergie.




Cela passe enfin par la diversité des nouveaux opposants ou alliés. Ici, l'antagoniste principale, qui n'en vient jamais aux mains mais qui est bel et bien aux ficelles de tout ce bordel, est une adjudicatrice de la Haute Table campée par une actrice qui a vraisemblablement été choisie parce qu'elle se présente comme non-binaire. L'idée est a priori pas mauvaise, et il est vrai qu'il est presque étonnant de voir, dans un tel film, une femme totalement asexuée, qui ne nous est pas montrée comme un simple bout de viande appétissant, bien moulé ou court vêtu. Mais en soi, la dénommée Asia Kate Dillon a une présence qui ne pèse pas lourd, elle ne dégage rien à l'écran et fait même très pâle figure. On peut espérer mieux, surtout dans des films qui ont désormais largement de quoi s'offrir les plus grandes stars ou convoquer n'importe quel revenant. Comme dirait l'autre, "il faut que le méchant soit réussi"... John Wick affronte également toute une bande d'assassins chinois à la tête de laquelle nous retrouvons Mark Dacascos, que l'on préférait quand il avait des cheveux et un peu plus d'amour propre. On sent bien que ces figurants sont plus doués et agiles que notre vedette assez lourdaude lors des scènes de bagarre, mais celle-ci finit toujours par l'emporter par la force. La dernière partie, peut-être la plus accrocheuse, met en scène le siège du Continental new-yorkais par la troupe d'élite de la Table Haute : ces derniers sont des crétins anonymes qui ne feront pas de vieux os, notamment en raison de casques ineptes que Wick ouvre facilement depuis l'extérieur pour des headshot assurés à bout portant. Enfin, on retrouve Halle Berry, qui vient faire un bout de chemin avec ses deux bergers allemands aux côtés de John Wick après lui avoir réservé un accueil glacial, dans une relation amour/haine des plus banales. Hélas, cela fait depuis belle lurette que cette actrice n'est plus un argument. On croise également Anjelica Huston, dans la peau d'une vieille femme qui nous en apprend un peu plus sur le passé de notre héros, tout droit issu de l'imagination limitée d'un pré-ado friand de jeux vidéos.




John Wick Parabellum peine donc terriblement à se renouveler et l'on a comme le sentiment que Chad Stahelski et sa bande ont foncé tout droit vers cette impasse qui s'offrait grand à eux dès les toutes premières minutes du premier film sans, cette fois-ci, parvenir à nous divertir suffisamment pour nous la faire oublier. On tient un film d'action qui continue à vouloir se prétendre pure abstraction pour essayer de brosser le cinéphile de passage dans le sens du poil, avec également quelques clins d’œil appuyés à la plus noble cinéphilie (Wick trouve refuge au "théâtre Tarkovsky", des images de Buster Keaton illuminent Time Square...), et à abreuver l'amateur d'action lambda par des morceaux de bravoure à la chaîne. Mais tout paraît trop forcé et sans grande idée : rien ni aucune espèce de virtuosité ne vient motiver ce spectacle stérile et répétitif. Le résultat est assez bâtard et ne fait que rendre plus criantes les limites de Chad Stahelski comme cinéaste d'action et la pauvreté d'une franchise qui n'est malheureusement pas partie pour s'améliorer ni s'arrêter...


John Wick Parabellum de Chad Stahelski avec Keanu Reeves, Asia Kate Dillon, Halle Berry et Ian McShane (2019)

26 juin 2018

Atomic Blonde

Il y a de quoi être très déçu par le nouveau film de David Leitch, co-réalisateur du premier John Wick. C’est à croire que le talent était plutôt détenu par son compagnon, Chad Stahelski, quant à lui auteur d’une suite plus que satisfaisante des aventures du hitman incarné par Keanu Reeves. David Leitch a également persévéré dans la veine du film d’action « badass » aux airs assumés de bande-dessinée et de jeux vidéo, pour un résultat bien moins réussi, alors que de bons ingrédients semblaient pourtant réunis. Je fais bien sûr d’abord allusion au casting et notamment à Charlize Theron, dans la peau de la blonde atomique du titre, une agente secrète appelée à mettre la main sur une liste cruciale pour les renseignements occidentaux dans un Berlin-Est glauque et malfamé. La star au sex-appeal toujours intact et au charisme évident aurait pu incarner un nouveau personnage d’action marquant après son rôle de Furiosa dans l’excellent Mad Max : Fury Road, mais le film ne s’avère cette fois-ci pas à sa hauteur. Elle a beau se démener et se désaper plus d’une fois, ça ne suffit pas, elle paraît gesticuler dans le vide, perdue dans un scénario trop confus et tordu pour être réellement plaisant à suivre.




Ce scénario abscons échoue totalement à nous captiver et il nous perd dans ses rebondissements trop fabriqués. Il est bien le plus gros défaut d’un film qui nous propose aussi, aux côtés de sa vedette blonde et longiligne, le sempiternel défilé de tronches plus ou moins connues, parmi lesquelles John Goodman et Toby Jones, que l’on a déjà vus bien plus inspirés. Visuellement, la reconstitution du Berlin de la fin des années 80 est d’une lourdeur terrible. Histoire que l’on se sente tout à fait plongé en RDA, l’image est d’une teinte grisâtre pénible en journée tandis que, la nuit, de multiples éclairages fluos, via des néons roses et jaunes, viennent nous rappeler avec insistance que nous sommes dans les eighties, effet renforcé par une bande originale omniprésente, enchaînant des tubes pop de l’époque. C'est épuisant.




On relève simplement un peu les yeux quand une scène lesbienne s’amorce entre Charlize Theron et Sofia Boutella, avant qu’elle ne soit coupée dans la seconde. Dommage car une sorte d’électricité émanait des deux actrices, vraisemblablement désireuses d’aller plus loin et de donner un motif de satisfaction aux spectateurs les plus primaires (et largement majoritaire ici). On se réveille également lors du morceau de bravoure du film : un très long plan-séquence où l’on suit les bastons, fusillades et poursuites de l’atomique blonde, opposée à un nombre impressionnants de gros bras armés et remontés à bloc. Les coupes et les doublures, que l’on imagine réduites au minimum, ont sans doute été rendues invisibles par le numérique et on se prend plutôt au jeu, à condition d'être encore d'humeur. On pourra toutefois regretter que ce plan-séquence ne se termine pas un peu plus intelligemment. Force est de reconnaître que cette séquence produit néanmoins son petit effet, elle est même la seule, à vrai dire, à nous proposer ce que l’on était en droit d’espérer d’un tel film.


Atomic Blonde de David Leitch avec Charlize Theron, James McAvoy, John Goodman et Toby Jones (2017)

22 août 2017

John Wick 2

La suite des aventures de John Wick ravira ceux qui avaient déjà été séduits par le premier chapitre et donnera peut-être envie aux autres de programmer une séance de rattrapage. Ce nouveau volet répond à la règle simple de certaines séquelles : bigger, louder, faster, stronger. Dès l'introduction, nous avons ainsi droit à une poursuite en voiture puis à quelques bagarres provoquées par l'inarrêttable John Wick, désireux de récupérer sa bagnole chez un malfrat, quitte à la ramener à la maison complètement défigurée. D'emblée, on entre dans le bain. Mais cette introduction un peu forcée n'est guère un aperçu fidèle de ce que nous réserve la suite, bien plus amusante. John Wick se retrouve de nouveau contraint à reprendre du service, il doit honorer un ultime contrat et se rendre à Rome pour éliminer une ponte du crime qui n'est autre que la sœur de son commanditaire, ce dernier veut ainsi se garantir une place de choix parmi la confrérie d'assassins internationaux sur laquelle cette suite lève encore un peu plus le voile.




John Wick 2 est peut-être le film qui s'apparente le plus à un de ces jeux vidéo dont le héros doit flinguer tous les ennemis qui se présentent massivement à lui. Keanu Reeves doit avoir 20 lignes de dialogue grand maximum mais un "body count" affolant. Son travail consiste uniquement à avoir l'air classe, à manier ses armes comme un pro et à enchaîner les acrobaties dans des chorégraphies toujours très lisibles et proposant parfois des idées sympathiques (il faut voir l'usage que peut faire John Wick d'un simple crayon à papier ou sa façon très pro de maintenir un rival au sol pour mieux appréhender les suivants...). On suit l'évolution de notre personnage à travers différents niveaux, des catacombes de Rome jusqu'à un musée d'art contemporain new-yorkais et, à chaque fois, ces lieux sont plus ou moins propices à des idées visuelles qui font plaisir à voir. J'ai particulièrement apprécié le final au musée où Keanu Reeves progresse dans un palais des glaces aux couleurs flashy du plus bel effet et doit anticiper les mouvements de ses ennemis, malgré les trompes l’œil et autres pièges. Chad Stahelski, désormais seul derrière la caméra puisque son acolyte David Leitch était occupé à filmer Atomic Blonde, n'a rien perdu de son savoir-faire.




En dehors de ça, cette suite continue à merveille le développement patient de cet univers fait d'assassins, de contrats, de hiérarchies et de règles que l'on découvre progressivement, ce qui était déjà l'un des points fors du premier film. Chad Stahelski offre aussi quelques cadeaux à ses spectateurs, comme mettre en scène les retrouvailles de Keanu Reeves et Laurence Fishburne. Ce dernier est particulièrement décontracté dans la peau d'un seigneur du crime du monde souterrain, grimé en quasi clodo, murmurant aux oreilles des pigeons sur les toits new-yorkais. Cela faisait un bail qu'on ne l'avait pas vu aussi cool à l'écran. Les deux acteurs, réunis pour la première fois depuis les Matrix, semblent diffuser une joie communicative de se retrouver, ce qui tombe à pic dans ce film éminemment ludique. Il y a d'autres tronches que l'on est heureux de retrouver, à commencer par Ian McShane, parfait dans le rôle du patron, aussi flegmatique que charismatique, du Continental, l'hôtel des assassins, ou John Leguizamo, le garagiste attitré de John Wick, habitué à retaper les épaves que son client lui ramène, mais aussi Lance Reddick, concierge impassible de l'hôtel, et Franco Nero, tenant des lieux à Rome.




Bien entendu, il faut vraiment avoir envie de s'envoyer un film comme ça pour ne pas abandonner d'entrée de jeu et jurer que l'on a affaire à une débilité totale. Or non, John Wick 2 est, dans son genre, une franche réussite, rythmée par quelques trouvailles réellement louables. Et, à condition d'avoir envie de ça, c'est un très bon moment garanti. En ce qui me concerne, j'avais choisi le soir idéal : Fête de la Musique, gros ramdam autour de chez moi, aucune envie de mettre un pied dehors, mais plutôt de m'enfermer avec un John Wick à cran pour un film qui pétarade comme il faut. C'était parfait. Cette suite est même clairement au-dessus du premier, ce qui est assez rare pour être relevé. On pourra seulement regretter que le mignon petit beagle du 1 ait été remplacé par un sage bulldog noir, assorti aux costards de son maître. Mais ce n'est qu'une question de goûts car, en fin de compte, j'aime tous les chiens. Et je n'aime pas tous les films d'action, loin de là, celui-ci est simplement dans le haut du panier.


John Wick 2 de Chad Stahelski avec Keanu Reeves, Ian McShane, Riccardo Scamarcio, Common et Laurence Fishburne (2017)

22 mars 2015

John Wick

Comme l'indique la tagline, il ne faut surtout pas énerver John Wick ! Il est capable d'abattre une centaine d'hommes sous le prétexte que l'un d'eux a froidement buté son chien... Son adorable petit chien. Un irrésistible beagle. Celui que sa femme lui avait laissé après sa mort comme cadeau posthume. La seule chose qui lui restait d'elle. La seule chose qui le maintenait dans une vie normale, rangée des voitures. Cette existence bien tranquille qu'il avait choisie après de longues années à œuvrer en tant que tueur à gages pour de sombres organisations mafieuses. John Wick était surnommé le "Baba Yaga", ce qui semble vouloir dire le boogeyman, le croque-mitaine, le démon, le Diable, grosso modo. Redouté de tous, il était le nettoyeur le plus efficace. Quand le grand chef de la mafia apprend que sa progéniture a dérobé la Mustang et a abattu le clébard de John Wick, il voit rouge. Il sait que son con de fils a malencontreusement réveillé une bête capable de tout !




Un centaine d'hommes au tapis, oui, on ne doit pas être loin du compte, tant les scènes de bagarres et de fusillades s'enchaînent, sans temps mort, dans ce film réalisé par deux amoureux du genre, vraisemblablement fans des revenge movies coréens. Deux gugusses qui ont su rendre son charisme à Keanu Reeves et mettre au point des séquences d'action efficaces, lisibles, souvent chorégraphiées avec un certain soin. Il y en a vraiment pour tous les goûts : corps-à-corps musclés et bastons à la mise en scène étudiée dans des décors aux lumières fluos, longues fusillades opposant John Wick au reste du monde, poursuites en bagnoles, duel final à l'arme blanche... Tout y passe. Très à l'aise, Keanu Reeves, qui retrouve donc enfin un peu d'allure, aligne les headshots, peaufine ses mouvements, et nous rappelle ses bases en art martial. On apprécie particulièrement l'usage qu'il sait faire des ustensiles à sa portée, notamment celle d'un simple drap de couchage pour étouffer une tueuse particulièrement retorse.




La débilité extrême et la simplicité atterrante du scénario sont totalement assumées, l'histoire est un simple prétexte à cette succession de scènes d'action assez bien balancées. Malgré tout, soulignons que le film développe aussi, mine de rien, un petit univers assez plaisant, sur lequel le scénario, sans doute écrit très vite, a la bonne idée de ne pas tout dévoiler. Plutôt marrant est ce monde peuplé de tueurs qui obéissent à des règles absurdes, créchant tous dans le même hôtel lorsqu'ils sont en mission et trimballant avec eux des pièces en or qui leur donnent accès à des endroits interdits et leur permettent aussi de faire appel à une étrange entreprise de nettoyage, passant derrière eux, après leurs méfaits. On pourrait jurer qu'il s'agit de l'adaptation d'une bande-dessinée. Bien sûr, on pense aussi beaucoup aux jeux vidéos, comme si nous assistions à une partie qui, pour une fois, ne serait pas si déplaisante que ça à regarder. A condition, bien sûr, d'être dans l'humeur et les dispositions adéquates...




Il s'agit donc du premier film d'un duo, Chad Stahelski et David Leitch, d'ordinaire réalisateurs de seconde équipe et spécialistes des cascades et cocktails. Ils ont été embauchés à la demande expresse de l'acteur vedette, qui connaissait sans doute leur potentiel et leur savoir-faire car il avait travaillé avec eux pour Matrix. Keanu Reeves a donc eu le nez creux, car le film, qui a su taper dans l’œil de nombreux amateurs de cinéma de genre, a aussitôt été désigné comme celui de son grand come-back tant attendu. Une suite serait même dans les tuyaux. Je serai au rendez-vous...


John Wick de David Leitch et Chad Stahelski avec Keanu Reeves, Willem Dafoe, Michael Nyqvist, Alfie Allen, Adrianne Palicki, John Leguizamo et Bridget Moynahan (2014)