25 août 2013

Elysium

Les temps sont rudes pour ceux qui aiment se divertir au cinéma. L'été 2013 nous a vus fouiller les programmes ciné, éplucher le web, scrobbler les bandes-annonces de tous les gros blockbusters annoncés sur FrontRow, in vain comme dit Morgan Freeman à la fin de La Guerre des mondes. L'un de nous a même fini devant Godzilla versus Mécawarrior à la sauce de Guillermo del Burrito, les lunettes 3D - ne voyez pas là un quelconque smiley souriant, parce qu'il faudrait plutôt me dessiner comme ça :-(( - bien vissés sur le nez et le sac à dos rempli d'Ercefuryl et de Romarinex, pour prévenir une éventuelle diarrhée aiguë de type "zombie tsunami" (mon régime de l'été à base de pastèque, de melon, de melon espagnol et de melon d'eau ne me réussit pas toujours, et la moindre contrariété me "fait aller"). Ou comment atterrir devant la plus grosse daube du siècle par pur désœuvrement, la faute à une livraison de blockbusters affligeante. On ne va pas se lancer dans un article bilan sur le phénomène, avec références et chiffres à l'appui. Il suffit de s'intéresser de très loin au ciné pour savoir que ce n'est plus comme avant, que les gros films produits pour ramasser le pactole sont de plus en plus insultants pour le quidam en mal de sensations fortes. On a tous les jours une pensée pour ceux qui sont nés en 95 et qui n'ont pour ainsi dire grandi qu'avec ça, en plus de n'avoir qu'un souvenir très flou de la finale du mondial 98...




Aussi, et malgré l'épreuve Pacific Rim pour l'un, Pain and Gain pour l'autre, nous avons longuement hésité à aller nous empaler sur Elysium au cinéma (à vrai dire on a hésité pour pas mal de gros colis du même acabit, sauf, et c'est à noter, pour Lone Ranger : plutôt crever). Nos échanges de mails et de textos à ce sujet sont un équivalent épistolaire et numérique du Necronomicon, en ce sens que quiconque les lit peut y passer. Tous les arguments ont défilé. Du "tu me payes McDo si on y va, même si je suis déjà en train d'en bouffer un !", au "on profite de l'offre cinéday ! Demain c'est le fameux cinéday !", pas suffisant pour un sou quand l'autre répond : "C'est tous les jours le cinéday sur utorrent et sous Hollande". La veille on s'est même réunis à domicile pour peser le pour et le contre et en finir, mais on s'est quittés sur un collégial et pathétique : "La nuit porte conseil". Le lendemain, on n'y voyait pas plus clair et la pluie de messages d'insultes a continué à déferler sur nos portables respectifs. A un simple texto disant : "Alors, la nuit porte conseil ?", la réponse ne se fit pas attendre : "Va te faire foutre". 




Entre midi et deux, la décision n'étant toujours pas faite, les vieux subterfuges ont refait surface. La première idée consistait à indiquer son envie d'aller voir le film sur une échelle de 0 à 5 (on fera le point sur cette échelle qui nous tient à cœur et que l'on sollicite une fois sur deux dans un autre article, où le film traité sera abordé de manière plus superficielle). Si nos deux notes dépassaient la moyenne, on devait y aller. L'un, véritable tronche cramée, a mis 3/5, l'autre, poule mouillée label rouge nos régions ont du talent, 2,5/5, soit un total de 5,5/10. On devait y aller, logiquement. Mais, aussitôt, celui qui avait proposé le jeu et qui avait donné la meilleure note s'est rétracté, en regrettant d'avoir mis au point des règles aussi peu claires et en invoquant l'interdiction d'utiliser les décimales, ainsi que l'absence notoire d'un notaire au moment de la transaction. Tout était à refaire. Nous nous sommes donc rendus chez l'huissier de justice le plus proche pour tirer à pile ou face, faire chou-fleur, pierre-caillou-ciseau, chifoumi, etc. On a fini la journée assis côte à côte dans des fauteuils à répéter en boucle, "ciné, pas ciné", comme Jim Carrey dans Ace Ventura quand il récite "Finkle et Einhorn, Einhorn et Finkle...", dans ce qui restera l'une des plus grandes scènes de l'histoire du 7ème art, selon les dires de Jean-Luc Godard himself.




A 23 heures passées, l'un de nous envoyait à l'autre par texto : "Alors t'as chopé ton code cinéday ?", et l'autre de répondre un très définitif : "Qu'est-ce que tu me fais ?". Bilan des courses, on n'a pas vu le film. Notez bien qu'on l'a vu quand même étant donné qu'on a tous les deux enduré la bande-annonce, qui dit tout à la manière de ces sketchs rarement drôles qui foisonnent sur le net et qui consistent à résumer l'intégralité d'un film en trois minutes dans un dessin animé hideux. Et c'est sûr que ça donne pas spécialement envie de voir la version longue. Même les fans absolus de District 9 n'ont pas su nous intriguer, nous donner envie tant soit peu, allumer l'étincelle de curiosité en nous, alors qu'ils étaient là pour nous attiser sur une daube intégrale telle que Pacific Rim. Nous invitons les fans d'Elysium, s'il en existe en dehors de Neill Blomkamp et de toute sa fratrie, à nous faire regretter ce putain de cinéday qui nous tendait les bras. Soyons honnêtes, l'un d'entre nous a eu la flamme pendant environ deux minutes, en marchant seul au soleil, peut-être une insolation mais il jure d'avoir eu nettement envie, pendant deux minutes, d'aller voir le film au ciné, une joie ultra fugace s'est emparée de lui à l'idée d'y aller. Constatant qu'elle était fugace, il a repensé aux fougasses que prépare sa mère et c'en était fini du ciné, il avait juste envie de s'en faire une.


Elysium de Neill Blomkamp avec Matt Damon et Jodie Foster (2013)

16 commentaires:

  1. Un très beau texte qui résume à lui seul les aternoiements du cinéphile en mal de blockbusters de qualité. J'a-do-re!






    Écrit de mon IPad depuis l'étranger.

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  2. J'adore !

    J'étais venue lire une critique d'Elysium avant de dire j'y vais j'y vais pas, et paf, je me bidonne sur un super texte qui parle de tout sauf du film!

    Bref j'ai bien lolé, (merci), mais je ne sais toujours pas si je dois aller au ciné ou pas ;)

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  3. Je vote génial pour l'article, qui m'a flingué, et particulièrement le paragraphe au dessus de la photo du téléphone. Mais j'aimerais bien que vous finissiez par le voir, ce movie. La semaine dernière, un philosophe complètement con (dans le sens pharmacologique positif de "con comme j'aime, marrant en diable, méga con") que je ne nommerai pas, a fait irruption dans un gros débat, entre deux "Kant ceci" et "Heidegger cela" et, interrompant les participants, qui s'écharpaient sur "ce que c'est que le cinéma", a lancé une diatribe formidable autour d'Elysium, film sur la lutte d'une classe contre une autre, film de merde soit, mais film qui cause, qui déblatère un brin. Moi je demande à voir.

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    1. Sans doute le même message édifiant que dans la plupart des films du genre (Time Out, Upside Down, etc.). Les pauvres d'un côté, les riches de l'autre. Un gentil pauvre essaie de sortir du ghetto géant des miséreux pour aller foutre la merde dans la petite forteresse des riches. Belle...

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    2. Je précise que je n'ai toujours pas vu le film, c'est peut-être mieux que ça. Mais si c'est le cas, ma parole, je te paye des cerises.

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    3. D'un côté j'aime beaucoup les cerises, et de l'autre d'ici à ce que tu le voies ça sera plus du tout la saison. Et puis ça risque d'être une daube !

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  4. Les critiques ont parlé de "science-fiction mâture", sans doute par opposition aux films de gamins style Pacific Rim qu'ils encensent pourtant. Pas vu non plus, mais pour eux, "mâture", ça veut dire "héros qui tire la tronche" + "décors minimalistes" (à la District 9) + "intrigue foireuse à message non-subliminal".

    Avec la reprise du championnat, je vais à nouveau pouvoir mater des films de merde en écoutant le multiplex Ligue 1 à la radio (avec le son du film au minimum, dans ce genre de produit les dialogues ne sont pas importants). Le dvdrip de ce truc est sur ma liste.

    Pas mal la première tof, au fait. Que de souvenirs...

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  5. Comment vous tenez votre téléphone vous ?!

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  6. La tof d'Ace Ventura, on dirait un fake, on dirait que la tête ne va pas avec le corps, pourtant si !

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  7. Une chouette critique de ce triste film que je n'ai pas vu :
    http://fenetressurcour.blogspot.fr/2013/08/elysium-de-neil-blomkamp.html?spref=fb

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  8. Bon, pour l'avoir vu, sur un malentendu, je suis convaincu que vous avez mieux rentabilisé votre temps en tergiversations qu'en allant voir cette merde.

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  9. Il est laid, cet homme :
    http://www.imdb.com/media/rm986293760/nm0088955

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  10. Vu hier : qui a eu les couilles de le regarder en entier ? C'est tout bonnement une pure merde. A côté District 9 est un bon film c'est dire.

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    1. J'ai vu les 5 premières minutes (je l'ai lancé à un moment inopportun), ça a effectivement l'air assez affreux...

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    2. Je l'ai vu cet aprèm' ! Hé ben, heureusement qu'on a pas vu cette de-mer au ciné... Woha !

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