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19 juillet 2015

The Gambler

Si vous avez encore un peu d'estime pour Mark Wahlberg, grâce à ses rôles dans La Nuit nous appartient ou The Others Guys, si vous conservez encore une once de respect pour celui que personnellement je ne surnommerai plus jamais "Marky Mark", voici encore un film qu'il vaut mieux éviter soigneusement. Il y est ridicule comme rarement et il s'humilie même totalement si on s'amuse à comparer sa prestation avec celle de James Caan dans l'original de 1974. Ce remake est si putride qu'il a d'ailleurs ça de très fort : il parvient à nous faire douter de la qualité de l'original ! C'est pas tous les remakes qui accomplissent ce tour de force. D'ordinaire, on a plutôt le réflexe très simple et naturel de regretter l’œuvre souillée et de nous rappeler sa supériorité écrasante. Ici, l'effet est plus pervers : la nullité du remake contamine le premier film. Devant cette bouillie sans âme, vide de tout, qui roule des mécaniques sur une bande originale aguicheuse (Pulp, Rodriguez, Billy Bragg...), on se dit qu'avec une telle histoire, on ne peut forcément être qu'un film minable... Rupert Wyatt et son style publicitaire imbuvable font du scénario de James Toback un épisode de feuilleton insupportable à la gloire d'une star au charisme en faillite.




Les cours donnés en amphithéâtre à la fac par Mark Wahlberg, se promenant dans les rangs d'étudiants admiratifs, sont d'un grotesque absolu. Nous n'y croyons pas une seule seconde. L'acteur débite machinalement des discours d'une nullité abyssale, il en fait des caisses, sans jamais y croire lui-même. Il n'est pas non plus aidé par un look désastreux. Avec ses costumes sombres et ses cheveux fous, on croirait avoir affaire à une star du rock sur le déclin, un mix piteux entre Mick Jagger et le leader des Strokes. Il est fort moche. Lors de ces scènes de cours magistral, il passe pour un mauvais coach sans inspiration en train de haranguer ses troupes en usant des ficelles les plus débiles. Toujours au ras des pâquerettes. 




On souffre énormément quand le consternant Rupert Wyatt nous montre la relation du prof accro aux jeux avec l'une de ses étudiantes modèles, incarnée par Brie Larson, une jeune actrice blonde qui compte déjà quelques fans virulents et à laquelle j'ai simplement envie d'envoyer une godasse au visage. Il faut voir cette scène atroce où, nageant en plein bonheur parce que son prof vénéré a affirmé devant tout l'amphi qu'elle était la seule à avoir un soupçon de talent pour l'écriture, nous la voyons marcher au ralenti et éviter les passants en enchaînant les expressions d'extase insupportables. C'est le genre de scène qui devrait normalement condamner une actrice pour le restant de sa carrière. J'ai pas vu grand chose de plus laid sur un écran récemment. Non, franchement, passez votre chemin, et intéressez-vous plutôt au film de Karel Reisz, porté par un James Caan à son zénith, que ce misérable remake parvient à salir sournoisement.


The Gambler de Rupert Wyatt avec Mark Wahlberg, Brie Larson et John Goodman (2014)

28 octobre 2014

Le Flambeur (The Gambler)

On annonce aujourd'hui un remake mettant en vedette Mark Wahlberg du film de Karel Reisz sorti en 1974, The Gambler. Inspiré de la nouvelle de Dostoïevski, Le Joueur, et basé sur l'expérience personnelle du scénariste, James Toback, on y suit les mésaventures d'un homme, issu d'un milieu aisé et professeur de littérature, qui souffre d'une très sévère addiction aux jeux d'argent. Alors qu'il commence le film avec une importante dette à régler, il remet systématiquement en jeu tout l'argent nécessaire à la rembourser et qu'il récolte bien difficilement en pariant auprès de bookmakers véreux. Cet addict complet est incarné par James Caan, tout bonnement excellent dans la peau de ce personnage difficile à cerner. On se dit d'abord que sa débordante confiance en lui est typiquement celle propre aux héros de ce genre de films, finissant toujours par s'en tirer en beauté sans jamais oublier de placer quelques bons mots ici ou là. Puis on devine progressivement que cette confiance n'est que de façade et cache une immense faiblesse, le film nous révélant petit à petit, et assez subtilement, les rapports compliqués du "flambeur" avec sa mère et son père adoptif (joué par un excellent Morris Carnovsky), très éclairants sur son cas.




Au sommet de son art, le charisme au beau fixe, James Caan réussit parfaitement à donner vie à toute l’ambiguïté de ce personnage, lui qui à l'époque luttait en réalité contre son addiction à la drogue. Je l'ai rarement vu aussi bon. Il arrive également à être très crédible en prof de littérature, les scènes où nous le voyons donner des cours magistraux à un par-terre d'étudiants conquis sont très réussies. Karel Reisz parvient alors sans lourdeur, assez miraculeusement, à relier les œuvres analysées et les passages citées par professeur Caan aux thèmes et aux enjeux de son film, participant ainsi à l'illuminer intelligemment. On a aussi le plaisir de retrouver au casting la trop rare Lauren Hutton, que j'avais déjà vue et appréciée dans Someone's Watching Me, l'excellent téléfilm très hitchockien de John Carpenter. Cette actrice, qui a débuté sa carrière comme mannequin, a un visage atypique avec ses dents du bonheur et son très léger strabisme, mais elle montre de sacrées gambas et a une présence toujours agréable. On pourra aussi s'amuser de croiser James Woods, en employé de banque zélé qui, lors d'une très courte apparition, trouve le temps de se faire violemment secouer par James Caan (ce dernier l'étrangle d'une manière raffinée avec le cordon de son téléphone pour lui réclamer quelques sous, et cela s'avère diablement efficace... bon à savoir !).




Le film, très captivant, est donc particulièrement intéressant dans le superbe portrait qu'il nous offre de ce personnage autodestructeur et obnubilé par le goût du risque, attiré de toutes ses forces par le danger, la défaite, et totalement prisonnier d'un cercle vicieux dont la scène finale, aussi déconcertante que géniale, nous montre qu'il n'est pas prêt d'en sortir. Un joueur invétéré qui rejoint ceux, parfois tout aussi fascinants, interprétés par Steve McQueen (Le Kid de Cincinnati) et, surtout, Paul Newman (L'Arnaqueur). A noter que la musique, signée Jerry Fielding (le compositeur attitré de Sam Peckinpah), reprend des symphonies de Gustav Mahler pour un très bel effet et participe pleinement à la singularité du film. The Gambler fut donc pour moi une belle découverte, d'autant plus qu'a priori, le pitch ne me disait rien et je redoutais quelque chose ayant très mal vieilli. Il n'en est vraiment rien. The Gambler est à l'évidence un film plutôt mésestimé des années 70, à redécouvrir. De mon côté, je compte bien m'intéresser à d'autres œuvres de Karel Reisz, cinéaste britannique d'origine tchèque qui fut l'un des piliers du free cinema anglais des années 50-60.


Le Flambeur (The Gambler) de Karel Reisz avec James Caan, Lauren Hutton, Morris Carnovsky, Jacqueline Brookes et Paul Sorvino (1974)