5 décembre 2022

Significant Other

Quatrième long métrage de Dan Berk et Robert Olsen, Significant Other s'ajoute à la longue liste de ces films d'horreur et de science fiction dont la première image nous montre un objet extraterrestre tomber du ciel et s'écraser sur notre planète. C'est ici une sorte de comète rougeâtre qui vient atterrir sur l'accueillant et vaste relief boisé du nord-ouest des États-Unis. Les plans suivants nous indiquent clairement la nature de la menace venue de l'espace : un pauvre cerf en fait aussitôt les frais, attaqué par une tentacule qui surgit derrière lui. Nous suivons ensuite un jeune couple, incarné par Maika Monroe et Jake Lacy, qui s'apprête à s'engager dans une randonnée de plusieurs jours dans cette si belle région. Ils tomberont rapidement sur le corps calciné de l'animal plus si majestueux que ça, premier indice d'un séjour en forêt qui leur réservera de sacrées surprises... 


 
 
Surprenant, Significant Other parvient à l'être tout le long, et ce malgré une filiation évidente et assumée avec ce qui est sans doute LE film incontournable dès qu'il est question d'envahisseurs se substituant à nous : Body Snatchers. Surprenant, aussi, en dépit de menus emprunts à droite à gauche et même d'indications très claires sur ce que nous réserve le scénario. Dès le générique d'ouverture, et la façon discrète qu'ont certaines lettres composant chaque nom de se fondre les unes dans les autres, l'amateur de cinéma de genre un peu attentif sait forcément à quoi s'attendre. Mais Dan Berk et Robert Olsen sont, à l'évidence, deux petits malins, qui n'en sont pas à leur premier coup d'essai et n'ont pas envie de lasser leur audience. Ils allument plusieurs feux d'entrée de jeu comme pour mieux les attiser, de façon originale, ou en déclencher d'autres, ailleurs, plus inattendus, sans que cela paraisse trop systématique ou facile. Ainsi, leur film change intelligemment de ton, au bon moment, quand il commençait tout juste à nous rendre un brin dubitatif. C'est lors d'une scène a pirori très romantique de demande en mariage, avec vue imprenable sur l'océan grandiose, que tout bascule et que le film s'engage dans une nouvelle direction, regagnant tout notre intérêt, pour ne jamais le perdre. 


 
 
Scénaristes et réalisateurs depuis toujours associés, Dan Berk et Robert Olsen s'amusent à mélanger les genres, de la comédie romantique au pur film d'horreur, à provoquer des ruptures de ton gentiment déconcertantes, allant avec succès vers un humour léger, décontracté, loin du sérieux plombant que d'autres auraient pu préférer. Quand s'invite à la fête un requin vorace de passage le long de la côte, on se demande toutefois fugacement si nous ne nous engageons pas vers un n'importe quoi qui finira par nuire à l'ensemble et par nous paumer progressivement. Heureusement, il n'en est rien. En dehors de cette courte parenthèse aquatique, les rebondissements ne sont jamais grotesques ou too much. Et quand Berk & Olsen s'intéressent de plus près au couple, au sentiment amoureux, en bref, aux deux personnages principaux et à leur relation, ils ne se trompent pas et se montrent même assez habiles et pertinents, très aidés, en cela, par un binôme d'acteurs irréprochables. 
 
 
 
 
C'est de nouveau un choix judicieux de la part de Maika Monroe, qui continue d'entretenir et d'agrandir sa fanbase principalement constitué d'amateurs de cinéma de genre. La jeune actrice affirme encore ici son goût pour les projets originaux et indépendants, son jeu convaincant permet au film de rester à flot quand il se risque assez lourdement à l'allégorie des problèmes psychiatriques de son personnage. Quant à son partenaire, Jake Lacy, il est la bonne surprise du casting, lui qui dans un premier temps laisse planer le doute avec sa tronche de playboy américain et son sourire ultra bright, il s'avère en réalité parfait pour le rôle et réussit même à honorer la touche comique recherchée par les réalisateurs. Ces derniers parviennent d'emblée à instaurer une tension latente dans le couple, un malaise sous-jacent dont on se demande comment il va finir par se manifester ou se transformer. Devant la tournure des événements, on repense au plus sombre Honeymoon, autre petit film d'horreur indé sorti en 2014, que l'on doit à la réalisatrice Leigh Janiak, qui nous proposait lui aussi une variation minimaliste autour du classique de Don Siegel lors d'une lune de miel particulièrement glauque d'un jeune couple dans une cabane au fond des bois...


 
 
Alors certes, Significant Other pèche parfois dans son écriture, trop explicative, trop bavarde, parfois un peu grossière sur son versant psychologique. À la réflexion, on pourra s'interroger sur la façon dont les événements s'enchaînent, remettre en question leur logique, avec quelques ficelles bien commodes. Mais ces défauts sont mineurs, importent peu durant le visionnage à proprement parler et n'enlèvent rien au plaisir ressenti à la découverte de ce film humble et astucieux qui cherche d'abord à nous faire passer un bon moment et nous propose une virée à travers bois dont on ressort amusé, séduit. Divertissant de bout en bout, Significant Other ne perd jamais son souffle et sait aussi s'arrêter quand il faut, une qualité louable en cette période où la plupart des films s'éternise et n'en finisse pas. On termine donc avec l'envie évidente de découvrir les opus précédents de ce duo de cinéastes, qui était jusqu'à présent passé entre les mailles de mon filet de moins en moins efficace d'amateur vieillissant de bobines horrifiques alternatives. 


Significant Other (Une obsession venue d'ailleurs) de Dan Berk et Robert Olsen avec Maika Monroe et Jake Lacy (2022)

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