3 septembre 2021

Psycho Goreman

A moins que cela soit propre au bled paumé où j'ai grandi, authentique repaire à originaux, je crois que l'on a tous connu, en classe, un gamin un peu louche et rêveur, à l'abord difficile, qui restait dans son coin, ou plutôt dans son monde, et inondait les marges de ses cahiers de créatures et d'horreurs issues de sa propre imagination de déglingué. Un effrayant bestiaire qu'il griffonnait, avec un talent évident, au crayon, quand il ne débordait pas tout bonnement sur la table, attaquée à la pointe de son compas comme pour y laisser l'empreinte indélébile de son univers débridé. Steven Kostanski, le scénariste et réalisateur canadien de Psycho Goreman, devait être un gamin comme ça. Peut-être plus persévérant que la moyenne, il a réussi à faire de sa passion pour les monstres et les délires gores son métier, son gagne-pain. Car on ne doute pas une seconde, devant son sympathique Psycho Goreman, que le gars aux manettes, le cerveau leader de la troupe, est un véritable passionné qui a su emporter dans son sillage toute une équipe d'allumés.


 
 
 
Un soin maniaque, au service d'une imagination galopante, a été apporté aux maquillages, aux effets spéciaux, en bref, à la conception de toutes les créatures plus ou moins horribles, comiques et pathétiques, qui font tout l'intérêt de cette série B d'un autre âge. Il y en a vraiment pour tous les goûts. On imagine les longues heures passées à créer les costumes, à penser chaque détails, à fignoler le moindre petit effet. En tant qu'amateur de cinéma de genre, il y a quelque chose de très plaisant à la découverte de ce beau travail d'artisan, qui fait justement la part belle aux effets artisanaux, manuels, à l'ancienne. Il y a bien quelques passages où les images numériques viennent en renfort ou envahissent carrément l'écran, semblant assumer leur rendu assez cheap, très voyant, mais elles ont surtout l'air là pour valoriser le reste : les aliens, les bestioles, ces monstres qui, eux, sont vrais, en dur, palpables, comme au bon vieux temps. Ils existent bel et bien à l'image, de façon incomparable à ces ignominies en CGI, hideuses et sans âme, qui peuplent et hantent les superproductions aux budgets colossaux. Psycho Goreman (P.G., pour les intimes), le monstre éponyme, super-vilain réveillé par hasard par deux gosses qui en prennent le contrôle car ils détiennent aussi l'amulette au centre de toutes les convoitises, a plutôt fière allure mais il n'est même pas le plus réussi ni le plus original du lot, c'est dire...



 
 
Si on relève et apprécie forcément cette application de dingue apportée aux maquillages et aux effets spéciaux en général, on peut toutefois regretter que Steven Kostanski n'ait pas passé un peu plus de temps sur son scénar... Malgré une bande de personnages, humains ou non-humains, plutôt attachants et assez rigolos (l'autre grande attraction du film est une gamine survoltée, très prometteuse Nita-Josee Hanna, qui vole quasi la vedette aux monstres qu'elle mène à la baguette !), on peine, au bout d'un moment, à se passionner pour leurs mésaventures sans queue ni tête, où le sort de l'humanité, d'autres races inconnues et de toute la galaxie est en jeu. Cette sorte de mélange de Monster Squad, Power Rangers et Evil Dead manque cruellement de consistance pour emballer totalement. Dommage. Steven Kostanski avait plus d'inspiration pour les paroles de la chanson du générique final, bel hommage rappé à P.G., qui lui permet de nous quitter sur une dernière note positive et amusante. On préfèrera donc se rappeler de cela et, surtout, de cette si séduisante galerie d'extraterrestres aux allures et aux tronches impossibles qui font de Psycho Goreman une vraie curiosité, mais peut-être pas le film culte qu'il cherche tant à devenir d'emblée. 


Psycho Goreman avec Steven Kostanski et Nita-Josee Hanna et Owen Myre (2020)

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