Bizarrement, ce téléfilm de 1990 est peut-être la meilleure adaptation du classique de R.L. Stevenson, auquel il est très fidèle. Les décors sont bien choisis (en particulier l'auberge de l'Amiral-Benbow, le fortin sur l'île, le passage sous la cascade où se manifeste la voix d'un fantôme), l'action est portée par une sympathique bande-son aux tonalités irlandaises, et surtout le casting est réussi. L'acteur le moins convainquant, c'est finalement le jeune Christian Bale dans le rôle de Jim Hawkins, un peu trop grand peut-être, un peu trop serein, impassible même, et sûr de lui, avec sa voix de basson. Le jeune acteur, qui avait déjà officié, et avec plus de talent, dans L'empire du soleil, peine aussi (mais il n'est peut-être pas seul fautif) à exprimer ce mélange de crainte et de fascination, de mépris et de sympathie, qui caractérise la relation du jeune Hawkins au vieux Silver dans le roman. Mais pour le reste des personnages, on y est.
Outre Charlton Heston, grinçant à souhait devant la caméra de son fiston en Long John, le trio d'acteurs qui interprète le Dr. Livesey, Trelawney et le capitaine Smollet, est au poil, un certain Nicholas Amer, par ailleurs abonné aux séries TV (j'entends par là qu'il a joué dans un million d'entre elles, pas qu'il capte OCS) s'avère très bon dans le rôle du formidable Ben Gunn, mais surtout, présents tous deux quelques minutes seulement et néanmoins inoubliables dans leur rôle, Oliver Reed, dans la peau de Billy Bones, et Christopher Lee, dans celle de Pew l'aveugle, marquent les esprits (du moins marquèrent durablement celui de l'enfant que je fus).
C'est d'ailleurs le début du film qui est le plus réussi. Avec ce défilé de pirates, la bande de Flint, dans l'auberge de Jim et sa mère, et ce Billy Bones, vieux loup de mer gueulard et malade, accroché à son coffre et à son épée comme un naufragé, tout bouffi d'alcool et d'angoisse, constamment sur le qui-vive, en attente de la fameuse "tache noire" que bientôt lui remettra l'aveugle Pew. Deux beaux plans scandent cette grande introduction, celui où Bones apparaît tel un fantôme scrutant l'horizon sur le replat d'un rocher, et cet autre où Jim, Trelawney et Livesey découvrent l'Hispaniola, le navire déjà infesté de pirates qui les conduira vers l'île éponyme. C'est un plan simple, qui ne montre pas la mer comme une pure menace (ça c'était le précédent), mais comme une promesse où couve la menace. Tout le roman d'aventure est là. Dans ces deux plans. On aurait aimé en voir davantage dans le genre, mais c'est déjà pas mal.
L'Île au trésor de Fraser Clarke Heston avec Charlton Heston, Christian Bale, Oliver Reed et Christopher Lee (1990)
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