30 décembre 2024

Sans un bruit : Jour 1

Après avoir réalisé l'encourageant Pig, Michael Sarnoski a préféré empocher un bon gros chèque co-signé Michael Bay et John Krasinski pour mettre en boîte un préquel à la saga A Quiet Place. Il semble donc avoir choisi son camp et c'est bien dommage pour lui. C'est à la fois poussé par une attention sincèrement bienveillante pour ce réalisateur et par une curiosité toujours malsaine pour ces films-là que je m'y suis encore risqué. De nouveau, beaucoup de temps perdu. Sarnoski, également auteur du scénario qui a dû être surveillé de très près par le gros melon de Krasinski, nous narre une énième histoire de résilience dans un contexte d'apocalypse. Une jeune new-yorkaise en phase terminale de cancer, accompagnée de son chat, veut concrétiser un dernier souhait avant d'y passer : aller déguster une pizza chez Patxi (vu à la Star Ac en 2003 et désormais pizzaïolo réputé de la Big Apple) et tant pis si des aliens redoutables viennent compliquer ses plans. La malade est rapidement rejointe par un étudiant complètement dépressif et inerte auquel elle va, paradoxalement, insufflé un inespéré souffle de vie... C'est beau et touchant. Heureusement, l'importance de demeurer silencieux pour ne pas attirer les monstres empêche les dialogues à la mords-moi-le-nœud. Les deux comédiens, Lupita Nyong'o et Joseph Quinn, n'ont d'ailleurs pas grand chose à se reprocher dans ce spectacle des plus anodins.
 



"Découvrez comment le monde est devenu silencieux" annonce la tagline sur l'affiche. Justement, tout est sur l'affiche... N'espérez guère apprendre des choses intéressantes sur ces créatures à l'allure fort peu mémorable et à l'ouïe particulièrement fine venues de l'espace pour nous envahir. Nous découvrons simplement qu'elles ont débarqué sur terre sous la forme d'une sorte de pluie de météorites et il nous est rappelé avec insistance qu'elles ne savent pas nager (bien mauvais choix de planète de leur part, donc). Le scénario, sans idée, ne se consacre jamais à l'enrichissement d'un univers famélique, à l'exception peut-être d'une courte scène rappelant inévitablement l'Aliens de James Cameron lors de laquelle, dans un décor de ruines plongé dans l'obscurité (comme quasi tout le film), nous apercevons rapidement un monstre plus gros que les autres entretenir maladroitement des espèces de culture d’œufs ou de champignons fibreux puis alerter ses collègues, révélant par la même occasion leur mode de communication rudimentaire (et particulièrement sonore pour des individus aux oreilles si sensibles). Mais, là encore, ce n'est pas vraiment ce sur quoi se concentre le réalisateur à ce moment-là puisqu'il est plus occupé à filmer le gros chat noir et blanc, pas spécialement mignon, mettre en danger notre survivant dépressif en se ruant dans l'un des repères des bestioles. Je ne fais pas un reproche à Sarnoski en soulignant qu'aucun élément neuf nous est apporté dans ce préquel inutile tant on peut être persuadé que rien ne serait ressorti d'intéressant si le film avait choisi cette voie. 


 
 
L'invasion extraterrestre et la fin du monde tel que nous le connaissons permet simplement de nous rappeler combien il est important de veiller les uns sur les autres, surtout quand on est mourant, et de savoir apprécier les petits plaisirs de la vie, comme une pizza pourrie de chez Patxi. A Quiet Place : Day One nous apprend aussi qu'un chat peut être plongé entièrement dans l'eau et faire de la nage en apnée sur une bonne centaine de mètres pour en ressortir en pleine forme avec le poil légèrement ébouriffé. On vous déconseille très vivement de reproduire l'expérience à la maison, sous peine de perdre votre animal de compagnie dans de bien tristes circonstances. Au plus creux de la vague, Jeff Nichols a longtemps planché sur ce projet, écrivant même un scénario, dont on espère qu'il ne reste rien ici, à partir d'une idée de Krasinski (toute cette saga est fondée "à partir d'une idée de Krasinski" d'où le souci). Si Nichols était allé au bout, en associant son nom à cette sinistre mascarade, il nous aurait sans doute définitivement perdu. Michael Sarnoski a quant à lui choisi de continuer sa carrière sans un bruit.
 
 
Sans un bruit : Jour 1 de Michael Sarnoski avec Lupita Nyong'o et Joseph Quinn (2024)