Elizabeth Banks se construit une belle petite filmographie. Pitch Perfect 2, Charlie's Angels et maintenant ce Cocaine Bear (devenu Crazy Bear dans nos contrées où un plus fidèle Ours sous coke aurait été bien mieux). Depuis qu'elle est passée derrière la caméra, Banks complète avec cohérence sa carrière d'actrice et semble se spécialiser dans une veine très spécifique, celle de la merde qui se sait merdique et affiche cette conscience de se savoir merdique comme le summum du cool. C'est tout un concept ! Le film est supposé être cool car il a conscience de sa propre débilité et il serait idiot de le regarder sans le bon état esprit requis. Vous pouvez m'insulter, je n'ai pas su apprécier cette œuvre à sa juste valeur, c'est un fait. C'est donc au spectateur qu'il est demandé d'être inconscient et d'ignorer qu'il a en réalité affaire à un produit aseptisé et infect qui n'a strictement aucune âme ni le moindre intérêt. Pour résumer, Crazy Bear est une daube assumée, un fier étron, une "série b" au budget estimé à 40 millions de dollars, affichée en première page d'IMDb depuis des semaines et vendue par un grand studio. En bref, l'opportunisme et l'hypocrisie à leur summum. Pour le cool, on repassera !
Toute la promo de ce si triste film est basée sur son titre à la con et son pitch tout aussi teubê mais basé sur un fait divers survenu aux États-Unis en 1985 : un ours noir a trouvé de la cocaïne tombée d'avion dans la forêt nationale de Chattahoochee-Oconee et a passé l'arme à gauche après en avoir ingéré (je copie-colle Wikipédia, de la même manière que les premiers intertitres inutiles du film, qui prennent soin de préciser leur source en cherchant, là encore, à se donner l'air cool). Une anecdote de dingue, vraiment, dont on attendait avec impatience l'adaptation sur grand écran et dont le petit génie Jimmy Warden, scénariste de seconde zone, s'est saisi. Il a cependant revu et corrigé la réalité à sa sauce : ici, la coke ne finit pas par tuer la bête, mais la rend plus forte, agressive, la dote quasiment de super-pouvoirs. C'est censé être plus marrant ainsi, bien entendu. Sauf que de bête, il n'y en a pas. Jamais, pas un instant. Ne cherchez pas. Ces films-là sont morts à partir du moment où l'on a remplacé les effets spéciaux artisanaux et l'utilisation maîtrisée de véritables animaux par le tout numérique.
L'ours vedette n'a de "crazy" que son extrême laideur, son aspect lisse et même curieusement satiné : son poil lustré reflète la lumière d'étrange façon, on dirait que l'animal sort tout juste d'un carwash suivi d'une intense séance de brossage à sec. Les gros plans sur sa gueule, à laquelle des geeks sans idée ont parfois essayé de donner des expressions ridicules, sont les moments les plus gênants d'un film qui parvient à l'être du début à la fin. On sait bien que les gens derrière tout ça n'ont pas de cœur. Mais n'ont-ils pas au moins des yeux ? On se le demande devant cette comédie horrifique qui n'a rien de franchement comique tant tous les personnages "décalés" et leurs répliques sont à se pendre et dont les quelques passages gores sont glissés ici ou là très mécaniquement, comme pour répondre à cet odieux cahier des charges. Cela suffit tout de même à être qualifié de "déjà culte" par les guignols d’Écran Large, cibles toutes trouvées pour ce genre de fumisteries... Crazy Bear est désespérant de nullité et constitue une vraie insulte pour ceux qui aiment les vrais films de genre faits avec amour et parfois, certes, dans un esprit d'autodérision plaisant mais jamais dans cette hypocrisie crasse qui inonde notre sinistre époque. Ça se sait régressif, ça se veut subversif, c'est juste totalement vain et profondément hideux.
Crazy Bear d'Elizabeth Banks avec Keri Russell et Ray Liotta (2023)
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