15 juin 2020

Them ! (Des monstres attaquent la ville)

Sorti en 1954, Them ! (prononcer à l'anglaise : "Zem !"), traduit en France par le très plat Des monstres attaquent la ville, est un film de SF et de série B très sympathique, basé sur la peur commune à un millier de films sortis à la même époque, soit en pleine guerre froide : celle de l'apocalypse atomique. Les premiers essais effectués en 1945 dans les White Sands ont ici une conséquence terrible : l'apparition de monstres. Mais point de Godzilla, ici les créatures destructrices sont des bestioles bien banales de notre monde, devenues gigantesques et donc terrifiantes. Et il ne s'agit pas des créatures les plus effrayantes de notre quotidien (araignées ou serpents), non, ce sont des fourmis (vingt ans avant le moins trépidant mais parfois très beau Phase IV - et l'on se dit que le scénario du film de Gordon Douglas combiné aux inventions plastiques de celui de Saul Bass aurait peut-être fait des fourmis les plus belles égéries du 7ème art).




Se signalant par des bruits aigus terribles, les fourmis géantes commencent par foutre la merde dans le désert du Nouveau-Mexique, où elles éventrent la caravane d'une petite famille qui a mal choisi son spot de vacances. Ne survit qu'une petite fille, sous le choc, rendue muette par les horreurs auxquelles elle vient d'assister (c'est la très bonne idée de la séquence d'introduction), qui guidera malgré elle les flics locaux vers la découverte des monstres. Mais ces derniers sont bientôt réduits en poussière par une pluie de tirs de bazookas. Trop tard cependant. Les bêtes se sont déjà répandues. Une reine a foutu le camp et condamné un navire (scène malheureusement absente du film), tandis qu'une autre est suspectée d'avoir volé jusqu'à Los Angeles...




Le film est plaisant à voir en tant que pur film d'action, assez rondement mené, au point d'avoir largement inspiré son Aliens à James Cameron. On en retrouve de nombreux éléments ici, de l'ardeur militaire (les USA sortent les gros bras, et les flics de balancer des dizaines de grenades sur chaque spécimen monstrueux), à la musique (qui, bien que discrète, nourrit efficacement le suspense et par certains côtés rappelle parfois celle de James Horner) jusqu'à cette séquence finale où les militaires investissent le réseau souterrain de Los Angeles en jeeps, ou à quatre pattes via des conduits d'aération, et se retrouvent confrontés à un nid purulent de fourmis progressant dans l'obscurité des égouts, dans le but de délivrer, à coups de lance-flammes, deux gamins qui s'en sont miraculeusement sortis dans le réseau de canalisations infesté de monstres (lesquels, associés à la petite orpheline choquée aux joues salies du début, rappellent le personnage de Newt). A ceci près que la seule femme impliquée dans l'expédition insecticide, la fille du grand scientifique, incarnée par Joan Weldon, n'a pas droit à la tête d'affiche, contrairement à Sigourney Weaver 25 ans plus tard, au profit de James Whitmore, croisé dans de nombreuses séries et mémorable par de nombreux seconds rôles (comme dans La Charge des tuniques bleues, Face au crime ou bien plus tard dans Les Évadés). 




Là où le film est malin en choisissant de mettre en lumière des fourmis, c'est qu'il nous fait prendre conscience de notre chance, notamment à travers une séquence très documentée d'exposé tenu powerpoint à l'appui face aux flics et militaires du coin par un vieux scientifique barbu (Edmund Gwenn), qui leur expose les mœurs des fourmis, finalement assez semblables aux humains dans leur froide obsession de la conquête par le travail de construction et par la guerre. Quand cet expert nous explique qu'une reine se contente d'un accouplement pour pondre des œufs pendant 15 ou 17 ans, dont de nouvelles reines qui, éphémèrement pourvues d'ailes, se répandront au loin pour former de nouveaux nids et de nouvelles colonies, on réalise notre chance que les fourmis ne mesurent pas trois mètres, comme dans le film, mais trois millimètres, et qu'il s'en est fallu de peu (environ 2,999 mètres) pour que les fourmis rule the earth.


Them ! de Gordon Douglas avec James Whitmore, Edmund Gwenn et Joan Weldon (1954)

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire