30 janvier 2021

Felicità

Felicità
, le deuxième long métrage écrit et réalisé par Bruno Merle, produit un très drôle d'effet : il donne l'impression qu'il démarre à peine au moment même où il se termine, au terme de ses 82 minutes que nous n'avons pas vu passer. Et ce n'est pourtant pas là un reproche que j'adresse au film, bien au contraire. Felicità produit cet effet étrange parce qu'il s'agit d'un petit film continuellement surprenant et déroutant, dont on ne sait jamais ce qu'il va bien pouvoir nous réserver ni où il nous amène, à tel point qu'il nous maintient sur le qui-vive, éveille et entretient tout du long notre curiosité, prenant soin de ne jamais entamer notre espoir de savoir enfin à quoi nous avons véritablement affaire. Bruno Merle le reconnaît, son mot d'ordre lors de l'écriture du scénario était de surprendre : il dit avoir fabriqué son film "comme un jeu de pistes dont on ne sait jamais s’il va partir à gauche ou à droite". Le souci, pour ce cinéaste qui n'avait rien tourné depuis 2007 (Héros, pour lequel j'ai désormais une certaine curiosité) et a vu l'un de ses projets lui échapper (il a écrit Le Prince oublié, avant de devoir en laisser la réalisation à Michel Hazanavicius), était aussi de signer une histoire à taille humaine, aux besoins très modestes, pour mieux en garder le plein contrôle. Avec ses trois personnages facétieux, son récit, mené tambour battant et à la construction ingénieuse, concentré sur 24 heures et sa si courte durée, Felicità est un petit film tout à fait assumé, et c'est encore là une belle qualité. Aussi petit qu'il soit, on peut même se féliciter qu'un tel film, si original, joli et malin, puisse exister aujourd'hui.




Pour ce qui est de surprendre, force est de reconnaître que Bruno Merle a donc réussi son coup haut la main. En vérité, son film ressemble à ses trois personnages, des parents imprévisibles et fantasques qui ont promis à leur fille qu'elle pourrait enfin faire une rentrée normale, comme les autres gamins de son âge. Nous les suivons tous les trois, lors de ce dernier jour mouvementé, riche en surprises et en rebondissements, de leurs vacances d'été, découvrant chacun d'eux petit à petit. A l'image de ce trio, Felicità est difficile à cerner et on se méfie d'abord de lui, la faute à toutes les mauvaises comédies françaises passées avant lui, mais il devient rapidement plaisant, attachant et, surtout, très amusant. Les acteurs sont à l'avenant. En tête de gondole, Pio Marmai se montre de nouveau très à l'aise dans un registre où nous commençons à vraiment l'apprécier, lui qui apportait déjà toute sa verve comique et son énergie brute à une autre production modeste et très louable dont je vous avais aussi dit du bien récemment (Je promets d'être sage). Il est crédible dans le rôle de ce type un peu trop impulsif, échappé de taule alors qu'il ne lui restait plus que six mois à tirer, qui a un rapport très spécial avec sa gamine (incarnée avec talent et fraîcheur par la propre fille du cinéaste, Rita Merle) et qui est le premier à alimenter le petit jeu de farces et de bobards énormes dans laquelle toute la famille s'adonne à cœur joie, se faisant marcher les uns les autres (la première scène donne le ton) et mettant surtout la crédulité du spectateur à rude épreuve. En fin de compte, si sa narration chamboulée et ambiguë lui donne un côté un peu brouillon et fragile, Felicità n'en demeure pas moins une petite chose singulière, délicate et pleine de charme, qui fait passer un très bon moment. A l'évidence l'une des agréables surprises de cette année de cinéma si spéciale où, faute de grives, on aura au moins pu se taper un très bon Merle. 
 
 
Felicità de Bruno Merle avec Pio Marmaï, Camille Rutherford et Rita Merle (2020)

28 janvier 2021

Lawrence d'Arabie

Il y a une scène que j'aime beaucoup dans le célèbre film de David Lean. Pour situer : T.E. Lawrence (Peter O'Toole), le Chérif Ali ibn el Kharish (Omar Sharif) et ses cinquante hommes, envoyés à Lawrence par le le prince Fayçal ibn Hussein (Alec Guinness) pour attaquer le port d'Aqaba selon son plan, par l'intérieur des terres, où ses défenses sont faibles, viennent de traverser le désert de Nefud, réputé infranchissable même par les Bédouins. Au matin, ils s'aperçoivent que Gasim, l'un des hommes d'Ali, est tombé de son chameau au beau milieu du désert pendant la nuit. Lawrence repart seul dans la fournaise pour le retrouver et le ramener. Pure folie. Et il réussit. Pour le remercier, Cherif Ali lui remet la tenue traditionnelle des cavaliers arabes. Étonnamment, alors que les hommes de la caravane le fêtaient, Lawrence s'en va derrière une dune pour se changer. Fier comme Artaban, et gêné à la fois, il se cache pour ce moment solennel, et le vit tout seul. 
 
 

 
On le voit alors, dans l'intimité des dunes, s'admirer dans cette tunique de soie blanche, qu'il fait bouger dans un semblant de chorégraphie improvisée, se coiffer du keffieh, et manipuler la janbiya, poignard à lame courbe, jouant dans le vide, exactement comme un enfant le ferait. Il sera bientôt surpris par Auda abu Tayi (Anthony Quinn), chef de la tribu bédouine des Howeitat, qu'il convaincra alors de se rebeller contre les Turcs. Mais, dans ce grand et long film épique, où des acteurs (aucune actrice ici) anglais et américains grimés jouent des arabes en parlant anglais et en roulant les r, dans ce film emmené par une musique inoubliable et scandé par de grandes scènes de voyage et de batailles, le moment que j'aime le plus (car il y en a quelques autres) est une séquence courte, sans spectacle, où le héros se comporte comme un gosse, heureux de revêtir l'habit (le thawb ? le qamis ? je ne suis pas sûr d'avoir le bon nom pour ce vêtement) des Arabes du désert. Je reconnais mon enfance dans le personnage, à ce moment précis, moi qui rêvais le même rêve que lui quand, entre 4 et 6 ans, je regardais en boucle la mini-série Le Secret du Sahara, fasciné par la beauté des paysages et des noms arabes et par le mouvement des chevaux, des sabres et des vêtements dans les dunes de sable, sur une autre musique envoûtante, signée Ennio Morricone. C'est certainement la séquence du film de David Lean qui dit le mieux, et avec le moins de moyens, la fascination du personnage pour l'Arabie du titre et le goût de l'aventure qui le lie à ces pays.

 

Lawrence d'Arabie de David Lean avec Peter O'Toole, Alec Guinness, Anthony Quinn et Omar Sharif (1962)

22 janvier 2021

Quien a hierro mata

Le titre mérite une petite explication. Ceux qui ont deux trois notions d'espagnol sauront à peu près le traduire mais seront tout de même embêtés : on dirait qu'il manque un bout. En effet, l'expression espagnole complète est "Quien a hierro mata a hierro muere", l'équivalent de notre un peu plus tranchant "Celui qui vit par l'épée périra par l'épée". Remplacez "l'épée" par "la drogue", "la came" ou "l'héroïne" et vous obtiendrez un résumé succinct mais très fidèle du film de Paco Plaza. En anglais, le titre de ce thriller, au scénario si tordu qu'il pourrait effectivement conquérir le monde, est devenu Eye for an eye, soit "œil pour œil", ce qui en change et réduit sensiblement le sens. Mais l'idée est là, car Quien a hierro mata est un film de vengeance, ni plus ni moins. Un assez bête, de surcroît.




Un infirmier en maison de retraite est amené à prendre soin du vieux baron de la drogue local, fraîchement sorti de taule et atteint d'une grave maladie dégénérative. Ayant perdu son frère il y a des années des suites d'une overdose, l'infirmier met au point une vengeance aussi terrible que minutieuse : il va injecter chaque soir à son patient impuissant une perfusion d'héroïne aux doses croissantes pour le faire clamser à petit feu du même mal que son frangin. Ce petit manège finira bien évidemment par se retourner contre lui... 




Comme vous pouvez le constater, Paco Plaza s'attache donc à illustrer l'expression éponyme. Il l'illustre lourdement, avec une multitude d'exemples à l'appui. Son thriller captive mais pèse une tonne. Le réalisateur espagnol n'a pas beaucoup progressé depuis Rec. Bien que l'on soit jusqu'au bout curieux de découvrir où le film va nous mener, et désireux de connaître tous les aspects de son scénario de malheur qui ne tient d'ailleurs pas trop debout, on ne peut pas faire l'impasse sur la laideur visuelle régulière de la mise en scène. Paco Plaza ne fait pas dans la dentelle, notamment lors de ces flashbacks inutiles, véritables flashs aux couleurs faisandées, qu'ils nous assènent brutalement pour nous rappeler le passé douloureux du personnage principal. Cela ne nous aide guère à mieux comprendre ses motivations, à compatir avec lui, mais si le but était de produire des images moches et pénibles, il est atteint haut la main.




Dans le rôle de l'infirmier, nous retrouvons, heureusement, Luis Tosar, un acteur galicien doué qui ne choisit hélas pas toujours bien ses rôles au point d'avoir tourné, consécutivement, pour Jaume Balaguero puis Paco Plaza, l'association de malfaiteurs derrière les deux premiers Rec. Il y a peut-être du masochisme là-dedans... Luis Tosar fait ce qu'il peut dans un rôle très mal écrit. Son personnage d'abord intriguant finit par nous blaser sévère. Il fait tout simplement nawak, allant jusqu'à mettre sa femme enceinte en danger pour satisfaire son insatiable besoin de vengeance. On suit d'un œil de plus en plus critique ses faits et gestes imbéciles et Luis Tosar apparaît comme le malheureux pantin d'un Paco Plaza bien déterminé à nous faire comprendre que la vengeance ne résout pas tout. Message reçu.




C'est dommage car l'idée de départ, qui consiste à délocaliser l'intrigue habituelle dans un milieu inédit (la maison de retraite) et à faire du plus grand salop en présence un homme âgé vulnérable et grabataire, n'est pas mauvaise. On imagine déjà le remake américain s'en saisir et peut-être en faire quelque chose d'encore pire. Le suspense est parfois au rendez-vous et les acteurs sont bien choisis. Le vieux baron, campé par Xan Cejudo, est très loin des clichés associés à ce genre de personnages. Ses deux cons de fils, qui essaient de maintenir son commerce à flot malgré leur QI limité, sont crédibles et joués par deux acteurs aux grosses tronches amusantes qui mettent du cœur à l'ouvrage (l'un deux, Enric Auquer a même été récompensé d'un Goya). Ils ont presque quelque chose de pathétique et le fort amour fraternel qui les unit les empêche d'être complètement négatifs et haïssables. On préfèrera retenir ces petites qualités là, si l'on retient vraiment quelque chose de ce thriller balourd.


Quien a hierro mata de Paco Plaza avec Luis Tosar, Enric Auquer et Xan Cejudo (2020)

19 janvier 2021

L'Exorciste selon William Friedkin

On le sait, William Friedkin est un sacré client. Il n'y a qu'à poser une caméra devant lui, le laisser déblatérer, et on passe généralement un très bon moment. On se souvient encore de sa masterclass donnée à la Cinémathèque française, il y a quelques années, dans le cadre de la reprise de Sorcerer : elle filait quasiment l'impression d'assister au stand-up d'un vieux comique américain en pleine bourre qui, fort de sa grande expérience et de sa vaste culture, sûr de lui et de ses effets, enchaînait les mots d'esprits, les anecdotes amusantes et les réflexions éclairées, offrant ainsi à son public, conquis, tout ce qu'il était venu chercher. Plus récemment, un autre documentaire mettait le cinéaste à l'honneur : Friedkin Uncut, de l'italien Francesco Zippel, diffusé l'an passé sur Arte. Un film intéressant, forcément, vu son sujet, avec des intervenants de haute voltige (Coppola, Tarantino, Dafoe, McConaughey, Argento, Wes Anderson) mais, au bout du compte, assez frustrant aussi, car trop lacunaire et répétitif, notamment pour ceux qui avaient déjà lu les mémoires du cinéaste parues en 2014 chez La Martinière.



 
 
On pourrait facilement croire que ce nouveau documentaire a été tourné dans la foulée de Friedkin Uncut étant donné la tenue vestimentaire identique du réalisateur de French Connection, son humeur loquace, alerte et détendue, assis sur son fauteuil Louis XVI placé au beau milieu de son salon, dans la même configuration qu'auparavant. Mais ce nettement plus réussi Leap of Faith, en version originale, a un immense avantage sur son prédécesseur : il ne s'éparpille jamais, ne s'écarte pas une seconde de son sujet et se focalise sur la genèse du titre le plus mythique de la filmographie de Friedkin, qui est ici le seul à avoir la parole. On revient donc en détails sur la conception d'une œuvre à travers la seule vision de son auteur, dont les souvenirs sont très précis et l'envie de les partager au beau fixe, et c'est ce qu'il y a de chouette ! Déjà auteur en 2017 d'un documentaire remarqué où il décortiquait au scalpel et jusqu'à la nausée la fameuse scène de douche de Psychose, le réalisateur suisse Alexandre O. Philippe s'intéresse donc ici à la genèse, à la fabrication et au mystère d'un film qui a posé une empreinte indélébile sur son genre et au-delà. Un film que Friedkin dit avoir réalisée, en reprenant les mots de l'un de ses mentors, Fritz Lang, avec "l'assurance d'un somnambule" et sur laquelle les "Dieux du cinéma" se seraient même penchés. Il le dit avec une telle conviction, arguments à l'appui, qu'on a bien envie de le croire...



 
 
Impossible et inutile d'énumérer ici quelques exemples des meilleures anecdotes et autres infos données par un Bill Friedkin intarissable, il y en a tellement... Quand on est déjà bien renseigné sur l’œuvre et son auteur, nous avons beau en connaître la plupart, on les réécoute avec délice, tant elles sont bien racontées, impeccablement illustrées et mises en lumière. Le vieux cinéaste est même assez touchant quand il évoque, avec une passion contagieuse, les peintres, de Vermeer à Monet en passant par Le Caravage, qui l'ont le plus inspiré ou qu'il décrit, ému, dans les derniers instants du docu, l'impact qu'eut sur lui la découverte et la contemplation du jardin zen de Ryōan-ji, à Kyoto. Aussi, alors qu'on pourrait souvent le trouver un poil orgueilleux, un peu trop fier dans sa manière de présenter les choses, Friedkin paraît au contraire très humble quand il énumère élégamment les petites "notes de grâce" qu'il a essayé de disséminer dans son œuvre, ces moments qu'il juge particulièrement beaux, et le sont en effet, devant leur existence à des circonstances particulières, à un heureux hasard ou à une inspiration soudaine.




 
On pourrait craindre que sa durée ne soit excessive, compte tenu du dispositif et de la limitation stricte du sujet, mais ce documentaire, d'une belle fluidité, n'ennuie à aucun moment et passionne de bout en bout. L'érudition, l'éloquence et l'humour de William Friedkin sont tels que l'on se laisse volontiers porter par ses mots. En outre, Alexandre O. Philippe ne se contente pas d'illustrer platement les riches propos de William Friedkin, il fait ça avec brio, attestant d'un lyrisme appréciable et d'une inspiration de chaque instant, établissant visuellement les liens parfois implicites établis par le cinéaste entre son long métrage et ses nombreuses influences, ses diverses sources d'inspirations, étoffant son récit juste ce qu'il faut. Il y a parfois même quelque chose d'assez grisant et stimulant à la vue de ce travail simple et évident, mais si précis et méticuleux. En bref, ce documentaire est un must absolu pour tous ceux qui ont été marqués par le classique de William Friedkin. Un film que l'on a, curieusement, aussitôt envie de revoir. 
 
 
L'Exorciste selon William Friedkin (Leap of Faith : William Friedkin on The Exorcist) de Alexandre O. Philippe (2020)

17 janvier 2021

Singapore Sling

Singapore Sling est le nom d'un cocktail et d'un film du grec Nikos Nikolaïdis, sorti en 90, un film noir, répondant à tous les codes du genre. Sous une pluie torrentielle, filmée dans un noir et blanc granuleux, un type blessé à l'épaule (Panos Thanassoulis) monte dans une voiture pour s'abriter et passer la nuit. Il nous explique, en voix off et en grec, qu'il cherche une certaine Laura, depuis longtemps, en vain. Il est bientôt recueilli par deux femmes qui l'emmènent dans leur manoir. Une mère (Michelle Valley) et sa fille (Meredith Herold) qui, elles, parlent anglais, et parfois français pour la mère. Elles sont tombées sur lui tandis qu'elles enterraient, par la même nuit diluvienne, à moitié nues sous leurs imperméables, leur chauffeur, qu'elles venaient de flinguer. On saura vite qu'elles n'en étaient pas à leur premier meurtre et qu'elles ont aussi raidi ladite Laura, qui fut servante chez elle. Et qu'avant de buter les gens et de les enterrer, elles ont régulièrement tendance à jouer avec, à les éviscérer notamment. 
 
 


 
Non sans se faire plaisir dans des jeux sado-maso. Elles ont par ailleurs des relations sexuelles incestueuses (entre elles et avec le papa quand il était là : un flash-back nous montre la fille, nymphomane pleine de tics et comme nerveusement dévorée par un appétit gargantuesque, se faire dépuceler avec entrain par son père sous les traits d'une momie enchaînée et contrainte) et paraissent relativement folles. Dans plusieurs scènes de repas, on les voit bâfrer de façon répugnante, ingurgitant et régurgitant tout à la fois, se nourrissant de viandes et de poissons que le noir et blanc rend monstrueux, sous le regard mi-halluciné mi-mort du détective qu'elles séquestrent et avec lequel elles s'amusent (il sera le jouet de leurs plaisirs et le réceptacle de divers fluides). 
 
 


 
Et, outre de nombreux ébats et corps érotiques, le programme est riche en viscères, vomi et pisse, dans des images très composées, parfois très belles, et dans un rythme un peu flottant. Probable que ce film, qui lorgne sur des classiques comme Boulevard du crépuscule ou Qu'est-il arrivé à Baby Jane ?, et peut même évoquer, en bien plus bizarre et glauque, le Misery de Rob Reiner sorti la même année, aura largement inspiré Bertrand Mandico, en particulier son court métrage Notre-Dame des hormones, où Nathalie Richard et Elina Lowensohn jouent deux actrices qui se détestent mais vivent ensemble et trouvent dans la forêt un corps extra-terrestre qui ressemble vaguement au pod d'eXistenZ, gros coussin mou, doté d'une sorte de doigt d'E.T. qui ressemble aussi à une verge, et s'amusent avec. Mais peu importe, toujours est-il que bizarrement, ce Singapore Sling, je ne l'ai pas détesté...
 
 
Singapore Sling de Nikos Nikolaïdis avec Panos Thanassoulis, Michelle Valley et Meredith Herold (1990)

11 janvier 2021

Birds of Prey (et la fantabuleuse histoire de Harley Quinn)

Au risque de perdre toute espèce de crédibilité au sein de l'impitoyable blogosphère ciné, je dois vous avouer avoir bien aimé Birds of Prey. Je le dis tout timidement, je ne vous invite guère à vérifier la qualité de la chose par vos soins, craignant trop le retour de bâton... Je suis le premier étonné d'avoir passé un agréable moment devant ce film dont je n'attendais strictement rien. La raison est d'ailleurs peut-être là. Pourtant nettement plus agréable que le tout-venant des productions super-héroïques qui nous inondent depuis des lustres, le film de Cathy Yan s'est fait laminer à sa sortie, en particulier par la presse américaine, elle qui est d'ordinaire si encline à faire l'éloge de daubes XXL plus ou moins apparentées (Black Panther, Wonder Woman et compagnie). C'est plutôt cruel et injuste pour ce film sans grande prétention qui renoue humblement avec les divertissements US des années 90, flirtant régulièrement avec le buddy movie, et n'aborde pas du tout le genre avec le sérieux si plombant trop souvent de mise ailleurs. Il y a certes de sacrées lourdeurs et quelques fautes de goûts, avec notamment des scènes d'action pas assez bien fagotées pour être aussi longues, mais l'ensemble est à mes yeux sauvé par cette modestie et cette légèreté affichées d'emblée, par une énergie bien présente de la première à la dernière minute et, surtout, par une bande de comédiennes sympathiques, à commencer par la meneuse du groupe, Margot Robbie.




Également productrice, l'actrice australienne porte clairement ce film sur ses frêles épaules, elle y insuffle toute son énergie, elle a l'air d'y croire à fond. Elle atteste d'un abattage comique évident qui donne très envie de la revoir dans de plus pures comédies, dans des rôles carrément burlesques, de chtarbée finie. Elle constitue à l'évidence, et de très loin, le meilleur effet spécial de cette production au budget avoisinant les 100 millions de dollars. L'actrice, qui visiblement s'amuse beaucoup, est parvenue à me rendre son plaisir ludique contagieux. Elle est d'une expressivité de chaque instant, faisant preuve d'une précision dans son jeu, dans sa diction par exemple, qui donne tout son intérêt à ses scènes (à vrai dire, on pourrait même effacer du film sans grand regret les rares scènes où elle n'apparaît pas oui, même celles avec MEW, cette actrice attrayante qui, d'habitude, focalise notre attention et se retrouve ici reléguée au second plan). On dirait un personnage de dessin animé dont chaque détail aurait été pensé au préalable et aurait pu être parfaitement maîtrisé dans son exécution. Il y a aussi une autre raison, dans la performance de Margot Robbie, qui explique sans doute pourquoi elle m'a autant plu là-dedans, moi le nostalgique inconsolable de l'âge d'or de Jim Carrey*...



 
Pendant la promotion du film, une émission de télé américaine a confronté l'actrice à Jim Carrey. Ce dernier a alors eu une blague un peu déplacée, ou en tout cas maladroite, en disant avec une ironie pas assez évidente pour les twittos du monde entier que le succès de Margot Robbie devait beaucoup à sa plastique si agréable. L'actrice a alors souri et rougi, rendant le compliment encore plus frappant, et n'a montré aucun signe de vexation, ayant sans doute saisi la gentille taquinerie du trublion Carrey, plus charmeur qu'autre chose. Aussi, il me semble évident que la star d'Ace Ventura et Dumb & Dumber devait être le principal modèle de l'actrice pour son jeu désinhibé dans Birds of Prey, sa plus grande source d'inspiration. Dans sa gestuelle si calculée et parfois outrancière, son bagout dans toutes les circonstances, sa façon d'investir à fond un personnage invraisemblable, son explosivité pas toujours retenue, son contrôle absolu de chacun de ses muscles faciaux, etc. etc., Margot Robbie se présente elle aussi comme une toon à visage humain. Elle qui était déjà le seul intérêt de Scandale, voire de Moi, Tonya, confirme qu'avant d'être un idéal de beauté au sourire enchanteur, elle est d'abord une actrice très douée. On espère que ses choix futurs l'amèneront plus souvent à explorer ce registre comique et, surtout, à sortir de ces productions super-héroïques que, d'ordinaire, j'évite comme la peste. Quoique si elle revient bientôt en Harley Quinn, je devrais sans doute répondre présent...




*il faut d'ailleurs lire à son sujet le superbe livre d'Adrien Dénouette qui vient de paraître aux éditions Façonnage, Jim Carrey ou l'Amérique démasquée, dont la lecture, passionnante de bout en bout, est un pur régal.
 
 
Birds of Prey (et la fantabuleuse histoire de Harley Quinn) de Cathy Yan avec Margot Robbie, Mary Elizabeth Winstead et Ewan McGregor (2020)

7 janvier 2021

La Ville gronde / La Brigade du Texas

Les deux films dont il est question ici n'ont pas grand chose en commun sinon qu'ils traitent du même sujet : la quête du succès politique par des justiciers sans scrupules brandissant le spectre de la peur pour se faire élire. Tourné en en 1937 par Mervyn LeRoy, La Ville gronde (They won't forget) s'ouvre par une séquence intéressante où, dans une petite bourgade tranquille du sud des États-Unis, une poignée de vétérans grabataires de la guerre de sécession, assis en uniformes sur le bord d'une fontaine, se remémorent les grandes batailles auxquelles ils ont pris part et, déplorant que leurs rangs s'éclaircissent, se demandent combien il en restera lors de la prochaine commémoration. Mais le film nous lance sur une fausse piste. On pourrait s'attendre à un flashback sur l'histoire de ces vieillards. Pas du tout. La Ville gronde est un film de procès. Et un drôle de film de procès puisque le crime ne nous sera pas montré et le coupable jamais révélé. Tout ce que l'on sait, c'est qu'une jeune fille a été retrouvée morte dans une cage d'ascenseur de son école. Les deux suspects sont le concierge noir de l'établissement et un jeune enseignant marié venu du Nord qui s'apprêtait à y retourner et que plusieurs preuves indirectes accablent (la victime en pinçait pour lui, il était présent dans le bâtiment au moment des faits, vient d'acheter un billet pour quitter la région et une tache de sang sur le col de sa veste enfonce le clou). Seul hic : nous, spectateurs, savons a priori que ni le concierge ni l'enseignant n'ont commis le meurtre. Les habitants de la ville, eux, et en particulier les frères de la jeune fille assassinée, veulent un coupable, coûte que coûte, et veulent sa mort.
 
 
 

Tourné en 1975 par Kirk Douglas lui-même, La Brigade du texas (Posse), qui prend pour décor l’État sudiste en 1892, est quant à lui un authentique western, dont l'acteur-réalisateur ne se donne pas le beau rôle. Celui-ci revient plutôt à ce cher Bruce Dern, qui incarne Jack Strawhorn, le plus grand bandit du sud des États-Unis, un redoutable pilleur de trains. Kirk Douglas, lui, est Howard Nightingale, le marshall à ses trousses. Et très vite, avec facilité même, le shérif met la main sur sa proie, qu'il ramène en ville comme un trophée, après que ses adjoints ont tué absolument tous les hommes de Strawhorn dans l'affrontement initial, y compris ceux qui se rendaient... une drôle d'idée de la justice (et l'on sourit de voir Bo Hopkins dans la bande du shérif, l'un des chiens fous de La Horde sauvage). C'est que Nightingale espère devenir sénateur, et pourquoi pas davantage, or le bonhomme a bâti toute sa campagne sur la peur du banditisme et multiplie les promesses de sécurité. Le gibier de potence qu'il vient de rapporter sera donc son laisser-passer pour le Sénat, et de fait toute la population locale l'acclame et jure d'aller voter pour lui la fleur au fusil (à l'exception de quelques réfractaires, dont le journaliste local). Sauf que Strawhorn, embarqué dans le train spécial du justicier pour aller se faire pendre ailleurs, non seulement se libère, non seulement prend le shérif en otage, mais le ramène dans la bourgade de son succès pour l'humilier. Et par une ruse habile, le truand aura sa vengeance, aussi perfide que brillante, par une manœuvre pour le moins inattendue qu'il vaut mieux ne pas révéler ici.
 


Une chose est sûre, la dernière séquence est rude pour Nightingale qui, quand il traite de monstre le hors-la-loi, s'entend répondre qu'utiliser un macchabée pour se faire élire est digne d'un tas de "horseshit" (sic.), et qu'il y en a déjà bien assez à Washington. Ce Nightingale est un double du procureur Andrew J. Griffin (Claude Rains) de La Ville gronde, impatient de trouver un coupable au meurtre de la jeune Mary Clay pour gagner en prestige et bientôt se faire élire sénateur, lui aussi. Pas de hors-la-loi pour s'opposer à lui, comme Strawhorn barrant la route à Nightingale dans le film de Kirk Douglas, seulement un avocat de la défense et deux accusés innocents. Et le procureur Griffin aura, lui, gain de cause. Mais le verdict du jury, favorable à l'accusation, déchaîne les passions de la foule et l'accusé, condamné à la prison, finit lynché, disparaissant du film dans une scène terrible où des hommes enragés viennent l'extirper du train qui le conduit en prison, la caméra se fixant sur une potence en bord de chemin de fer où un sac suspendu est fauché au vol par un cheminot à bord du train. Et le film de se conclure gravement sur Griffin et le journaliste local, complices, se demandant si l'accusé était bel et bien coupable, après la visite d'une femme (la jeune Lana Turner) venue leur dire leurs quatre vérités. 
 
 
La Ville gronde de Mervyn LeRoy avec Claude Rains, Lana Turner et Elisha Cook Jr. (1937)
La Brigade du Texas de Kirk Douglas avec Bruce Dern, Kirk Douglas et Bo Hopkins (1975)

4 janvier 2021

L'Empreinte / Angel of Mine

Angel of Mine est le remake d'un film français signé Safy Nebbou, L'Empreinte de l'ange (désormais connu sous le titre L'Empreinte tout court suite à une bataille judiciaire avec une maison d'édition qui détenait les droits d'un bouquin du même titre : on en apprend des choses intéressantes sur Wikipédia). Si je devais faire le remake d'un film français, je ne choisirais certainement pas un film de Safy Nebbou, un réalisateur très mauvais qui s'est ridiculisé l'an passé avec le nullissime Celle que vous croyez (et qui a par la même occasion ridiculisé son actrice principale, Juliette Binoche). Safy Nebbou aime les histoires "bigger than life". Celle de L'Empreinte est pas mal du tout, dans le genre, jugez du peu : une maman est persuadée de trouver, en la sœur cadette d'un pote de son fils, la fille qu'elle a perdu sept ans plus tôt. Houlala, dans quoi je me suis aventuré moi ? C'est tellement tordu que c'est impossible à résumer en trois lignes comme j'envisageais de le faire et mon pitch de poche s'avère ultra bidon ! Je vous le refais en version longue, excusez-moi. Je disais donc : un beau jour, une maman, en instance de divorce et ravagée psychologiquement, vient récupérer son gosse à l'anniversaire d'un de ses potes. Au milieu des autres enfants présents, elle remarque une gamine dont elle est sûre et certaine qu'il s'agit de sa fille qu'elle est supposée avoir perdue dans l'incendie de la maternité alors qu'elle était à peine âgée de 5 jours (ça se fait pas de clamser à cet âge-là, elle a même pas eu le temps de profiter un brin). Une disparition brutale dont elle ne s'est jamais remise, d'où le divorce en cours, car le mari n'en peut plus de gérer la dépression de sa future ex-femme. La maman va donc s'immiscer dans la famille de la fillette, dont elle prétend vouloir acheter la maison qui est en vente sur LeBonCoin alors qu'elle n'a pas un kopeck. Elle espère en réalité pouvoir se rapprocher de la gosse et faire éclater la vérité aux yeux de tous. Ça sera pas évident, croyez-moi, d'autant plus que l'autre maman ne verra pas tout ça d'un très bon œil (normal, imaginez un peu la situation !). Vous avez mieux pigé là ? Rassurez-moi... Je me disais que le même scénario, en remplaçant la fille par un chien, pourrait donner un film du tonnerre. Vous imaginez la chose ? "C'est mon clébard, je le sens, il y a quelque chose entre lui et moi. C'est mon Baltazar Kormakur, ce n'est pas votre Reuno. C'est le chien que je croyais avoir perdu sur une aire d'autoroute un jour maudit de juillet 2006. Je ne m'en suis jamais remis ! Regardez, il m'obéit au doigt et à l’œil et répond à son doux nom de Baltazar Kormakur." On aurait pu assister à une chouette bagarre entre les deux maîtres autour d'un clébard que l'on imagine forcément merveilleux et meilleur acteur que la gosse au centre de toutes les convoitises dans les deux films, frenchie et ricain, auxquels je reviens immédiatement. 
 
 
 

Dans la version française, la maman ravagée est incarnée par une Catherine Frot étonnante dans un rôle à contre-emploi. Elle qui joue d'habitude les pimbêches ou les daronnes sans histoire prête ses traits délicats (elle m'a toujours fait vibrer, c'est depuis Le Dîner de Cons...) à une femme que l'on croit longtemps être une psychopathe atteinte au dernier degré. Sauf que Safy Nebbou nous fait douter et que son scénario est bien plus tordu qu'on ne le croit... mais je vous en dis pas plus, ça serait dommage ! Face à Frot, nous retrouvions Sandrine Bonnaire dans la peau de l'autre maman, celle qui veut protéger sa fille (et vendre sa maison, mais ça, ça passe vite au second plan, quand bien même son mari est à cran). Believe it or not, c'est la première fois que l'on mentionne le doux nom de Bonnaire sur ce blog pourtant calé, Bonnaire, ce monument du cinoche français ! Les deux actrices réussissaient à nous accrocher à ce film comme un camé à sa came. Franco, Safy Nebbou a zéro talent, mais à chaque fois j'ai des yeux gros comme ça devant ses films à la con, je dois bien le reconnaître. Celle que vous croyez aussi m'avait scotché, même si j'étais un peu gêné pendant cette scène désormais culte où Binoche, confinée avant l'heure dans sa bagnole, se masturbe lors d'un FaceTime avec François Civil (je l'ai vu avec mes parents, c'était assez chaud). L'Empreinte de l'ange (je préfère le premier titre et je suis sûr que Safy aussi) faisait donc partie de ces films qui arrivent à t'agripper les mirettes pendant 1h45 puis te lâchent d'un seul coup au générique du fin, et tu te sens comme une merde dans ton salon, seul, avec cette histoire sordide en tête, et une soirée fumée de plus au compteur. Tradition française oblige, l’œuvre de Nebbou tenait plus du drame psychologique de dix tonnes, fondé sur un duo d'actrices solides qui se faisaient plaisir, qu'autre chose. Côté ricain, on a chaussé des sabots tout aussi lourds mais peut-être plus tranchants (si un sabot peut l'être, j'ai bien conscience que ma métaphore est pourrie). On a de suite flairé le potentiel de malade du scénario impossible de Safy Nebbou et Cyril Gomez-Mathieu (dont le nom est ici rappelé en gras dans le générique final, le gars doit être fier de lui et revendiquer la paternité de cette idée originale, paraît-il tirée d'un fait divers, allez piger...). En effet, Angel of Mine tend beaucoup plus clairement vers le thriller pur jus, avec invasion du foyer et affrontement musclé, il s'inscrit dans la lignée de ces films qui fleurissaient dans les années 90 suite au succès retentissant du pourtant médiocre Liaison Fatale et dont les titres claquaient bien plus. Je pense tout particulièrement à La Main sur le berceau (The Hand That Rocks the Cradle en VO). Qui ne se souvient pas vaguement de La Main sur le berceau ? Rebecca De Mornay était top dedans. On avait kiffé devant ces films, avouez-le. Jamais on ne les reverrait aujourd'hui mais, sur le moment, ça faisait le taff, on se disait que les américains savaient y faire, y'avait pas à chipoter là-dessus.



Niveau acting, Angel of Mine n'arrive pas à la cheville de son homologue hexagonal. Sandrine Bonnaire et Catherine Frot versus Noomi Rapace et Yvonne Strahovski, je suis désolé mais, dans un combat de catch en tag team, j'vous raconte pas le carnage, ça serait vite réglé, la confrontation serait très déséquilibrée. La faute à qui ? Strahovski. On l'avait déjà croisée dans la série 24, où elle ne se montrait jamais à la hauteur au sein de la cellule antiterroriste. Elle ne l'est pas non plus ici en tant que maman qui essaie de garder le grappin sur sa fille. Elle doit avoir le visage trop carré, ça l'empêche d'exprimer toute une palette d'émotions ; il y a quelque chose qui cloche. A ses côtés, Noomi Rapace fait pourtant tout son possible. Les choix de carrière de cette actrice plutôt douée m'interrogent. Elle doit aimer les films de seconde zone, c'est pas possible autrement. Contrairement à Frot, Rapace n'étonne pas dans un tel rôle. On lit sur son visage que ça ne va pas, c'est un peu comme Glenn Close (en moins cheum ceci dit). Kim Farrant, la réalisatrice, s'appuie beaucoup sur l'actrice suédoise pour toutes les scènes-clé. Je n'ai plus aucun souvenir des personnages masculins du film français (le futur ex-mari de Frot et le père de la fillette convoitée), mais ces derniers font complètement pitié dans la version US. Luke Evans aussi a un problème de tête carrée, on dirait un playmobil qui ne mettrait pas du tout en avant les histoires. Quant au mec de Strahovski, c'est un pur guignol lui aussi, un gros naïf à l'accent australien ridicule. 
 
 
 
 
Malgré l'absurdité de toutes les situations dépeintes, la grossièreté du trait et le manque de surprise, on regarde connement tout ça, et je suis persuadé qu'en ignorant tout du film original, on peut même s'y laisser prendre. Ça fait presque plaisir de voir un thriller aussi fou, qui ose se terminer par un pugilat dans la cuisine, avec débris de verres et ongles sanglants, et qui reprend de si vieilles recettes, on a comme l'impression de remonter dans le temps, de retomber en enfance. Trente ans plus tard, c'est plus la même limonade cependant. Angel of Mine ne sort même pas en salles et n'est même pas répertorié sur le site Vodkaster : j'ai dû le leur signaler pour qu'ils l'ajoutent à leur base de données et ainsi m'offrir le petit plaisir de lui accorder la note de 1,5/5. Pourquoi 1,5/5 pour un film qui ne vaut pas tripette ? Parce que je ne vous ai pas encore parlé du meilleur moment d'Angel of Mine, celui qui a su provoquer chez moi un éclat de rires retentissant. Il survient lors d'une sortie familiale à la patinoire, où Noomi Rapace tape encore l'incruste, collant toujours aux basques de la gamine tant convoitée. Aux anges sur la piste, seule avec la fillette, Rapace profite pleinement de ce moment d'extase quand survient le drame : un patineur imprudent vient les heurter ! Elle lâche alors la petite qu'elle tenait jusque-là par les épaules avec amour. Livrée à elle-même et en panique, la gosse glisse piteusement et se retrouve allongée sur la glace, KO. C'est là que Kim Farrant nous offre l'un des plus merveilleux moments de cinoche qui soient : après un plan sur le visage horrifié et inquiet d'Yvonne Strahovski, nous voyons la gamine glisser sur le dos et heurter la bande de la patinoire, pour rebondir pathétiquement dessus et ainsi ressurgir très mollement dans le cadre. Je me le suis repassé quoi ? 12 fois. J'ai bien dû revoir ce passage-là une douzaine de fois, oui. Oh putain quel pied... Ça y'est, je me suis donné envie de le voir une 13ème fois ! Merci Kim, merci Safy !


L'Empreinte (de l'ange, je suis désolé) de Safy Nebbou avec Sandrine Bonnaire et Catherine Frot (2008)
Angel of Mine de Kim Farrant avec Noomi Rapace et Yvonne Strahovski (2019)