Adopter une autoroute... Derrière ce titre étrange, qui fait référence à un programme américain de sponsorisation de segments d'autoroute pour garantir leur propreté (?!), se cache un très beau petit film signé Logan Marshall-Green, cet acteur souvent associé à Tom Hardy pour leur ressemblance physique troublante et que l'on a déjà vu être contaminé par un alien dans le pitoyable Prometheus de Ridley Scott et, avec plus de bonheur, devenir une sorte de surhomme dans le très cool Upgrade de Leigh Whannell. C'est d'ailleurs très vraisemblablement suite à sa participation dans ce dernier film, également produit par Blumhouse, que Marshall-Green a pu faire financer une œuvre personnelle par la désormais célèbre société de production spécialisée dans le cinéma de genre qui ajoute ainsi un titre plutôt atypique à son répertoire. Pour son premier long métrage en tant que réalisateur et scénariste, Logan Marshall-Green offre un rôle en or au grand Ethan Hawke qui, plus magnétique que jamais, fait ici étalage de tout son talent et de sa capacité exceptionnelle à porter un film à lui tout seul.
Ethan Hawke incarne Russell, un type qui vient de passer 21 ans en taule pour avoir dealé quelques grammes d'herbe, en vertu de l'application de la loi dite "des trois coups" (en vigueur en Californie, celle-ci permet aux juges de prononcer des peines de prison perpétuelle à l'encontre d'un prévenu condamné pour la troisième fois pour un délit, aussi mineur soit-il). Peu adapté à la vie en société et soucieux de ne plus faire de vague, Russell bosse avec le plus grand sérieux du monde à la plonge d'une sandwicherie et habite dans un motel. Sa vie, très morne et solitaire, se voit bousculée par la découverte d'un bébé abandonné dans une benne à ordures. Sous le charme du bambin, il va s'en occuper quelques jours...
Il n'est pas méprisant ou réducteur de dire d'Adopt a Highway qu'il s'agit d'un petit film : à peine un peu plus d'une heure au compteur, guère plus de 20 pages de scénar, un seul personnage principal... Mais Adopt a Highway est un beau petit film, vraiment, et si tous les films indé ricains étaient aussi jolis et sincères, je ne serais peut-être pas autant dégoûté par la chose. Logan Marshall-Green fait preuve d'une humilité tout à fait louable et confère à sa première œuvre prometteuse un rythme assez tranquille, tout doux, qui m'a mis à l'aise du début à la fin. J'étais dans mes chaussons... Son film a aussi cela d'agréable qu'il arrive toujours à prendre une nouvelle direction juste à temps. Pas de grand rebondissement ni de bouleversement à la clé, mais simplement une trajectoire intelligente, légèrement modifiée et inattendue, qui lui fait retrouver son souffle, si bien que notre intérêt pour ce personnage et son histoire n'est ainsi jamais perdu. Il est très plaisant de découvrir la tournure, plutôt heureuse et positive (spoiler), que prennent les choses pour ce pauvre gars, qui ne fait pas les conneries tant redoutées, refait surface peu à peu et qui est même promis à un avenir radieux grâce à un p'tit coup de pouce du destin. Et puis, évidemment, le gars en question est incarné par un comédien hors pair.
Dès les premières minutes, on est admiratif du jeu d'acteur au millimètre de l'aigle-fin d'Austin (Texas), dont les pas timides et hésitants, à la sortie de prison, nous plongent dans une compassion immédiate pour son personnage de marginal dont la moitié de la vie a été gâchée par un système judiciaire impitoyable. On a déjà qu'une seule envie : le voir kiffer, prendre du bon temps... Il faut ensuite admirer le géant Hawke jouer celui qui surfe pour la première fois sur internet, dans un web café, à la recherche d'information sur son père, dont il apprend la mort les yeux humides, à la lecture d'une banale nécrologie, lors d'une scène qui nous serre le cœur. Il faut aussi le voir mettre ses lunettes de presbyte, une monture assez dégueu à clipser par le devant, avec des verres bien épais qui lui grossissent les yeux mais ne gâchent en rien sa beauté naturelle et viennent même renforcer son adorable air de chien battu. Je préfère arrêter là l'inventaire de toutes ces scènes où Hawke en met plein la vue. Vous l'aurez compris : Adopt a Highway est un véritable festival, un récital, un must pour tous les fans de la star, sur un nuage et quasi de tous les plans. On se dit que Logan Marshall-Green doit également compter parmi ses premiers admirateurs pour lui avoir donné, sur un plateau d'argent, une telle scène d'expression. On l'en remercie au passage.
Qui, aujourd'hui, peut s'assoir à la table d'Ethan Hawke ? Quel autre acteur peut se targuer de faire cohabiter sur son CV des noms comme Peter Weir, Hirokazu Kore-Eda, Bob Redford, Joe Dante, Sidney Lumet, Paul Schrader, Dick Linklater, les frères Spierig ou encore le jeune Ti West ? Combien ont tourné pour de telles pointures ? Tous les talents des cinq continents et de toutes les générations sont réunis en une seule et même filmographie. Soyez sûrs que des types comme Sidney Lumet et Kore-Eda, qui comptent parmi mes cinéastes chouchous, ne font pas tourner n'importe qui. Tous se bousculent pour travailler avec eux, et c'est Hawke qu'ils choisissent d'appeller au beau milieu de la nuit pour lui proposer un rôle. Un chapitre entier et inédit du célèbre ouvrage de Sid' Lumet, Making Movies, est consacré à l'effet galvanisant qu'eut la collaboration avec la star sur le réalisateur des 12 hommes en colère. Combien, aussi, peuvent attester d'une telle longévité ? C'est grâce à des choix de carrière audacieux, une loyauté et une fidélité à toute épreuve envers des types valables que notre homme a su demeurer si longtemps au premier plan. Combien de jeunes éphèbes sont devenus de beaux vieux en vieillissant si bien que lui ? Ne cherchez pas. Aucun. Ethan Hawke est le faucon maltais du cinéma américain, qu'il survole avec une grâce sans pareille et contemple d'un œil supérieur mais bienveillant. Son plus gros souci aujourd'hui, c'est que notre homme mange seul à tous les repas. Car personne ne peut s'assoir à sa table...
Dès les premières minutes, on est admiratif du jeu d'acteur au millimètre de l'aigle-fin d'Austin (Texas), dont les pas timides et hésitants, à la sortie de prison, nous plongent dans une compassion immédiate pour son personnage de marginal dont la moitié de la vie a été gâchée par un système judiciaire impitoyable. On a déjà qu'une seule envie : le voir kiffer, prendre du bon temps... Il faut ensuite admirer le géant Hawke jouer celui qui surfe pour la première fois sur internet, dans un web café, à la recherche d'information sur son père, dont il apprend la mort les yeux humides, à la lecture d'une banale nécrologie, lors d'une scène qui nous serre le cœur. Il faut aussi le voir mettre ses lunettes de presbyte, une monture assez dégueu à clipser par le devant, avec des verres bien épais qui lui grossissent les yeux mais ne gâchent en rien sa beauté naturelle et viennent même renforcer son adorable air de chien battu. Je préfère arrêter là l'inventaire de toutes ces scènes où Hawke en met plein la vue. Vous l'aurez compris : Adopt a Highway est un véritable festival, un récital, un must pour tous les fans de la star, sur un nuage et quasi de tous les plans. On se dit que Logan Marshall-Green doit également compter parmi ses premiers admirateurs pour lui avoir donné, sur un plateau d'argent, une telle scène d'expression. On l'en remercie au passage.
Qui, aujourd'hui, peut s'assoir à la table d'Ethan Hawke ? Quel autre acteur peut se targuer de faire cohabiter sur son CV des noms comme Peter Weir, Hirokazu Kore-Eda, Bob Redford, Joe Dante, Sidney Lumet, Paul Schrader, Dick Linklater, les frères Spierig ou encore le jeune Ti West ? Combien ont tourné pour de telles pointures ? Tous les talents des cinq continents et de toutes les générations sont réunis en une seule et même filmographie. Soyez sûrs que des types comme Sidney Lumet et Kore-Eda, qui comptent parmi mes cinéastes chouchous, ne font pas tourner n'importe qui. Tous se bousculent pour travailler avec eux, et c'est Hawke qu'ils choisissent d'appeller au beau milieu de la nuit pour lui proposer un rôle. Un chapitre entier et inédit du célèbre ouvrage de Sid' Lumet, Making Movies, est consacré à l'effet galvanisant qu'eut la collaboration avec la star sur le réalisateur des 12 hommes en colère. Combien, aussi, peuvent attester d'une telle longévité ? C'est grâce à des choix de carrière audacieux, une loyauté et une fidélité à toute épreuve envers des types valables que notre homme a su demeurer si longtemps au premier plan. Combien de jeunes éphèbes sont devenus de beaux vieux en vieillissant si bien que lui ? Ne cherchez pas. Aucun. Ethan Hawke est le faucon maltais du cinéma américain, qu'il survole avec une grâce sans pareille et contemple d'un œil supérieur mais bienveillant. Son plus gros souci aujourd'hui, c'est que notre homme mange seul à tous les repas. Car personne ne peut s'assoir à sa table...
Passez donc outre son drôle de titre, qui fait métaphoriquement sens avec les thèmes abordés par le cinéaste mais peut effectivement dérouter quand on connaît mal la législation californienne et toutes ses subtilités, et donnez vite une chance à Adopt a Highway : vous passerez 78 minutes de bonheur auprès d'un acteur au sommet de son art qui parvient à donner vie à un personnage que l'on n'oubliera pas de si tôt.
Adopt a Highway (New Lives) de Logan Marshall-Green avec Ethan Hawke (2020)