Il est comique de se rappeler comment Josie Balasko a vendu son film sur toutes les télés françaises. Elle a longuement raconté que son scénario avait été rejeté par tous les producteurs du pays après une vaine lutte acharnée contre la censure et les esprits étriqués d'une intelligentia hexagonale toute-puissante et outrageusement pudibonde. Désespérée de ne pouvoir tourner ce film qui lui tenait tant à cœur, Josée Balasko s'était alors résolue à faire de son script un roman, qui fut couronné d'un engouement du public fnac et massif. Forte de ce succès d'estime, Josué Tabasco s'en est donc retournée montrer patte blanche aux producteurs qui tous se disputèrent le bout de gras, en vue d'un triomphe en salle aussi lucratif que celui des libraires. Ayant fait la preuve de la qualité de son récit et de l'intérêt qu'il devait susciter chez les gens, J.G. Balardsko pouvait faire la nique à tous ces financiers désormais alléchés par son histoire de gigolos. Et c'est ainsi que son film si sulfureux, prêt à briser bien des tabous, abordant un sujet tu jusque là et parlant sans ambages de la vérité sexuelle des femmes, pouvait enfin être mis en scène au cinéma, par nulle autre que Joe Balmasqué elle-même.
Regarder le film à la lanterne du souvenir de ce matraquage promotionnel devient alors comique, ou tragi-comique, puisque le film est une des "choses" les plus conventionnelles, plates et convenues sorties au cinéma. De la mise en scène au récit en passant par la palette des personnages jusqu'au dénouement sans oublier le discours, tout est un immense cliché navrant. Ce qui fait de Josiane "Grotte de" Balasko la cinquième roue du carrosse d'un Cinéma Français populaire dont tous les pneus étaient déjà bien crevés.
Le film raconte l'histoire d'une bourgeoise de 50 ans pleine aux as et présentatrice de télé-achat qui se paye les services d'un escort-boy (ou gigolo) pour se faire plaisir quelques fois par semaines avec ce jeune prolo qui fait ce boulot dans le dos de sa femme qui le croit charpentier et à qui il permet d'ouvrir le salon de coiffure dont elle a toujours rêvé avec l'argent de ses coups de reins... La bourgeoise ne croit pas à l'amour mais en l'argent et elle vit en se payant ses plaisirs éphémères. Sa collègue de travail, jouée par Josiane Kosovo elle-même, est une dépressive en quête d'amour qui finit par trouver son paradis sous les traits d'un vaste Indien d'Amérique (le vrai nouveau mari de Balasqaw qu'elle a tenu à foutre dans le film pour que chacun puisse témoigner de son nouveau bonheur et se dire que tout est possible). Le gigolo et sa femme sont mal coiffés et ils vivent avec la mère et la petite sœur hystérique en pleine crise d'adolescence (interprétée par l'insupportable Mariloops Berry)... Y'a un homme noir aussi dans le tas, histoire que tout le panel de la société ait un petit morceau à se tailler dans le ventre du film de Balascrocs... La femme du gigolo (Isabelle Carré) finira par découvrir qu'il est gigolo, elle voudra le quitter, puis finira par lui demander de recommencer pour ne pas foutre la clef sous la porte, sans pouvoir pour autant supporter la situation... Le gigolo (Eric Caravaca, le jour où celui-là sera payé pour se foutre à poil, il fera chaud) finit par se tirer avec sa vieille riche qu'il aime bien mais il revient avec sa femme... Ils sont tous très différents mais on ne se mélange pas trop pour autant. La bourgeoise reste seule et les prolos retournent ensemble.
Ce qui est intriguant c'est qu'une fois de plus, l'imaginaire morbide du cinéma Français dominant décrit le couple comme irrémédiablement lié à l'argent. Cliente succède à Hors de prix, Le prix à payer ou encore Combien tu m'aimes. Dans les cerveaux confits des réalisateurs populaires Français, l'amour se monnaye, le couple s'achète. Tristes sires. Pauvre France.
Cliente de Josiane Balasko avec Nathalie Baye, Eric Caravaca, Isabelle Carré et Josiane Balasko (2008)