20 juillet 2012

John Carter

La SF, a priori, je suis très client. J'en suis même friand. C'est d'ailleurs ce goût pour la science-fiction qui m'a permis de tenir exactement 2 minutes et 37 secondes devant John Carter. Qui dit mieux ? On nous apprend dès le générique d'ouverture que la planète Mars s'appelle en réalité Barsoom. Elle n'est pas inhabitée et déserte mais le théâtre d'une guerre sans fin entre les différentes peuplades qui l'habitent. S'ensuit une introduction extrêmement bruyante qui ressemble à s'y méprendre à la pénible scène cinématique d'ouverture d'un très mauvais jeu vidéo, devant laquelle on labourerait la touche "start" de notre joypad pour abréger le calvaire. Face à ce festival d'effets spéciaux ridicules et ces acteurs hideux s'agitant dans tous les sens sur fond vert, j'ai coupé net mon lecteur divx. Je n'en pouvais déjà plus, moi qui quelques secondes plus tôt nourrissait pourtant la réelle envie d'assister à un divertissement dépaysant et haletant.



Quand je lis la page "Le saviez-vous ?" consacrée au film sur Allociné (ce que je fais systématiquement après, voire pendant, la vision d'un film - au grand dam de ma compagne, puisque je lis à voix haute), j'apprends que nommer le film "John Carter" n'a pas été chose aisée. Le premier titre envisagé était celui du roman d'Egar Rice Burroughs, La Princesse de Mars, dont Andrew Stanton a donc signé l'adaptation. Mais il a été jugé que le mot "princesse" pouvait rebuter les jeunes garçons, soit le public vraisemblablement visé en priorité par ce blockbuster au budget faramineux et promis à un beau succès. Le réalisateur Andrew Stanton a donc opté pour "John Carter of Mars". Un ultime changement a raccourci le titre en "John Carter" tout court, sous prétexte que le genre science-fiction, rendu évident par le complément circonstanciel de lieu "of Mars", aurait pu éloigner le public féminin. Ce titre tout con est donc le fruit d'un brainstorming particulièrement intensif dans le but de produire un film pouvant plaire au plus grand nombre, ou au moins l'attirer. Pourquoi cette réflexion n'a-t-elle pas été poussée plus loin ? Pourquoi ne se sont-ils pas posé autant de questions lors de la confection du film à proprement parler, et pour la scène d'ouverture, par exemple, la seule que j'ai pu voir à moitié ? S'ils avaient eu un brin de jugeote, ils auraient logiquement pu déduire que cette scène dégueulasse était clairement susceptible de rebuter n'importe quel spectateur, de la petite fille au vieillard, du bouffeur de pop-corn au cinéphile le plus chevronné. Le but était-il donc seulement de mettre au point le parfait guêpier pour amasser le plus de thunes possibles ? Si c'est le cas, c'est raté, puisque Walt Disney s'est vautré en beauté : John Carter a rapporté la modeste bagatelle de 70 millions de dollars sur le sol américain, pour un budget (officiel, car ça doit être bien plus en réalité) de 250 millions, ça fait tâche !



Après Brad Bird et son M:I-4, Andrew Stanton est le second réalisateur de Pixar à s'être lancé dans un film en prises de vues réelles. Hé bien croyez-moi, il n'a pas tout à fait lâché le morceau : Wall-E et Nemo ne sont pas loin, on n'aurait aucun mal à croire que le robot libidineux et le poisson bleu triso rôdent quelque part hors cadre, et ils passeraient incognito s'ils étaient bel et bien présents à l'écran. Andrew Stanton est un fan hardcore des ouvrages d'Edgar Rice Burroughs auxquels il voulait rendre un vibrant hommage. Il prévoyait d'adapter lui-même les deux ouvrages suivants et de signer une trilogie mythique, avant de laisser place à d'autres. Il rêvait en effet de voir l'intégralité du cycle inventé par l'écrivain américain père de Tarzan portée sur grand écran, soit onze films au total. Finalement, peut-être que Walt Disney a économisé beaucoup d'argent...


John Carter d'Andrew Stanton avec Taylor Kitsch, Lynn Collins et Samantha Morton (2012)