10 novembre 2010

Black Dynamite

On m'a dit : "Va le voir !". J'y suis pas allé. J'ai sagement attendu qu'il sorte en dvd-rip. On m'a dit : "C'est le genre de film à mater avec plein de potes, noirs de préférence, et avec plein de bières !". Je l'ai maté seul, blanc-bec, sobre comme un chameau, sans boire une goutte d'eau. Résultat des courses, je me suis pas pris au jeu, je me suis pas poilé et j'ai trouvé ça à chier. J'aurais dû le mater dans les conditions adéquates, c'est de ma faute. Je m'en veux. On tient là la meilleure comédie du siècle, une comédie de fou, un film déjà culte avant d'être réalisé, une référence ! Et j'ai pas été foutu de me foutre dans les conditions sine qua none pour l'apprécier. Guilty as charged de pas avoir le moindre copain black, ni la moindre connaissance basanée, et de préférer le thé vert et la Contrex à la Kro. Ce film fait résolument partie des films "à voir avec...".




On en connaît tous un rayon de ces films "à voir avec...". On a tous des potes qui nous disent : "Ah t'as pas aimé ?? Ouais mais moi je l'ai vu avec...". Exemple : en février dernier, un ami de retour de Chamonix me causait de Shining. Un film que j'ai trouvé assez surfait. Immédiatement mon collègue lève le doigt : "Je t'arrête. Moi je l'ai vu dans un hôtel immense à la montagne, et mon père a littéralement grillé un câble le week-end où on a été interdits de chasse-neige par une tempête de tous les diables. Il s'en est pris physiquement à chaque employé de l'hôtel. Puis à maman. J'ai eu les foies de ma vie. Et rebelote en matant ce film de dingue du coup, le dimanche soir avant de plier les voiles". Petit désaccord entre nous. J'ai jamais obtenu ma première étoile et mon père a toujours été schizo : à l'ouest rien de nouveau pour moi. Faut dire aussi que le désaccord était peut-être finalement plus profond que ça. Quand mon ami m'a causé d'un dénommé Jacques Nicholson, j'avoue avoir été semé dans la conversation. La vérité c'est que je me suis planté de torrent et j'ai téléchargé la version writer's cut supervisée par le King himself : Elvis Presley, l'auteur du fameux roman, qui n'avait pas apprécié la version du dénommé Kubrick, cinéaste apparemment célèbre dont mon tepo m'a appris l'existence, version en réalité officielle et soi-disant magnifiée par le Jacques Nicholson en question. Petit anachronisme supplémentaire : son "Shining" à lui ne prend qu'un N, le mien je crois bien qu'il en compte deux. "Shining", "Shinning", la différence est maigre et je me suis laissé prendre au piège des faux-amis.




Autre exemple, autre époque. Je suis au collège, retour au bahut. 1996 : Speed enflamme les grands écrans, mais me laisse de marbre. Dans la cour de récré en revanche, c'est LE film à voir. Et l'un de mes potes a été particulièrement bouleversé, pour ne pas dire traumatisé, par ce long métrage tout feu tout flamme. Imbroglio entre nous. J'ai détesté ; il est marqué, physiquement même, par les traces du film de Jan de Bont. Faut avouer que quand il l'a vu son slibard contenait autant de traces de frein qu'il y en a dans le film, mais tout le monde n'a pas eu la chance de mater ce film dans un bus à grande vitesse à deux doigts de cramer.




Idem pour 7 piges au Tibet. Qui peut se targuer de l'avoir maté dans un bivouac, le cul suspendu face à un précipice de six kilomètres de profondeur ? C'est ce qu'il faut pour apprécier. Sans ça, on reste extérieur à la magie du cinéma. Et le top c'est que lorsqu'on parvient à réunir de telles conditions, on peut presque se passer du film, parce que mater la mort droit dans les yeux, c'est aussi une sacrée expérience.




Un dernier exemple pour la route : Délivrance, de John Boorman, un patronyme qui aurait très bien convenu à mon tonton Rolland. Le jour où j'ai maté ce film sans rémission, ce film de ceux qui laissent les plaies ouvertes, et qui ont la volonté de ne pas permettre le deuil, mon tonton Rolland m'a enculé. Donc on peut dire que j'étais "dedans". J'arrêtais pas de gueuler : "Chuis dedans !". Depuis c'est mon film de chevet. Et il a un pouvoir immersif de taré, si je l'avais vu en 3D c'était tout comme. Faîtes-vous enculer par vos oncles et matez-le, je vous garantis le pied.


Black Dynamite de Scott Sanders avec Michael Jai White et Tommy Davidson (2010)

3 commentaires:

  1. Pour ceux qui découvriraient le blog et cet article, nous vous renvoyons à un autre article, sur le très fameux "Las Vegas Parano", qui traite du même sujet, de cette question de l'immersion conditionnée, de ces films qu'il faut voir avec... avec tel environnement, avec telle ou telle expérience, avec.

    http://ilaose.blogspot.com/2009/05/las-vegas-parano.html

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  2. C'est dommage que tu ne l'aies pas aimé. Moi je l'ai vu avec... ah non, moi je l'ai vu au cinoche avec un pote qui ne se marrait pas. Je me marrais tout seul. Non, en fait je crois que j'avais pas besoin d'être "avec" pour l'aimer. Mais très chouette article sur cet infâme fléau de notre ère qu'est le "tu l'as pas vu avec.... ?"

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  3. Pas d'accord pour Black Dynamite qui ne requiert aucune condition particulière pour être vu, faut juste aimer le grindhouse (Modus Operandi lui est préférable néanmoins, featuring Danny "Fucking" Trejo).
    Las Vegas Parano, exige d'être foncdé ou vraiment con. A mon époque pothead je lui mettais A+, maintenant je me torcherais même pas le cul avec. Ceci dit une large partie du public qui l'a apprécié n'est pas pothead, Gilliam a rendu la drogue mainstream et faire rigoler toute la famille avec Hunter S. Thompson. Et puis y'a Depp, donc même s'il sodomise de jeunes pubères avec un crado adipeux ta soeur aimera quand même.

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