17 avril 2011

The Shining

Quand on demande à Stephen King où va sa préférence parmi les 37 films adaptés d'une de ses merdes, il répond invariablement : "J'en sais rien mais ce que je sais c'est qu'il y en a un que je déteste : le Shining de Kubrick, et j'avoue avoir un faible pour mon Stephen King's Shining : Les Couloirs de la peur de Mike Garris". On a tendance à mettre ça sur le compte du terrible "brainwash" qui a succédé à son terrible accident de bagnole dans un carwash, mais il disait déjà ça avant. En effet, Steph' King déteste le film de Kubrick et a voulu le refaire à sa sauce, pour rendre à César ce qui appartient à Kubrick. Pourtant actuellement l'exposition Kubrick à la Cinémathèque de Paris fait salle comble. Il paraîtrait que c'est un record, du jamais vu du côté de Montparnasse-Bienvenüe. Qui dit du mal aujourd'hui de Kubrick ? Qui n'a pas dans sa discothèque le petit Kubrick qui va bien, pour montrer qu'on connaît. Les amateurs de film de guerre ont Les Sentiers de la gloire, les fans de films en noir et blanc ont Lolita, ceux qui préfèrent les capes et les épées se régalent de Barry Lyndon, quid de ceux qui aiment le cul et qui se rincent l’œil devant le fessier parfait de Kidman à son apogée, je ne suis jamais allé plus loin que le générique... etc. Et normalement Shining est LE film d'horreur par excellence. On le trouvera dans toutes les listes des meilleurs films d'horreur de tous les temps, c'est un intouchable. Stephen King est bien le seul à avoir fait barrière de son propre corps lors de l'ouverture en fanfare des portes de la Cinémathèque Française.



Qu'est-ce que Stephen King peut bien trouver à reprocher à Kubrick ? Un peu trop de neige ? C'est vrai qu'il y en avait un peu moins dans le livre... King parle de "dix centimètres" tandis que le film de Kubrick en montre au moins un bon mètre. Certes, certes. En tout cas le reproche principal a trait à un manque supposé de fidélité au roman. C'est pour ça que Stephen King a engagé le plus gros yesman de la téloche ricaine, Mick Garris, à ne pas confondre avec Anna Farris, pour torcher son ultimate Shining, en trois épisodes de 6 heures chacun, soit une totalité de 24 heures de métrage dans la tronche d'un schizo. Que dire sur Mick Garris ? C'est lui qui est à l'origine de la série Masters of horror, fausse bonne idée réunissant d'anciennes gloires du film d'horreur sur le déclin pour un vrai tombeau des lucioles télévisé. Dommage, bien tenté pour ce sosie de James Cameron qui porte sur la tête la même chevelure que la vieille documentaliste de mon collège de Moissac, celle qu'on appelait "La torche humaine", à moins que ce ne soit un Grammy Award fondu ? En tout cas le projet de faire un meilleur Shining, plus authentique, loin de celui de Kubrick, a de quoi dérouter quand on admire sur l'affiche un acteur tâchant d'imiter qui l'on sait, les pointes des sourcils agrafées aux coins du front pour rappeler les circonflexes un poil plus inquiétants de Jack Nicholson. On ne le voit pas sur l'affiche mais selon le même principe l'actrice de la version King du film a perdu 43 kilos et s'est enfoncé d'énormes objets dans le cul pour se faire jaillir les globes oculaires hors de la tête histoire de ressembler comme deux gouttes d'eau à l'inoubliable Shelley Duvall. Au final tout ça n'est qu'un gros péché d'orgueil de la part de Stephen King, qui n'a pas apprécié que Kubrick lui vole la vedette et transcende son torche-cul pour en faire un sacré film. En même temps il fallait oser passer derrière Kubrick, c'est le signe d'une grande audace, mais question : n'est-ce pas à ce type précis d'audace qu'on reconnaît les plus gros cons ?


The Shining de Mick Garris avec Steven Weber et Rebecca de Mornay (1997)