Persuadés d'avoir acheté des tickets pour Nipples of 
Fire, force est de reconnaître que nous avons été cueillis à froid et 
que nous nous attendions à un tout autre spectacle. Il faut dire que 
celui-ci nous a été recommandé par notre "éducateur", et nous ne 
connaissons que trop bien son passif avec le cinéma pour adultes pour 
avoir été trop longtemps en concurrence avec lui lors de la course à la 
zappette des premiers samedis du mois, à l'époque où Philippe Vandel, 
notre "guide spirituel", occupait une place si chère dans nos cœurs (à 
12 ans, nous nous habillions déjà d'un t-shirt XXS à l'effigie des 
Stones sous une veste de costard noire, un jean taille basse et des 
converses blanches). Les conseils de notre "grand frère", on s'en méfie 
depuis cette sinistre époque où, seul pourvoyeur de films empruntés au 
vidéo-club, celui qu'on devait appeler "l'aïeul" choisissait 
systématiquement, parmi la pléthorique offre de films en tous genres, 
les romcoms d'un autre âge signées Edward Burns, rangées dans le rayon 
"daubasses", ce qui correspondait alors à ce qui se faisait de pire en 
termes de cinéma d'auteur indépendant américain. La trace laissée par Ed
 Burns dans l'histoire du 7ème art équivaut celle du lisboète et 
soi-disant footballer avant-centre Vitinha dans le cœur des olympiens de
 la cité phocéenne. Heureusement, celui que l'on considère comme une 
souche pour nous et notre évolution sur cette terre, aka toujours notre 
éducateur spé, Ra'lex "The Rock" de son prénom, a visé 
un peu plus juste et un peu plus haut avec Riddle of Fire, film pour 
enfants qu'il est allé voir sans les siens, en bon père dépourvu d'autorité (mais quel éducateur modèle : c'est bien simple on 
lui doit tout, y compris d'avoir échappé à la zonzon quelques fois - il y
 est allé pour nous, lui et son cœur gros comme aç). 
Qu'est-ce
 qui est fragile, mignon, éphémère et s'essouffle vite ? Un bouledogue 
français ? Ousmane Dembélé ? Un joli coquelicot ? C'est vrai mais pas 
seulement. Ajoutez à cela le premier long métrage de Weston Razooli dont
 nous vous déconseillons fermement de checker la ganache sur google tant
 il a un physique instable capable de tirer sur les nerfs les plus 
solides. Ce n'est pas un hasard s'il s'est lui-même attribué le rôle du 
gros débile de service dans son film. Son apparition coïncide d'ailleurs
 avec la grosse chute de tension de Riddle of Fire, qui démarrait plutôt
 très bien, sachant nous emporter avec sa petite bande de gosses très 
sympathiques, partie à l'aventure équipée de motocross et de pistolets à
 air à la recherche des ingrédients de la tarte aux myrtilles préférée 
de leur maman malade dans le seul but de décrocher le mot de passe 
débloquant la télé et permettant à la joyeuse petite bande de s'éclater 
sur un jeu vidéo. A partir du moment où leur course folle croise celle 
d'une bande de braconniers à la solde d'une sorcière taxidermiste, le 
rythme du film patine, on commence à trouver le temps long, tout devient
 plus laborieux et l'absence de vrai gag n'aide pas à se passionner pour
 les tribulations de tous ces personnages faiblards qui gravitent autour
 des gosses. 
Un tel film aurait dû savoir 
limiter ses ambitions à 1h15 de pellicule bien tassée et sans faux-col, 
histoire d'avoir plus de chances de rester sur le bel élan initial et de
 ne jamais ennuyer. Au contraire, il perd son temps et nous donne l'opportunité
de regretter ses faiblesses, comme celle de s'inscrire tambours battants et 
sans retenue dans la mouvance nostalgique actuelle, alignant les 
références et allusions aux classiques du film pour enfants des années 
80, des Goonies à Princess Bride en passant par Stand by Me ou Beyond 
The Green Door. Le tout filmé en pellicule kodak et sans mise au point, 
sur fond de dungeon synth à fond les ballons, cette musique électronique 
inspirée des jeux vidéos RPG à l'ambiance médiévale des années 80 et 90, autant d'emballages qui en rajoutent une louche dans le registre de la 
connivence générationnelle. 
Néanmoins, le 
film, pour toujours rattaché à notre éduc spé (qui a pourtant grandi 
dans les années 60, dans une ferme isolée de l'Aude, et n'a jamais tenu 
une manette ou un joystick de sa vie), et vu dans les meilleures 
conditions possibles (à savoir une salle archi vide, tempérée, la petite
 sacoche de car-en-sac dans la poche, le pistolet à air comprimé à la 
ceinture, le t-shirt Atari qui va bien, les Converse sur le siège de 
devant, un mister freeze dans chaque bouche, le walk-man autoreverse 
branché sur Tangerine Dream temporairement mis sur pause - ce qui ne 
change rien -, la version longue du Silmarillion dans la banane, la 
casquette "I want to believe" vissée au crâne, le scoubidou au poignet),
 suscite très clairement notre bienveillance et notre critique est 
positive. Vous chercherez peut-être à lire entre les lignes, à les 
espacer avec un logiciel word, interligne 4,5, pour trouver des 
compliments, ou à ne garder que la première majuscule de chaque phrase 
pour déceler un point positif (on va vous épargner, ça donnerait un truc
 du genre : "UALNV"... soit quetchi, c'est même pas une sous-marque 
Décathlon), mais pas la peine, si on le dit, ça suffit. Comme dirait 
cette teubée achevée d'Oudéa Castera, réduisant tout le 1984 d'Orwell à du pipi de chat : nous n'avons pas menti, quand bien même la réalité nous donne tort.
Riddle of Fire de Weston Razooli avec Skyler Peters, Phoebe Ferro et Charlie Stover (2023)
 




 
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