Trois ans après Fatima, son plus grand succès critique et public, auréolé d'un César du Meilleur film obtenu au nez et à la barbe de Jacques Audiard, Phil Faucon revient à la 3D : délicatesse, douceur et dignité. Trois adjectifs qui peuvent encore une fois caractériser son dernier film, une nouvelle histoire d'immigré où l'on suit cette fois-ci le bel Amin (Moustapha Mbengue), un homme d'une quarantaine d'années venu du Sénégal pour travailler en France sur les chantiers. Éloigné de sa femme et de ses trois enfants, qui grandissent bien loin de lui, Amin rentre au pays de temps en temps pour y rapporter une bonne partie de l'argent qu'il gagne. Au hasard d'un chantier, il fait un jour la rencontre d'une femme en plein divorce, incarnée par Emmanuelle Devos, dont il retape la terrasse avant de visiter l'intérieur.
Phil Faucon filme avec une très grande simplicité une galerie de personnages sur lesquels il porte un regard des plus humains et empathiques (seul l'ex-mari de Devos paraît sacrifié par le scénario, passant simplement pour l'empêcheur de tourner en rond). C'est un vrai plaisir de suivre un film social si juste et intelligent, à des années lumière du misérabilisme parfois de mise dans ce type de cinéma, et l'on se rapprocherait parfois plutôt d'une certaine naïveté. Un petit défaut que l'on pardonne volontiers à Phil Faucon. Le style épuré du cinéaste paraît être ici arrivé à un point de maturité, offrant quelques moments d'une surprenante sensualité lors des retrouvailles intimes ou des découvertes amoureuses et livrant même une parenthèse sénégalaise qui émerveille littéralement. Cette séquence au Sénégal constitue clairement la plus belle partie du film : au retour d'Amin en France, nous ressentons d'autant mieux le manque et le décalage que le personnage subi.
On passe donc un très agréable moment devant la dernière livraison de Phil Faucon, l'aigle-fin du cinéma français, qui aurait de nouveau mérité quelques récompenses. En périphérie de l'histoire du personnage éponyme, le réalisateur s'intéresse aussi à un autre immigré, un maghrébin ne souhaitant qu'une seule chose : rentrer au pays après sa retraite. Son destin tragique, un peu trop attendu, drape Amin d'un voile plus pessimiste et cruel. Le charme de ce film, encore une fois très concis, réside également dans son humilité. Peut-être est-ce là aussi une de ses limites... Loin de marquer au fer rouge la mémoire du spectateur, il lui laisse seulement un doux et modeste souvenir. L’œuvre de Faucon est sans doute supérieure à la somme de ses parties.
Amin de Philippe Faucon avec Moustapha Mbengue et Emmanuelle Devos (2018)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire