10 janvier 2012

Bilan 2011


Le temps est venu pour nous de dresser le bilan de cette année cinématographique, toujours un peu en retard par rapport au reste du monde mais un peu moins que l'an passé quand même. Mais débarrassons-nous d'abord du gros morceau que nous avons en exclu. On ne vous a pas souhaité un joyeux Noël sur le blog, alors on vous fait en retard un gros cadeau de Noël, à savoir la liste des meilleurs films de 2011 selon Quentin Tarantino, traduite de l'américain par nos soins, qu'on a pu choper en avant-première :

TARANTINO'S TOP MOVIES OF 2011 AND ALL TIME


Warrior de Gavin O'Connor
The Fighter de David O. Russell
Attack the block de Joe Cornish
Detective Dee de Tsui Hark
Super de James Gunn
50/50 de Jonathan Levine
The Artist de Michel Hazanivicius
How do you know ? de James L. Brooks
Somewhere de Sofia Coppola
Mission Impossible 4 : Ghost Protocol de Brad Bird
La Planète des singes : les origines de Rupert Wyatt
Real Steel de Shawn Levy
Kung fu panda 2 de Jennifer Yuh
Steak de Quentin Dupieux
Hesher de Spencer Susser
The Tree of life de Terrence Malick
Drive de Nicolas Winding Refn
Hanna de Joe Wright
Soul Surfer de Sean McNamara
Le Flingueur de Simon West

Le contact américain qui nous a transmis la tant attendue liste du grand Tarantino n'a pas pu nous dire si les titres sont rangés dans un ordre de préférence. Il semblerait quand même que l'ordre alphabétique soit respecté, sauf pour quelques titres, comme Warrior qui apparaît en premier, mais les conventions anglophones ne sont pas exactement les mêmes que les nôtres. Pour ce qui est de la qualité ou de la cohérence des films sélectionnés par le grand manitou de Los Angeles, on vous laisse juges. Il pourrait y avoir Les Adoptés si Tarantino se rappelait du nom de Mélanie Laurent, idem pour Requiem pour une tueuse, dans lequel il a cru reconnaître quelqu'un et qu'il a bien aimé mais pas assez pour le mettre dans son top.

Comment passer après le maître à jouer du ciné ? Pourtant il faut bien qu'on s'adonne, comme tout le monde, comme tous bons blogueurs ciné qui se respectent, à l'exercice annuel des Tops de janvier. On est en retard par rapport aux blogueurs en général, c'est un fait, et encore plus par rapport à nos voisins très éloignés de Nouvelle Calédonie et autres Wallisiens revêches, qui sont toujours les premiers à croquer dans l'année et qui ne nous laissent que les miettes. D'un autre côté, on peut pas tout avoir, une force herculéenne des âges farouches, des palmes à la place des pieds, un sourire bright, une montre qui avance de beaucoup et des films qui sortent au cinéma... Le seul film programmé là-bas cette année était L'Ordre et la morale, le film de Kassovitz sur la prise d'otages d'Ouvéa, qui a fait un flop retentissant pour notre plus grand bonheur (cette fois-ci Kassovitz n'a pas pu tout mettre sur le dos de son acteur vedette, Vin Diesel, qui a préféré briller de mille feux dans Fast and Furious 5) et qui a finalement été censuré sur l'île concernée, dont les habitants ont dressé leurs tops vides avant tout le monde. Mais revenons au sujet, par pitié. Voici venir les Tops 10 2011 de vos deux fidèles serviteurs qui, cette année, ont un peu plus aimé le cinéma que l'an passé, mais un peu moins que l'an prochain :

NOS TOPS
(Rémi/Félix, par ordre de préférence)



























































































































L'un comme l'autre, nous avons très envie de retenir le positif d'une année fournie en films de grande qualité, qui a su nous contenter de bien des façons, la preuve en est que nous n'avons eu aucun mal à établir un top 10 et que nous aurions pu aller jusqu'à 15 lauréats sans difficulté et sans fouiller les fonds de tiroir (sauf Félix). Autre point positif pour ce bilan de l'année, on peut facilement y déceler une cohérence, des échos, une sorte de corpus sur les angoisses les plus actuelles, bien éloignées des sottes apocalypses et autres élégies cosmiques grandiloquentes de Malick et Von Trier, à savoir une terreur plus tangible, plus ancrée dans nos réalités quotidiennes, et qui précède peut-être la peur cataclysmique que Take Shelter (sorti au cinéma en ce début d'année 2012 mais découvert à Cannes en mai dernier) a su saisir avec brio, l'angoisse de l'absence de guide et de direction pour des êtres sans idéologie et sans valeurs sûres, un peuple précaire et condamné, qui ne songe qu'à survivre en avançant dans le vide et le doute. Cette angoisse fut cristallisée très notoirement par des films tels que La Dernière Piste, Habemus Papam et Essential Killing, voire le sublime L'Apollonide ou le fascinant La Grotte des rêves perdus, de diverses et admirables manières. Voila qui suffirait à faire de 2011 une remarquable année de cinéma, et ce serait sans compter sur les films prodigieux de Manoel de Oliveira, de Werner Herzog, des frères Dardenne, d'Asghar Farhadi, de Pedro Almodovar, Darren Aronofsky, Emmanuel Mouret et quelques autres.



Mais trêve de suspense, passons au TOP DES LECTEURS dans lequel nous n'avons pas introduit le classement de Tarantino parce que nous n'avons pas la prétention de le considérer comme un "lecteur". Vous avez été très nombreux à participer aux votes pour établir cette liste, beaucoup plus nombreux que l'an passé où, il est vrai, nos familles respectives et nos propres frères, tous fans de Nicolas Cage, avaient un peu donné le ton des grandes tendances de 2011. Nous sommes depuis tous les deux brouillés avec nos familles, aussi ce classement reflète-t-il assez nettement les véritables goûts de notre lectorat, parmi lesquels se comptent un certain nombre de blogueurs ciné. Voici donc les dix meilleurs films de 2011 selon VOUS :


1) Black Swan de Darren Aronofsky

2) Drive de Nicolas Winding Refn

3) Melancholia de Lars Von Trier

4) The Tree of Life de Terrence Malick

5) Une Séparation d'Asghar Farhadi

6) La Piel que habito de Pedro Almodovar

7) J'ai rencontré le diable de Kim Jee-Woon

8) L'Apollonide, souvenirs de la maison close de Bertrand Bonello

9) Habemus Papam de Nanni Morreti
10) Hugo Cabret de Martin Scorsese

La seule chose notable que l'on puisse véritablement souligner dans ce beau classement (hormis la pluralité des styles et des horizons convoqués), c'est l'écart entre les deux premiers du top et leurs poursuivants. En effet deux films se sont réellement et nettement détachés du lot : Black Swan et Drive, deux œuvres séduisantes et fédératrices, très codées et dont les auteurs assument un vaste héritage cinématographique tout en se démarquant de leurs influences par une patte personnelle indéniable, signature qui leur avait déjà valu une solide base de fans avant la sortie de ces nouveaux films. Il n'est donc pas étonnant que de nombreux jeunes cinéphiles, dont nous, s'y retrouvent et placent leurs espoirs sur des cinéastes en herbe mais déjà confirmés qui ont leur carrière devant eux et que l'on peut aisément considérer comme énergiques et prometteurs.



De façon plus générale, et ce classement contribue à le vérifier, cette année a été très vivante et marquée par des enthousiasmes très forts autour de certains films qui ont violemment divisé les spectateurs, tels que The Tree of Life et Melancholia que vous avez majoritairement plébiscités et que, il faut bien l'avouer, nous n'avons pas aimés, ou encore Drive qui a suscité des réactions contrastées jusqu'au sein de notre équipe rédactionnelle. Il faut dire que cette année beaucoup de "films-expériences" ont crevé l'écran, des films pour lesquels ça passe ou ça casse, typiquement les trois films déjà cités mais aussi J'ai rencontré le diable voire Essential Killing, autant de films qui peuvent aussi bien transporter leur public que l'insupporter au plus haut point. Si bien que, même en ayant possiblement détesté le film de Malick, celui de Von Trier et d'autres, on ne peut pas nier que ces films, qui ont fait le "buzz" cette année, sont des films originaux, qui ont tenté quelque chose, qui ont proposé du cinéma et qui ont le mérite d'avoir pris des risques, de véritables risques, non pas de vaines tentatives suffisantes et irrécupérables telles que celles de nos deux réalisatrices prodiges insupportables, Maïwenn et Donzelli, qui Dieu merci n'apparaissent pas dans le haut du panier de vos préférences. A une époque où près de 20 millions de spectateurs vont en salles pour découvrir un pur téléfilm tel qu'Intouchables, voir le "grand public" se déplacer aussi en nombre pour aller voir The Tree of Life et ses propositions artistico-mystiques fumées n'est pas triste, et mieux encore, voir se remplir les salles de L'Apollonide ou d'Une Séparation est, disons-le, très heureux.



Car enfin parlons des grands films de l'année, ceux que nous avons autant aimé que vous, à commencer par Black Swan : quand le titre est en gras ET en rouge, c'est un lien pour la critique, donc nous n'en dirons pas plus. Passons à autre chose. Évoquons par exemple les cas de cinéastes qui nous ont étonné en bien ou en mal. Au rayon des come-back ratés et des fades déceptions : John Carpenter et son très pâle The Ward, Monte Hellman et son si faible Road to Nowhere, Roman Polanski et sa moitié de film Carnage ou David Cronenberg avec son tout juste honnête A Dangerous Method. Un mot sur l'improbable ménage à trois Duncan Jones, Céline Sciamma et Kelly Reichardt, les trois métro-sexuel notables de l'année : le premier a brisé l'espoir que nous-mêmes et son propre père placions sur son nom avec Source Code, la seconde au contraire a su passer à la vitesse supérieure en réalisant Tomboy, la troisième nous a carrément foutus sur le cul après nous avoir fait pioncer avec ses films précédents sur des airs de Yo la Tengo grâce à La Dernière piste (à chaque fois, cliquez sur le titre). Il y a également de quoi se foutre sous la dent du côté des vieillards qui ont su se renouveler en signant des films détonants : Almodovar et Morreti, qu'on croyait rangés des bagnoles et qui ont réalisé deux des plus beaux films de l'année, contrairement à Woody Allen qui, avec l'indigent Minuit à Paris, continue à fumer des mauves pépère, à l'instar de Wes Craven et de son misérable Scre4m (le cinéaste est un amour dans le civil mais il est en mode pilote automatique depuis trop longtemps). On aurait pu écrire un paragraphe sur les cinéastes reconnus, approuvés par le métier et habitués à sortir un bon film honnête tous les dix ans, qui ont cru bon de pointer du doigt 2011 sur leur calendrier pour sortir leur nouveau bébé, mais Peter Weir, avec The Way Back, est le seul cette année de cette catégorie, donc on s'en tiendra là. Il y aurait peut-être Jean-Michel Ocelot, l'auteur des Contes de la nuit, mais ça n'a rien à voir d'une part, et d'autre part nous sommes un peu passés à côté de ce film, comme à chaque fois avec Ocelot dont les ombres chinoises africaines n'ont jamais su nous choper réellement.



Il y a aussi eu beaucoup d'OVNIS observés dans le ciel cette année. Sur Il a osé "OVNI" est simplement synonyme de "documentaire" ou de "film pas normal". Parmi les Objets Volants Non Identifiés, les principaux restent : The Troll Hunter, docu incomplet sur les trolls, Pater, méta-docu-fiction-de-mes-deux, Pina et La Grotte des pas perdus, ou quand la 3D, utilisée par les Allemands W&W&W&W, Wim Wenders et Werner Werzog, se met au service de l'art avec un grand A (les ballets de la Pina Bausch et les gribouillis des hommes de Cro-Magnon), pour changer un peu des culs bleus d'avortons (certes assez craquants) que nous avait servis Cameron l'année dernière. Et que dire de I'm Still Here, le vrai faux vrai canular de Colin Farrell sur la carrière musicale de Ben Affleck. On avait été habitués à plus croustillant avec les précédents films de Colin Farrell, tous dispos en POV sur Spankwire...



On vous a également demandé un Flop, exercice toujours compliqué vu qu'on est tenté d'y nommer les films qui nous ont asphyxiés, du genre The Tree of Life, Sleeping Beauty, Somewhere, Sucker Punch, Polisse ou La Guerre est déclarée, comme les films qui sont vraiment des merdes infectes (y'a pas d'autre mot) du type Ma Part du gâteau, Les Femmes du 6ème étage, La Conquête, Rien à déclarer, L'Elève Ducobu, La Guerre des boutons, La Nouvelle Merde des gloutons ou encore Les Schtroumpfs, qui a déçu tout le monde, y compris les Schtroumpfophiles. Et puis il y a tant de saloperies qui sortent chaque année que la somme de vos classements éclectiques est assez disparate et finalement peu concluante. On peut toutefois remarquer que le cinéma à grand spectacle hollywoodien a une fois de plus exaspéré plus d'un cinéphage avec des immondices portant les noms de Green Lantern, Green Hornet, Comment tuer son boss ?, La Planète des singes : les origines, Thor, Numéro 4, Thor, Conan, The Thing, Bad Teacher, Paul, Thor et l'indétrônable Cowboys et envahisseurs, qui a quand même su se détacher et remporter quelques suffrages notoires dans le grand bain de vos coups de gueule. On se payera le cas Jon Favreau d'ici peu sur le blog, faîtes-nous confiance. Cette année fut aussi celle de tous les remakes, reboots, prequels, sequels et compagnie, dont on a cité un bon paquet d'exemples ci-dessus. Seule bonne nouvelle : à ce rythme-là, des scientifiques ont prouvé, d'après des calculs fournis par les meilleurs ordinateurs de la Nasa, que d'ici 36 mois il ne restera plus aucun film à remaker, et on a hâte d'y être. Autre triste tendance, dans le cinéma mondial cette fois-ci, on regrettera la mode des films en "able" : Expendables, (Les) Impardonnables, Présumé coupable, Intouchables, et ainsi de suite, autant de films à ne pas voir, tout simplement.



Voila pour le bilan de cette fière année 2011. Oublions vite les déceptions et autres navetons de toutes catégories pour ne nous rappeler avec bonheur que des grands films sortis cette année, qui sont assez exceptionnellement nombreux et que nous n'avons pas fini de revoir et d'aimer à qui mieux mieux. Nous ne sommes pas nombreux à le penser, bizarrement, mais n'y allons pas par quatre chemins : 2011 fut un grand cru cinématographique et si 2012 en prend de la graine nous accueillerons la soi-disant fin du monde avec un smiley. D'ailleurs l'année commence plutôt très bien avec Take Shelter, excellent film de Jeff Nichols, un jeune cinéaste déjà important et qu'il faudra suivre de près dans les années à venir. Et nous pouvons compter sur un certain nombre de gros titres annoncés dans le courant de l'année qui nous font déjà saliver. Pour ne citer que quelques noms, nous verrons bientôt sur nos écrans les nouveaux films d'Alain Resnais, Alexander Sokourov/Payne, Arnaud Desplechin, Abbas Kiarostami, Olivier Assayas, Lucas Belvaux, Werner Herzog, David Cronenberg, Hirokazu Kore-Eda, Chantal Akerman, Abel Ferrara, Arnaud Des Pallières, Wang Bing, Tarantino, Coppola, Spielberg et tant d'autres...



Rendez-vous tout au long de l'année pour de nombreuses critiques de tous ces films et, comme d'habitude, de quelques vieilleries en tous genres. Mais pour commencer, dans les temps qui viennent nous éplucherons les films-phares de 2011 passés à l'as et nous réglerons nos comptes avec pas mal de ceux qui nous ont retiré quelques points à chaque œil. Rendez-vous aussi en janvier prochain pour un autre bilan, et on peut d'ores et déjà vous annoncer que tout le monde sera dans la merde vu que le nouveau Tarantino est prévu pour le 26 décembre 2012 ! Les blogueurs devront attendre au moins jusqu'à cette échéance pour poster leurs classements tranquilles, et nous serons peut-être un peu moins ridiculement en retard que d'habitude. En attendant nous tenons à remercier chaleureusement tous ceux qui ont participé aux votes pour établir le classement des meilleurs films de 2011. Nous remercions aussi particulièrement Fredastair ; Rick et Pick ; Nightswimming ; Donc Acte ! ; L’univers et le reste ; Blake ; Pausanias ; Gendar ; Chroniques du cinéphile stakhanoviste ; Cinedingue ; Ca flim ; Lexou ; Zombiatarian ; Brozkinos ; Une fameuse gorgée de poison ; C'est entendu ; Géotoine ; Thibault ; Erwan (si on a oublié quelqu'un, qu'il se manifeste et nous excuse !). Et pour finir, sentez-vous libres de poster vos tops personnels, commentés ou non, dans les commentaires de cet article, pour élargir le débat !