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31 décembre 2022

Les Banshees d'Inisherin

J'étais resté en mauvais termes avec Martin McDonagh suite à son lourdingue Three Billboards mais je gardais toutefois un agréable souvenir de Bons baisers de Bruges. Il réunit justement ici le même duo d'acteurs, Colin Farrell et Brendan Gleeson, mais, s'amusant de nos attentes de spectateurs conscients de l'alchimie si particulière des deux irlandais, McDonagh nous narre ici une drôle d'histoire de rupture amicale, un anti-buddy-movie en forme de réflexion amère sur le temps qui passe et la condition humaine. C'est un véritable chagrin d'amitié que nous vivons à travers les yeux (et sous les sourcils si expressifs) d'un brave type, gentil mais un peu simple, incarné avec une justesse étonnante par un superbe Colin Farrell qui trouve ici l'un de ses plus beaux rôles. Dès la première scène, celui-ci apprend que son compagnon de tous les jours, Gleeson donc, ne veut tout simplement plus le voir ni perdre davantage de son précieux temps à ses côtés. Nous sommes en 1923, sur une île magnifique aux larges de l'Irlande, Inisherin. Au loin, le pays, en pleine guerre civile, se déchire, nous entendons détonations et explosions. La métaphore n'est pas spécialement légère mais elle n'est guère centrale et ne gâche en rien ce film, à la fois petit, humble mais profond, dont l'ambiance et le ton singuliers nous happent rapidement. 


 
 
Martin McDonagh teinte encore une fois son œuvre de cet humour assez spécial qui est le sien et fonctionne ici plutôt bien, tantôt noir tantôt absurde, alliant discrétion et coups d'éclat, quelques bons mots et petits numéros d'acteurs. À ce propos, si Brendan Gleeson et Colin Farrell sont irréprochables, le premier presque toujours nimbé d'un nuage noir invisible qu'il rend palpable par sa présence intimidante et le second dans un rôle pourtant bien compliqué qu'il rend tout à fait crédible, c'est peut-être au plus jeune Barry Keoghan que revient la plus belle scène du film. La plus touchante à mes yeux en tout cas. C'est une sorte de remake à peine déguisé de l'un des plus grands moments de l'histoire du cinématographe : quand, dans Dumb & Dumber, Jim Carrey demande à Lauren Holly quelles sont ses chances auprès d'elle. Dans un élan de courage similaire mais un contexte tout de même plus romantique, Barry Keoghan pose à peu près la même question à la sœur de Colin Farrell, autre joli personnage joué avec délicatesse par Kerry Condon. Il obtient alors une réponse du même tonneau mais, à la différence de Carrey et bien qu'il n'ait pas non plus la lumière à tous les étages, Keoghan comprend tout le sens de cette réponse et à quel point celle-ci obscurcit son avenir insulaire. Il tente alors de sauver les apparences et lâche cinq mots d'une désarmante sincérité, aussi simples que beaux, avec une élégance gauche qui participe à les rendre d'autant plus poignants : "Well, there goes that dream". 
Quant à moi, je suis désormais réconcilié avec Martin McDonagh.
 
 
Les Banshees d'Inisherin de Martin McDonagh avec Colin Farrell, Brendan Gleeson, Kerry Condon et Barry Keoghan (2022)

10 septembre 2020

Ava

Les temps sont durs pour les fans de Jessica Chastain. Pour suivre la carrière de leur idole, ils enchaînent depuis maintenant bien trop longtemps les daubes pur jus. Avec Ava, on espère que l'actrice a touché le fond et qu'elle saura ensuite rebondir. A quel moment peut-on penser qu'un tel scénar vaut le coup d'être tourné ? On dirait une sous-production EuropaCorp. Le script est si débile qu'il aurait très bien pu être griffonné par Luc Besson entre deux entrevues à l'hôtel... C'est d'ailleurs à Besson que l'on doit le tout récent et pourtant déjà oublié Anna, autre thriller minable du même genre où l'on suivait, là aussi, une tueuse à gages surentraînée au nom en palindrome. Faut-il être encore très jeune dans sa tête pour trouver brillante l'idée d'un nom palindrome... Le titre Ava était qui plus est déjà pris, par une œuvre autrement plus respectable. Bref. C'est donc ici Chastain qui endosse le rôle d'une agente ultra efficace bossant pour une organisation secrète dirigée par cette enclume de Colin Farrell. Du fait de son métier pas comme les autres et d'une histoire de famille compliquée, Ava a des problèmes avec l'alcool, elle doit résister aux tentations tout en essayant de se rabibocher avec sa smala et en devant échapper aux tueurs de sa propre organisation suite à une mission ayant mal tourné. Vaste programme...



Devant une telle ineptie cinématographique, on s'étonne de croiser de tels acteurs. Colin Farrell se fait principalement remarquer pour son air mauvais pathétique et sa coupe de cheveux étonnante, qui parvient à nous faire oublier ses fameux sourcils. L'acteur arbore une brosse particulièrement touffue et droite qui vient curieusement compléter la très nette calvitie de John Malkovich lors des champ-contrechamps qui nous les montrent deviser entre eux : le brun fuligineux tenace de la chevelure de Farrell s'imprégne sur nos écrans quelques secondes après sa disparition du cadre proprement dite pour un effet fascinant à l'écran. Visiblement peu intéressé, et on le comprend fort bien, par son rôle, John Malkovich assure le minimum syndical, il incarne l'unique contact de Jessica Chastain, son ancien formateur, une sorte de père de substitution. On devine l'amour platonique que Malkovich éprouve pour la tueuse, mais on ne sait pas s'il est dû au fameux strabisme du comédien, à son cheveux sur la langue, ou à ce qu'il était réellement venu chercher sur le plateau auprès de sa belle partenaire...




On retrouve aussi Geena Davis dans la peau, qu'elle a très tendue, de la mère d'Ava. Sa présence au générique renforce la filiation du film avec le grand classique (?) de Renny Harlin, Au Revoir à Jamais, où celle qui était alors la femme du cinéaste à moitié timbré d'origine finlandaise campait une tueuse professionnelle à la mémoire vacillante et portait la même coupe au carré plongeant que Chastain. Le visage de Geena Davis, littéralement tiré à quatre épingles, fait d'ailleurs l'objet d'une sorte de boutade à l'autodérision pitoyable qui tombe à plat. Non, pour trouver de vrais moments de rigolade, il faut chercher ailleurs et notamment chez l'acteur Common, dont le jeu rappelle un peu celui de Vin Diesel, la magie en moins ; il est guère aidé, avouons-le, par des dialogues catastrophiques. Rayon comique involontaire : relevons aussi une bagarre entre Colin Farrell et John Malkovich qui se veut particulièrement musclée et brutale mais, filmée avec les pieds, comme tout le reste, elle est en réalité plus gênante qu'autre chose. Elle sera très vraisemblablement zappée des montages vidéos qui seront consacrés aux deux acteurs à la dérive lorsqu'ils recevront enfin leurs César d'honneur.




Les temps sont si durs pour les fans de Jessica Chastain que je me dois de remercier l'un deux : celui qui, le cœur sur la main, a réalisé les sous-titres français qui m'ont permis de suivre ce film et d'en saisir toutes les subtilités. Ce fan plein de bonnes intentions, mais à l'anglais encore perfectible, qui a daigné consacrer quelques heures de son temps à la traduction de cette daube, dernier coup de poignard en date de Jessica, afin de permettre à son prochain de la subir à son tour en toute illégalité. Peut-être aveuglé par son admiration pour l'actrice, notre cher traducteur amateur a opté pour le vouvoiement systématique à l'égard de Jessica Chastain, quand bien même celle-ci les tutoie tous en retour, qu'il s'agisse de la mère, de la sœur ou de l'ex-boyfriend de son si triste personnage. Ce choix linguistique inhabituel octroie un ton singulier à quelques scènes au demeurant tout à fait misérables. Ce moment où Jessica Chastain commande un savoureux "scotch sur les rochers" au barman, succombant à un petit délice ambré, sort également du lot. Pour le reste, circulez, y'a putain de que dalle à voir, c'est horrible ce truc.  
 
 
Ava de Tate Taylor avec Jessica Chastain, John Malkovich, Colin Farrell, Common et Geena Davis (2020)

3 juin 2019

Prémonitions

Je pensais que ça ne se faisait plus, des thrillers comme ça, qu'ils avaient, d'un commun accord, décidé d'arrêter, que c'était en quelque sorte devenu interdit. Je croyais aussi qu'il était désormais puni par la loi de filmer de cette façon-là. On croirait la caricature d'un des plus mauvais épisodes de 24. C'est laid, mais qu'est-ce que c'est laid ! Et comme si ça ne suffisait pas, Afonso Poyart nous balance régulièrement des visions atroces faites d'images subliminales et d'effets clipesques dégueulasses qui nous renvoient plus de vingt ans en arrière. C'est ainsi qu'il met en image les fameuses prémonitions d'Anthony Hopkins, une sorte de précog sans âge qui devine l'avenir des gens en leur frottant l'épaule (ça ne fonctionne que s'il frotte avec suffisamment d'énergie). J'ai tenu 45 minutes, et c'est déjà beaucoup. Je n'ai pas eu le temps de croiser Colin Farrell, qui doit vraisemblablement jouer le serial killer ou un livreur de pizzas.




Le médium de pacotille campé par Hopkins enquête sur un psychopathe doté du même don que lui (le frottement d'épaule). Ce tueur a choisi d'éliminer les personnes malades, en fin de vie, condamnées à la souffrance et dont la mort lui semble être le seul salut. Afonso Poyart pose ainsi avec la subtilité d'un rhinocéros en rut la question de l'euthanasie et place son héros vieillissant devant un sérieux cas de conscience. Son alter ego maléfique a-t-il raison d'épargner à ses victimes une lente et pénible agonie ? Avec Se7en et Le Silence des Agneaux pour modèles écrasants, Prémonitions fait partie de ces thrillers qui se veulent graves et ambiguës, cherchant à chambouler le spectateur au plus profond de son être. Dans les faits, il parvient seulement à nous agacer de par son insondable nullité, à nous pousser à bout. Anthony Hopkins est d'un ridicule absolu. Il plisse continuellement les yeux pour avoir toujours l'air en pleine réflexion, le cou légèrement avancé, comme une vieille tortue que l'on aurait envie de jeter à l'eau. Notons également la présence de la plantureuse Abbie Cornish, qui fait plus d'une fois loucher un caméraman à la libido en pleine ébullition, mais qui est si mauvaise là-dedans, ça fait peine à voir... Après ce film, Afonso Poyart est retourné vivre au Brésil, où il s'est passionné pour les arts martiaux mixtes. Nous n'avons plus de nouvelles de lui.


Prémonitions d'Afonso Poyart avec Anthony Hopkins, Abbie Cornish et Colin Farrell (2015)

2 avril 2019

Les Veuves

J'y ai cru pendant une bonne heure, puis Steve McQueen et son scénario trop tordu ont fini par me paumer complètement. On retrouve Gillian Flynn, l'auteure de Gone Girl, à l'écriture, et cela se sent. Le pitch de départ est pourtant accrocheur et a priori propice à un polar solide : des veuves de braqueurs tués lors de leur dernier méfait décident de s'allier pour un cambriolage et ainsi régler leurs dettes. Le scénario dévoile progressivement tous ses contours et se veut en réalité très ambitieux. Vers le milieu du film, survient un rebondissement assez énorme qui ne manque pas de nous retourner, mais il se produit au détriment de la cohérence générale et de notre possibilité de croire aux agissements des différents protagonistes... Quand on fait le bilan, on constate aussi qu'il y a de gros courants d'air dans le script si bien huilé de Gillian Flynn.




Fort de ses Oscars emmagasinés pour Twelve Years a Slave et d'une reconnaissance critique déjà acquise, Steve McQueen ne se contente pas d'un simple polar, il tient à jouer sur plusieurs tableaux : le film féministe tout à fait dans l'air du temps et le thriller politique qui dénonce, branché corruption et bavure policière. Au bout du compte, le cinéaste ne choisit pas vraiment de point de vue, dilue trop son récit et échoue malheureusement sur tous les fronts. Son polar manque de pep's et de clarté pour nous scotcher à notre fauteuil. Son propos est un peu trop simpliste pour nous bousculer (en gros, "tous pourris !" nous dit McQueen, d'un côté comme de l'autre). Et ses personnages sont trop voués à être des pantins pathétiques au service d'une intrigue retors pour qu'ils puissent un tant soit peu nous toucher.




C'est bien dommage car il y a quelques idées de mise en scène qui viennent nous rappeler que Steve McQueen peut parfois être un cinéaste inspiré, même quand il s'aventure dans un registre inhabituel pour lui comme l'action. Il choisit alors d'adopter un style assez sec, insistant sur la soudaineté de la violence, sa fugacité, son côté presque accidentelle, et il réussit à produire son petit effet, notamment lors des cambriolages qui ouvrent et concluent le film. Parmi ses inspirations, on retient surtout ce plan-séquence assez ostentatoire mais intelligent et lourd de sens, qui fait suite au discours démago du candidat en campagne donné à la lisière d'un quartier pauvre et délaissé de Chicago. La caméra est littéralement vissée à l'avant de la berline du candidat regagnant ses pénates, elle commence par nous montrer les quartiers pauvres de la ville avant, quelques dizaines de mètres plus loin, d'opérer un simple panoramique pour nous révéler que nous sommes désormais dans les quartiers huppés, là où se trouve son QG, une immense baraque bien chic.




Notons que les actrices sont irréprochables et auraient pu dégager une belle alchimie, mention spéciale à l'élégante Elizabeth Debicki. Hélas, Steve McQueen, trop occupé à mettre en image cette histoire trop compliquée, n'exploite pas suffisamment leur potentiel et nous finissons par regretter de les voir si peu interagir entre elles et agir ensemble. Il y a aussi quelques grands numéros d'acteurs, comme Colin Farrell, infect mais crédible en politicard aux dents qui rayent le parquet, et aussi le grand Robert Duvall, saisissant dans le rôle de son père, un vieux briscard peu fréquentable mais pragmatique et habitué aux manigances politiques. Reconnaissons aussi que Steve McQueen fait preuve d'une certaine humilité en bouclant tout ça en un peu plus de deux heures quand bien d'autres auraient profité d'un tel scénar pour livrer une bobine dépassant allègrement les trois plombes. Mais c'est là un bien maigre compliment, qui permet à peine de relativiser le temps perdu devant ce film pas affreux, certes, mais un peu raté.


Les Veuves de Steve McQueen avec Viola Davis, Elizabeth Debicki, Colin Farrell, Michelle Rodriguez et Liam Neeson (2018)

23 janvier 2018

3 Billboards : Les panneaux de la vengeance

Après In Bruges et Seven Psychopaths, il était encore possible de croire que Martin McDonagh avait du potentiel et qu'il parviendrait sans doute un jour à l'exploiter pleinement, à trouver la bonne formule, le juste équilibre, pour briller enfin aux yeux du grand public. Étant donné les très bons échos qui accompagnent la sortie de Three Billboards Outside Ebbing, Missouri, et les prix qui commencent à s'accumuler dans son sillage, on pouvait penser que c'était sans doute celui-ci, le film de la confirmation tant espéré pour le cinéaste britannique. Hélas, on avait tout faux ! 3 Billboards confirme au contraire les travers déjà connus, les capacités limitées et même l'orgueil déplacé d'un réalisateur pour lequel la balance penche désormais très nettement du mauvais côté. A tel point que l'on se demande à présent si on ne s'était pas trompé depuis le début. Rappelez-vous...




Lors de la découverte d'In Bruges (réintitulé quant à lui Bons Baisers de Bruges, Martin McDonagh n'étant jamais gâté par les versions françaises de ses titres), il y avait l'effet de surprise et le plaisir, toujours très appréciable, de tomber par hasard sur un film sympathique dont on attendait strictement rien, voire que l'on lançait avec un brin de méfiance. Un simili Tarantino, mêlant les gangsters et l'humour, les coups de feu aux répliques drôlatiques, on en a vu passer quelques-uns, et on en méprise presque autant. Mais In Bruges parvenait joliment à se détacher de cette lourde association, à trouver une vraie originalité. L'humour souvent absurde et le ton assez singulier du film étaient ainsi parvenus à nous charmer. Les personnages principaux étaient rendus attachants par d'excellents acteurs, formant un casting original : Colin Farrell, Brendan Gleeson et Ralph Fiennes, très cools, avaient l'air de s'amuser aussi, heureux d'être là, inspirés par un scénario étonnant. En bref, In Bruges était une bonne petite surprise qui nous emplissait de sympathie et d'espoir à l'égard de Martin McDonagh. On ignorait alors que l'on venait déjà de voir son meilleur film !




On avait en effet pas mal déchanté devant Seven Psychopaths et sa ribambelle d'acteurs encore plus impressionnante, jugez du peu : Christopher Walken, Colin Farrell, Sam Rockwell, Woody Harrelson, Tom Waits et, à des fins purement décoratives, Olga Kurylenko et Abbie Cornish (Martin McDonagh ayant un goût prononcé pour les très jolies filles, qu'il place généralement dans les bras d'hommes bien plus âgés...). Tous venaient faire leurs petits numéros avec plus ou moins de talent dans un salmigondis supportable mais fonctionnant beaucoup moins bien avec, toujours, ce mélange de genres et de registres cher à McDonagh. C'était clairement raté mais il y avait tout de même là-dedans une originalité et une ambitieuse mise en abyme qui ne donnaient pas envie de tomber sur le film et son auteur à bras raccourcis, mais plutôt de rester bienveillant à son endroit, de saluer l'essai manqué en espérant qu'il réussisse au prochain coup. Déjà couronné aux Golden Globes, quasi unanimement salué par la critique et bien parti pour rafler quelques Oscars, 3 Billboards donnait des raisons d'y croire. Malgré 10 ans d'expérience en tant que blogueur ciné derrière moi, avec toutes les désillusions et les déceptions qui vont avec, je suis encore naïf...




Cette fois-ci, Martin McDonagh s'aventure du côté du mélo, du drame familial, ce qui explique peut-être ce succès plus large. Il nous narre le désir de justice d'une mère (Frances McDormand), très remontée contre une police qu'elle juge inefficace après le viol et le meurtre de sa fille, toujours irrésolu. Elle tente donc de secouer son petit monde en affichant trois panneaux gigantesques à la sortie de la ville, qui attirent les médias et apostrophent directement le shérif, campé par un Woody Harrelson atteint d'une maladie incurable. Martin McDonagh nous sert sa petite recette habituelle mêlant le sérieux à l'humour à travers des situations absurdes et quelques répliques bien senties, le tout servi par des acteurs de talent dans la peau de personnages haut en couleurs (empruntant même aux frères Coen leur actrice fétiche, Frances McDormand, lui que l'on plaçait déjà naturellement dans leur voisinage cinématographique).




En situant son film dans le sud des États-Unis, Martin McDonagh en profite pour égratigner, très gentiment, l'Amérique, son racisme, son homophobie et la débilité profonde de certains de ses habitants. Dans ce domaine-là, il réussit plutôt bien et son film s'avère plus d'une fois amusant. Remarquons tout de même que tout cela reste très inoffensif et qu'il filme avec empathie son flic raciste et ultra violent en quête de rédemption. McDonagh est nettement moins à l'aise quand il s'agit de nous faire croire en la détresse de son personnage principal, pourtant solidement campé par une Frances McDormand irréprochable. Il nous livre ainsi un flashback totalement inutile et d'une lourdeur inouïe, nous retraçant le dernier échange de la mère avec sa fille, avant que celle-ci ne soit retrouvée morte : se disputant pour une histoire de clés de bagnole que la maman refuse de lui octroyer, la gamine finit par gueuler "Eh ben j'espère que je vais me faire violer et que tu seras contente !", et la mère de répondre "Ouais c'est ça, fais-toi violer !"... Quelle finesse.




McDonagh chausse régulièrement ses plus gros sabots pour essayer de nous émouvoir et choisit de rompre parfois très brutalement le ton de son film, quitte à ce que cela paraisse bien artificiel. Lors d'une scène d'interrogatoire a priori légère et humoristique, le chef de la police joué par Woody Harrelson, après avoir débité des dialogues plutôt marrants, se met ainsi à tousser du sang au visage de Frances McDormand, pour mieux nous rappeler qu'il n'en a plus pour très longtemps. Il n'y a rien à faire, ça ne fonctionne pas. On a l'impression que le réalisateur nous prend pour de très jeunes enfants, encore capables de passer du rire aux larmes dans la seconde.




Trop désireux de nous surprendre coûte que coûte, Martin McDonagh a écrit un scénario bancal dont les péripéties successives apparaissent bien trop grossières. Nous ne croyons pas en ces personnages, pour la plupart égoïstes et peu aimables, ni en leurs revirements successifs. Celui joué par Sam Rockwell, plutôt bon dans un rôle ambivalent, cristallise bien ce problème : comment croire en ce flic totalement crétin qui découvre d'un seul coup qu'il peut être un peu moins con à la lecture des recommandations posthumes du shérif ? Et comment rire aux facéties de cet énergumène d'une connerie abyssale que McDonagh filme presque en héros ? Tantôt tout juste drôle, tantôt pleinement haïssable, on finit par se moquer d'un personnage si peu crédible, malgré tous les efforts d'un acteur doué auquel l'Oscar tend les bras.




Côté mise en scène, Martin McDonagh ne fait pas non plus dans la dentelle... Quand il se lâche et nous sort un plan séquence en caméra portée où il suit ce con de flic emporté par sa colère et son goût irrésistible pour la violence, le tout accompagné par les envolées vocales de Jim James poussées à plein volume, on est presque mal à l'aise et on a envie de dire au réalisateur "Mec, relax, ça pèse des tonnes tout ça...". Pour le reste, le cinéaste britannique ne prend aucun risque et filme ma foi très platement, sans réelle inspiration, sans aucune fulgurance (à moins que l'on nomme ainsi l'apparition, hideuse, de la biche numérique). Si la vision de ce film n'est pas une souffrance et qu'elle reste passablement divertissante, elle vient saper tous les espoirs jadis placés en Martin McDonagh, dont on connaît désormais bien la formule et ses limites. On retrouve dans 3 Billboards les (petites) qualités et les (gros) défauts habituels du réalisateur, définitivement plus doué dans l'humour et qui devrait peut-être s'y cantonner. Ce serait encore un sacré hold-up si ce film-là remportait les Oscars et compagnie. Un de plus, me direz-vous. 


3 Billboards : Les panneaux de la vengeance de Martin McDonagh avec Frances McDormand, Sam Rockwell et Woody Harrelson (2018)

14 juin 2015

Phone Game

L'affiche de ce film ne nous évoque rien de bien agréable, à cause de sa tagline : "Raccroche et tu es mort". C'est ce que nous disent nos compagnes à chaque fois qu'on les a au bout du fil... Pourtant, ce poster symbolise une heure et quart de pur bonheur. Une heure et quart en compagnie de Colin Farrell in a glass case of emotion. L'acteur est pris au piège d'une cabine téléphonique. La caméra est coincée entre ses sourcils de dingue et le combiné. A l'autre bout de la ligne, pointant sans relâche le canon scié de son fusil à lunette sur Farrell, un acteur dont la voix commençait à peine à être reconnaissable, alors qu'elle est aujourd'hui une signature, au point que quiconque découvre le film de nos jours saura dès le départ qui incarne le vilain : Jack Bauer. Mais ça n'a finalement que peu d'importance tant le suspense et la tension instaurés par Joel Schumacher reposent sur un pitch minimaliste dont on mesure aujourd'hui toute l'importance dans l'histoire des scripts à Hollywood. 


Le regard du type qui se dit : "Putain il vise pas trop maaaaal..."

Combien de films découlent en droite lignée de Phone Game ? On peut penser à Buried, à Locke, à Frozen, à Wrecked et tant d'autres, qui s'appuient tous sur une unité de mot, de lieu, de temps et d'action réduite au maximum pour un suspense d'autant plus grand et des rebondissements forcément percutants. Combien d'acteurs s'inspirent par ailleurs du jeu de sourcils de Colin Farrell ? En 2002, à l'aube d'internet, alors que minitels et fax se disputent encore le bureau de papa, Joel Schumacher a déjà flairé tous les changements à venir dans le domaine des communications, actant tout simplement la mort de la cabine téléphonique en tant que telle et de tout ce qui est filaire en général. Une anecdote assez connue raconte que durant la promotion de ce film, à un journaliste malicieux et encore sous le choc de la projection qui lui demandait : "Comment voyez-vous le futur Monsieur Schumacher ?", le cinéaste répondit en pointant tous les recoins de la pièce du bout d'un index giratoire : "Tu vois tous ces fils qui traînassent par terre ? Bientôt y'en aura plus". 


Le visionnaire, entre deux éclairs de génie.

Artiste visionnaire, Schumacher n'en est pas moins un bras cassé, un facho affirmé et depuis peu un taulard dont on attend la sortie de coma après une chute en rollers lors d'un séjour de villégiature dans le sud de la France, plus précisément à Rouffiac-d'Aude, où nous avons nous-mêmes de la famille. Toujours dans les bons coups, notre clébard, Baltasar Kormákur, au volant de son pick-up, pris dans son élan, n'a pas freiné à temps et a heurté Joel (avec ce bruit que fait un bouchon de champagne qui saute) tandis que le cinéaste sortait chercher son journal. On est donc aux premières loges de ce drame, pour lequel nous éprouvons tout de même une once de culpabilité. Ne laissez pas conduire vos clebs, même quand ils semblent savoir piloter. Rassurez-vous, notre Baltasar fait ses nuits, pas troublé le moins du monde.


Phone Game de Joel Schumacher avec Colin Farrell, Kathie Holmes, Rada Mitchell et Kiefer Sutherland (2002)

25 juin 2014

L'Imaginarium du Docteur Parnassus

Heath Ledger est mort en tournant L'Imaginarium du Docteur Parnassus. Je me contente de cette phrase scrupuleusement factuelle et je vous laisse faire les liens que bon vous semblera (mais qui s'imposent au bon sens). L'acteur est décédé avant d'avoir pu tourner toutes les scènes du film de Terry Gilliam, et fut remplacé au pied levé par ses amis Johnny Depp, Jude Law et Colin Farrell, tour à tour appelés à faire le déplacement par le réalisateur à chaque fois que le héros de son film devait passer dans un nouveau miroir vers un autre monde parallèle. Si Ledger n'a pas pu tourner toutes les scènes autant vous dire qu'il n'a pas non plus eu le temps de poser pour l'affiche, et on devine à sa petite taille et aux reebok portées avec un costume trois pièces que c'est Colin Farrell qui a prêté son corps à l'acteur mort, dont le visage a ensuite été collé là sous photoshop pour un résultat qui laisse à désirer mais qui n'égale pas, en termes d'atrocités, le contenu du film.


Colin Farrell est soit un pur génie soit une vaste enflure, j'ai encore des doutes.

Le début, c'est très finement vu. Ça commence par le spectacle, dans une sorte de foire, du fameux docteur Parnassus, et personne n'y assiste, personne n'en a rien à battre. C'est une belle méta-analyse. Personne n'en a effectivement rien à foutre de L'Imaginarium du docteur Parnassus. A part moi qui ai maté cette daube à 23h01 un samedi, en maudissant le petit quart d'heure qui me séparait de l'émission hebdomadaire d'Alain Ruquier, l'épouvantail du PAF, cet empaffé, mon pote Ruquier, cette triste personne. Je suis accro à la perruque peroxydée de Ruquier, je suis gaga de ses blagues sexistes et racistes en bois, de son vieux dentier et de ses mimiques affreuses, et ça fait de ma vie un suffisant merdier pour en prime m'envoyer, alors que personne ne m'y force, les élucubrations cafardeuses de Terry Gilliam, l'idole des réalisateurs français à la ramasse (Dupontel en tête).


Parnassus lui-même se contrefout de son propre imaginarium...

Cette brillante méta-introduction du film nous présente donc le show du docteur Parnassus, qui n'amuse personne et encore moins ce dernier vu qu'il pionce assis en tailleur sur un tabouret au milieu de la scène. Après ce spectacle morbide, un mec complètement bourré monte sur l'estrade, balance tout le monde par terre et affirme vouloir "se faire" Parnassus. Il veut se "taper" le docteur Parmesan et le crie à la cantonade, bien décidé à, je cite, "s'enculer le doctor paillasson" (sic.). C'est son projet, il est là pour se "faire" Parnassus. Et je ne peux que me rallier à sa cause désespérée. Mais tout dérape avant que l'enculade n'ait lieu et le type entre dans un miroir pour se retrouver dans un monde parallèle prodigieusement laid, criard, usant, typiquement "décalé" et tragiquement déprimant, plein d'effets spéciaux piteux, de freaks poisseux (quid de Ron Perlman et du "mini-moi" d'Austin Powers, paumés dans le décor), enfin bref de tous les éléments habituels et autres tocs sempiternels du fameux "univers Gilliam".


L'univers Gilliam fait mal aux yeux, et la vision de ce film peut réclamer plusieurs mois passés au fond du gouffre de Cabrespine avec un sac isotherme opaque enfoncé sur le crâne, pour réhabituer la rétine à la vie et aux choses belles en particulier.

Malgré les apparences, je termine cette critique heureux. J'ai écrit tout ça en croisant les doigts pour que Gilliam sorte une nouvelle marque d'engrais sur grand écran et me donne un beau prétexte pour poster cette critique un jour. La nouvelle livraison de lisier signée du maître est enfin venue. Du coup félicitez-moi, je crois que mon petit texte est à peu près lisible, pourtant quand on écrit les doigts croisés, AZERTYUIOP devient YTRUEIEZOPA.


L'Imaginarium du Docteur Parnassus de Terry Gilliam avec Heath Ledger (aka Jude Law, aka Johnny Depp, aka Colin Farrell), Christopher Plummer et Tom Waits (2009)

25 janvier 2012

Les Marches du pouvoir

Ce film-là c'est typiquement celui que nous regardons chacun de notre côté, et chacun avec sa tchotcha (vu les acteurs en présence). Chacun se dit "je ne vais pas en parler à l'autre, sinon il ne le verra jamais", et puis une fois que l'autre l'a vu aussi, on se réunit pour en causer ensemble sur le blog, parce qu'en parler tout seul c'est pas jouable, ce serait trop laborieux, autant que le film. Ce film-là c'est la rencontre de deux beaux gosses, à l'image des deux auteurs de ce blog se retrouvant pour en causer. D'un côté Ryan Gosling, l'homme à tout faire de 2011 : garagiste dans Drive, psychopathe dans Love & Secrets, déménageur dans Blue Valentine, pigiste indé sur CE, blond platine, 90-60-90, mannequin Gillette, deuxième homme le plus sexy du Monde selon Esquire après Bradley Cooper aka Glue3, bref la totale. L'acteur a un parcours tout tracé, dans dix ans il aura son premier Oscar pour un film sur la trisomie, dans vingt ans il aura son premier rôle de manager d'équipe de baseball, dans trente ans il jouera en guest un macaque vieillard dans le 19ème épisode de La Planète des singes, dans quarante ans il passera pour la première fois derrière la caméra pour filmer un biopic lent sur Thom Yorke ou Neil Young et il ne finira pas son chef-d’œuvre parce qu'il crèvera entre temps.


The Driver s'est paumé dans un meeting politique et il se fait chier autant que nous

En face et aux manettes, George Clooney, le Obama blanc. Le seul homme qui a dû dire non à une journaliste latino qui en pleine interview filmée et pendant qu'il répondait à la question : "Alors vous avez joué dans Kung-Fu Panda 2, pas trop dur d'incarner un panda ?", lui a mimé une grosse pipe en poussant à intervalles réguliers l'intérieur de sa joue avec sa langue. Colin Farrell's way... Clooney a été obligé de dire non et de faire un mouliné avec les bras pour signifier "tout à l'heure" avant d'enchaîner sur la question suivante : "Alors ? Vous avez joué dans Cars 2, pas trop dur de doubler une bagnole ?". Clooney c'est l'homme qui a voulu être le Cary Grant des années 2000, mais son meilleur rôle reste celui de Monsieur Nespresso, dommage pour lui. Cet homme aux allures d'ambassadeur s'est octroyé le rôle du président démocrate dans The Ides of march, titre original, assez malin et tape-à-l'œil qui désigne en anglais le jour où Jules César s'est fait assassiner (vient du latin Idus Martii), sauf que c'est Ducon qui s'est collé à la traduction française et qui, après avoir suggéré "Les Idées de Mars", s'en est tenu à un plus terre-à-terre Les Marches du pouvoir.


Les deux sextoys humains de l'année sont contents d'eux, mais Dieu sait qu'il n'y a pas de quoi !

Qu'en est-il donc de ces Idées de Mars ? Un thriller politique de grand-père qui croit nous apprendre la vie et qui veut nous rencarder sur les coulisses du jeu politique où tout le monde est pourri et où c'est blanc bonnet, bonnet blanc. A d'autres Clooney, à d'autres... Comme toujours quand Clooney réalise, grooooooos problème de rythme à la clé. On suit le film parce qu'il n'est pas inintéressant et parce que les acteurs sont là, mais tout ça est terriblement mou du genou et les temps morts durent une heure et demi. Reste un script où Clooney, qui aime à faire des films à charge, semble faire part de ses désillusions politiques d'homme de 60 balais qui a paumé ses rêves d'adolescent et qui "en est revenu". Clooney ne votera peut-être pas Obama, dont il reprend les codes visuels de campagne, vu ce qu'il met dans la tronche du parti de son cœur avec cette histoire de blackmailing à tout-va. "Tous pourris" nous dit Clooney ! Ton film aussi !


Les Marches du pouvoir de George Clooney avec George Clooney, Ryan Gosling, Paul Giamatti et Philip Seymour Hoffman (2011)

15 décembre 2011

Comment tuer son boss ?

Tandis que la Grèce nous refait le même coup que lors de l'Antiquité, c'est-à-dire s'effondrer et laisser derrière elle ruines, désolations et guérillas, moi je me suis lancé Comment tuer son boss ? en bouffant un kefta arrosé de tzatziki ! Le pitch, en quelques mots. On a là trois mecs qui veulent se débarrasser de leurs patrons respectifs. Jason Bateman, soit littéralement "l'homme chauve-souris", doit subir le diktat d'un supérieur lunatique et violent : Kevin Spacey, qui tient à bout de bras les quelques scènes réussies de ce pauvre film. Jason Sudeikis est quant à lui l'employé préféré de son patron, Donald Sutherland, et tout va comme sur des roulettes. Son avenir est tracé, son patron lui ayant déjà promis sa place. Le dernier, Jason Day, se fait tout simplement assaillir de propositions indécentes de la part de Jennifer Aniston. Les trois compères décident de signer un pacte en se promettant de s'entraider à se débarrasser de leurs boss respectifs.

 
Là vous me direz "Mais Jason Sudeikis jouit d'une position fort enviable, non ?". Sauf que, ironie du sort, son patron, après lui avoir adressé un clin d’œil, a succombé à une heart attack et c'est malheureusement son fils, interprété par un Colin Farrell qu'on avait pas vu aussi survolté depuis Daredevil, qui reprend légalement les rênes de l'entreprise. Sauf que cet homme-là est un érotomane, cocaïnomane et qu'il a une dent contre Jason Sudeikis (father and son relationship problems). Conclusion : nos trois gus n'ont plus qu'une seule envie, se débarrasser de leurs boss. Vous vous rendez compte que ça fait trois fois que je répète qu'ils veulent se débarrasser de leurs boss, et c'est bien là le problème de ce film : dès le moment où ils décident ensemble qu'ils veulent se débarrasser de leurs boss, il ne se passe plus rien !


Et la question qui me vient, c'est : pourquoi vouloir se débarrasser de Jennifer Aniston ? Je comprends la logique dans l'envie d'éliminer Colin Farrell ou Kevin Spacey qui ont bien fait comprendre à leurs subalternes qu'ils leur feraient la peau à la moindre incartade, mais pourquoi Aniston, qui ne réclame, après tout, qu'un coup de vous-savez-quoi ? Je conçois tout à fait la légitimité de rester fidèle à sa bien-aimée mais mettons-nous dans la peau du personnage interprété par Jason Day : quand une telle situation se présente, l'ado de 15 ans qui est en toi te hurle de réaliser séance tenante un acte sexuel bref, violent et culpabilisant avec cette femme au regard, aux manières et au parler salaces. Certes, Jennifer Aniston est une érotomane qui submerge sa victime de propositions outrageusement indécentes, mais c'est loin d'être l'ordure hyper violente fan de Beethoven incarnée par les deux autres boss. Quel homme hétérosexuel normalement constitué viendrait lui jeter la pierre ? Et c'est bien ce dont les producteurs se sont rendus compte puisqu'ils ont décidé de faire s'entretuer Kevin Spacey et Colin Farrell tandis qu'ils laissent la vie sauve à Jennifer Aniston. Pendant ce temps, nos trois Jason s'en tirent les mains dans les poches, les pieds au guidon. Là je viens de vous spoiler le film. Je viens de vous épargner 1h40.

 
Pour clore ma chronique, je citerai un anonyme croisé sur internet : "Jennifer Aniston drove me nuts. Biggest tease ever ! Let's face it though, any married man would still fuck her if he had the chance." En effet. Moi qui espérais pouvoir apprécier les derniers atouts charmes de Jennifer Aniston avant sa date de péremption (11. 02. 2012), je m'estime floué. Les uniques répliques et plans grivois se trouvent dans la bande-annonce, disponible gratuitement sur Youtube (faut dire que le film intégral est aussi disponible gratuitement depuis un moment...). Là résidait l'argument numéro 1 qui m'a convaincu à entre guillemets aller au cinéma ou, si vous voulez, à "acheter le dvd" (on se comprend !). Je suis très amer et déçu.


Comment tuer son boss ? de Seth Gordon avec Jason Sudeikis, Jason Bateman, Charlie Day, Kevin Spacey, Colin Farrell et Jennifer Aniston (2011)

10 juin 2011

Les Chemins de la liberté

Peter Weir est un cinéaste qui prend son temps, et c’est une denrée de plus en plus rare à Hollywood. Dans la vie et dans ses films, c’est à l’évidence un type qui n’aime pas se presser. Le réalisateur australien, officiant aux Etats-Unis depuis maintenant près de 30 piges, a donc mis 8 ans avant de sortir un nouveau film après son fameux Master and Commander. Si ce dernier n’avait pas été un franc succès, on aurait ainsi pu dire que le cinéaste a vécu une longue traversée du désert, à l’image, littéralement, de son groupe de personnages dans le film qui marque son retour tant attendu : Les Chemins de la liberté (The Way Back en vo, soit Le Demi-Tour en québécois). Peter Weir retrace en effet le périple d’une bande de prisonniers échappés d’un camp de travail sibérien en 1940 et bien décidés à regagner un pays où ils seraient libres. D'où le titre, astucieux. Ces hommes, partis du nord de la Sibérie, se donnent ainsi pour objectif d’aller à pieds jusqu’en Inde, après avoir constaté avec effroi que la Mongolie était désormais une alliée de l’Union soviétique et ne constituait donc plus une terre d’accueil en accord avec leurs désirs de liberté. D'où le titre, là aussi astucieux. Plus tard rejoints par une jeune fille de 15 ans mais qui ressemble déjà à une catin avec 15 ans d'expériences sexuelles intenses, ces grands randonneurs devant l’éternel traverseront quasiment tous les types de paysages possibles, des montagnes enneigées de la Kolyma à l’étendue désertique de Gobi, en passant par les steppes arides d’Asie centrale et les eaux limpides du Lac Baïkal, offrant ainsi à Peter Weir l’occasion de nous croquer avec un savoir-faire évident des images de toute beauté, sans jamais aller jusqu'à la véritable contemplation.


Peter Weir, l'homme au béret, se mime ici en train de palper le cul de Saoirse Ronan, aux côtés d'un conseiller, spécialiste en climatologie et en culs juvéniles. Vieux pervers.

Évadés de leur camp en pleine tempête et dans un froid polaire, les personnages devront en outre faire face à quasiment tous les grands types de climats enregistrés sur le sol terrestre, puisqu’ils devront aussi affronter la chaleur la plus extrême ainsi que des ours libidineux au cours de leur folle randonnée. On raconte que le vétéran Peter Weir a passé tout le tournage du film avec un manuel de géographie physique sous un bras et le livre controversé de Slawomir Rawicz, A Marche forcée, sous l’autre. Bien qu’il prenne quelques libertés avec le second, le réalisateur natif de Sydney illustre le premier avec application et passe strictement tous les climats en revue, à l’exception des climats tropicaux et subtropicaux. Le metteur en scène aux allures de vieux prof de lycée fatigué nous livre donc un film pluridisciplinaire à recommander à tous les enseignants d’Histoire-Géographie, ces derniers pourraient le diffuser en classe pour tuer le temps en attendant les grandes vacances.


Communiste à la ville comme à l'écran, l'acteur n'a pas souhaité retirer son tatouage bien qu'on lui ait dit que le camarade Staline n'a pas fait que du bien à son idéologie chérie.

Avec un classicisme élégant, efficace mais rarement surprenant, Peter Weir s’attarde surtout à nous dépeindre les caractères de ces personnages auxquels on s’attache progressivement. Comme c’est désormais rarement le cas dans les films américains, ces individus et leurs secrets nous sont dévoilés sans hâte et avec subtilité, ce qui participe à rendre le film captivant du début à la fin, bien qu’il dépasse les 2 heures. On peut toutefois reprocher au héros, le meneur de la troupe, d’être un peu lisse. Il est d’ailleurs incarné par un acteur dont le nom m’échappe (d'après l'affiche, je dirai qu'il doit s'agir de Jim Sturgess). Peut-être aussi est-il légèrement éclipsé par celui campé par le charismatique Ed Harris, impeccable dans le rôle d’un vieux briscard simplement guidé par son instinct de survie, et par le personnage le plus haut en couleurs du film, le chien fou de la bande, sous les traits de l’imprévisible Colin Farrell. L’acteur irlandais marche ici sur des œufs avec ce personnage difficile de bandit endurci, fervent communiste malgré son séjour au goulag, arborant sur le torse un impressionnant tatouage à l’effigie de Staline et Lénine. Colin Farrell parvient à ne jamais tomber dans la caricature, et cela serait de mauvaise foi de dire qu’il n’est pas crédible dans le rôle de cet impitoyable criminel russe croyant encore en son pays. Ces personnages sont si bien dessinés que lorsque l’un d’entre eux vient à mourir, à bout de force, sa mort est toujours poignante. La mise en scène discrète de Peter Weir brille particulièrement dans ces moments émouvants, toujours traités avec délicatesse, recul et simplicité, sans effets faciles et tire-larme comme c’est en général la règle dans les productions américaines.


Colin Farrell aurait affirmé que pour lui, Ed Harris était l'exemple à suivre. Cette déclaration amicale envers l'acteur-réalisateur pose problème lorsqu'on se rend compte que Farrell apparaît souvent derrière lui, tentant de l'imiter du mieux qu'il peut. Sur ce plan, c'est quand même pas mal réussi.

Peter Weir s’applique aussi à nous décrire la survie de ces personnages au cours de leur interminable périple, sans toutefois rentrer dans les détails ni s’approcher d’un style documentaire. Pourtant, on aimerait parfois bien en savoir plus, connaître le menu de chacun de leurs repas, les endroits où ils choisissent de dormir, etc. Et cela est davantage une preuve de la réussite du film que d’une insuffisance quelconque. Le cinéaste met aussi de côté son penchant réaliste lorsque notre bande de taulards se retrouvent nez-à-nez avec une jeune fille fraîchement échappée d’une ferme collective et désireuse de faire la route à leurs côtés. En réalité, nul doute que la jeune fille subirait les assauts de ces ex-taulards qui n’ont pas vu le moindre cul si joliment bombé depuis des années ! De la même façon, on pourra également trouver les randonneurs un brin grassouillets...


Magie du cinéma : pas une seule seconde du film n'a été tournée sur le territoire russe.

La fin du film, trop rapide et maladroite, déçoit quelque peu. On ne peut s'empêcher de penser que Peter Weir aurait dû stopper son film un quart d'heure avant (dans la hutte tibétaine, où les survivants échangent sur leurs projets, avec l'assurance que le pire est derrière eux), ou qu'il aurait carrément dû enchaîner sur une heure supplémentaire nous dépeignant la traversée de l'Himalaya (ici croquée en quelques secondes !), mais au risque de lasser. Peut-être aussi que le cinéaste n'a pas pu faire tout ce qu'il souhaitait... Bien qu’il manque un je-ne-sais-quoi pour faire de ce film une réussite totale Les Chemins de la Liberté est tout de même une œuvre hautement recommandable, surtout par les temps qui courent. Après l’avoir vue, vous jurerez avoir marché pendant deux plombes ! Sacré Tuper Ware !


Les Chemins de la liberté de Peter Weir avec Ed Harris, Colin Farrell, Jim Sturgess et Saoirse Ronan (2011)

4 juin 2011

London Boulevard

Quand t'es condamné à avoir le cul vissé sur le siège inconfortable d'un Téoz Eco pendant 10h avec comme seul échappatoire un mini laptop à la batterie chargée à bloc et contenant une petite paire de films sélectionnés à la va-vite, tu es normalement prêt à t'enquiller n'importe quelle saloperie, histoire d'éviter de regarder ton voisin envieux dans le blanc des yeux. C'est du moins ce que je croyais, jusqu'à cet épouvantable trajet Lille-Portbou où j'ai eu la sale idée de lancer London Boulevard. On pourrait appeler ça le "Test du Téoz Eco" : quand un film ne parvient même pas à capter notre attention lors d'un voyage en train interminable que l'on cherche pourtant à écourter par tous les moyens, c'est que le film en question est réellement merdique. C'est donc le cas de ce London Boulevard que l’on doit au dénommé William Monahan, un sale type dont je viens d’apprendre qu’il est surtout connu pour être un scénariste reconnu et multi-récompensé : point d'orgue de sa carrière, l'Oscar du meilleur scénario pour Les Infiltrés de Martin Scorsese, un malheureux remake à peine déguisé !


Y a pas mal de "sessions seigue" qui tombent à l'eau avec une telle photo

Colin Farrell incarne ici un ex-taulard roi du braquo qui profite à peine de ses premières heures de liberté quand il se voit proposer une offre qu'il ne peut refuser : devenir le bodyguard d'une actrice assaillie par les paparazzi, tellement célèbre qu'elle est chaque semaine en couverture de tous les magazines people. Et tellement bonne que ses cousins ont changé de nom pour avoir une chance de lui faire sa fête, on se comprend. Quand Farrell voit que cette actrice a les traits délicats de la maigrichonne Keira Knightley, son sang ne fait qu'un tour, surtout au niveau de ses corps caverneux, et il accepte illico. Mais c'est sans compter sur ses anciens potes truands qui ne l'ont pas oublié et qui lui rappellent dès qu'ils peuvent son passé de malandrin, notamment par des coups de fil incessants. Farrell ne passe jamais une heure tranquille en compagnie de sa future conquête anorexique sans être dérangé par son téléphone. "Hé y'a une fusillade suivie d'un McDo prévue demain à telle heure, t'en es ou quoi ? Y'aura du sang sur les murs et ça sera pas le mien, on va faire des bas-reliefs sur les murs avec les gueules de nos victimes !", "Ow j'ai un bon plan de braquo facile d'une BNP tranquille, je peux compter sur toi ou quoi ? C'est un plan en or, gros, on mettra des masques de présidents des States pour ne pas se faire reconnaitre et on fera une session surf après, pour se détendre...", "Tu viens chez wam demain soir ou quoi ? J'ai PES et le dernier Marc Esposito, mec, j'ai aussi la vidéo de Taïg Kris qui saute de la Tour Eiffel en HD !", "Yo Ferraille de mes deux astérosourcils de merde, j'ai gagné deux billets pour aller voir Sochaux - Guingamp (64ème de finale de Coupe de France) et j'ai direct pensé à toi quoi". Farrell a beau répondre "quoi" systématiquement, il finit par céder, et le voilà à nouveau embarqué dans une sale histoire à Montbéliard...


Déchu de ses poils, on dirait une photo du profil facebook de mon cousin

London Boulevard
est donc un très banal film de lascars que l’on pourra ranger dans les pires dvdthèques aux côtés de Get Carter (la version avec Sly Stallone !) et du coffret réunissant l’ensemble des saisons des séries Veronica Mars et Joey. Dès le départ, le film m’a foutu le cafard et a plongé le compartiment dans lequel j’étais installé dans une ambiance délétère. Ces histoires-là, je n’en veux plus ! Le coup du lascar à la gueule d'ange fraîchement sorti de taule (Colin Farrell) qui s'amourache d'une tocarde a priori inaccessible (Keira Knightley) tandis que lui pend au nez la menace de retomber dans ses travers et donc de finir à nouveau derrière les barreaux ou avec une balle dans le crâne : c'est du réchauffé, du déjà vu et revu des milliers de fois ! Et c’est d’un chiant tellement carabiné que ça m'emmène direct aux chiottes du Teoz Eco histoire de me vider de mon courroux quitte à me tordre les boyaux de manière irrémédiable…


Cette image résume deux effondrements de carrière imminents

Je vous dis tout ça alors que j'ai vu l'intégralité de ce film en un quart d'heure, en accélérant un max. Il a fait fondre la batterie de mon EeePC qui pédale dans la choucroute dès qu'il s'agit de passer des vidéos en avance rapide. Du coup, ce film m'a non seulement fait paumer 15 mn de mon temps mais peut-être environ 2 heures d'autonomie à la batterie de mon mini ordi. Résultat, j'ai passé les deux dernières heures de mon voyage à zieuter le décolbard de la vieillarde obèse assise en face de moi. Faute de mieux, j'étais en train de traverser la banlieue de Thionville !


London Boulevard de William Monahan avec Colin Farrell et Keira Knightley (2011)

14 mai 2009

Le Nouveau Monde

Celui-là je l'avais loupé au ciné parce que j'avais un imprévu et que je voulais pas du tout le voir. J'avais pas tort. Terrence Malick a une idée fixe : filmer l'herbe. Je sais pas s'il est toxico dans le privé, ou s'il devient à moitié con quand on le fout dans un pré, toujours est-il que c'est ça son crédo. Petit retour en arrière. En 1974, dans son premier film, La Balade Sauvage, Malick avait plus ou moins décidé de refaire le Bonnie and Clyde d'Arthur Penn sept ans après, sans en avoir l'air, en choisissant Martin Sheen et Sissy Spacek pour incarner la jeunesse éperdument libérée des années 70 prête à tuer pour s'aimer. Si Godard avait su voir Belmondo pour A bout de souffle et si Vadim avait su voir Bardot pour Et Dieu créa la femme..., on peut dire que Malick avait une paille dans l'œil le jour du casting de son premier film, une grosse botte de paille coincée dans son œil gauche et une poutre amarrée dans l'autre. Quand on veut filmer des icônes faut quand même se rappeler que leur profil compte un minimum pour entrer dans le cœur des gens, et là causons de charisme... Pour emballer les foules un homme-tronc coiffé des cheveux les plus secs du Michigan (Martin Sheen), et une anorexique qui peut se servir de son propre blair comme d'un économe dès qu'il y a des patates à éplucher (Sissy Spacek), ça ne peut guère suffire. Toujours est-il que ces deux-là batifolaient tout le long du film dans les herbes sauvages séchées par l'impitoyable soleil d'Alabama. Dans Les Moissons du ciel, en 1979, c'était au tour de Richard Gere de se rouler dans la paille Texane pendant 3 plombes avec les roustons coincés dans la braguette de son jean Levis. Puis en 1999, dans La Ligne rouge, Malick prenait pour prétexte un film sur la guerre dans le Pacifique pour aller fumer les herbes hautes de Guadalcanal avec toute son équipe pendant vingt ans pour ce qui devait rester comme le tournage le plus long et le plus "camé" de l'histoire du cinéma.


Pocahontas sent ses doigts après s'être gratté la raie. John Smith découvre toute une culture.

Et puis en 2006 notre soixante-huitard attardé remet le couvert avec Le Nouveau Monde, adaptation de la célèbre histoire de Pocahontas, la légende fondatrice de la civilisation Américaine et jalon de sa tradition littéraire. Mais ça on s'en fout puisque ce qui intéresse Terrence Malick, c'est l'herbe. Et quoi de mieux pour filmer des herbes que ce "Nouveau monde", terre vierge, tantôt hostile tantôt si hospitalière ? Au fond Malick il s'en balance pas mal de Pocahontas. Et on va pas lui en vouloir. Qui en a quoi que ce soit à secouer de cette légende parfaitement chiante ? Non, tout le monde s'en fout. C'est super con comme histoire de toute façon... Y'en a eu deux mille comme ça, des récits de captives tantôt blanches tantôt natives, de chevaliers preux et conquérants, de sceptres en or et de calumet de mes pets, et c'est celle de Pocahontas qui est restée dans les mémoires sans doute parce que le nom de l'héroïne sonne bien... Une chance que l'histoire n'aie pas porté le nom du héros d'ailleurs, parce qu'avec un bouquin intitulé "Smith" personne n'aurait levé son cul de sa chaise. Non pour Malick c'était surtout une aubaine pour filmer des herbes, des brindilles, de la paille, des prairies, de la végétation, des prés, de la pelouse en un mot. Et Terrence Maniac s'en est donné à cœur joie. De long en large, de loin en loin, on voit la jeune Péruvienne qui interprète Pocahontas déambuler dans un sens puis dans l'autre à travers champs, à contrechamp, elle colchique dans les prés sans fin, béate, toujours plus esbaudie par le contact avec le moindre bourgeon, toujours plus excitée à chaque fleur qu'elle écrase de ses pieds plats, toujours plus bouffée par les guêpes et les moustiques, heureuse, candide, niaise, conne, faut bien le dire, elle est con comme un ballon.


Un des 3500 plans du film où Pocahontas cavale dans l'herbe.

On se demande si pour Malick le "mythe du bon sauvage" n'équivaudrait pas à un genre de "mythe du bon con". Faut voir cette native se fendre d'un sourire éternellement plus grand et plus bête à chaque fois qu'elle va courir dans les herbes folles en écartant les bras pour que ses mains frôlent les têtes fleuries des pousses sauvages de son "nouveau" monde pourtant si ancien que la farouche nature s'en est emparée - mais pour combien de temps ? Bref c'est pas ça que je disais, ce que je disais c'est qu'elle a vraiment l'air con la gosse à force de gambader toutes les trois scènes dans sa robe à ras les couilles au milieu des plantes. Malick a vraiment un gros souci. Sans parler de ses indiens qui hurlent "ouhouhouh !" à tout bout de champ. Je veux bien croire que les indiens avaient ce cri de guerre. Après tout on nous le raconte depuis des lustres, doit bien y avoir un fond de vérité. Mais de là à nous faire croire qu'ils hurlaient ça du soir au matin et du matin au soir, pour un rien, c'est vraiment les prendre pour des autistes et nous prendre pour des cons. Aimer les herbes c'est une chose mais Malick pourrait faire l'effort de respecter la mémoire et la dignité des abrutis qui les ont regardé pousser. Seulement voila, donnez du feuillage à Malick et c'est un coq en pattes, alors foutez-lui une idiote du village en culotte courte qui ne parle pas sa langue au milieu du tableau, pendue à une liane avec un sourire long comme le bras collé à la gueule, et notre homme ne se sent plus pisser.


Que filme Malick ? Colin Farrell ou des herbacées ? Impossible à dire.

Parsemé de scènes narratives probablement tournées par un assistant à la manque, un exécutant sans figure, un "yes man" très patient, le film de Malick n'est qu'une suite de plans sur une bourrique indienne en extase permanente qui danse dans les hautes herbes Américaines, filmée par un vieillard plein de tocs et sans doute plein de tiques après des mois passés dans la jungle Colombienne caméra au poing. Aussi le montage est-il totalement décousu et audacieux. Mais encore faut-il considérer comme "audacieux" un monteur d'Hollywood qui a dû suer toutes les eaux de son corps et se ronger les ongles jusqu'à se dénuder les os des doigts pour raccorder bon an mal an des milliards de kilomètres de rushes sur des herbes grimpantes au milieu desquelles, tête basse, Colin Farrell grimpait quant à lui la moitié des petites actrices locales, naïves autochtones, sans que personne ne s'en aperçoive. En tchancles ou en armure de conquistador, Colin Farrell finit chacun de ses tournages, pour ne pas dire chacune de ses journées, assis en chien de fusil sur une autre personne.

Après la sortie de ce film les journaux spécialisés annonçaient Malick sur le tournage d'un long métrage sur le golf intitulé "Green". On entendait aussi courir la rumeur de l'écriture d'un film sur le football, dont le working-title était "Grass". Mais c'est bel et bien The Tree of Life qui devrait arriver sur nos écrans un jour ou l'autre.


Le Nouveau Monde de Terrence Malick avec Colin Farrell et Christian Bale (2006)