11 février 2008

Combustion Spontanée

Je tiens à vous parler d'un film que j'ai vu l'an passé dans un cinéma underground. Ce film s'appelle Combustion Spontanée et il est réalisé par Tobe Hooper, le saint homme à qui l'on doit Massacre à la Tronçonneuse, grand classique de l'horreur et chef d’œuvre instantané du cinéma pour certains. Ce film date de 1985, et plus exactement du jour de la mort de Yul Brynner (le chauve au regard vide) et Orson Welles (le citoyen de Shanghai), c'est aussi celui de ma naissance.

Combustion spontanée est l'histoire d'une petite bourgade du Texas en proie à des phénomènes d'auto-immolation de la part de ses habitants. Dans ce film, tout le monde meurt, le Texas prend feu, mais on voit un criquet qui s'en sort, ce qui ouvre la possibilité d'un Combustion spontanée 2 au Kansas. A posteriori je vous préviens des spoilers de ma phrase précédente. A noter, en guest star, l'apparition éclair de Louis de Funès déguisé en gendarme perdu au milieu des rednecks.




Réalisé avec peu de moyen, ce film fut très rentable dès sa sortie direct-to-video (dtv, l'ancêtre du dvd, pour les intimes) mais il fut sauvagement critiqué par la presse catholique qui voyait cette œuvre comme un blasphème envers saint Patrick, le protecteur des chauves (en effet, toutes les victimes sont chauves, même Juliette Binoche). A cause de ce mouvement protestataire rétrograde et digne du Moyen Âge, le film n'a pu avoir la carrière qu'il méritait et a fini cloué au pilori de la chaise des œuvres maudites.

Heureusement, des gens ouverts d'esprit et laïques ont voulu et ont décidé de diffuser ce film dans un cinéma clandestin (que je ne citerai pas pour ne pas compromettre les promoteurs de tels projets) et j'ai pu noter dans mon calepin la date de cet évènement sans précédent. Cet événement unique s'inscrivait dans le cadre d'une rétrospective spéciale consacrée au grand Tobe Hooper, absent lors de la projection mais présent dans tous nos cœurs.




Le jour de la séance (la date restera secrète car les fuites au sujet de ce genre d'évènements peuvent remonter jusqu'au diocèse le plus proche et mettre à mal de telles initiatives, en plus on pourrait avoir un clérical qui viendrait pour foutre en l'air la soirée), un grand nombre de personnes étaient présentes, et il ne s'agissait que de personnes ouvertes d'esprit, du genre à ne pas avoir allumé la télé depuis le 2 avril 2005, 21h37 pour cause de télévision devenue communiste. Seul indice pour vous, mécréants, le cinéma se trouve à 500 mètres d'un Lidl...

Dans la salle, au lieu d'un vendeur de pop corn et de coca cola, comme dans les cinés pourris, on avait une fille tout de court vêtue qui vendait des almanachs avec des photos d'elle-même encore moins vêtue au milieu. Ils étaient de si bonne qualité que je peux vous dire sans ressentir la moindre honte que j'en ai acheté deux, dont un pour mon cousin Boris, ce qui, j'espère, le détournera de sa PS2 et de NHL 1987 pour mater les filles, ce qui est bien mieux. Juste avant la projection, un spectacle-surprise nous a été offert : l'un des organisateurs est arrivé monté sur un superbe cheval gris, en arborant une photo de Stéphane Peyron (dont il est fan). L'un des spectateurs a ensuite brandi avec ferveur un drapeau du Paraguay en hurlant "Viva les Grenouilles !". A moins que je n'ai point compris ce qu'il disait... J'ai pensé à ce moment précis que son cerveau devait être le théâtre morbide de la coexistence de deux personnalités incompatibles : un citoyen paraguayen et un batraciologue.




Le film a ensuite commencé mais mon voisin (un inconnu, je vous jure !) s'est mis à sortir son gros calibre et à réaliser des mouvements manuelles équivoques. Au début, je n'ai rien dit, jusqu'à ce qu'il m'interpelle en me demandant : "Hé, c'est pas un film de cul ce soir ?". Par réflexe, je lui ai répondu que non, et que j'aimerais que son engin opère un sous-développement pour éviter de me gâcher mon film. Mon voisin de l'autre côté a ensuite sorti son téléphone mais, devant ma mine outrée, il l'a très vite rangé. En effet, je lui ai fait mon regard de Touareg, un regard mêlé de terreur et de fermeté avec un touche d'onanisme.

Installant une tension dès les premiers plans du film (un frigo vide qui suggère une misère sans alternative) pour finir en crescendo lors d'une scène finale sans issue dont seul un criquet ressort indemne, j'ai très vite compris pourquoi ce film avait reçu le prix du Jury au festival de Plymouth en avril 1986.

Je vous le conseille, vous ne perdrez pas votre temps. Brad Dourif y est ébouriffant.


Combustion Spontanée de Tobe Hooper avec Brad Dourif (1990)

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