
Alexandre Bustillo était donc journaliste au sein de ce magazine. Peut-être même qu'il l'est toujours. J'avais bien gardé son nom en mémoire parce qu'il coïncide avec la chute de Mad Movies qui, au départ, était un papelard respectable et de grande qualité. Bon, une question se pose alors : Mad Movies était-il réellement un magazine de qualité ou bien est-ce tout simplement moi-même qui suis devenu un peu moins con en grandissant ? Non, croyez-moi, il n'y aurait qu'à comparer n'importe quel article d'aujourd'hui avec un autre d'il y a quelques années pour se rendre compte que tout s'est cassé la gueule : du style de leurs rédacteurs, désormais rempli de tics tout bonnement insupportables, jusqu'aux films dont ils font les éloges (à les croire, Jusqu'en Enfer est le plus grand chef d'œuvre de ces dernières années). Bref. A travers les quelques articles que j'ai pu lire de cet Alexandre Bustillo, je crois connaître ses deux ou trois idées ou convictions sur le cinéma ou, pour être plus précis, sur ce que doit être un bon film d'horreur. Faut dire qu'on a vite fait le tour... A l'Intérieur n'est donc que la mise en application de ces quelques convictions puériles.

Pour Bustillo, et certainement pour son compère (ils sont deux à avoir commis cette atrocité) et sûrement hélas pour bien d'autres énergumènes de leur genre, un film d'horreur se doit de ne jamais rien suggérer, d'être extrêmement premier degré, terre-à-terre au possible, jusqu'au-boutiste et ultra brutal. Ça doit littéralement prendre par les tripes. Bon, admettons, à la rigueur, pourquoi pas. Encore faut-il avoir quelque chose à dire... Je ne me souviens pas de l'histoire d'A l'intérieur, si toutefois il y en a bien une. Je garde juste le souvenir d'un huis-clos minable où deux femmes se retrouvent confrontées et finissent par s'entre-tuer. On sera peu étonnés de retrouver parmi elles Béatrice Dalle, abonnée pour le meilleur et surtout pour le pire aux films français qui se veulent "choc". On pourra en revanche découvrir Alysson Paradis, qui en plus d'avoir pour handicap d'être la sœur d'une loque humaine sans talent, et donc la belle-sœur d'un acteur à minettes qui a fait son temps, a désormais le maigrelet curriculum vitae entaché par ce film, l'un des plus détestables qu'il m'ait été donné de voir.

En réalité, je ne me souviens que d'une série de prétextes pour faire exploser la chair, pour déchaîner la violence et enchaîner les effets gores, filmés avec une complaisance évidente. Ah, si vous aimez ça, vous allez être servis. Mais si vous aimez ça, au point d'adorer ce film, alors je ne vous envie pas, car vous avez un grain ! Ce film est extrêmement dégueulasse, d'une laideur et d'une obscénité incomparables. Il fout la nausée. Il n'est rien d'autre que l'œuvre d'esprits malades, qui s'amusent à mettre en scène une femme enceinte se faire exploser le ventre à coup de fusil à pompe, et une autre, baignant déjà dans le sang, se faire percer l'œil à coup de ciseaux à travers une porte. Et je ne vous dis que ça, alors que le film est une série de scènes de cet acabit... Je serais presque curieux de voir le making of, pour savoir si nos deux réalisateurs prenaient réellement leurs pieds en tournant tout ce cirque infâme.

Un film comme ça n'aurait même pas dû connaître les honneurs d'une sortie en salles, il aurait dû être censuré. C'est moche ce que je dis, mais je le pense. Le pire, c'est qu'A l'intérieur est tristement représentatif de toute une série de films d'horreur français, qui se veulent ultra directs, secs, rugueux, violents et gores. Je pense ainsi à l'abominable Martyrs, le film à vomir signé Pascal Laugier, au moins aussi détestable qu'A l'Intérieur : il met en scène la vengeance sanguinolente de deux filles débiles finalement victimes d'une secte qui s'amuse à amener des êtres humains au plus proche de la mort, en les torturant à outrance, pour vivre à travers eux une expérience unique (je viens de tout vous raconter). Quelle idée... Dans sa critique, parue dans Mad Movies, Alexandre Bustillo décrit sans surprise Martyrs comme le "film parfait", un "chef-d'œuvre". Ça nous donne une idée de ce qu'il doit penser de son propre film, qui est exactement du même tonneau ! On n'arrête pas le progrès...

Ce qu'il y a de plus étonnant, c'est que les auteurs de ces films atroces citent inévitablement John Carpenter parmi leurs cinéastes favoris. Ils ne jurent que par lui. Or, Carpenter ne s'est heureusement jamais abaissé à tourner des merdes pareilles, son cinéma n'a rien à voir avec tout ça. D'ailleurs, il dénonce à longueur d'interviews des films comme Saw ou Hostel qu'il qualifie de "torture porn", peut-être l'une des raisons qui l'ont amené à cesser toute activité pendant près de 10 ans. Il n'a pourtant pas tort. Ces films sont bel et bien à rapprocher de la plus basse et craspec pornographie, les envies et les pulsions les plus macabres trouvent ici leur lieu d'expression. Peut-être que ça en soulage certains, et que Martyrs, tout comme A l'Intérieur, permet de canaliser un peu quelques tarés, mais je n'y crois pas trop. Ces films sont des déchets.

Je dis tout ça, je vous parle de censure, alors que je suis un grand fan de Massacre à la tronçonneuse, je suis un gros gaucho de mes deux, fervent défenseur de la liberté d'expression et des artistes de tout poil. J'écris actuellement un mémorandum sur Staline parce que le communisme et sa dégénérescence me fascinent. Je suis rouge de la tête au pied, je suis un gros facho d'extrême gauche. Je ne suis pas conservateur, je bouffe sans, je mange bio. Je ne suis pas catho, je vis en plein Pays Cathare, je suis le dernier des connards et je vous dis là un beau bobard. De la part d'un tocard, je conçois que ce soit fendard. J'étais dans la rue lors des dernières manifs, motivé comme jamais, avec mon pare-balle, ma coque pour mon service trois-pièces, ma matraque et mon canif. Et malgré tout ça, je le pense et je le redis : des films comme A l'Intérieur ou Martyrs ne devraient pas sortir en salles. Ils sont simplement l'expression d'esprits dérangés, qui se complaisent à filmer ce qu'ils refoulent sans doute au quotidien, leur envie de meurtre, leur soif de violence, leur besoin de voir des corps déchiquetés, gonflés, déformés. J'éprouve un mépris infini pour ces gens. J'avais un pote comme ça. Il avait des dossiers entiers de photos de cancers, d'actes zoophiles et de meurtres prises par les meurtriers eux-mêmes. Authentique. Il était fan de Soldier Of Fortune et il dépeçait virtuellement les cadavres qu'il laissait sur sa route en prenant au moins deux minutes et environ 200 cartouches d'uzis par victime. Il passait des soirées entières à planter un couteau dans le mur de son appartement tout en faisant une croix sur sa caution. Il m'a avoué avoir plongé le cadavre d'un chat dans l'acide pour "voir ce que ça fait", il m'a également avoué avoir l'intention de fabriquer du LSD artisanal pour arrondir ses fins de mois. Il est PhD depuis 2008. Véridique.
On ne s'étonnera pas de voir, en cliquant sur la fiche d'A l'intérieur sur le site Allociné, que la critique la plus positive a été attribuée par Mad Movies, qui pousse le bouchon jusqu'à parler, je cite, d'"une date dans l'Histoire du cinéma d'horreur". Ça laisse songeur...
A l'intérieur d'Alexandre Bustillo et Julien Maury avec Béatrice Dalle et Alysson Paradis (2007)
Martyrs de Pascal Laugier avec Morjana Alaoui et Mylène Jampanoï (2008)