30 novembre 2010

2012

Saloperie de film. J'ai décidé de vous en causer longuement parce que j'adore perdre mon temps. 2012 se place là dans la course aux pires films du monde. Il dure plus de 2h30. Le programme c'est l'histoire de la fin du monde annoncée pour 2012 par le calendrier Maya. Or, première objection, baser un film sur des prédictions qui datent de Mathusalem c'est déjà un pari, les Mayas que je sache ça reste un peuple bloqué à l'ère du moko je crois. Deuxième objection, il y a fort à parier pour que ce peuple se soit simplement éteint avant d'avoir fini le manuscrit de son calendar. Objections rejetées ? Rien à foutre. Au milieu de tout ça, John Cusackee va se révéler être un héros du quotidien prêt à tout pour embarquer ses gosses (une fille sympa et un fils gonflant) ainsi que son ex-femme (c'est donc exactement le pitch de La Guerre des mondes) dans un de ces vaisseaux construits en Chine, au pied de l'Everest, par l'union des gouvernements du monde entier pour servir d'Arches de Noé après la fin du reste du monde, englouti à tout jamais.




C'est le scénario le plus con à ce jour et chaque scène est une nouvelle somme de débilité. Les références à tous les films catastrophes les plus connus pleuvent à n'en plus finir : En pleine tempête, Titanic, Volcano, Pic de Dante, et jusqu'aux Dents de la mer quand Cusack lâche sans trembler le pathétique et sempiternel : "We're gonna need a bigger plane", en clin d'œil minable au "We're gonna need a bigger boat" du film de Spielberg. Ceci dit pour tout fan de John CuldeSac, c'est imparable, c'est un must-have. A un moment, tandis que lui et sa famille sont piégés au cœur de la fournaise du plus grand volcan de l'histoire du monde qui vient de se réveiller sous leurs panards malchanceux dans le parc de Yellowstone, et alors qu'ils auraient dû tous cramer comme des allumettes sous l'effet de la chaleur ambiante depuis déjà deux jours, Cusack se voit doublement pris au piège puisqu'il est coincé dans un camion filant tête la première dans une faille de type San Andreas qui s'ouvre béante sous ses pneus et qui dégueule à n'en plus pouvoir de la lave en fusion. Toute la sainte famille croit naturellement qu'il est décédé et hurle au désespoir quand soudain Cusack réapparaît, s'étant débarrassé Dieu sait comment du camion devenu barbeuk dans lequel il cuisait depuis cinq longues minutes, s'agrippant au bitume fondu avec ses longues mains de pianiste et sans avoir oublié de récupérer dans le fond de son bahut sa précieuse fiche de paie signée "Roland EmmeRich". Grand moment de cinoche. Très grand passage du film si l'on est un inconditionnel chevronné des facéties de l'acteur Cusack.




Ce qui est dommage c'est que le film dure 26 heures et qu'il se contente de nous montrer le moins intéressant. On n'a droit strictement qu'à la fin du monde avec tout ce que ça comporte de peaux de bananes et de cascades à répétitions aux quatre coins du globe (car c'est un film choral par-dessus le marché). A la fin la partie la plus nantie de l'humanité, qui a pu se payer un siège à bord de l'hideuse Arche de Noé, survit aux intempéries et s'aperçoit que suite aux mouvements des plaques terrestres, l'Afrique, nouveau toit du monde, est seule émergée. Alors ce résidu des plus gros connards de l'humanité vogue vers les bédouins toutes voiles au vent, à pleine vapeur. Et c'est là qu'éventuellement ça pourrait peut-être s'avérer intéressant. La fin du monde avec l'humanité toute entière qui se neigue, on s'en doute, ce qu'on ignore c'est après. C'est sûr qu'on a tous déjà vu une centaine de films d'anticipation écrits par des cons apocalyptiques voués à nous prédire l'avenir, tel que le récent I Am legend, mais ça reste un sujet drôlement cool et on est toujours avides de connaître une autre hypothèse foireuse sur l'avenir de notre sale race. De toute façon c'est une constante... Ces temps-ci le cinéma Américain, même le plus con et le plus populaire, part de scénarios potentiellement intéressants pour nous amener vers des films complètement abrutis. C'est le cas du fameux Inception, c'est le cas de The Box par exemple, qui soulève au départ quelques questionnements métaphysiques vus et revus mais toujours croustillants pour les laisser choir en deux temps trois mouvements au profit d'élucubrations débiles sur la planète Mars et sur la gueule recouverte de chair de phoque de Cameron Diaz. 2012 est une daube de plus à ce niveau-là aussi.




Ce que vous voyez là au-dessus, c'est un plan du film. Un Russe obèse, personnage dont on se fout éperdument, montre fièrement sur son cellphone une photo de sa famille à un John Cushack qui mate l'appareil du coin de l'œil en plissant les yeux. Ces trois russes sont effectivement hideux. Mais on voit surtout qu'il s'agit là d'un triste photo-montage créé par l'équipe technique du film : ces trois gourmands antipathiques sont grossièrement incrustés sur un fond bleu minable, avec à leur droite une fausse tour voulue typiquement Russe histoire de nous faire mordre à l'hameçon un quart de seconde. Le plan est effectivement très bref, d'où sans doute un certain je-m'en-foutisme assumé par l'équipe technique et la médiocrité de l'effet spécial. Mais je veille au grain. On ne m'aura pas. Ce plan que tu as délégué à ton pire sous-fifre, Emerich, je le capture en arrêt sur image et j'en fais ton étendard de pur tocard ! Tout le film est à l'image de cette photo, incroyablement mal fait. Au point que ça en est surprenant... Enfin certainement que compte tenu de l'étape actuelle de l'évolution des effets spéciaux hollywoodiens et des possibilités qu'ils offrent, ce film est plutôt "bien fait", j'en sais rien et je ne veux pas le savoir. Mais objectivement, pour quiconque n'en a cure de leurs petits trafics et de leurs jouets de milliardaires, pour quiconque mate ce truc avec des yeux neufs et neutres, le film est d'une laideur éclatante. De sorte qu'à force d'être cher c'est extrêmement gerbant. Un type comme Baudrillard a dit je crois que plus les effets spéciaux sont bien faits, dessinés minutieusement et au millimètre près pour un "rendu" optimal et des textures hyper-réalistes, plus ils permettent de remplir l'image de mille détails ultra précis, foisonnants et superfétatoires, et plus l'image finale paraît fausse (et laide). Parce qu'il y a dans le plan plus de choses que l'œil ne saurait en voir, ces films se targuant d'un soi-disant réalisme absolu, les infographistes hollywoodiens créent des images dont la fausseté saute droit aux yeux : c'est tout le problème de l'hyper-réalisme et les magnats d'Hollywood s'y empalent de plus en plus. Il suffit d'ailleurs de regarder les tableaux hyper-réalistes qui sont généralement extrêmement laids d'une part, qui ont tous les aspects du faux et de l'archi-faux d'autre part (et quand c'est bluffant le spectateur passe tout son temps à traquer l'erreur, un petit jeu qui atteint vite ses limites et en impose de cruelles aux œuvres en question). Visez-moi ce plan ci-dessous tiré du film par mes soins, qui est par ailleurs à l'image de tous les autres plans qui composent ce navet d'anticipation, et qui est une saloperie informe, atrocement mal éclairée, factice au possible, où chaque élément semble incrusté au petit bonheur la chance (je précise que l'acteur au premier plan n'est pas censé se trouver devant un écran, on doit croire qu'il est sur la piste de décollage) dans une composition invraisemblable et abominable :




Ce film est très éloquent de ce point de vue. Il est si merdique qu'il pointe facilement les énormes contraintes et la profonde nullité des films à l'heure actuelle entièrement composés par ordinateur, qui ne peuvent apparemment que ressembler à de très laides scènes cinématiques de jeu vidéo, lesquelles sont probablement réalisées par de tristes gens. Tout au long du film, Roland Emmereich se veut très moraliste, du genre gros humaniste qui fout les pieds dans le plat. A la fin de l'histoire, le petit blackos méga malin et bien gentil qui sauve pas mal de gens affirme avec aplomb : "On est là pour s'entraider. Il ne faut pas laisser mourir nos frères humains, il faut en sauver le plus possible". Et on a envie de devenir soi-même un socialiste à la manque et de lever les drapeaux à la manière de Josiane Balasko ou de Charles Berling pour dire à Roland Emmerich qu'il aurait tout aussi bien pu réunir l'énorme somme de fric qu'a coûté ce film minable, des millions de dollars, pour envoyer quelques colis de riz blanc en Afrique par exemple, ou chez Kouchnez à la limite, pour aider nos frères humains et les sauver d'une mort injuste, au lieu de réaliser ce gros amas de merde qu'est son film.

NOTA BENE : Dany Glover joue le président des Etats-Unis et il zozotte pendant tout le film. Woody Harrelson, quant à lui, joue un gros taré et il est excellent dans ce rôle, comme toujours quand il interprète un trépané (voir la meilleure scène du film : 27').


2012 de Roland Emmerich avec John Cusack (2009)

16 commentaires:

  1. Heureusement qu'il n'existe pas un tag "moko".

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  2. Bien vu les titres en gras et les links.

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  3. Ce film n'est que de la branlette technique sur fond de pseudo-humanisme dégoulinant de mansuétude.

    Quand tu te dis que ce mec a aussi fait Le Jour d'après, Independance Day et 10.000, tu comprends de suite l'ampleur des dégâts.

    Gondebaud.

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  4. C'est quand même le seul film au monde où tu vois le président des Etats-Unis se prendre littéralement un porte-avions sur la gueule ! Même dans un Tex Avery tu vois pas ça !

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    1. Bel article sinon, je plussoie les passages sur le photomontage et sur la laideur des plans numériques. Et je rajoute une observation : on sait tous depuis le 11 septembre 2001 que quand tu casses quelque chose de gros, ce que tu vois en premier lieu, c'est la poussière et la fumée. Quand Emmerich et Bay cassent le monde, c'est toujours clean et net, sans poussières ni fumées. Les avions virevoltent au milieu de tours s'ecroulant comme des légo, sans que ça ressemble une minute à un truc crédible.

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    2. Complètement. Et ils sont d'autant plus bêtes que de gros nuages de fumée seraient sans doute bien plus commodes à truquer. Mais ce qui les amuse c'est les mille détails de l'image. On a l'impression qu'ils dessinent le plan en zoomant dans l'image pour fignoler chaque pixel sauf qu'ils oublient de dézoomer régulièrement pour voir à quel point l'ensemble est affreux.

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  5. Vu le fichier .avi (comme tojours)(un pote à moi l'avait dans sa PS3 et je me suis "puisque c'est gratuit..."), peinard bien allongé au chaud chez moi, et j'ai pris du bon temps. Je crois que vous prenez le cinéma trop au sérieux, des fois. OK, c'est de la merde, mais de la merde qui s'assume. Certes, c'est bien moins surprenant que "Independandce Day" que j'avais maté quand j'avais onze ans (la soucoupe volante géante qui s'écrase, c'est une image qui m'est resté) mais bon... Encore une fois, prenez du recul, les gens : je préfère un bon gros nanar qui s'assume (et qui en fait des mega tonnes)plutôt que... je sais pas quoi. Un truc qui se prend au sérieux et qui est complètement raté.

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    1. Je ne suis pas très partisan du fait de tolérer la merde sous prétexte qu'elle s'assume. Même assumée la merde reste merdique. Et un gros film populaire, même pas très sérieux, ne devrait pas ressembler à une daube pareille.

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  6. Ah certes. Mais je n'avais aucune attente au moment de voir ce film, ça explique sûrement mon attitude cool et décontractée au milieu de tant de bêtise. C'est pas comme si je regardais le dernier Batman, par exemple. Après, c'est sûr que la merde n'a aucune raison d'exister (et sur le net, faut pas trop la ramener quand quelque chose ne te plaît pas, sinon on te sort le top 3 des immondices argumentatifs "si t'aimes pas tu dégages" ; "c'est, pas parce que tu dis que c'est de la merde que ça en est forcément" ; "tu connais l'ouverture d'esprit ?"). On va dire que, vu que je n'attends rien d'Hollywood, je suis plutôt coulant bien que je considère malgré tout ces produits comme du gros caca. C'est d'ailleurs pour ça que je les regarde en .avi.

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  7. Le problème c'est que t'en as même pas pour ton argent: les scènes de destruction les plus spectaculaires étaient dans la bande annonce, elles sont trop lisses pour être vraies, et le reste est chiant chiant chiant. Il ne s'agit même pas d'être indulgent puisque même l'argument principal du film est raté. Pareil pour Transformers, j'attendais juste des grosses bastons de robots, or même sur ce plan c'est nul, n'importe quel épisode de Goldorak est plus prenant au niveau bastons que 2h de Michael Bay

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  8. Ne vous méprenez pas : j'aime pas ce film, et si ça ne tenait qu'à moi je fermerais Hollywood pour une vingtaine d'années, histoire que cette industrie réfléchisse à ses péchés (mis à part quelques chômeurs, je pense que ça ne dérangera pas grand-monde, sauf ceux que ça débecte en public et qui les regardent en cachette). Juste qu''il y a tellement de daubes encensées... L'enchaînement des péripéties m'a fait penser à One Piece, en encore plus exagéré. Sinon, je l'ai regardé à titre purement documentaire.

    Cependant, la toute fin de l'article m'a fait tiquer. Au sujet des cinématiques de jeux, vous dites qu'elles sont « faites par de pauvres gens ». Objection ! Un jeu, a priori, c'est pas du cinéma. Une cinématique, c'est là juste en complément, pour faire avancer l'histoire. Y'a bien quelques exceptions, comme dans Metal Gear Solid, où la mise en scène prend une grand place, mais pour le reste, évidemment si vous attendez quelque chose des jeux sur ce plan-là, vous serez toujours déçu. D'ailleurs, un truc qui me tue depuis quelques années, c'est que les gros studios qui font leurs gros tas de merde video-ludiques se vantent de faire « comme Hollywood », mais vu ce qu'Hollywood devient, ils ne devraient pas en être fier. Ils devraient plutôt faire profil bas. C'est une dérive que beaucoup observent depuis quelques années, mais bon, je m'éloigne un tantinet du sujet.

    D'ailleurs j'attends que vous critiquiez (descendiez ?) Final Fantasy VII Advent Children, un film en images de synthèses complètement nawak dérivé du fameux jeu.

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  9. Le pire, c'est qu'à la fin, apparemment, tout le monde va se planquer en Afrique parce que c'est le seul continent qui a échappé au carnage... Les pauvres. Emmerich croyait sans doute bien faire, mais il leur a amené un nouveau fléau...

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    1. Bien vu. Tel Freud foulant le sol américain pour la première fois, John Cushack aurait pu, en parlant de sa seule personne, s'exclamer : « Ils ne se rendent pas compte, je leur amène la peste ».

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  10. Evidemment, tout le monde passe encore à côté du génie de Roland Emmerich, artiste ô combien méritant et qui assume le plus ouvertement du monde que la seule chose qui l'intéresse ce n'est pas le drame (a-t-on déjà vu des vrais larmes), le réalisme (pas de poussière), le gore (pas de sang), le scénario (un recto de post-it suffit à le résumer), les personnages (ceux de Spielberg, déjà pas bien beaux) ou le jeu d'acteur (Cusack et ces acolytes interchangeables), le message (l'égoïsme c'est mal, l'écologie c'est mieux) non ce qui l'intéresse, lui, et il ne s'en cache pas, c'est de casser des immeubles. C'est tout. Tout le reste l'ennuie tellement qu'il ne fait même pas semblant, il bâcle, s'en moque, plagie ouvertement, ridiculise tout ce qui n'est pas tourné vers ce seul but: détruire, proprement, consciencieusement, tout ce qu'il a sous la main, comme un enfant avec des playmobiles et un marteau.
    La comparaison avec Bay, en ce sens, m'insupporte, tant Bay est un plouc, un beauf, un filmeur de gros cul et de gros seins (a-t-on déjà vu pareille beauferie chez Emmerich? Non!), un fan de grosses bagnoles, de gros flingues et de mecs bodybuildés, chez qui l'explosion n'est pas un fait esthétique en soi mais une preuve de sa grande virilité, une sorte d'éjaculation symbolique. Bay est par ailleurs un gros conservateur crado, là où Emmerich est une sorte de confiture de bons sentiments de supermarché, auquel il semble adhérer d'ailleurs avec autant de conviction que moi à la scientologie.

    Roland Emmerich, je crois, connait tout ce qu'on lui reproche, est totalement d'accord avec les critiques, et s'en fiche et, s'il pouvait simplement mettre bout à bout des images d'immeubles s'effondrant et de tsunami, il le ferait avec un plaisir total.
    En cela, j'aime profondément ce type, et c'est sincère.

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