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13 mars 2015

Birdman

Cette année, bonne limonade, l'Oscar du meilleur film a leaké avant son sacre et sa sortie officielle en salles. Qualité bluray. Merci à Yify. Sous-titres impec'. Ni trop longs, ni trop concis, qui permettent de bien se concentrer sur la mise en scène maraboutante du fou volant Alejandro Gonzalez Iñarritu. On peut dire (si vous connaissez le blog, vous le savez) qu'on ne l'aime pas, malgré beaucoup d'intérêt pour la péninsule ibérique, la paëlla, la civilisation maya, le Machu Picchu, les empañadas, sa sainteté Popocatépetl, le Quetzatcoatl, Fernando Pessoa, Pablo Ñeruda, Brazilia la ville-avion et les bruits de Recife. On a pourtant vu absolument tous les films du génie des favellas de Mexico (sauf Amours de chiennes, plus vieux fichier sur notre disque dur, preuve d'un nez creux, quand même, et d'un certain feeling, en prime).




21 grammes, Babel, depuis ses débuts Iñarritu alterne le moins bon et le moins bon, et Birdman ne déroge pas à la règle. Sacrer ce film est une erreur historique de la part de l'Académie des Sciences et des Oscars, historique ! Comme chaque année. Ceux qui s'étaient indignés de voir Kevin Spacey recevoir l'Oscar du meilleur acteur au nez et à la barbe d'Haley Joel Osment (et pour quel résultat ? deux carrières brisées net...), ont encore de quoi chialer avec ce braquage organisé par un sylphe bigleux venu nous cracher toute sa prétention au visage dès les premières images. S'inspirant de Truffaut et de Cassavetes pour mieux tringler leurs fantômes, Iñarritu change de registre et veut définitivement s'installer dans le paysage du cinéma contemporain. Jusqu'à présent gens du voyage, le cinéaste à la réussite insolente semble avoir décidé de planter sa tente et de camper dans le salon d'Hollywood. Il s'achète une respectabilité avec Birdman. Sur le papelard, on a tous bavé : Michael Keaton dans un métafilm, incarnant un acteur sur le retour hanté par des succès passés (sommes-nous les seuls à avoir fait le rapprochement entre "Birdman" et "Batman" ? à ce jour nous ne l'avons lu nulle part. So obvious...). Le personnage de Michael Keaton essaie lui aussi de s'acheter une crédibilité dans le film, en montant une pièce de Raymond Carver à Broadway. Il s'entoure d'une galerie de personnages censés nous délivrer un message sur l'industrie du rêve, ce qui nous vaut un défilé d'acteurs qui nous imposent tour à tour leur ptit numéro : Edward Norton, Naomi Watts, Zach Galifianakis ou Emma Stone.




Edward Norton parlons-en. Voilà quelques années qu'il est là. Souvent dans des films qu'on ne regarde pas. Vive les roux. On n'a rien contre les taches de rousseur ni contre le teint diaphane. Les yeux chassieux ne nous répugnent pas spécialement. Mais Edward Norton est la preuve sur pattes qu'on peut tout à fait correspondre aux tags cochés pour aboutir à un résultat rageant. Invitez-nous dans une banque du sperme, proposez-nous deux supports pour remplir la mission, l'un est une photo de plain pied d'Edward Norton, l'autre un portrait A4 de Morgan Freeman : notre choix est fait. On préfèrera toujours partir de la base Morgan Freeman, quitte à ce que notre imagination doive franchir quelques haies. L'acteur de Fight Club a son moment de bravoure, soit une scène où il hurle ses quatre vérités à son père, Michael Keaton, en tirant une tronche pas possible, à tel point que le spectateur inattentif croira qu'Iñarritu a tourné la scène en fish-eye. Sur le plateau seule Emma Stone possède des fish eyes.




Un mot, au passage, sur la mise en scène d'Iñarritu. Tout le film se présente comme un seul et unique plan-séquence, qui se veut une mise à sac du spectateur éberlué, un tour de force admirable et monumental. On a repéré les coupes (là encore, sommes-nous les seuls cons à avoir ponctué l'avant-première au Grand Rex en hurlant toutes les cinq secondes : "Là ça a dû couper ! Là ça a dû couper !"). Ne jetons pas bébé avec l'eau du bain, Iñarritu a une petite idée sympa (on en compte toujours une dans la copie des purs cancres), celle de ménager des ellipses étonnantes comme autant de coutures temporelles improbables dans la supposée continuité de ses longs plans-séquences. Mais quitte à ne pas jeter bébé, on peut dire qu'il a globalement une sale tronche. Les mouvements de caméra incessants et tape-à-l’œil nous épuisent rapidement, d'autant qu'ils sont au service d'un discours très lourd et d'acteurs peut-être sympathiques mais qui en font somme toute des caisses. On a par exemple déjà hâte de réhabiliter Zach Galifianakis et Naomi Watts, même si on commence à perdre espoir pour la seconde. Quant à Norton, sa fameuse baston en slip ne fait pas le buzz par chez nous. Nous ne sommes pas dans ton délire Edward, pas plus que dans celui d'Iñarritu, qui était plus à l'aise dans ses baskets quand il bossait chez Taco Bell | Your Destination for Tacos and Burritos All Day.


Birdman d'Alejandro Gonzalez Innaritu avec Michael Keaton, Edward Norton, Naomi Watts, Emma Stone, Zach Galifianakis et Amy Ryan (2015)

31 août 2014

Date limite

Portes ouvertes à Joe G., ex-rédac chef du webzine musical C'est Entendu, qui a subi dans son intégralité et de son plein gré ce film et qui a éprouvé le besoin d'en parler, pour notre plus grand plaisir :

J'ai maté ça comme on mate passer un autobus qu'on ne prendra jamais. Tanqué comme jamais, aucune envie de voyager ni avant ni pendant ni après, j'ai regardé ce movie comme on mange un petit charolais de chez Macdalle : on n'en attend rien, on ne trouve pas ça très bon mais on ne s'en plaint pas. C'est l'histoire de deux gros gros tocards, et évidemment c'est un buddy movie en plus d'être un road movie de mes deux. Deux quoi ? Deux gros connards ensemble, et forcément ça devient des amis de toujours, l'ennemi de mon ennemi est mon ami, et l'ennemi ici, c'est le spectateur, alias "homme de bonne volonté", parce qu'aucune femme ne peut s'encaisser ce film, m'est avis, à moins d'avoir de sérieux problèmes psycho-lesbiens ou au contraire d'avoir envie de forniquer Robert Downey Jr. au point d'encaisser chaque merde dans laquelle il tourne, dans les deux cas, les meufs en question sont un peu just'. C'est l'histoire d'un architecte arrogant et limite nervous breakdown qui va pas tarder à être papa et qui, de retour de Kansas City, Texas, est en passe de prendre l'avion pour rentrer à L.A. et voir sa femme se faire césarienner. Un gros connard, ce mec. Évidemment il tombe dès l'aéroport sur un gros lard super con (Zach Galifiananiasalakis) qui vient de paumer son reup et qui part à Hollywood pour devenir acteur. Lui il est sujet à la narcolepsie, à la connerie, à des oublis et à son toutou chéri. Un gros connard, lui aussi.




Évidemment, il va arriver au premier un gros paquet d'emmerdes à cause du second, et ils vont devoir rouler jusqu'à L.A. pour arriver à temps et assister à l'accouchement. C'est en gros pas mal inspiré de Planes, Trains and Automobiles (Un ticket pour deux, ndlr) de John Hughes (avec Steve Martin et John Candy) qui était une chouette comédie sachant que les deux personnages étaient des mecs attendrissants, gaffeurs mais sympas. Ce faux remake est évidemment l'occasion de booster l'original façon Holly"mate-mes-rouston"Wood avec cascades en tous genres, coups de feu, drogues, etc. C'est très très con et là où la morale du film de Hughes était un truc du genre "il fait des conneries mais c'est parce qu'il va vraiment mal, accepte-le dans ta famille toi qui es heureux", là on voit surtout un gros relent de pitié dans le personnage de Downey JR lorsqu'il accepte de revoir Galifientes à la fin, sur le thème "il est laid, con et je le hais, mais il m'a sauvé in extremis de la situation pourrave dans laquelle il m'avait foutu, il a pas un mauvais fond même si c'est un gros enculé et que je vaux mille fois mieux que lui". Les scènes où Downey tabasse son "ami", le traite de connard ou crache à la gueule de son chien sont particulièrement éloquentes.




C'est, in fine, l'histoire de deux merdes humaines, l'une qui fait pitié, l'autre capable d'en éprouver un peu malgré son pédant complexe de supériorité, l'histoire de deux gros amerloques de mes deux. Mes deux quoi ? Mes deux centimes. J'ai maté le film sans broncher, ça se mate.


Date limite de Todd Phillips avec Robert Downey Jr. et Zach Galifianakis (2010)

5 décembre 2013

Bachelorette

Cette comédie américaine a cela de méprisable qu'elle nous fait vaciller sur nos propres certitudes. Le film fait le portrait de trois jeunes femmes, des trentenaires bien d'aujourd'hui, réunies pour le mariage de leur amie commune. La future mariée (Rebel Wilson) a semble-t-il, c'est film qui le dit, le défaut ultime d'avoir moins de sex appeal que ses camarades, et d'être notamment en surpoids. D'où la rage qui naît chez les trois pimbèches chargées d'organiser la fête, jalouses, indignées, révulsées que la moins sexy des quatre soit la première à se caser. Kirsten Dunst joue la working girl overbookée apparemment à l'aise dans sa peau mais à deux doigts de la crise de nerf et terriblement solitaire. Lizzy Caplan interprète la brune dynamique et imprévisible, restée coincée sur un échec amoureux datant du lycée mais incapable de le reconnaître pour ne pas froisser son amour propre. Et enfin Isla Fisher incarne la demeurée de la bande, hystérique nymphomane, suiveuse naïve et délurée qui multiplie les bourdes et les conquêtes pour faire illusion, quitte à sombrer dans une attitude autodestructrice qui l'empêche de voir le bonheur lorsqu'il se présente. Le scénario a l'air plutôt finaud dit comme ça, mais gardez à l'esprit qu'on veut seulement bien dépeindre ces trois personnages et que si un jour Leslye Headland, la réalisatrice et scénariste du film, lisait ces lignes, elle serait elle-même sur le cul, car à l'image vous ne trouverez que trois connasses rivalisant de connerie et impliquées dans une suite de péripéties minables au sein d'un film irritant, sans rythme, sans humour et sans intérêt.




Et pourtant ce triste film nous a bousculés dans nos convictions. D'abord concernant Kirsten Dunst, que nous respections jadis. Cette jeune femme de notre génération a réussi, joué dans quelques films intéressants, fait preuve d'intelligence dans ses choix (elle n'a jamais tourné avec Tarantino), mais elle se ridiculise ici et s'avère incapable de faire sourire son public. Ensuite, et surtout, ce pauvre film a questionné notre propre éthique et notre rapport aux femmes. Le spectateur mâle de cette daube peut finir par s'interroger sur lui-même et s'auto-soupçonner de misogynie si dès le départ, comme nous, il prend en grippe les trois énergumènes épuisantes qui s'agitent à l'écran, et se trouve surpris par une envie de tout casser devant leurs facéties régressives ô combien vulgaires. La pire, dans la course à la grossièreté, étant Lizzy Caplan, qui sort des insanités à intervalles réguliers et finit par créer un malaise palpable. Force est alors de constater qu'on ne supporte pas de voir et d'entendre ces grasseries à longueur de scènes, alors qu'on adore l'immaturité et le langage châtié des personnages incarnés ici ou là par Will Ferrell, John C. Reilly, Adam Sandler, Andy Samberg, Will Forte ou d'autres. Pourquoi rions-nous chez ces messieurs, et pourquoi pleurons-nous chez ces dames ? Au-delà du monde d'humour qui sépare un film comme Bachelorette de films comme Step Brothers, Crazy Dad, Hot Rod, ou MacGruber, ne serait-ce que sur papier, c'est-à-dire avant qu'un homme ou une femme n'interprète les dialogues et les situations en question, au-delà aussi d'un certain talent de comédien essentiel à la comédie (qui pourrait décemment comparer Will Ferrell et Lizzy Caplan ?), on en vient à se demander si une petite pointe de misogynie ne s'en mêlerait pas dès lors que nous ne tolérons pas la vulgarité crasse de ces demoiselles quand nous en redemandons à ces messieurs.




Sauf qu'il se trouve que nous sommes d'authentiques fans de la dénommée Melissa McCarthy qui, dans le registre de l'humour qui tache se place là. L'actrice n'a pas son pareil dans le domaine de l'obscénité débitée sur un flow presque incontinent. Vous nous direz peut-être, et nous y avons nous-mêmes pensé, que, dans notre prétendue misogynie, nous acceptons d'une femme moins immédiatement sexy ce que nous refusons chez des jeunes premières qui correspondent aux standards de beauté des podiums hollywoodiens (Dunst, Caplan, Fischer y correspondent toutes plus ou moins). Mais le fait est que nous rions aussi, quand elle nous y aide un brin, aux facéties de Kristen Wiig (dans Mes Meilleures amies, d'ailleurs aux côtés de Melissa McCarthy, ou dans Walk Hard), comme nous rions des pitreries de Sandra Bullock, actrice hollywoodienne-type (au même titre que Kirsten Dunst), qui a maintes fois élargi son registre à la comédie, souvent pour le pire, parfois pour le meilleur, comme dans Les Flingueuses, en side-kick de la sus-nommée Melissa McCarthy.




En définitive, le vrai problème d'un film comme Bachelorette n'est donc pas notre redoutée misogynie mais bien, d'une part, sa médiocrité (le film n'est jamais drôle), et, d'autre part, ses personnages, qui ne sont rien d'autre que trois parfaites ordures. Le film oublie, avouez que c'est dommage, de nous rendre son trio de trentenaires attachant. Bachelorette veut s'inscrire dans la mouvance du très médiocre Very Bad Trip en tournant le scénario au féminin, sauf que ce film modèle, si imparfait soit-il, pense à ne pas détester ses personnages et présente trois individus très différents mais pas forcément détestables. Si l'on aime certains personnages d'adolescents attardés, de machos débiles, de sales gosses, de prétentieux narcissiques, de grands naïfs ou de désespérés sentimentaux incarnés par Will Ferrell, Steve Carell, Zach Galifianakis, Adam Sandler, Will Forte, Will Arnett ou Jim Carrey, c'est parce qu'ils sont d'abord attachants, sympathiques, aimables et un peu humains. Impossible de rire avec les trois héroïnes infectes de Bachelorette, qui passent le film à mépriser leur amie obèse, à la jalouser, à ruiner consciencieusement son mariage et à sortir des horreurs sur elle sans discontinuer. On s'attendrait à ce que cette attitude ne soit que le point de départ de l'histoire, menant à un rachat quasi immédiat afin que les personnages récupèrent vite notre empathie, mais les trois débiles hautaines et méprisantes du départ sont toujours aussi pourries à la fin, et l'on se demande encore comment des auteurs de comédies (Apatow tombe aussi très souvent dans ce travers, par exemple avec le récent 40 ans mode d'emploi - et la France n'est pas de reste, de l'horrible Le Prénom à la série Platane d'Eric Judor) peuvent espérer nous captiver et nous donner envie de rire à gorge déployée en déployant sous nos yeux, et pendant des heures, une ribambelle de connards et de connasses imbuvables. C'est un peu comme aller à un one man show de Nicolas Bedos. Comment rire ?


Bachelorette de Leslye Headland avec Kirsten Dunst, Lizzy Caplan, Isla Fisher et Rebel Wilson (2012)

7 septembre 2012

Moi, député

C'est avec un peu d'appréhension, comme toujours quand on va voir un film de notre idole, celui dont on attend monts et merveilles, que nous sommes allés découvrir Moi, député en salles. On craignait un film trop balisé, sous cloche, un film à la Ben Stiller, où rien ne dépasse et rien ne se passe, où l'humour passe après le script à cause des impératifs d'un budget trop conséquent. On craignait un film où notre star aurait à jouer avec le frein à main et nous apparaîtrait malheureuse, comme Jim Carrey dans certains films récents qui ne laissaient pas suffisamment de place à son génie, ou comme un Zizou menotté et obligé de faire la passe à Stéphane Guivarc'h. Cette crainte n'était pas tellement justifiée tant il est vrai que Ferrell est habitué à brûler les planches y compris dans des films à priori plus sages que les siens et où il se contente d'un rapide caméo (rappelez-vous sa brève mais divine apparition dans le par ailleurs assez fade Wedding Crashers). Mais crainte il y avait, et principalement à cause des récents opus du grand comique américain (Land of the lost (2009) The Other Guys (2010)) qui, sans être totalement ratés, ne nous avaient pas autant fait rêver que ses principaux chefs-d’œuvre : Anchorman (2004), Ricky Bobby (2006), Semi-Pro (2008), et Step Brothers (2008). On peut être fan au dernier degré et rester critique envers les films mineurs, ainsi de Old School en 2003 (où Ferrell n'a pas assez d'importance malgré de grandes scènes), Blades of Glory en 2007 (film trop écrit, même si encore une fois il y a une paire de scènes à retenir), et puis surtout Casa de mi padre cette année, pour lequel on peut vraiment parler de ratage complet et de souvenir douloureux. Heureusement Moi, député est venu juste après et l'a vite fait oublier, nous rassurant immédiatement sur la santé de celui avec lequel on rêverait de passer ne serait-ce qu'un petit quart d'heure, notre quart d'heure de gloire warholien, pour le serrer dans nos bras et lui assurer qu'en France aussi, et malgré un mépris généralisé de la critique et d'une grande partie du public, il a au moins un putain de pied-à-terre.



Comme tous les Ferrell, et c'est une leçon que beaucoup d'auteurs de comédies devraient retenir, le film démarre tout de suite et très fort quand Cam Brady (notre cher Ferrell) répète les mots "America, Jesus and Freedom" avant un speech, en avouant qu'il n'a aucune idée de ce que cela signifie mais que ça marche à tous les coups. Puis l'histoire part immédiatement sur des chapeaux de roue quand le même candidat se trompe de numéro et laisse un message des plus craspecs destiné à sa maîtresse à une famille de catholiques bigots pour ensuite s'en justifier ridiculement auprès des médias. Le rythme du film ne baisse pas d'un iota et l'humour ne se fait pas attendre quand on passe à la présentation du personnage de Zach Galifianakis, acteur en grande forme ici et qu'on espère revoir aux côtés du Dieu de la comédie. Il parvient à camper un personnage évidemment grotesque, comme celui de son binôme en or, qui prend vie et corps dans le récit et qui crève l'écran. L'un et l'autre acteur se mettent idéalement au service de leurs protagonistes (pourtant pas faciles à tenir), si bien que l'on n'a jamais le sentiment de regarder des comédiens faisant leur petit numéro : ce sont bien des personnages qui s'inventent sous nos yeux et que l'on suit avec intérêt et en riant presque sans discontinuer, d'un rire franc et entier.



La satire politique est aussi franche et massive que notre rire et ne fait pas dans la dentelle, mais jamais au détriment de l'humour du film et de son ton léger (contrairement à The Other Guys qui se voulait une comédie sur la crise et s'en voyait pénalisé lourdement par un scénario inutilement chargé). Seul le dernier quart d'heure retombe un peu, et l'humour s'y voit davantage forcé, résolution d'intrigue et conclusion moraliste obligent vis-à-vis d'un sujet forcément un peu contraignant. Mais jusque là on a ri sans cesse devant un film sans retenue et on a retrouvé avec délectation la marque de fabrique des comédies de Will Ferrell dans de nombreuses scènes mémorables qu'on brûle déjà de se repasser en boucle. Nous sommes aujourd'hui des fans comblés regardant sereinement droit devant, vers l'avenir de notre step bro Will Ferrell, dont la longévité fait figure d'exception et dont la carrière compte déjà un nombre conséquent de pépites, avec la certitude qu'il y aura longtemps quelqu'un au volant et qu'on n'a pas fini de se marrer devant les prouesses de ce sacré bonhomme.


Moi, député (The Campaign) de Jay Roach avec Will Ferrell et Zach Galifianakis (2012)

8 mai 2011

It's Kind of a Funny Story

Les films « indés » américains actuels, j'en ai ma claque et je l'ai déjà dit ici plus d'une fois. Rappelez-vous de la haine que j'ai pu déverser sur des saloperies comme Greenberg ou The Kids are all right. En général, ces films ont ma peau, mais je reste tout de même devant jusqu'au bout, comme paralysé par l'écœurement qu’ils provoquent chez moi et l’énervement qui bout en mon for intérieur. Je n'en peux plus des petits codes de ces films, du fait qu'ils se ressemblent tous comme deux gouttes de flotte et qu'ils soient quasi systématiquement acclamés par le pire de la critique. Pourtant, je continue à en regarder. Allez savoir pourquoi. Peut-être suis-je désespérément à la recherche d'un nouveau Sideways ou d'un nouveau Station Agent, deux de mes films de chevet, le "diptyque maudit" comme aime à l'appeler mon collègue Rémi auquel j'ai très tôt infligé ces deux classiques du cinoche indé, duo incontournable de ma modeste dvdthèque. Je me suis donc récemment envoyé It's Kind of a Funny Story, sans trop y croire. Et, contre toute attente, ce fut une agréable surprise.


Le rôle d'une vie pour le jeune autiste assis sur votre gauche

Soyons clairs : contrairement aux œuvres cultes d'Alexandre Payne et Thomas McCarthy, ce film est loin de rentrer dans le cercle pas si fermé que ça de mes all-time favorite. Mais je reconnais avoir passé un très bon moment à le regarder, sous le charme bien connu que peut dégager un film de cet acabit quand il est bien exécuté et, surtout, quand il est autre chose que le simple véhicule d'un acteur minable qui cherche à démontrer son talent dramatique dans une histoire chiante pleine de personnages insupportables couverts de problèmes merdiques et qui pensent pouvoir les régler en se regardant le nombril (c'est une allusion à Ben Stiller mais ça marche avec plein d'autres) ou en baisant comme des otaries.


Ci-dessus, on peut se rendre compte que Zach Galifianakis maîtrise réellement le ping-pong, son revers étant terriblement authentique. Par contre, l'autiste en face est mal barré. Si le revers est smashé, il n'a aucune chance.

Le personnage principal est ici un jeune ado dépressif et suicidaire qui choisit de se rendre de son propre chef dans un institut psychiatrique pour se refaire une santé, persuadé que sa place est là-bas. Le film est le récit de son séjour dans cet hôpital, où le jeune homme est amené à faire des rencontres qui lui ouvriront un peu les yeux et lui permettront de remonter la pente. Il croisera notamment la route d'un quadragénaire désespéré (Zach Galifianakis) et d'une charmante jeune fille de son âge également dépressive (Emma Roberts vue dans le déplorable Scre4m), deux individus qui auront un impact décisif sur sa perception des choses. Le premier de ces deux personnages offre effectivement à un acteur habituellement abonné aux rôles comiques l'occasion de prouver qu'il peut briller dans un autre registre. Et Zach Galifianakis y parvient tout à fait, je dirai même que sa présence est l'un des atouts majeurs de ce petit film sympatoche. Jusqu'alors, j’avais toujours vu ce comédien à la tronche d’ours mal luné dans des rôles de types gentiment débiles et allumés (Very Bad Trip), parfois même infréquentables (Date Limite, Dinner for Schmucks), sans qu'il parvienne jamais à me faire vraiment marrer. Il nous offre ici un très bon numéro d'acteur, bien plus subtil qu’à l’accoutumée, grâce à ce personnage assez singulier, dont l'humour pince-sans-rire lui va comme un gant, qu'il réussit à rendre crédible et attachant.


Trivia : ce plan du film est un plan volé de Zach Galifianakis en train de refuser de jouer dans Very Bad Trip 2 avant que son interlocuteur n'ajoute un 0 à son paycheck.

Avec sa galerie de personnages plus ou moins atteints mentalement et le lieu particulier dans lequel se déroule toute l'action du film, It's Kind of a Funny Story peut aisément rappeler Vol au-dessus d'un nid de coucou, dont il serait une sorte de version teens, allégée, garantie sans idée noire. On pourrait en effet quasiment qualifier le film de « feel good movie », étant donné le déroulement très optimiste de l’histoire. Le sort réservé au personnage principal est ainsi à mille lieues de celui que connaît le personnage inoubliable incarné par le génial Jack Nicholson dans le chef d’œuvre de Milos Forman. La similitude entre les deux films est donc finalement assez superficielle.


Emma aux gros Roberts...

Alors certes It's Kind of a Funny Story possède bel et bien toutes les manies habituelles du petit cinéma indépendant américain actuel. On y trouve notamment des références musicales extrêmement appuyées et même une bande-originale clairement conçue pour plaire au public visé, faite de morceaux qu'il saura reconnaître sans mal. En outre, le film est parasité par des petits effets de mise en scène assez lourds mais heureusement peu envahissants, par une voix off trop présente et pas toujours utile, et peut-être par un trop plein de bons sentiments à la fin. Mais malgré cela, le film fonctionne, et ce, y compris assez miraculeusement lors de moments très périlleux et osés comme la reprise fantaisiste d'Under Pressure, le tube de Queen featuring David Bowie. Ce petit film m’a donc vraiment plu. La jeune Emma Roberts, qui parvient avec charme à contrôler son terrible strabisme du début à la fin, peut donc déjà se targuer d'avoir dans sa maigre filmographie de débutante un meilleur film que tous ceux qui composent la carrière de son imbuvable tante Julia, a.k.a. "la jument". Quoique y'a Hook. Il est cool Hook. Enfin, toutes proportions gardées.


It's Kind of a Funny Story de Ryan Fleck et Anna Boden avec Keir Gilchrist, Zach Galifianakis, Emma Roberts, Zoë Kravitz et Aasif Mandvi (2011)