Affichage des articles dont le libellé est Charlotte Gainsbourg. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Charlotte Gainsbourg. Afficher tous les articles

6 novembre 2016

Independence Day : Resurgence

Si vous avez une quelconque curiosité pour le Mal, vous devrez regarder ce film un jour ou l'autre. Independence Day : Resurgence compte parmi les plus grands maléfices commis de main d'homme. Et on doit ce prodige, peut-être le pire film du monde ?, à Roland Emmerich, qui rempile vingt ans après le premier film du nom, pour vingt fois plus de destruction, vingt fois plus d'effets spéciaux, vingt fois plus de conneries à la seconde de métrage (c'est possible). Ce film est quasiment incompréhensible à force d'être mal écrit. On ne pige rien tant c'est con. Si vous ne l'avez pas vu, vous ne pouvez pas imaginer. C'est impossible. Et c'est pas seulement que c'est écrit à la truelle, que les personnages sont des clichés abominables, les dialogues misérables et la mise en scène à s'asseoir sur des grenades dégoupillées, c'est au-delà de ça, c'est presque de la magie de foirer un film à ce point.






Ci-dessus quelques photogrammes de la fin du film. Je reste fasciné par l'incommensurable laideur des plans de Roland Emmerich. Ses incrustations sont tellement dégueulasses. Il nous avait déjà livré quelques monstruosités visuelles dans 2012 et je crois qu'il a encore poussé la barre un peu plus loin ici. Ah tiens, je n'ai pas dit un mot de l'histoire. En gros, les méchants aliens reviennent vingt ans plus tard. Juste avant leur arrivée, un vaisseau alien d'une autre race est venu nous aider, mais les chefs des gouvernements du monde ont décidé, en deux seconde chrono, sans raison ni justificatif de domicile, de leur tirer dessus. Du coup l'humanité doit subir une autre attaque des salopards (à laquelle ils réagissent exactement comme vingt ans plus tôt : à coups d'avions de chasse et de Bill Pullman, qui rempile aux côtés de Jeff Goldblum, parmi quelques nouveaux, dont Charlotte Gainsbourg et Liam Hemsworth, frère de Chris, ici dans le rôle de la tête brûlée horripilante, la même que celle incarnée par Charlie Hunnam dans Pacific Rim et tant d'autres daubes du genre). Tout cela bien sûr avant de piger que la petite boule blanche venue au début, et qui s'avère parler un excellent anglais (elle cause comme la voix digitale de la SNCF), leur veut du bien, et veut même faire des humains ses soldats pour aller botter le cul des méchants extra-terrestres chez eux. Ce qui nous vaut une dernière réplique digne des meilleures saillies de Donald Trump : "We're gonna kick some alien ass !", annonçant avec fracas la suite de cette suite... promesse d'un spectacle aux confins de l'imaginaire et de la merde.


Independence Day : Resurgence de Roland Emmerich avec Bill Pullman, Liam Hemsworth, Charlotte Gainsbourg, Jeff Goldblum et Maika Monroe (2016)

1 octobre 2012

Ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants

Quiconque a vu ce film se souvient de cette scène où le couple que forment Yvan Attal et Charlotte Gainsbourg fait une bataille de bouffe à travers un immense appartement parisien à dix briques le mètre carré. La baston est rythmée par la drôle de chanson de Burt Bacharach, avec ses chœurs guillerets et ses voix haut perchées, qui accompagne une course poursuite assez comique, digne d'un dessin animé, dans Butch Cassidy and the Sundance Kid de George Roy Hill. Attal et sa femme regardent le film à la télé quand ils commencent à se tartiner de Nutella et à se balancer gaiement des giclades énormes de moutarde et de ketchup au visage, n'épargnant aucun des murs de leur gigantesque baraque dans des allers et retours répondant directement à ceux de Robert Redford et Paul Newman, les cow-boys du film de Roy Hill. Yvan Attal communique avec l'histoire du cinéma dans cette séquence, il dialogue directement avec le cinoche, il réinvente le western à la sauce mayonnaise, il se torche avec notre cinéphilie. Attal marche dans les pas du cinéma américain moderne, lui qui se veut le digne héritier du cinéma de papa de Claude Berri, qui joue le rôle de son propre paternel dans le film.



Au-delà du clin d’œil cinéphile lourdingue et de la nullité de la séquence, ce qui frappe, et là je pense que vous serez tous d'accord, c'est la façon dont les personnages fusillent à bout portant la caution de leur palace en réduisant consciencieusement en bouillie chaque parcelle de leur appartement. Je ne sais pas vous mais moi j'enrage de les voir faire, de devoir les mater en train de dégommer le moindre recoin d'un loft à cent bâtons le nanomètre carré au bas mot, de répandre des milliards de plumes d'oreiller (cf. l'affiche) sur le sol maculé de flotte, de confiture, d’œuf pourri, d'Actimel, de pinard et de purée de leur chambre avant de s'entre-dégommer au milieu de la pièce pour ajouter un peu de fluide séminal à la béchamel ambiante. Pour peu qu'on imagine la femme de ménage (parce qu'il faut en avoir une, que dis-je, il faut en avoir une armée pour se permettre de telles frasques) qui devra nettoyer ce chantier le lendemain matin, et c'est une envie de meurtre qui nous prend.



N'importe qui de normalement constitué ne supporte pas cette scène et ne peut la regarder sans se dire que les personnages sont de gigantesques cons. Qu'ils sont beaucoup trop cons même, anormalement cons, à un point qui rompt l'effet de fiction. On ne marche plus, c'est pas crédible ! A la limite on pouvait faire semblant de croire à Alain Chabat en couple avec Emmanuelle Seigner, ou à Johnny Depp craquant sur Charlotte Gainsbourg au Virgin en écoutant Creep de Radiohead. C'est difficile à avaler mais après tout si Depp a été marié pendant trente ans à Vanessa Paradis, il peut bien tomber sous le charme de Gainsbourg, autre enfant-star sortie de la cuisse de Jupiter grâce à un papa bien placé, massacrant la chanson comme la comédie, dotée d'une mâchoire non-négligeable et affichant un poids plume d'enfant de huit ans. Et puis Radiohead ça peut faire des miracles. Qui n'a pas fini une soirée trop arrosée dans le pieu d'une fan, même pas très jojo, de Karma Police ? Le film se veut d'ailleurs un clip complet et atroce de tous les hits du groupe. Attal en place au moins dix intégralement dans sa bande son pour recouvrir ses plans en caméra tremblée le représentant lui et sa bande de potes, des personnages plutôt irritants qu'il voudrait proches de ceux d'Husbands... La musique est absolument omniprésente, comme dans les pires rejetons de chez Sundance. Mais, pour revenir au sujet, si on peut à la limite gober le reste d'un script souvent ignoble, on ne peut pas, on ne peut décidément pas croire à ces gens qui détruisent leur appartement de milliardaires avec un smiley gros comme ça collé sous le nez. Faut-il être plein aux as comme Attal et Gainsbourg eux-mêmes pour tourner une telle scène sans se poser de question et sans se douter que le quidam qui matera leur film tiquera forcément au moins là-dessus...



Deux scènes plus tôt (je vous refais le film à l'envers, ça ne peut pas être pire qu'à l'endroit) Gainsbourg, qui se doute de quelque chose et soupçonne son mari de la tromper, est au bistrot, commande un café, pleure et part en payant mais sans toucher à sa tasse. Je vous le dis : j'ai mal devant cette scène. J'ai envie de crier à l'autre charlot de Gainsbarre de le boire son putain de café à 10 euros la mini-tasse en plein Montmartre, d'au moins y tremper les lèvres, au pire de le verser dans son sac si vraiment elle n'a pas soif et n'a pas la tête à boire un café. Mais on ne fait pas ça ! J'ai peut-être trop longtemps vécu - et aujourd'hui encore - en faisant attention à mes dépenses et en mettant un point d'honneur à ne pas jeter l'argent par les fenêtres, peut-être aussi qu'à force de me faire taper sur la gueule par ma femme quand j'ai le malheur de ne pas finir mes boîtes de céréales j'ai acquis une sorte de conscience aiguë de la nécessité de ne pas gâcher, je ne sais pas, mais ces scènes-là me démolissent littéralement. Apparemment Yvan Attal s'en régale quant à lui. Son film en lui-même est un semblable gaspillage, de temps et d'argent, autant le sien que celui des pauvres malheureux comme moi qui auront vu son long métrage sur écran géant à l'époque sans pouvoir se plaindre.


Ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants d'Yvan Attal avec Yvan Attal, Charlotte Gainsbourg, Alain Chabat, Emmanuelle Seigner et Claude Berri (2004)

4 août 2012

Jane Eyre

Les tout premiers plans du film laissent quelque espoir, où l'on voit Mia Wasikowska parcourir la lande anglaise sombre et brune étendue à perte de vue dans ce qui semble lui imposer un effort surhumain, mais l'espoir fout le camp aussitôt la jeune fille entrée dans une maison pour y trouver refuge, quand la mise en scène redevient celle de tant d'autres films académiques, plats et laids. L'introduction était non seulement assez belle mais programmatique puisqu'après elle le spectateur traversera le film telle une morne plaine et avec toutes les peines du monde, mis à l'épreuve par un réalisateur américain médaillé d'or olympique d'apnée cinématographique. A partir de là je n'ai cessé durant trois quarts d'heures de manipuler mes télécommandes, celle de ma télévision et celle de mon lecteur dvd (je n'ai pas vu le film en salle, fouettez-moi), pour tâcher de désuniformiser un peu cette suite d'images mornes et grises, de transmettre quelque inspiration au directeur de la photographie en faisant varier la luminosité, la balance des couleurs ou le contraste dynamique de mon écran, pour enfin insuffler de la vie dans cette œuvre résolument morte.


Pas si étonnant que le film ressemble à tant d'autres quand son réalisateur lui-même correspond de pied en cap au portrait robot d'un milliard de ses semblables. On peut aussi constater sur ce cliché que Cary Fukanaga aime porter les mêmes vêtements rongés par les mites que les acteurs de son film historique et que, comme l'image de son long métrage, d'une pâleur morbide, il aurait besoin de prendre quelques couleurs.

J'ai abandonné le film au bout de 55 minutes et je pense que c'est à peu près là que ça commençait, après la rencontre entre Wasikowska et Fassbender, juste avant qu'ils ne commencent peut-être à batifoler dans l'herbe, à nouer quelques sentiments au milieu d'enfants rouquins et sous le regard d'une gouvernante grabataire ancien maton en zonzon. Pas de quoi se réveiller la nuit non plus donc. C'est une erreur que de faire démarrer un film en son milieu notez bien, après une heure de supplice, surtout quand ledit démarrage reste sur la lancée grisâtre et mortelle de son interminable introduction. Comparer comme certains l'ont fait ce Jane Eyre empesé et maladif au Bright Star de Jane Campion, film coloré s'il en est, aérien, insaisissable, emporté par sa poésie et regorgeant de vie, est une folie. Ce film donne seulement envie de revoir celui de Campion comme on prend son pouls après un malaise vagal, et aussi, pour les plus téméraires, de regarder la version de Franco Zeffirelli, mais à condition de garder le visage de Mia Wasikowska en mémoire pour remplacer celui de Charlotte Gainsbourg dans l'image. L'italien ne s'y était pas trompé en engageant Gainsbarre, qui était à moitié anglaise et possédait une belle tête de choux, vu que Jane Eyre était décrite dans le roman de Charlotte Brontë comme "une fille pas très jojo". Cary Fukushima quant à lui a tout misé sur un couple d'acteurs attractifs, mais il a oublié de les éclairer de telle façon qu'on ne les confonde pas avec le fond de l'image, ces ciels et ces tapisseries vert-de-gris so british qui pousseraient un nouveau champion olympique à se défenestrer.


Jane Eyre de Cary Fukunaga avec Mia Wasikowska, Michael Fassbender et Jamie Bell (2012)

20 août 2011

Melancholia

Malgré la plaie ouverte par le terriblement médiocre Antichrist, et au préalable entaillée par la plupart des autres films de Lars Von Trier, nous nous sommes laissés attiser par ce fameux Melancholia, avec sa pluie de critiques élogieuses, décrit par la majeure partie de ses spectateurs comme absolument sidérant, et nous sommes donc allés le découvrir au cinéma. Félix nous a accompagnés mais il ne s'exprime plus que par râles depuis qu'il est sorti de la séance. Ça va faire trois jours, on commence donc à s'inquiéter. Mais pour l'heure, Nônon Cocouan et moi-même allons vous donner nos impressions sur ce "chef-d’œuvre" du cinéaste danois, et à cette occasion nous allons spoiler tout ce qui peut l'être.

Le film est scindé en deux parties. La première sur Justine (Kirsten Dunst), le soir de son mariage, qui, alors qu'elle s'apprête à vivre une superbe fête pour célébrer son union avec un mari fou d'amour, est terrassée par la mélancolie (qui ne semble pas la submerger pour la première fois puisqu'on lui intime de ne pas "recommencer") au point de régulièrement s'éclipser et de rendre folle de rage sa sœur, qui a tout organisé. La deuxième partie est consacrée à la sœur donc, Claire (Charlotte Gainsbourg), dans son château et au sein de sa famille (Kiefer Sutherland et leur petit garçon), qui recueille la neurasthénique Justine, complètement abattue par la maladie mélancolique, tandis que tous attendent le passage de Melancholia, une planète qui va bientôt faire le tour de la Terre. Sauf que Claire est angoissée, persuadée que la planète ne va pas faire que passer et puis s'en va, mais qu'elle va bien s'écraser sur son monde.




Il y a bien quelques trucs pas mal dans ce film, mais globalement c'est plutôt mauvais, disons raté, assez plat malgré le fort potentiel d'un grand nombre de scènes. Toute la première partie ressemble à une sorte de Festen (Thomas Vinterberg) plein aux as, sauf que Lars Von Trier ne prend pas le temps de bien saisir les petits travers de chacun de ses personnages, il nous les balance par à-coups et les veut très caricaturaux. On se fout assez rapidement d'eux puisque tout tombe à plat (Cf. le père avec ses blagues sur les cuillères), ou n'a aucune saveur (Cf. les coups de gueule de la mère, la brève séquence de dispute avec le patron, etc.). Ceci dit ça peut fonctionner un temps, si on aime beaucoup les acteurs. Et on aime plutôt bien John Hurt, Kiefer Sutherland (malgré le triste tour qu'a pris sa carrière), Stellan Skarsgard et Udo Kier. Même Charlotte Gainsbourg tient bien son rôle de grande sœur rigide et pas gaie... Et puis il y a surtout Cannes Film Festival Award Winner Kirsten Dunst. Elle a une présence assez fascinante, il faut bien le dire, puis elle est extrêmement jolie avec son petit sourire, ses moues espiègles, ou son regard qui s'éteint soudainement quand la mélancolie la rattrape, et elle est en outre assez bonne, soyons clairs (Cf. la dernière image de l'article). Ce qui est fort dommage en revanche et qui plombe royalement le film, c'est qu'au bout de quelques scènes Von Trier la traite avec aussi peu d'égards et de cohérence que ses autres personnages : de mélancolique elle devient rondement conne, comme quand elle baise soudain avec un inconnu (à cheval sur lui, usant d'un mouliné de l'épaule qui évoque les scènes où elle est sur son canasson noir, cette analogie vous fait une belle jambe, hein ?), en plein milieu du jardin (un terrain de golf 18 trous qui passe soudain à 19 trous), dans sa robe de mariée, séquence placée là pour traduire le besoin qu'éprouvent les mélancoliques de ressentir une jouissance corporelle niant l'autre... ou encore quand elle envoie chier son patron dans un règlement de compte à la Festen donc, qui n'est pas franchement passionnant.




Ce qui est stupide là-dedans, c'est que tout cela va presque à l'encontre de sa mélancolie. Non pas que ces agissements ne soient pas dignes d'un personnage atteint de cette affliction - Von Trier semble s'être lourdement renseigné sur son sujet (étant par ailleurs lui-même mélancolique, selon ses propres dires) et son film égraine toutes les informations scientifiques que vous dénicherez en vous penchant à votre tour sur la question - mais dans la mesure où le trouble de Justine serait plus pesant et plus intriguant si tout autour d'elle n'était pas si misérable, car en l'état on ne peut que comprendre qu'elle ait les boules, et dès lors son angoisse n'est plus inexpliquée : elle a une vie de merde, basta. Enfin sauf en ce qui concerne son mari, qui est gentil et sympathique, trop pour Von Trier qui l'éjecte de son film en deux coups de cuillère à pot, c'est plus simple. Le cinéaste, qui avoue de façon assez remarquable que son film est un copié-collé de choses vues, entendues, et "volées" (des peintures de Bruegel au Tristan et Isolde de Wagner en passant par le château shakespearien et le terrain de golf de La Notte), se revendique d'Antonioni et de Bergman, et autant dire qu'il a de gros gros progrès à faire concernant le traitement de la psychologie de ses personnages...




On a donc une première partie pas totalement mauvaise, avec une structure d'ensemble qui fonctionne à peu près, des petits trucs d'acteurs, quelques jolis plans, des répliques cinglantes, ça se regarde, mais finalement tout est assez inconséquent, ça reste des trucs scénaristiques vus et revus (ou qu'on aurait préféré ne pas voir, comme quand la mariée va pisser en soulevant sa robe sur le green du parcours de golf...), et quand le jeune marié finit par se barrer, on a presque envie d'en faire autant. Cette tout de même accablante cérémonie bourrée de clichés et de fatuité (Von Trier dit s'être probablement et involontairement inspiré de la scène d'introduction de Voyage au bout de l'enfer, il y a de quoi rire), déplie un éventail de personnages têtes-à-bouffes, de la mère hystérique interprétée par l'affreuse Charlotte Rampling à ce personnage joué par Udo Kier qui se cache la vue dès qu'il passe devant la mariée parce qu'elle lui a soi-disant ruiné son mariage quand elle était enfant (gimmick d'une nullité totale...), jusqu'à l'époux de la sœur, Jack Bauer, qui ne pense qu'au fric dont il regorge et qui ne supporte pas les frasques de sa belle-famille (on le comprend). Après quoi nous passons à la deuxième partie.




Et le film se concentre alors sur Claire, Charlotte Gainsbourg, la pauvre Gainsbarre, qui n'est déjà pas un canon de beauté d'ordinaire mais dont on croirait ici qu'elle n'a pas dormi depuis trois mois. Encore faut-il avouer qu'elle n'est pas du tout insupportable, ce qui relève déjà de l'exploit la concernant. Une aubaine d'ailleurs que les rôles ne soient pas inversés, car Gainsbourg dans le rôle d'une mélancolique neurasthénique nous aurait achevés. Son problème à elle n'est pas d'être mélancolique mais de se faire de la bile dès qu'elle pense à l'immense planète jadis cachée par le soleil qui se rapproche de la Terre et qui fascine son mari et son gamin, impatients de découvrir ce qui s'annonce comme le plus grand moment de l'Histoire de l'humanité. A noter une bonne idée de scénario quand Sutherland est tout fier de présenter à sa femme l'invention dérisoire mais ingénieuse de leur fils qui consiste en une simple boucle de fil de fer destinée à évaluer à l’œil nu la distance de la planète approchant. Et donc on passe de Festen à euh, peut-être une sorte d'Antichrist pas dégueulasse, dans le grand manoir situé à l'écart de tout et entouré de nature. La catatonie de Justine se mélange alors à l'angoisse sourde et tenace de Claire, et il y a quelques trucs pas mal là encore, mais franchement, tout ça ne va pas bien loin. On régresse même quand Justine acquiert une sorte de prescience des choses, prétendant qu'elle "sait tout" et prouvant ses talents d'oracle en donnant à sa sœur et au chiffre près le nombre de grains de maïs contenus dans un pot, que les invités devaient deviner à l'issue de la cérémonie de son mariage. Il parait que dans l'Antiquité, les mélancoliques étaient effectivement considérés comme des sortes de devins, Von Trier a tout prévu, on l'a dit, il a tout lu sur ce thème et tout casé dans son film, mais là ça ne fonctionne pas du tout, ça rend simplement le personnage de Justine très con, voire infiniment désagréable, et ce don rendu exagérément explicite annule les pensées du spectateur qui songeait grâce au film à la mélancolie comme forme de lucidité impénétrable (Justine désirant la fin de tout et niant de façon autoritaire la possibilité de l'existence d'une vie ailleurs dans l'univers), pour leur opposer un très peu crédible et inutile talent de divination fort dommageable pour l'adhésion au personnage et au propos même de la fiction. Puis il faut bien le dire, tout ça est assez chiant. Toute la fin est un peu bâtarde : parfois Lars Von Trier saisit bien les derniers instants ambivalents censés précéder la fin du monde (enfin à priori, puisqu'on a peu de témoignages de cataclysmes), dans un mélange de frayeur et d'apaisement, un amalgame de foi absolue (la cabane de l'enfance en opposition au désastre) et de nihilisme, souvent il tue l'ensemble par les réactions bidons des personnages (la crise de larmes de Gainsbourg entre autres) et par un regard pas très fin sur son sujet.




L'ensemble donne vraiment l'impression que Lars Von Trier est certes un cinéaste pour le moins atypique, plus doué qu'un certain nombre de ses congénères, qui a des idées et un savoir-faire non-négligeable mais qu'il s'embourbe dedans, essayant d'être à la fois un grand symboliste et une sorte de naturaliste classieux. Il s'empare bien de l'angoisse et de la mélancolie, mais on a le net sentiment qu'il n'y a pas grand chose derrière, et après une scrupuleuse et esthétisante mise à plat du sujet, ne reste qu'un ennui assez profond. Le cinéaste, qui prétend ne pas tellement aimer son propre travail, dit que si le film touche les mélancoliques et leur paraît juste, ce sera déjà une réussite. Mais l'objectif semble un peu facile. L'idéal serait plutôt de toucher ceux qui sont étrangers à ce sentiment accaparant et destructeur. Y'en a-t-il seulement ? Ne sommes-nous pas tous, un jour ou l'autre, mélancoliques ? A des degrés variables bien entendu. Mais tout un chacun, et le cinéaste l'affirme, a déjà éprouvé les affres de la mélancolie, ne fût-ce qu'un instant, aussi n'y a-t-il aucun mal pour le quidam à se reconnaître par bribes dans les sentiments dépeints par le film ou à se laisser vaguement happer par celui qu'il provoque et que son titre ne laisse pas d'annoncer. On dit souvent que le rire est plus difficile à obtenir chez le spectateur que les larmes, aussi l'abattement quêté par Von Trier est-il plutôt aisément atteignable, ce qui ne fait que retirer du mérite au cinéaste. Qui plus est, hormis quelques moments de torpeur ainsi facilement provoqués par l’œuvre, on s'emmerde un peu, ou du moins reste-t-on relativement indifférent. C'est dommage parce que Von Trier, en touchant du doigt ces craintes ou ces angoisses injustifiées, incompréhensibles mais opiniâtres qu'on connait tous plus ou moins, pourrait aller beaucoup plus loin, imaginons-le ! mais non, ça s'arrête là.




Pour le côté "sidérant" du film, sur lequel à peu près tout le monde s'accorde avec un enthousiasme débordant, il concerne principalement le début de l’œuvre, les premiers plans, dont nous vous ferons la grâce tant nous sommes épuisés de les croiser dans les journaux et partout sur la toile, de longs plans très ralentis et très composés qui illustrent le récit à venir (prémonitions de Justine, ces images ouvrent le film et en donnent le ton). Ça dure assez longtemps, sur un morceau de Wagner, et effectivement ça peut paraître "beau", car le ralenti, la longueur des plans et l'étrangeté des images leur confère une persistance sur tout le reste du film assez troublante, en tout cas on peut trouver ça sublime jusqu'à ce ça fasse franchement penser à (coucou Malick) de grosses pubs pour parfums. Ok, Justine est publicitaire, et c'est censé justifier cette imagerie grossière, mais si elle avait été productrice d'engrais à base de fientes, ces images auraient donné quoi ? Peut-être quelque chose de plus beau remarquez, ou bien des plans comme ceux qui nous présentent des insectes grouillants sortant de leurs terriers à l'approche de la catastrophe et que Von Trier laisse, eux aussi, tomber à plat. Parmi ces motifs ou idées énoncées, voire énumérées, lancées en l'air au petit bonheur la chance par le cinéaste et qui ne retombent jamais, quid du cheval de Justine qui refuse de passer outre le pont vers la forêt, et de mille autres étapes du scénario qui s'accumulent sans donner suite. A vrai dire ce n'est que pire quand l'idée retombe, dans un gros plat décevant, comme cette séquence où la jeune femme semble s'offrir, nue sur le rivage d'un lac, à la planète Melancholia, scène dont Von Trier ne tire qu'un beau tableau (ou un beau cliché à la Helmut Newton, plastique et glacé), rien d'autre, aucune puissance, aucun souffle, aucune implication, aucune émotion, rien. Mais pour en revenir aux plans matrice du début du film, malgré tout reconnaissons que c'est presque séduisant, que c'est un peu fascinant, surtout pour les attitudes qu'ont les personnages, leur mouvement étiré jusqu'au malaise. Mais c'est trop léché, trop affecté pour que cela "sidère" véritablement. Donc l'un dans l'autre ce Melancholia n'est pas franchement une réussite. Il y a des choses, des plans, des bribes d'idées, un bréviaire psychologique sur le phénomène de la mélancolie, un symbolisme brut de décoffrage, du romantisme allemand, des acteurs, des attitudes, mais plof. Comme toujours chez LVT quoi, rien de nouveau sous le soleil, même s'il abandonne à bon escient le côté dégueulasse d'Antichrist ou le misérabilisme de Breaking the Waves. Ce cinéaste n'est sans doute pas le génie qu'on dit et Dogville reste la vague exception dans sa filmographie qui confirme la règle.


Melancholia de Lars Von Trier avec Kirsten Dunst, Charlotte Gainsbourg, Kiefer Sutherland, Charlotte Rampling, Udo Kier et John Hurt (2011)

25 juin 2011

Lemming

Ce film-là, je suis passé à côté. C'était le deuxième Moll après le tremblement de terre intitulé Harry un ami qui vous veut du bien. Après ce premier film, la France pensait avoir trouvé son Hitchcock en la personne de Dominus Moll, et son Anthony Perkins sous les traits cubiques de Sergi Lopez. Mais surtout les dames avaient fait main basse sur un nouveau sex symbol digne de Cary Grant : Laurent Lucas. Un front barré par les soucis, un nez droit comme la justice, des sourcils en équerres et un menton volontaire. Des yeux d'un bleu vif et percutant, aussi, puis surtout une voix. Laurent Lucas a vite fait de recouvrir toutes les couvertures de ELLE magazine. Dominik Moll en a fait son égérie en le collant à l'affiche de son second film. On parle de Scorsese-De Niro, de Desplechin-Devos, de Cassavetes-Rowlands, de Ridley Scott et Russel Crowe, de James Cameron avec Bill Paxton et de Carpenter et Kurt Russel, désormais il faudra compter avec Moll/Lucas. 
 
Ici on retrouve ce goût de l'inquiétant cher à Moll dans l'expression faciale du Cary Grant bourguignon, dans cette assiette qui ne contient bizarrement que de la salade et dans le reflet inversé de cette assiette sur le verre concave du pot à eau : tant de maîtrise force l'admiration 
 
Lemming fait partie de ces films qui ont un titre tapageur pour pas grand chose, comme Cloverfield, Kaboom, Mammuth ou Synecdoche New-York. C'est typiquement le genre de film que Moll a mis en boîte avant de se demander comment l'appeler. Alors que le titre Harry un ami qui vous veut du bien lui était apparu comme une évidence, Lemming tarda à monter au cerveau du réalisateur. En fait ça désigne à la fois l'animal que Gainsbourg retrouve dans la cuvette de ses chiottes après le passage éclair de Rampling aux cabinets, et le jeu préféré du cinéaste sur Nintendo DS. Dominik Moll l'a prouvé, il est intarissable sur le gameplay de Lemming ou sur celui de Worms, quant à moi j'ai un pote qui est incollable sur Moll. Les autres réalisateurs préférés de mon ami sont Douglas Sirk, Frank Borzage (qu'il prononce comme il faut quitte à ne pas se faire comprendre en soirée : "Borzégui"), Kubrick, Bergman, Hitchcock ou Bong Joon-Ho, et contre toute attente il place Dominik Moll au même niveau. Pour lui c'est les Rois Mages. Tout réal dont le blaze finit par "ick" a une chance de lui plaire : Kubrick, Sirk, Moll Dominik et il s'est même forcé à aimer The Tree of Life de Malick. Il m'avait vraiment vendu Lemming, mais c'est aussi parce qu'il a des billes dans le projet : c'est lui qui a fait l'affiche, matez-la en grand format et rendez-vous compte qu'il n'est pas fan des mirettes de Rampling. Si vous souhaitez rencontrer cet ami, rendez-vous entre le 1er et le 5 juillet au festival de ciné de La Rochelle, il y est chaque année, il a ses petites habitudes, vous le trouverez en tongs à la terrasse d'un café en train de manger une saucisse enrobée dans de la salade, c'est son plat préféré, celui qui lui permet de tenir bon tout le long de ses marathons cinoche. 
 
Sur ce glaçant photogramme du film, tout est anxiogène : les bras ballants et les verres fumés de Charlotte Rampling, surprenant l'étreinte des tourtereaux ; l'auréole de sueur dans le dos de chemise de Lucas ; le profil de Charlotte Gainsbourg. Mais le Malin rôde dans un autre niveau de l'image, au second plan, au milieu et au fond de la pièce
 
Pour revenir au film, on n'a pas tenu plus d'une demi heure assis devant. J'ai du mal à être captivé par des films dont l'action se déroule dans des décors surréalistes comme des maisons de banlieue high-tech dessinées par des architectes illuminés, avec un mobilier ultra moderne estampillé Philippe Stark. Quant à la dimension "conflit de famille" à coup de dégâts des eaux, j'avoue avoir eu ma dose avec ma propre belle-mère, qui s'est servie de l'unique manuscrit de mon mémoire de fin d'année presque finalisé pour lessiver sa baignoire. Je vois qu'on n'a rien dit de Charlotte Gainsbourg, premier rôle du film, et je crois qu'on en sort grandis. Ne pas l'insulter relève du prodige, vu que c'est une merde.
 
 
Lemming de Dominik Moll avec Charlotte Rampling, Charlotte Gainsbourg, André Dussolier et Laurent Lucas (2005)

11 janvier 2011

Max et les Maximonstres

Je vais jouer cartes sur table. Ce film-là, je l'ai depuis un bail en divx sur mon disque dur externe. Pratiques ces choses-là, ça me permet d'avoir toute ma discothèque sur moi en permanence. Réalisé par Spike "Eternal Shoeshine" Jonze, avec la voix pourrie de Charlotte Gainsbarre, une BO de malade signée Arcade Fire et 56 affiches toutes plus belles les unes que les autres : y'avait qu'à mater la bande-annonce ou trainer dans la rue en décembre 2009, pour se faire avoir, ce film est un gros piège à cons. Depuis des mois, j'ai donc de côté Max et les Maximonstres, dans la racine de mon dd. Je vais le virer, je me vois mal le mater. En réalité, et j'ai honte de vous l'avouer : je comptais un peu sur ma copine pour m'encourager à lancer ce film. Je me disais assez bêtement "Allez si ça se peut elle trouvera ça mignon, les renards empaillés et tout, les peluches géantes, et du coup elle voudra le voir et moi je serais curieux de subir un nouveau Spike Jonze, ça me permettra d'avoir vu ce film, un de plus de cette année où je suis au taquet niveau cinoche". Mais tu parles... Des fois je la prends pour une débile ma meuf, je vous jure. Elle s'en branle des renards et autres maximonstres. Elle est pas trépanée. Une fois je lui avais proposé, elle m'avait juste répondu "VTFF". Elle est rude aussi. Bon, à côté de ça, je m'envoie tous les films de chiens et de chevaux.



Et si je parle quelques fois de "renards" dans mon article, c'est parce que ça marche également avec le film Fantastic Mr Fox, qui lui aussi finira par disparaître de mon disque dur. D'ailleurs, à la base, cette "critique", c'est juste un commentaire à la "critique" de Fantastic Mr Fox rédigée par mon collègue, un commentaire que je m'apprêtais donc à poster sur mon propre blog. Je suis coutumier du fait. Mais je me suis dit que je racontais là quelque chose d'intéressant et j'ai constaté que ça fonctionnait aussi avec Max et les Maximonstres, de Spike Jonze, autre cinéaste "indé" américain qui s'est récemment essayé au film pour gosses. Alors j'ai changé quelques mots, et je me suis dit que ça ferait un papelard. Un mauvais papelard, mais un papelard quand même. Un papelard de plus. Je n'ai pas vu ce film et je ne le verrai jamais, mais je considère l'avoir vu.


Max et les Maximonstre de Spike Jonze avec la voix merdique de Charlotte Gainsbourg (2009)

19 février 2008

I Heart Huckabees

Vous connaissez l'histoire de Romain Gary qui avait pris pour pseudonyme Émile Ajar histoire de recevoir deux fois le prix Goncourt, d'abord sous son pseudonyme habituel, pour Les Racines du ciel, en 1956 et la seconde fois donc sous le pseudonyme d'Émile Ajar, pour La Vie devant soi, en 1975. Eh bien Michel Gondry a voulu faire pareil. Après avoir tourné des films à succès tels que Eternal sunshine of the spotless mind ou La science des rêves, il a donc choisi de se déguiser sous une nouvelle identité, David O. Russell, pour sortir un nouveau film : I heart Huckabees. Et si après avoir su la vérité sur la double identité de Romain Gary on devait découvrir que Gary et Ajar signifiaient respectivement "brûle !" et "la braise" en Russe, force est de constater que la supercherie chez Michel Gondry tient par des ficelles un peu moins solides, puisque d'après certains spécialistes ès Gondry, ce dernier aurait choisi le prénom David en hommage à David contre Goliath, le héros préféré de Gondry, petit et maigre comme lui, puis le nom Russell en guise de clin d'œil à Russell Crowe, son acteur fétiche, petit et maigre aussi. Quant à la lettre O. les chercheurs sont encore sur le coup. D'aucuns pensent qu'elle pourrait faire référence à O.J. Simpson aussi bien qu'à Wilson Oruma, les deux pygmallions officiels du réalisateur de clips.



Il n'était pas bien difficile de démasquer le coupable. Cependant le principal intéressé n'a pas encore avoué, et je pense même être le premier à mettre publiquement le doigt sur son crapuleux subterfuge. Mais la vérité ne saurait tarder à éclater au grand jour. Il n'y a pas beaucoup de place pour le doute. On retrouve dans ce film tous les éléments chers à l'univers de Michel. Un personnage principal disgracieux dont la tignasse ignoble lui assure la liberté de déambuler à sa guise sur les trottoirs que les passant désertent à son passage. Un bonhomme sympathique, fondamentalement gentil, en contentieux avec ses parents comme avec ses collègues de bureau et chèrement attaché aux bonnes manières ainsi qu'à la protection de l'environnement. Un univers décalé où urbanisme coloré et fantaisies mignonnes font bon ménage. Des seconds rôles tous plus improbables les uns que les autres baignant dans une folie douce et propices à un humour gentillet permanent. Enfin bref une escroquerie, une friponnerie, une malversation, une filouterie, un abus de confiance. Gondry nous prend pour des cons.



Pourquoi un pseudo ? Peut-être par peur de surprendre son audience habituelle rodée à des actrices aussi douées que Charlotte Gainsbourg ou à des acteurs aussi brillants que Gabriel Garcia Macdal . En effet on retrouve à côté des abominables malfrats que sont Jason Shwartzman et Jude Law des gens intéressants comme Dustin Hoffman, Naomi Watts, et Isabelle Huppert. Mais ne vous méprenez pas. Tous ces acteurs se sont vus confier des rôles si chiants qu'on en oublierait presque leur talent. À l'exception de Mark Wahlberg qui trouve enfin un rôle qui ne soit pas une insulte radicale à sa personne autant qu'au spectateur, un rôle assez marrant qui plus est. Peut-être aussi que Michel Gondry a choisi de prendre un pseudonyme pour remporter deux fois la Palme d'Or à Cannes, comme Gary avec le Goncourt, c'était oublier un peu vite qu'il n'a jamais reçu aucun grand prix à ce jour, hormis les Oscars du meilleur décorateur et du meilleur photographe de plateau pour sa publicité de la Smirnoff Ice, spot publicitaire qui a fait de Gondry le Méliès d'aujourd'hui.


I Heart Huckabees de David O. Russell avec Mark Wahlberg, Naomi Watts et Isabelle Huppert (2005)