

Je voudrais parler de l'acteur Gérard Meylan, de la Comédie Française s'il vous plaît, qui interprète Marius dans le film et qui "n'a plus assez de musique dans le cœur pour faire danser sa vie" comme le dit Jacques Boudet dans le film avant de se voir rétorquer un très sincère : "Merde, Justin, merde !" par un Jean-Pierre Darroussin imbibé d'alcool. Car c'est aussi toute la poésie provençale héritée de Pagnol (cf. le titre) qui est contenue dans ce film de Guédiguian, injectée de Céline et de Vivaldi, et je le dis sans ironie. Mais je voudrais parler de Gérard Meylan. D'abord parce que personne n'en parle. Ensuite parce que ce type n'est pas du tout Marseillais, encore moins natif de la Bonne-Mère comme il essaie de le faire croire en interview. C'est un pur Breton comme l'indique son nom d'oiseau et son coffre de marin-pêcheur court sur pattes. Il a seulement pris l'accent de Fos-sur-mer pour plaire à Guédiguian et jouer dans tous ses films. Aussi n'a-t-il joué que dans les films de Guédiguian, à part pour le rôle d'un gangster des Martigues dans Rapt et, plus notablement, pour celui du fameux homme des bois dans Lady Chatterley. Gérard Meylan ressemble effectivement à Jean-Louis Coulloc'h, le véritable garde-chasse du film de Pascale Ferran, mais Meylan n'a pas eu le loisir de s'envoyer Marina Hands pour de faux car c'est juste un vrai homme des bois qui passe de temps en temps dans le champ et qui reste le plus souvent hors-cadre, dans la forêt, où il vit, et qui servit de plateau de tournage à Ferran. C'est un peu lui le secret derrière les scènes les plus poignantes du film. C'est lui qui est nu comme un ver derrière la caméra, toujours à l'affût, accroupi en train de chier entre les arbres. Il provoque ce regard électrique et pressé d'en finir qu'affichent les deux acteurs principaux dans les séquences les plus sensuelles. C'est bizarre que Meylan ne perce pas davantage au cinéma vu que l'accent du sud est plutôt apprécié des médias parigots, ce qui fait les choux gras de Julien Doré et a assuré une belle carrière à Laurent Paganelli, le sosie français de Greg Kinnear. En voila un autre imposteur qui s'est forgé un accent rutilant digne des plus terribles autochtones de "Plan de P" ou de Dignes-les-bains histoire de mieux faire son trou dans les vestiaires les plus malfamés. C'est bien connu que dans le football vaut mieux avoir l'accent marseillais, croyez-moi.
Marius et Jeannette de Robert Guédiguian avec Gérard Meylan, Ariane Ascaride, Jacques Boudet et Jean-Pierre Darroussin (1997)