Cannes, 2009, le moment fatidique : Isabelle Huppert, présidente du jury, a décidé de ne pas nous surprendre, du moins pas en bien, quand elle dévoile le lauréat de la Palme d'Or, j'ai nommé Le Ruban blanc (White Cheddar en VO, le Ruban Chiant en VQ), de Michael Haneke. On a dit à quel point l'ambiance était tendue entre Bob De Niro et les membres du jury 2011, mais c'était rien comparé aux délibérations à couteaux tirés de l'an de grâce 2009, dirigées d'une main de fer par Isabelle Huppert, que les jurés ont souvent évoquée sous le sobriquet de "Dame sanglante de Csejte (Čachtice)". On connaît les liens amicaux et professionnels qui unissent Huppert et Haneke. Le cinéaste et la comédienne, qui ont travaillé ensemble sur les tournages de La Pianiste et du Temps du loup, se vouent une admiration mutuelle sans bornes. Aussi quand l'une récompense l'autre, on ne peut s'empêcher d'y voir un coup de main amical. Sortira d'ailleurs cette année le nouveau film d'Haneke, intitulé Amour, avec à l'affiche, je vous le donne en mille, la rouquine la plus célèbre du 7ème Art.
L'idée du film, et c'est bien de cela dont il faut parler en premier car nous sommes en présence d'un film à thèse, l'idée du film donc est déroulée sur 150 interminables minutes par Michael Haneke. Il nous raconte l'histoire d'un village Allemand frappé par des crimes mystérieux à la veille de la Première Guerre mondiale. Au début du film, un câble tendu entre deux arbres provoque la chute fatale du médecin du village, puis, petit à petit, ce sont le baron et sa famille, les paysans, le pasteur, l’instituteur, la sage-femme, et bien sûr les enfants, qui seront tous inquiétés par ce premier acte criminel et par ceux qui suivront. Que nous dit Haneke à travers ce récit cruel et cette longue suite de cas similaires ayant pour cibles un médecin juif ou un enfant handicapé ? Que l'Allemagne nazie est le fruit d'enfants élevés dans l'austérité et la violence par des parents ultra autoritaires, eux-mêmes gouvernés par une religion puritaine ou par leurs obligations face à l'aristocratie, et finalement contrits dans l'humiliation et la punition de leur progéniture. Ces enfants, en grandissant, auront probablement voulu s'affranchir de toute soumission en opprimant autrui, en dominant le monde, en abolissant la faiblesse, en contournant l'interdit et en poussant dans ses derniers retranchements la soi-disant pureté dont on les avait affublés. Le fameux ruban blanc noué autour du bras de ces petits allemands, qui les marque du sceau de la sacro-sainte pureté, aura donc trouvé son antithèse dans le brassard étoilé imposés aux juifs pour les marquer comme sous-êtres impurs. En somme si vos parents vous font chier vous aurez un jour ou l'autre envie de casser du juif. Voilà le postulat de Hanouka qui, dans un mixte irritant du Village des damnés et de Dogville, prétend donner une explication possible et tangible à l'avènement du nazisme en filmant l'origine du mal absolu, ou comment une éducation patriarcale malsaine, la jalousie, la perversité, la violence morale et physique sont génératrices de sociétés fascistes et totalitaristes. C'est une hypothèse, parmi d'autres, sans doute déjà avancée par des historiens et désormais enregistrée sur pellicule sous la forme d'une fiction par un cinéaste autrichien plein d'aplomb et donneur de leçons.
Le film défend donc une thèse à la fois convenue et douteuse car largement incomplète. Ça passerait peut-être si Hane-grosse-ke filmait mieux son propos boiteux. En dehors d'un jeu de lumières pesant sur le noir et blanc (le blanc très blanc qui fait mal aux yeux, qui éblouit et qui aveugle, le blanc de la pureté affichée opposé au noir qui dissimule la vérité de la cruauté...), et peut-être quelques soi-disant jolis plans très composés, pas grand chose d'intéressant là-dedans. Contrairement au Elephant de Gus Van Sant, qui égrenait les explications possibles à un phénomène sidérant dans une œuvre dont l'enjeu esthétique était prépondérant, Haneke part d'une thèse bien établie qu'il nous assène et qu'il ressasse pendant deux longues heures et demi en accumulant les exemples les plus répétitifs pour finalement nous laisser sans réponse définitive, parce qu'évidemment on ne saura jamais vraiment le pourquoi du comment. Difficile de se passionner pour un film qui veut dire la vérité mais qui n'en dit qu'une infime partie, un film souvent grossier dans ses moyens, ennuyeux et prétentieux dans son ensemble. Le Ruban blanc pue le "film à prix". Dans la veine de Dancer in the dark, c'est infiniment long pour être long, c'est froid, séduisant, bien cruel et pathétique à souhait et ça suce toutes les récompenses. On n'a pas idée de faire chier les gens pendant 150 minutes avec une idée qui tient sur une feuille de PQ. C'est l'ensemble du rouleau que déroule Haneke et qu'il nous inflige comme une dissertation bancale mais sûre d'elle-même. On commence à connaître la rigueur démonstrative du cinéaste autrichien, qui sert ici à dénoncer la rigueur éducative de personnages souvent méprisés par le réalisateur lui-même... Haneke se mord la queue puisqu'il semble employer sur le spectateur les moyens anti-pédagogiques que les parents coupables du film emploient sur leurs enfants : pour démontrer sa thèse il l'appuie fermement, sans la moindre subtilité, et l'impose avec violence pendant deux heures et demi sans issues. Haneke fait par ailleurs preuve, comme d'habitude, d'un manque abyssal d'humanité dans sa mise en scène, lui qui reproche précisément à ses personnages une froideur terrible.
Il y a deux scènes marquantes dans ce film. Dans la première un petit garçon appelé par son père le rejoint dans une pièce reculée de la maison, ferme la porte derrière lui, ressort puis revient un fouet à la main et ferme de nouveau la porte sur son dos - silence - après quelques secondes nous entendons des coups de fouet et les cris de douleur de l'enfant. Dans la seconde scène, encore plus longue, un petit garçon cherche sa sœur dans toute la maison, en pleine nuit, guidé par des cris étouffés, et finit par la retrouver à moitié nue, pleurant : elle vient d'être violée par son père. Haneke affirmait en conférence de presse à Cannes : "J'ai compris que la violence peut être encore plus percutante quand on ne la montre pas directement". C'est beau d'avoir pigé ça à 65 ans après une tripotée de films pourris, dont le parangon demeure Funny Games (film que le cinéaste trouve si génial qu'il a jugé bon de le réaliser deux fois), mais ce qui est encore plus beau c'est qu'il n'a qu'à moitié compris. Il y a une différence entre ne pas montrer la violence en gros plan (tentation à laquelle le réalisateur cède à la fin du film, on ne se refait pas complètement) pour intelligemment la suggérer, et systématiquement fermer littéralement la porte au nez du spectateur pour créer un non-mystère doublé d'un non-suspense en se contentant de laisser entendre en off ce qui est hors-champ, dans des scènes d'une nullité totale. Haneke est mauvais quand il filme la violence plein cadre et il l'est aussi quand il filme des portes. Si on cumule toutes les critiques du film, d'ici et d'ailleurs, la seule qualité qu'on lui reconnaisse unanimement c'est éventuellement un beau noir et blanc. Alors donnons une Palme de la meilleure photographie à Christian Berger (le directeur de la photographie du film) et qu'on nous foute la paix avec Michael Haneke.
Le Ruban blanc de Michael Haneke avec Christian Friedel, Ernst Jacobi et Leonie Benesch (2009)
sans déconner, ce film est une vraie épreuve à regarder. Je suis d'accord avec toi quand tu parles de "film à prix".
RépondreSupprimerC'est typiquement le genre de truc sur lequel les professionnels aiment se branler. Dès qu'il y a une bonne qualité technique, ils s'en foutent que le film soit bon ou pas.
Complètement d'accord. Le noir et blanc soutenu par un certain sens du cadrage n'enlève rien à la chianterie du propos. Mais j'ai trouvé comment parer à ça : j'ai dormi pendant les 3/4 du film, et le pire c'est que j'ai l'impression de n'avoir absolument rien raté. Regardez les 20 premières minutes, les 20 du milieu et les 5 de la fin, et vous avez vu la palme d'or moisie d'Haneke.
RépondreSupprimerPutain. On critique les films alors qu'on a dormi devant, on est vraiment de gros gros cons sur ce blog.
Oh moi je n'avais pas pioncé. J'avais tout encaissé du début à la fin.
RépondreSupprimerC'est vrai, toi, ta concubine et ton concubin, vous l'avez subi en intégralité. Ce qui explique vos têtes de déterrés à la sortie de la séance :D
RépondreSupprimerHey t'as l'accent circonflexe qui bouge ! :-O
RépondreSupprimer:D
RépondreSupprimerCe film est un coup de genoux dans le foie !
RépondreSupprimerCe film est un énorme étron noir et blanc :(
RépondreSupprimerSi ce film était un vrai ruban blanc et non un film, je m'en servirais bien comme d'un torche-cul ! Ce que ce film est en réalité !
RépondreSupprimerJe sais pas comment a fait un ami. Séance à 10h du mat en ayant dormi 5 heures à cause de beuverie absolu. Complètement saoul et puant l'alcool (les gens ont fait de l'espace autour de lui)... il a réussi à se mater cette boucherie.
RépondreSupprimerA jeun j'ai véritablement ramé. La vacuité du tout était assez sidérante, surtout quand on nous a vendu un film choc sur "la montée du fascisme"...
je suis retourné voir 1900.
"Pour preuve, sortira cette année le nouveau film d'Haneke, intitulé Amour, avec à l'affiche, je vous le donne en mille, la rouquine la plus célèbre du 7ème Art."
RépondreSupprimerAmusant cette manière récurrente de voir des complots partout, des connivences louches. Cela dénote un esprit tordu, vicieux, lepeniste.
Charlie Chaplin a engagé Edna Purviance, juive elle aussi. C'est louche pour vous, c'est ça, c'est un complot ?
"Dans la veine de Dancer in the dark, c'est infiniment long pour être long". Ca c'est sur Le ruban blanc est de la même veine que Dancer ... Mais comment peut-on écrire de telles conneries ?.. Vous relisez-vous ?..
"Il y a une différence entre savoir ne pas montrer la violence en gros plan (ce que le réalisateur fait finalement à la fin du film, on ne se refait pas complètement)".
RépondreSupprimerMais quelle différence faites-vous entre le traitement de la violence chez Haneke, auquel vous semblez ne rien avoir compris, et votre violence lorsque vous traitez une jeune actrice de "sale pute que je me ferais bien quand même ?..
Encore une fois la connivence entre Haneke et Huppert n'était pas envisagée sous un angle religieux (je suppose que le mot "lepeniste" nous inculpe de racisme ou d'antisémitisme, idem pour la comparaison étonnante avec Chaplin et Edna Purviance que tu qualifies avec le mot "juive"). C'est toi qui l'interprètes comme ça. Haneke et Huppert ont juste fait deux films ensemble et quand Huppert donne la Palme à Haneke (pour un film qui ne le mérite pas forcément) alors que TOUT le monde s'y attendait, bah TOUT le monde trouve ça un peu louche. C'est simplement une connivence amicale qu'on a tendance à tout naturellement soupçonner, rien d'autre.
RépondreSupprimerLe Ruban Blanc et Dancer in the dark n'ont pas vraiment de rapport, mais la phrase plaçait la comparaison ailleurs, ce que tu n'as pas dû comprendre.
Ultime remarque : Quelle différence fais-tu entre le traitement de la violence chez Haneke, auquel tu sembles avoir tout compris, notre violence lorsqu'on "traite" une jeune actrice, et la tienne quand tu viens nous "traiter" d'antisémites, de connards, de tarés, de gros cons, de fils de pute et ainsi de suite ?
Ou comment passer des heures à insulter des gens pour leur reprocher d'insulter des gens...
Oui, mais c'est en réaction à vos écrits, pour que vous voyez ce que votre manière gratuite d'arroser tout le monde d'insultes a de nauséabond. Je n'ai pas commencé, c'est vous. J'écris dans un tout autre style dans des lieux plus fréquentables ...
RépondreSupprimerTriste de ne pas assumer l'ignomine de ses écrits par des justifications alambiquées ... Assume, tu écris des conneries bêtes, méchantes, racistes, sexistes, homophobes. Sois-en fier au moins...
RépondreSupprimerTu vois je pourrais te citer pour te répondre...
Tu réponds à ce que tu considères de la bêtise par la bêtise, c'est dommage.
Récompenser le ruban blanc à cannes, c'est la même chose que de dire que Guivarc'h a bien fait son boulot lors de la coupe du monde 98. Légitimer la palme du ruban blanc, c'est légitimer la médaille de champion du monde de Bernard Diomède. Il faut se le rappeler de temps en temps !
RépondreSupprimerPas faux :D
SupprimerQuel grand film !
RépondreSupprimerDommage de ne pas avoir su l'apprécier, quand vous vous extasiez devant tant de navets...
Triste, triste Noël dans la maison du dragon !
Rien à voir mais je viens de mater Funny Games et putain quelle purge ! J'ai vu que celui-là et Le Ruban Blanc mais Haneke c'est terminé pour moi ! Hop dans la petite corbeille avec son neveu par alliance Gaspar !
RépondreSupprimerLa prochaine fois je regarderai ta note sur RYM avant de lancer la moindre pelloche, Félix.
Je viens de voir "Amour" (faut croire que j'aime me faire du mal) et j'en parlerai bientôt ici.
SupprimerLe pire c'est que j'avais envie de voir "Amour", ça avait l'air ambitieux comme film, il y avait de la place pour l'intelligence. Mais si c'est juste de bêêêêlles images de vieux mourants, de beaaauux "tableaux", merci bien.
SupprimerJ'aurais pu te faire rater Blue Valentine, Josette. ;-)
Supprimer:D je parlais surtout pour ces films que je lance avec un gros a priori négatif, ce qui n'était clairement pas le cas de Blue Valentine.
SupprimerEn même temps rien que le générique de Funny Games aurait dû me faire arrêter direct : le couple en voiture qui joue à un blind test musical interminable... sur de la musique classique ; puis gros plan sur la nana qui manque d'avoir un orgasme en effleurant par inadvertance la main de son bon mari... et enfin le clou, le titre du film qui apparait et la musique qui change brutalement en jazz punk. En trois minutes on a déjà la quintessence des procédés merdiques du film.
" Ce film pue le "film à prix" " dites-vous.
RépondreSupprimerEntièrement d'accord. C'est typiquement le genre de films qui met les critiques à genoux parce qu'il est en noir et blanc et parce ça se passe dans des intérieurs cossus avec des monsieurs à la mine grave. Et aussi parce que le gars qui l'a fait a un CV en béton (selon le point de vue...) et sans doute quelques potes dans le milieu de la critique, en tout cas des gens qui le défendront bec et ongles parce que, bon, la dichotomie fonctionne à plein quand les critiques ne savent pas de quoi parler, et de temps en temps ils aiment bien laver leurs péchés en faisant de la grosse hype pour des films chiants sans acteurs connus. En tout cas je n'ai jamais entendu parler de ces acteurs-là, ils doivent être connus de certains passionnés fanatiques, mais moi qui ne suit pas assidument le cinéma, je ne les connais pas, et pourtant j'en connais une tripotée de noms. Toujours les mêmes qu'on voit à la télé, qu'il fasse beau ou qu'il fasse laid.
Toujours est-il qu'on ne peut pas critiquer sereinement ce genre de films sérieux à en crever lors de leur sortie, il faut attendre plusieurs années pour les descendre (ou juste en parler vraiment) parce que ça parle d'un sujet sérieux, et bla bla bla. Sous des couverts intellectualisants, on a l'exact inverse du cinéma hollywoodien, ça en est presque troublant : d'un côté, des navets intersidéraux produits à la chaîne et dont tout le monde parle, et de l'autre des films à prétention intellectuelle dont tout le monde parle. On dirait qu'il n'y a pas de place pour le juste milieu, un film qui soit à la fois divertissant et un peu sérieux quand même (c'est-à-dire qui ne nous prenne pas pour des cons). Hors de cette dichotomie, point de salut.
Enfin, c'que j'en dis... De toute façon, je ne l'ai pas vu ^^
Et je me méfie es films dont l'affiche est ornée de la trop fameuse palme d'or, où même du logo de Cannes pour n'importe quel catégorie. Je sais pas pourquoi, ça me repousse, j'en veux pas.