Film vu au cinéma lors d'une après-midi qui restera comme la pire de notre vie. On fait des conneries quand on est étudiant en Cité U et qu'on se fait chier à clamser. Aller voir ce genre de film au ciné peut en faire partie. Tourner ce genre de film aussi, et Stephen Sommers, bien qu'il ne fut pas inscrit à l'Université de Metz en 2004, du moins pas qu'on sache, devait beaucoup s'ennuyer pour paumer des dizaines d'après-midi sur le tournage de ce navet. Ce fut la fin de sa carrière. Avant ça on lui confiait beaucoup d'argent et il s'en servait pour signer des films d'aventure à l'ancienne et très variés comme La Momie ou Le Retour de la Momie. Sommers était alors en odeur de sainteté à Hollywood grâce aux succès de ces deux films, et les grands studios comptaient sur lui pour torcher un bon film de vampires, genre qui n'était pas encore revenu à la mode au début des années 2000. D'ailleurs Hugh Jackman n'était pas encore la star d'aujourd'hui, il ne se faisait pas encore appeler "Huge Jackhammer". A l'époque c'était surtout un tout petit bellâtre fier d'arborer de gros muscles mais incapable de soulever son arbalète. Il préférait lever Beckinsale en coulisses, elle qui par contre était déjà une Barbie de chair et de sang, et surtout de chair. A ce propos, comment se fait-il que l'actrice n'ait pas pris le début d'un soupçon de ride (même d'expression...) depuis qu'elle a commencé à pavaner dans des gros blockbusters américains comme Pearl Harbor, c'est-à-dire depuis circa 2001 ?! Le mystère reste entier !

Que nous propose Van Helsing ? Nous tenons-là une réécriture révisionniste, presque négationniste, d'une grande figure du genre fantastique, cuisinée à la sauce barbecue par l'ami Sommers. Vieux scientifique bigleux chez Bram Stoker, Helsing fut quelque peu rajeuni et ragaillardi dans les films de la Hammer signés Terrence Fisher (aka le "Fisher King", et accessoirement le père de Terrence Malick) où Peter Cushing identifia à tout jamais son visage à celui du personnage. Francis "Ford" Coppola tenta bien de lui donner une nouvelle vie dans Dracula mais c'était sans compter sur l'éternel esprit déconneur d'un Anthony Hopkins bien décidé à lui mettre des bâtons dans les roues en transformant le scientifique d'origine en Pierre Desproges moyenâgeux sous acides. Enfin, Van Helsing devait devenir une brute épaisse et entre parenthèses un pur sac à merde devant la caméra hystérique du présumé coupable Stephen Sommers. Coiffé d'un sombrero en cuir dénotant avec les paysages des Carpates, attifé d'une coupe non pas de cheveux mais de cheval réellement atroce (un catogan coiffé-décoiffé trop long pour être honnête), affublé d'un cache-poussière qui dans son cas devrait s'appeler un cache-misère et qui peaufinait à merveille son air con, Hugh Jackman fit du personnage un archer guignolesque, un guerrier du dimanche toujours entouré des pires goules du quartier et, concernant Elena Anaya, de la pire gousse ibérique. Quand on regardait en 2004 la belle brune espagnole au charme vénéneux lâcher des caisses dans un rôle de faire-valoir honteux et insultant, on était bien en peine d'imaginer qu'elle finirait à l'affiche du meilleur film de Pedro Almodovar, La Piel que (je rêverais d') habitar.
En réunissant dans un scénario maléfique Dracula, le loup-garou de Londres, le monstre de Frankenstein, Dr Jeckyll et Mr Hyde, quelques piranhas, un bel anaconda, le gendarme de St Tropez, l'incroyable bonhomme des neiges et la fameuse Momie qui le rendit célèbre, Stephen Sommers n'imaginait sans doute pas une seconde qu'il était en train de signer un film visionnaire annonçant les blockbusters actuels, où l'on se plaît à convoquer l'âne et le cochon et à ménager la chèvre et le chou pour attirer dans les salles obscures le plus grand nombre de spectateurs quitte à trainer dans la boue un certain nombre de légendes du cinéma bis et une certaine idée du cinématographe. Van Helsing est une succession de scènes d'action en CGI (Computers Generated Imagery) que Christopher Nolan n'aurait pas reniée. Le film est aussi une accumulation de clins d’œil très appuyés aux films de genre d'antan, et il n'y a donc rien d'étonnant à ce que Quentin Tarantino l'ait placé dans son top des années 2000. L'action non-stop mise en scène par des gros geeks incapables, les coups de coude obligés et brutaux à la cinéphilie de caniveau, les jeux de lumière dignes de ceux d'une boîte de nuit gérée par un épileptique, la bande-son de taré qui rappelle le titre du film Travaux, on sait quand ça commence..., les personnages creux comme les bourses de Jackman à la fin du tournage, tout ça allait bien figurer au programme des pires films d'action du XXIème siècle, ceux-là même que la décidément tristounette Kate Beckinsale allait enchaîner avec son odieux époux Len Wiseman (le yes-man mange-merde qui a réalisé Underworld, Die Hard 4, Total Recall...). En ce qui concerne Stephen Sommers : pas de nouvelles, bonne nouvelle !
Van Helsing de Stephen Sommers avec Hugh Jackman, Kate Beckinsale et Elena Anaya (2004)