8 août 2012

Terri

Remarqué à Sundance, la grand messe du cinéma indépendant américain, Terri est le long métrage breakthrough du réalisateur new-yorkais Azazel Jacobs, dont les précédents films, plus expérimentaux, n'avaient pu atteindre qu'une audience très limitée. Nous y suivons le personnage éponyme, joué par Jacob Wisocki, un ado obèse et mal dans sa peau qui vit seul chez son oncle souffrant. Au collège, il est la tête de turc de ses camarades et il est ignoré par des professeurs incapables de le comprendre. Résigné, Terri vit en pyjus, reclus dans sa solitude et sa marginalité. Ses entrevues régulières avec le proviseur de son lycée, incarné par John C. Reilly, vont progressivement lui ouvrir les yeux et lui faire réaliser que tout n'est pas tristesse et désespoir en ce bas monde. Voilà pour le pitch de ce film qu'une seule chose m'a poussé à voir : la présence au casting de l'acteur John C. Reilly, que je sais capable d'élever tout un film par son incomparable présence. Pour le reste, je redoutais d'avoir affaire à un tout petit film indé ricain typique, et ça n'a évidemment pas loupé...



Faut-il alors regretter que John C. Reilly joue dans ce film ? Oui, évidemment, oui ; parce que cet acteur, si doué, perd son temps et gâche sa carrière dans des films indés insignifiants, que l'on connaît tous par cœur avant même de les avoir vus. Celui-ci n'est pas pire qu'un autre, mais on commence à trop bien connaître la recette aigre-douce de ces films anodins, typiquement faits pour briller à Sundance, comme l'était aussi le médiocre Cyrus, où notre vedette chérie traînait déjà son ombre, en meilleure compagnie, sauvant toujours une scène ici ou là. On a vu ça tellement de fois qu'on passe certaines longueurs, et il y en a beaucoup, en avance rapide, sans vergogne, et avec la certitude de ne strictement rien louper. Terri est donc un film tout à fait anecdotique, mais, dans le genre, il existe tellement pire et plus agaçant que l'on serait tenté de faire preuve d'indulgence. En ce qui me concerne, j'ai eu la mauvaise idée d'attendre une minute de trop avant de me lancer dans ces quelques lignes, je ne m'en souviens déjà plus assez pour vous en dire plus !


Revenons donc à John C. Reilly, qui mérite infiniment mieux que des films comme Terri. En outre, du fait de sa présence, on en vient à attendre et à espérer quelques éclats de rire, alors que ce film n'est pas drôle, ou si peu... Mais, comme dans le dernier Polanski, c'est tout de même à l'acteur que l'on doit les quelques rares bons moments de ce film, et notamment un monologue risqué, que n'importe quel autre comédien aurait pu rendre bidon et transformer en une leçon de morale à deux balles digne de la série La Fête à la maison, et qui devient, grâce au talent de l'acteur, assez poignant et presque beau. Je me souviens qu'il m'avait brièvement sorti de ma somnolence. A part ça, il y a bien sûr de brefs instants où l'acteur nous laisse furtivement entrevoir l'immense talent comique qu'il déploie habituellement aux côtés du génial Will Ferrell, pour aussitôt le refouler, le contenir, à notre plus grand désarroi. Non, vraiment, circulez, il n'y a pas grand chose à voir dans Terri. Et pour finir, sachez que dans la réalité, la bonnasse de la classe, la petite blonde au sourire craspec jouée par la dénommée Olivia Crocicchia, n'aurait même pas jeté un seul regard sur le gros Terri. En vrai, elle serait la première à le rabaisser et à le rappeler douloureusement à sa triste situation d'énorme freak du bahut. Dans le film, elle finit carrément par s'offrir à lui. Non mais sans blague... Ça, je m'en rappelle, ça m'avait choqué !


Terri d'Azazel Jacobs avec Jacob Wisocki, Olivia Corcicchia et John C. Reilly (2012)

13 commentaires:

  1. Je suis allé au ciné ce matin grâce à cet article, sans bouger mon énorme fiac de ma chaise à trois pieds, merci de m'avoir charrié la place, je te revaudrai ça !

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  2. http://www.youtube.com/watch?v=sLF31AY25so

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  3. Arf, il avait l'air de sortir du lot ce film... Pour une fois qu'un papier dans les Cahiers me donnait envie d'aller au cinoche...

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  4. Il faudrait dater précisément le moment où "ciné indé ricain" s'est mis à vouloir dire ce film et tant d'autres si semblables. Juno ?

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    1. Bien avant Juno ! Peut-être même bien avant American Beauty qu'on avait traité ici :
      http://ilaose.blogspot.com/2009/06/american-beauty.html

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    2. Mais Juno fait partie de ces gros succès, comme Little Miss Sunshine, Garden State et cie, qui donnent des ailes à ce cinéma-là.

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  5. Quand on pense au ciné indé ricain des débuts (Le Petit Fugitif), des années 70 (Wanda), du début des années 90 (My Own Private Idaho), et qu'on voit aujourd'hui Cyrus, Terri, Juno et compagnie, on a envie de s'ouvrir les veines. Sundance fait du mal. Heureusement qu'il y a quelques Kelly Reichardt...

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  6. Je me rends compte qu'en général je me les tape pour vous ! :)
    The Kids are allright était terrible dans le genre, aussi : http://ilaose.blogspot.com/2011/03/tout-va-bien-kids-are-all-right.html
    Des fois il y en a qui sont un peu plus sympas qui parviennent encore à me plaire :
    http://ilaose.blogspot.com/2011/05/its-kind-of-funny-story.html

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