14 mai 2009

Le Nouveau Monde

Celui-là je l'avais loupé au ciné parce que j'avais un imprévu et que je voulais pas du tout le voir. J'avais pas tort. Terrence Malick a une idée fixe : filmer l'herbe. Je sais pas s'il est toxico dans le privé, ou s'il devient à moitié con quand on le fout dans un pré, toujours est-il que c'est ça son crédo. Petit retour en arrière. En 1974, dans son premier film, La Balade Sauvage, Malick avait plus ou moins décidé de refaire le Bonnie and Clyde d'Arthur Penn sept ans après, sans en avoir l'air, en choisissant Martin Sheen et Sissy Spacek pour incarner la jeunesse éperdument libérée des années 70 prête à tuer pour s'aimer. Si Godard avait su voir Belmondo pour A bout de souffle et si Vadim avait su voir Bardot pour Et Dieu créa la femme..., on peut dire que Malick avait une paille dans l'œil le jour du casting de son premier film, une grosse botte de paille coincée dans son œil gauche et une poutre amarrée dans l'autre. Quand on veut filmer des icônes faut quand même se rappeler que leur profil compte un minimum pour entrer dans le cœur des gens, et là causons de charisme... Pour emballer les foules un homme-tronc coiffé des cheveux les plus secs du Michigan (Martin Sheen), et une anorexique qui peut se servir de son propre blair comme d'un économe dès qu'il y a des patates à éplucher (Sissy Spacek), ça ne peut guère suffire. Toujours est-il que ces deux-là batifolaient tout le long du film dans les herbes sauvages séchées par l'impitoyable soleil d'Alabama. Dans Les Moissons du ciel, en 1979, c'était au tour de Richard Gere de se rouler dans la paille Texane pendant 3 plombes avec les roustons coincés dans la braguette de son jean Levis. Puis en 1999, dans La Ligne rouge, Malick prenait pour prétexte un film sur la guerre dans le Pacifique pour aller fumer les herbes hautes de Guadalcanal avec toute son équipe pendant vingt ans pour ce qui devait rester comme le tournage le plus long et le plus "camé" de l'histoire du cinéma.


Pocahontas sent ses doigts après s'être gratté la raie. John Smith découvre toute une culture.

Et puis en 2006 notre soixante-huitard attardé remet le couvert avec Le Nouveau Monde, adaptation de la célèbre histoire de Pocahontas, la légende fondatrice de la civilisation Américaine et jalon de sa tradition littéraire. Mais ça on s'en fout puisque ce qui intéresse Terrence Malick, c'est l'herbe. Et quoi de mieux pour filmer des herbes que ce "Nouveau monde", terre vierge, tantôt hostile tantôt si hospitalière ? Au fond Malick il s'en balance pas mal de Pocahontas. Et on va pas lui en vouloir. Qui en a quoi que ce soit à secouer de cette légende parfaitement chiante ? Non, tout le monde s'en fout. C'est super con comme histoire de toute façon... Y'en a eu deux mille comme ça, des récits de captives tantôt blanches tantôt natives, de chevaliers preux et conquérants, de sceptres en or et de calumet de mes pets, et c'est celle de Pocahontas qui est restée dans les mémoires sans doute parce que le nom de l'héroïne sonne bien... Une chance que l'histoire n'aie pas porté le nom du héros d'ailleurs, parce qu'avec un bouquin intitulé "Smith" personne n'aurait levé son cul de sa chaise. Non pour Malick c'était surtout une aubaine pour filmer des herbes, des brindilles, de la paille, des prairies, de la végétation, des prés, de la pelouse en un mot. Et Terrence Maniac s'en est donné à cœur joie. De long en large, de loin en loin, on voit la jeune Péruvienne qui interprète Pocahontas déambuler dans un sens puis dans l'autre à travers champs, à contrechamp, elle colchique dans les prés sans fin, béate, toujours plus esbaudie par le contact avec le moindre bourgeon, toujours plus excitée à chaque fleur qu'elle écrase de ses pieds plats, toujours plus bouffée par les guêpes et les moustiques, heureuse, candide, niaise, conne, faut bien le dire, elle est con comme un ballon.


Un des 3500 plans du film où Pocahontas cavale dans l'herbe.

On se demande si pour Malick le "mythe du bon sauvage" n'équivaudrait pas à un genre de "mythe du bon con". Faut voir cette native se fendre d'un sourire éternellement plus grand et plus bête à chaque fois qu'elle va courir dans les herbes folles en écartant les bras pour que ses mains frôlent les têtes fleuries des pousses sauvages de son "nouveau" monde pourtant si ancien que la farouche nature s'en est emparée - mais pour combien de temps ? Bref c'est pas ça que je disais, ce que je disais c'est qu'elle a vraiment l'air con la gosse à force de gambader toutes les trois scènes dans sa robe à ras les couilles au milieu des plantes. Malick a vraiment un gros souci. Sans parler de ses indiens qui hurlent "ouhouhouh !" à tout bout de champ. Je veux bien croire que les indiens avaient ce cri de guerre. Après tout on nous le raconte depuis des lustres, doit bien y avoir un fond de vérité. Mais de là à nous faire croire qu'ils hurlaient ça du soir au matin et du matin au soir, pour un rien, c'est vraiment les prendre pour des autistes et nous prendre pour des cons. Aimer les herbes c'est une chose mais Malick pourrait faire l'effort de respecter la mémoire et la dignité des abrutis qui les ont regardé pousser. Seulement voila, donnez du feuillage à Malick et c'est un coq en pattes, alors foutez-lui une idiote du village en culotte courte qui ne parle pas sa langue au milieu du tableau, pendue à une liane avec un sourire long comme le bras collé à la gueule, et notre homme ne se sent plus pisser.


Que filme Malick ? Colin Farrell ou des herbacées ? Impossible à dire.

Parsemé de scènes narratives probablement tournées par un assistant à la manque, un exécutant sans figure, un "yes man" très patient, le film de Malick n'est qu'une suite de plans sur une bourrique indienne en extase permanente qui danse dans les hautes herbes Américaines, filmée par un vieillard plein de tocs et sans doute plein de tiques après des mois passés dans la jungle Colombienne caméra au poing. Aussi le montage est-il totalement décousu et audacieux. Mais encore faut-il considérer comme "audacieux" un monteur d'Hollywood qui a dû suer toutes les eaux de son corps et se ronger les ongles jusqu'à se dénuder les os des doigts pour raccorder bon an mal an des milliards de kilomètres de rushes sur des herbes grimpantes au milieu desquelles, tête basse, Colin Farrell grimpait quant à lui la moitié des petites actrices locales, naïves autochtones, sans que personne ne s'en aperçoive. En tchancles ou en armure de conquistador, Colin Farrell finit chacun de ses tournages, pour ne pas dire chacune de ses journées, assis en chien de fusil sur une autre personne.

Après la sortie de ce film les journaux spécialisés annonçaient Malick sur le tournage d'un long métrage sur le golf intitulé "Green". On entendait aussi courir la rumeur de l'écriture d'un film sur le football, dont le working-title était "Grass". Mais c'est bel et bien The Tree of Life qui devrait arriver sur nos écrans un jour ou l'autre.


Le Nouveau Monde de Terrence Malick avec Colin Farrell et Christian Bale (2006)

30 commentaires:

  1. Je suis tombé sur un extrait de ce film, l'autre soir à la TV, j'ai cru à un film-TV, remake sans-le-sou de Braveheart, mettant en scène Colin Farrell dans le rôle de Braveheart. J'ai crié au scandale, tu te doutes.

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  2. ahah, géant ! :D

    Mais même si le paragraphe sur Sheen et Spacek est méga drôle, je trouve ça rude car je trouve le premier très classe et la seconde très belle dans Badlands ! (ouais, on s'en fout !) :D

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  3. Sérieux, le prochain film de Terry Manique s'intitule "Tree of Life", on est donc pas si loin ! :D
    Toujours plus ambitieux, The Machinist compte, dans ce film, tout simplement raconter "l'histoire de la vie", comme il le répète à longueur d'interview...

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  4. L'histoire de la vie... des herbes. Il ne le précise jamais mais c'est implicite, c'est entendu j'ai envie de dire. Petit clin d'œil au blog de mon con de plagiaire de frère.

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  5. Merci, grâce à toi j'ai vu ce film que je ne verrai jamais, et j'en garde pour toujours l'image d'une "bourrique indienne qui colchique dans les près" :D

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  6. N'importe quoi ce que vous dites de Badlands que vous réduisait à si peu! Malick y prouve surtout qu'il est LE gand cinéaste du vide : une grande partie du film se déroule dans un no man's land total, un paysage lunaire et splendide que la caméra filme en tant que tel, et qui acquiert une beauté toute... becketienne, je trouve pas d'autres mots. On retrouve seulement dans Gerry une telle science du cadre et un tel amour du froid.

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  7. D'autres critiques ont parlé de Malick comme du "cinéaste du vide" mais c'était pas pour lui faire plaisir...

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  8. "Dans Les Moissons du ciel, en 1979, c'était au tour de Richard Gere de se rouler dans la paille Texane pendant 3 plombes avec les roustons coincés dans la braguette de son jean Levis." écrivez-vous. C'est une vision personnelle de ce film, vulgaire, bête et méchante, qui se disqualifie d'élle-même. Pauvre connard, et toi, tes roustons, ils sont coincés dans ton cerveau ?.. (J'essaie de me mettre au niveau).

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  9. Ce que tu cites c'est pas une "vision du film", c'est une vanne, drôle, contrairement à la tienne. T'es tuant...

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  10. Autre vanne drôle,navrant Stavros: James Dean a les roustons "Géants" coincés dans son jean. Ah ah ah !.. dRÖLE? NON ,

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  11. Eh ben voilà, j'arrive à me mettre au niveau, mais ça demande beaucoup d'efforts. Désolé, moi question humour, je serais plutôt Wilder que Pécas .

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  12. C'est vrai que t'as le timing de malade des comédies de Wilder. C'est fou :D

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  13. Non, Wilder ne filme pas rapide, c'est typiquement un poncif. Le seul film où les répliques fusent, c'est "Un, deux, trois". Le reste de l'oeuvre de Wilder est, au contraire, placé sous le signe de la lenteur. Hawks est le spécialiste du timing d'enfer en comédie (voir "La dame du vendredi").

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  14. Comment tu fais pour répondre toujours à côté de la plaque ?

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  15. Qui, quoi, quelle plaque ?..

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  16. j'aime beaucoup les gens qui ont assez de temps dans leur vie pour descendre si inutilement et maladroitement des oeuvres.
    C'est mignon tout plein, vain, très ambitieux, un peu comme filmer de l'herbe, ce que certains font très bien.

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  17. Demain, mardi 31 mai, tu pourras lire notre critique de Tree of Life !

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  18. J'ai vu le film et il m'a sacrément ennuyé. La nature c'est bien joli, mais comme le discours ne va pas bien loin, je comprends que les auteurs du blog aient eu envie de s'amuser un peu avec ce film surestimé et je trouve ça très bien qu'ils en aient sorti un article marrant (qui, si je ne m'abuse, ne prétend pas à une analyse rigoureuse et exhaustive de l’œuvre de Malick).
    Depuis quand est-ce qu'on n'a plus le droit de s'amuser?!

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  19. j'ai pas dit que ça n'était pas un droit, je dis juste que je trouve ça marrant, même fascinant que des gens aient le temps pour des conneries pareilles. S'amuser oui, apparemment ça n'amuse qu'un cercle restreint d'internautes, et encore... tant de temps pour si peu, c'est mignon.

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  20. Anonyme a dit…

    j'ai pas dit que ça n'était pas un droit, je dis juste que je trouve ça marrant, même fascinant que des gens aient le temps pour des conneries pareilles. S'amuser oui, apparemment ça n'amuse qu'un cercle restreint d'internautes, et encore... tant de temps pour si peu, c'est mignon.


    --> on pourrait te rétorquer que c'est fascinant que toi, qui n'apprécies pas le ton du blog, prennes sur ton temps pour venir lire et faire des commentaires... Je ne critique pas le fait que tu ne sois pas d'accord et encore moins le fait que tu le dises. Un blog étant un espace public, c'est normal qu'il y ait des com positifs comme négatifs, mais sur la durée ça m'étonne toujours un peu : c'est comme regarder les 2 premiers épisodes d'une série, trouver ça nul, mais s'envoyer quand même les 40 saisons...

    Quand au cercle restreint d'internautes : c'est inhérent au principe d'un blog. Il y en a tellement qu'il est difficile d'avoir un large public. Puis, même si le blog n'amuse qu'un nombre restreint d'internautes, où est le problème? Si ça n'amuse que les proches des auteurs (ce qui ne semble pas être le cas, cf. moi), c'est déjà ça, non? Ça plaît à certains et ça ne fait pas de mal aux autres qui ne sont pas obligés de le lire, donc bon ...
    Enfin je sais pas, ce débat sur les blogs est étrange. Il y en a que je trouve nuls, mais s'ils font marrer les 3 personnes qui l'écrivent et les 6 personnes qui le lisent, tant que les propos ne sont pas condamnables, je m'abstiens de les lire et du coup je ne vois pas trop le problème :/

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  21. On est bien d'accord, mais les mêmes "Anonymes" qui critiquent la futilité des blogs sont ceux qui défendent je n'en doute pas une seconde corps et bien la sacro-sainte liberté d'expression. Et ces gros gros tocards une fois revenus de leur manif pour la libération de journaleux emprisonnés en Iran, ceux-là ils se connectent sur le net, vont lire des blogs (alors qu'ils n'aiment pas ça) et demandent sans détour à leurs auteurs d'"arrêter parce que ça sert à queud de causer". Tocards.

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  22. Un seule chose sur ce film... va voir un psy et raconte-lui ton enfance, avoir autant de négativité c'est bon pour un enregistrement dans le "Guiness Book" !!!

    - Ce sont des pseudo-intellos comme toi qui foutent la merde ici bas, se croyant fort avec leurs deux neuronnes se culbutant entre les deux oreilles... ma foi, comme le disait mon grand-père "il faut de tout pour remplir un Zoo", et il a raison !!!

    - Grâce à Google et le hasard j'ai pu dénicher une tribu de Pseudo-intellos et de Pro-tocards, j'aurais préférer gagner au loto mais bon, à chacun ses mauvais jours... sur ce, vivez en paix et surtout restez dans vos coins !!!

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  23. J'avais assez aimé ce film moi, parce que c'est un film où rien n'a d'importance, on se laisse bercer, il ne se passe rien et quand il se passe quelque chose, ça ne semble pas avoir de conséquences. Et il filme les herbes, mais il les filme bien.

    http://tepepa.blogspot.fr/2008/11/le-nouveau-monde.html

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  24. Wow, je me suis déjà fait jeter?

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  25. J ' aime comme Malick film la nature , une nature onctueuse , soyeuse , douce ....Elle donne le sentiment que l ' on pourrait y dormir durant des siècles , tranquille...... Ouvrir parfois un oeil , regarder le soleil et les super belles herbes et dormir encore......
    Quant à l ' histoire on s ' en fous !!! le monde entier regorge , vomit d ' histoires et de discours de merde . Malick arrive parfois à faire oublier ce monde et c ' est déjà beaucoup . Merci à lui .
    Cali


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    1. N'oublie pas de caler ta tignasse dégueulasse dans le bus pour la douze millième saison des purs Enfoirés de merde, cher Cali, c'est important pour les restos du cul !

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