2 avril 2012

My Week with Marilyn

Ma tolérance pour ce genre de films a considérablement diminué depuis quelques temps. Je ne supporte plus ces produits hollywoodiens aseptisés et calibrés pour gagner quelques petits prix à quelques piètres cérémonies. Ces films qui, sans prendre aucun risque, visent à satisfaire bêtement le spectateur dans ce qu'il s'attend forcément à voir : de petits numéros d'acteurs, un rythme pas emmerdant, une reconstitution d'époque léchée, et... quoi d'autre ? Rien ? Ah oui, peut-être aussi une amourette impossible qui rendra le récit un peu plus poignant (elle se joue ici entre la star Marilyn Monroe et le jeune Colin Clark, troisième assistant réalisateur sur le film Le Prince et la danseuse, dont on suit une semaine de tournage). Ces films-là m'emmerdent tellement que j'en oublie leur soi-disant intérêt. Alors que tout est fait pour plaire facilement, sans ennuyer une seconde, je me retrouve plongé dans un abîme de lassitude, pas le moins du monde intéressé par ce qui se déroule sous mes yeux. Alors vous devez logiquement vous demander pourquoi je regarde ce genre de films, pourquoi je me suis infligé cette semaine avec Marilyn, et je vais tenter de vous répondre de mon mieux...


Je vous avoue tout de go que si j'ai regardé My Week with Marilyn, c'est principalement pour juger la prestation de son actrice principale, Michelle Williams. Je suis en effet assez admiratif de son travail dans les très beaux films de Kelly Reichardt, et tout particulièrement dans Wendy & Lucy, où elle parvient magnifiquement à donner vie à un personnage dans la droite lignée de l'inoubliable Wanda de Barbara Loden. J'étais donc assez curieux de voir ce que l'actrice originaire de Dawson Creek donnerait dans la peau de la plus mythique des stars du cinéma et si elle réussirait à faire oublier, par exemple, qu'elle ne partage pratiquement rien de sa beauté. J'étais aussi plutôt impatient de savoir si Michelle Williams parviendrait à élever un peu cette tranche de biopic de toute évidence promise au classicisme le plus plombant, à mille coudées du cinéma audacieux de sa talentueuse amie Kelly Reichardt. Verdict : la récompense glanée aux Golden Globes et sa nomination aux Oscars étaient hélas autant d'indices sur la prestation plus qu'embarrassante de l'actrice, qui m'est ici carrément antipathique. Son jeu cabotin et maniéré participe même assez grandement à faire de Marlyn Monroe un personnage insupportable qui, sans surprise, correspond totalement à tous les clichés qui lui sont généralement associés.



Et puis il faut bien dire que Michelle Williams ne ressemble pas à grand chose. Elle n'est pas laide, non, loin de là, ne soyons pas de mauvaise foi, mais quand on la voit minauder et se pavaner dans les tenues de Marilyn, elle fait vraiment de la peine. On se dit inévitablement "Putain, mais elle était quand même plus belle que ça, la Marilyn Monroe !". C'est peut-être triste à dire, mais tout cela ne serait pas si problématique si cette beauté, ce charme, cette élégance et cet aura particulière n'étaient pas si inhérents au personnage même de Marilyn Monroe. Ici, c'est le vide. Michelle Williams échoue la plupart du temps à nous rendre compte de tout ce que devait dégager la star, cette femme à la sensualité et au sex-appeal toujours renversants, même sur ces photos en noir & blanc où elle prend des poses d'un autre âge et que l'on connaît tous par cœur. Pour essayer de nous embobiner gratos et de nous faire triquer sans effort, on a tout de même droit à quelques scènes qui se veulent affriolantes. C'est bien connu, la star n'était pas pudique du tout et adorait se trimballer à poil devant le premier venu. Le personnage de Marilyn Monroe apparaît donc deux fois dans son plus simple appareil. Pas spécialement bien achalandée, Michelle Williams a bien sûr dû faire appel à un "body double" en la personne d'Emma Glover, une pin-up britannique aux mensurations dignes d'une star du X, bien trop énormes pour être tout à fait naturelles. Cela ne serait pas gênant si on ne le remarquait pas, mais le corps de la mannequin glamour dénote assez clairement avec celui de l'actrice, malgré des trucages vieux comme le monde permis par le montage (gros plan sur la tronche de Michelle Williams en train de se désaper, cut, plan moyen sur un corps de malade mental vu de dos et appartenant à une autre femme). Nue, Michelle Williams devient donc, dans la peau de Marilyn, une grande perche au cul en bombe et aux seins dépassant de tous les côtés, n'appelant qu'à jouer dans un gros porno dégueu. Je me répète un peu et je m'y attarde peut-être trop, certes, mais cette tromperie m'a choqué ! Et vous savez bien que ces questions-là nous taraudent...


Bon, Michelle Williams n'assure pas, c'est un fait. Mais elle n'est pas la seule. My Week with Marilyn est un festival d'acteurs qui cabotinent, à commencer par Kenneth Branagh, imbuvable dans le rôle de Laurence Olivier, profitant de chacune de ses scènes pour péter un câble gratuitement et pousser des gueulantes à la Christian Clavier. A ce petit jeu-là, il les bat tous sans souci. Il s'amuse peut-être, nous beaucoup moins. Et que dire d'Emma Watson, rescapée d'Harry Potter (comme tout un tas d'autres acteurs de ce film), qui fait des pieds et des mains pour qu'on la remarque. Elle n'est pas crédible dans le rôle d'une femme. Elle a simplement l'air toute droit sortie d'un catalogue La Redoute. A vrai dire, tous les acteurs ont l'air de costumes ambulants, de portes-manteaux animés, uniquement là pour mettre en valeur le boulot de costumiers hors pair. Ah ça, ils assurent les techniciens, y'a pas à dire, ils font sans doute partie des meilleurs du monde. Costumiers, accessoiristes, maquilleurs, décorateurs... Ils sont très doués pour donner vie à des fantômes dans des films hantés par le néant. L'acteur principal, Eddie Redmayne, jeune premier hideux, est juste trop laid. Sans ses fringues chics et sa coiffure impeccable, on jurerait qu'il s'agit d'un footballeur guingampais aperçu lors d'un morne dimanche après-midi d'automne passé devant un 1/32ème de finale de la Coupe de France diffusé sur France 2 (et commenté par Xavier Gravelaine). Il faut aussi dire que tous ces gens ne sont jamais aidés par la mise en scène complètement raplapla voire inexistante du triste Simon Curtis, bien loin de Fred Godard, le Monsieur Sport de France Télévisions. La réalisation est d'un académisme terrible, fade au possible, quand elle n'est pas polluée par quelques tics visuels assez chiants, à l'image de ces gros plans répétés sur des ampoules-flash en action qui viennent annoncer ou conclure invariablement chaque séquence. Cet affligeant manque d'idée amène le simili cinéaste à essayer de donner vie à son film en se raccrochant à la bande-son, un réflexe bien connu. On devra ainsi supporter une musique jazzy omniprésente, qui accompagne quasiment toutes les scènes dans le but de leur donner un peu de peps. En vain. Quelque chose d'intéressant aurait sans doute pu être tiré des souvenirs de Colin Clark et plus généralement d'un tel sujet, mettant en présence l'une des plus grandes icônes du 7ème art. Hélas, force est de constater qu'on ne peut plus attendre grand chose d'une production américaine de ce genre, encore moins quand le projet a été mis entre les mains d'un guignol entouré d'abrutis.


My Week with Marilyn de Simon Curtis avec Michelle Williams, Eddie Redmayne, Kenneth Branagh, Emma Watson et Julia Ormond (2012)