9 mars 2008

Trade

Si on croit la légende qui entoure la genèse de Trade, Marco Kreuzpaintner aurait eu l’idée du film un beau matin en consultant son programme TV et en constatant qu’il n’y avait rien de prévu pour le soir même. C’est dans le même magazine qu’il vit un article à propos d’un documentaire traitant du commerce d’esclaves sexuels liés aux réseaux pédophiles. En lisant ça en diagonale, Marco, choqué, s’est juré de ne jamais regarder ce documentaire et s’est donné pour objectif de réaliser le film définitif sur le sujet, avec l’espoir de le boucler dans la journée, afin qu’il puisse le regarder le soir même, et ainsi passer une soirée sympathique. L’audace et l’ambition de Kreuzpaintner, ses deux plus grandes qualités. Hélas, le tournage déborda sur quelques jours et le film ne fut pas achevé le soir même du lancement du projet. Quand on se rend compte de la qualité du film, on comprend tout à fait qu’il ait fallu plus d’une journée pour l’achever ; dans la carrière de Kreuzpaintner, Trade apparaît comme le point culminant.




Pourquoi ? Parce que c'est le plus riche et le plus complet, celui dans lequel le réalisateur parvient le mieux à étaler tout son talent. Citez moi un autre film dont l'essentiel du budget est liquidé dès le générique, preuve de la générosité sans limite de son réalisateur. Citez moi un autre film où chaque acteur joue comme si sa vie en dépendait, sans doute parce qu’effectivement ils sont les cibles de menaces de mort du metteur en scène. Citez moi un autre film où l’actrice la plus âgée à l’écran a à peine 8 ans mais apparaît tout de même topless en full frontal. Citez moi un film dans lequel on retrouve donc le clip d’une chanson de bossa nova particulièrement chouette (le fameux générique d’ouverture), un documentaire riche en informations faisant froid dans le dos sur le commerce d’enfants, la bande-annonce du précédent film du réalisateur très discrètement incrustée au montage, et plusieurs des meilleures pubs du dernier Festival International de la Publicité de Pittsburg. Non, ne cherchez pas, vous n’en trouverez pas !




Ce film c'est un peu le Bohemian Rhapsody du 7ième art. Une œuvre qui part dans toutes les directions sans jamais perdre de vue son objectif. Une oeuvre incontournable où tous les grands thèmes récurrents du cinéma de Kreuzpaintner sont présents : les relations père-fils, la religion, les relations oncle-neveu, la croyance, la sexualité, les animaux domestiques, la foi et le doute en sa propre destiné.

Parmi les films de Kreuzpaintner (Trade et Summer Storm, rappelons-le), Trade est donc mon préféré, mon chouchou, celui que je conseille à tous les cinéphiles et en règle générale à toutes les personnes un peu intéressées à l’idée de connaître l’âpreté de la société dans laquelle nous vivons.

Ah, qu’est-ce qu’on est bien, tout seul, dans son salon, les doigts de pieds en éventail posés sur la table basse, en train de regarder un film de Kreuzpaintner.

On est tellement soulagé quand ça s’arrête.


Trade de Marco Kreuzpaintner avec Kevin Kline (2007)

1 commentaire:

  1. el age a ce jeune réalisateur ? A t'il prévu de réalisé une préquel appelée World ? Et une séquelle ? Parce que d'après ta critique on dirait un film inachevé.

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