19 février 2013

The Burrowers

En exterminant les bisons de l'Ouest américain, l'homme blanc a bouleversé cet écosystème fragile que sont les grandes plaines de l'Ouest américain. Il a réveillé les burrowers (littéralement "les enfouisseurs"), des terribles bestioles vivant sous terre, dont le bison constituait l'unique source de nourriture. Ces burrowers, seuls les Indiens savent comment s'en débarrasser. Mais l'homme blanc, en décimant également les Indiens, a fait disparaître avec eux leur savoir ancestral. 1879, quelque part en Arkansas. Une famille a disparu suite à une attaque que l'on attribue immédiatement aux Sioux. Une petite bande de mecs, constituée entre autres d'un homme brisé à la recherche de sa fiancée, d'un commandant de cavalerie pète-sec et d'un cuistot black loquace et sympatoche, s'en va à leur recherche, bien décidée à faire la peau à quelques peaux rouges. Ils ne se doutent pas du tout qu'ils vont se confronter aux impitoyables burrowers, malgré les mises en garde d'un jeune sioux dont ils ne comprennent pas le langage, mais dont les propos nous sont sous-titrés par un traducteur qui, lui, maîtrise le quechua en plus d'en être certainement vêtu de la tête aux pieds.


Un plan qui rappelle volontairement le plan final de Indiana Jones et la Dernière Croisade !

The Burrowers, à ne pas confondre avec The Borrowers (en VF Le Petit monde des Borrowers, un petit film pour enfants avec John Goodman, aka "Jean Bonhomme", sorti en 1997, qui nous raconte la vie de lutins qui s'empruntent des choses entre eux), se présente comme le croisement d'un film de monstres et d'un western. C'est donc un weirdstern. Ce mélange, déjà effectué à plusieurs reprises par le passé, n'a jamais rien donné de notable, et c'est d'ailleurs pour cela que j'aurais bien du mal à vous citer un ou deux exemples. Cette idée de croiser ces deux genres en vaut bien une autre mais, face au film de J. T. Petty, on se demande longtemps à quoi bon situer l'histoire à cette époque et mettre en scène quelques cowboys, indiens et tout le toutim, tant cela n'apporte aucune originalité ni intérêt à l'ensemble. En réalité, si J. T. Petty a fait de son film un western, c'est simplement parce qu'il en a gros sur la patate. The Burrowers est un véritable pamphlet écolo, anti-facho et pro-Navajo. Le réalisateur dénonce à tour de bras, vide son sac à l'aide de sa caméra. Il pointe du doigt l'attitude agressive des populations d'origine européennes face aux Indiens, immédiatement considérés comme les boucs émissaires, torturés, tués, traités comme des bêtes. Il critique sévèrement le racisme des blancs envers les noirs, puisque le noir cuistot est sans cesse rabroué par ses camarades abrutis. Il accuse enfin les pionniers d'avoir provoqué la disparition des sympathiques bisons, au mépris d'un équilibre naturel fragile par définition.


Quand il était petit, J.T. Petty dessinait toute sorte de croquis (exemple flagrant ci-dessus) qui faisaient dire à son père dans son anglais natal qu'il était un "retarded" et un "copycat". 

Le design des monstres est toujours un élément crucial de ce genre de films (pensez à Alien : si le monstre n'avait pas été conçu par un malade génial nommé Hervé Giger, le film serait très probablement resté dans l'anonymat ; rappelez-vous aussi de Predator, de Critters ou, plus récemment, L'Arnacoeur). Devant de tels films, nous attendons comme le Messie ces rares moments où nous apercevrons furtivement les monstres à l'écran, quitte à faire des arrêts sur image pour mieux admirer le travail des créateurs. Les burrowers sont plutôt réussis si l'on prend en compte le maigre budget dont devait bénéficier Petty. Ils ressemblent à des sortes d'acrididées mammifères, faits de chair et de sang, à la peau pelée, mesurant près de deux mètres de long. Leur corps se termine par une tronche très brouillonne à la dentition particulièrement acérée, et nous les devinons à moitié aveugles vu le sale état de leurs mirettes. Ils ont la particularité de ramper sur le sol à l'aide de membres rabougris, donnant ainsi l'impression d'être des hommes aux bras imparfaits, évoluant laborieusement sur les coudes, avec les jambes comme retournées et placées sur le dos (des freaks humains sont d'ailleurs utilisés par Petty pour les plans d'ensemble). Pour faire plus simple : imaginez des taupes sans poil, mêlées à des criquets sans antennes, au caractère ronchon et querelleur. Ce look fait des burrowers des bestioles presque pitoyables, que l'on devine ancestrales, primitives, et condamnées à une vie monacale. Les burrowers s'attaquent à leurs victimes de nuit, exclusivement, les empoisonnent d'un coup de griffe puis les enterrent (d'où leur nom) alors qu'elles sont encore vivantes, pour mieux s'en repaître quand elles commencent à se décomposer, car c'est comme ça qu'ils préfèrent les déguster. Vous savez tout des burrowers.


La véritable histoire du dernier des Mohicans est dans ce film !

J. T. Petty, pourtant pas bien grand, a imité Sam Raimi et ses Evil Dead en faisant de son court métrage son premier long métrage. On aurait donc pu s'attendre à ce qu'il maîtrise de bout en bout son sujet, et qu'il nous livre une œuvre moins brouillonne que celle-ci. S'il avait eu du succès, on peut s'imaginer que Petty aurait remaké son premier long métrage, qui était déjà le remake de son premier court métrage, avec plus de moyens. Son film d'horreur "à charge" échoue à nous faire peur et s'avère très banal malgré son côté hybride a priori un peu original. L'engagement du cinéaste pour la cause amérindienne et afro-américaine est toutefois à saluer, même s'il survient un peu tard et après la bataille (cf. le Lincoln de Spielberg). Signalons également que The Burrowers apparaît comme une nouvelle déclinaison du chef d’œuvre de John Ford, La Prisonnière du désert (Desert's Pandemonium en version originale), dans lequel John Wayne et son éternel sourire de plombier remuait ciel et terre pour mettre la main sur Natalie Wood, qui finalement ne voulait pas rejoindre la civilisation car elle avait trouvé en "Le Balafré" un partenaire sexuel digne de la plus grande prévenance. Une déclinaison dont on aurait pu se passer, n'apportant rien à l'original et avec laquelle John Ford aurait poliment nié toute espèce de lien de parenté. 


The Burrowers de J. T. Petty avec Clancy Brown, David Busse et William Mapother (2008)

7 commentaires:

  1. Ca c'est un western, il se passe bien à l'époque des western. Il est pas mal bien que je ne l'aie pas vu.

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  2. A noter que ce film était en compétition au festival du Film Fantasticâble de Gérardmer en 2009. Il n'a rien gagné, probablement parce que le jury, composé entre-autres de Pierre Mondy (rest-in-peace) et de Bérénice Béjo (prononcez "Bérro" en insistant bien sur la jota, la jeune femme étant très à cheval sur ses origines de la Pampa) n'a pas su voir la subtilité du message délivré par The Burrowers. Il faut dire que cette année-là un certain Morse (Låt den rätte komma in, Let the right one in) de Tomas Alfredson était en compétition...

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  3. Autre Trivia de tous les diables, concernant The Borrowers (à ne pas confondre avec The Burrowers) : John Goodman (aka Jean Bonhomme) est très ami avec Jeff Bridges (aka Jean-François Ponts) et Steve Buscemi (aka Stéphane Buisson) depuis le tournage de The Big Lebowski.

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  4. Y en a certains, c'est des gros salauds de pas mettre de commz.

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  5. ce film est un très bon dtv je vous trouve encore trop sèvères...

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  6. Et Cowboys vs. Envahisseurs avec Indiana Jones le soixantenaire, on en parle ? Il y a même un autre acteur reconnu pour ses films d'action mais j'ai oublié son nom. Et son visage. Donc ses films d'action doivent être mémorables. Comme ce film.

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