J'avais choisi de voir le verre à moitié plein devant le chapitre inaugural de l'adaptation du roman fleuve de Stephen King, en faisant preuve d'une grande mansuétude, histoire de ne pas encore passer pour le type qui tombe systématiquement à bras raccourcis sur un film qui a fait le buzz à sa sortie. Impossible d'adopter la même "positive attitude" devant sa suite, réalisée dans la foulée par le même Andy Muschietti, après un casting quasiment effectué par les fans sur internet. Enthousiasmés par le premier volet, ces derniers s'étaient en effet amusés à trouver des ressemblances physiques entre les jeunes acteurs composant la bande des Losers et des stars établies toutes désignées pour les incarner à l'âge adulte. C'est ainsi que la rouquine au centre de toutes les convoitises prend désormais les traits de Jessica Chastain, non mécontente de satisfaire ses followers en validant le choix des réseaux sociaux, de retrouver le réalisateur avec lequel elle avait déjà collaboré pour le médiocre Mama et d'ajouter, au bout du compte, une nouvelle erreur de parcours à sa filmographie. A ses côtés, nous retrouvons également James McAvoy, en leader mollasson du groupe, bégayant et sans charisme, avec toujours au moins une main dans la poche, Bill Hader, imbuvable dans le rôle du boute-en-train de service, et d'autres tocards embarqués dans la même galère.
Ce deuxième chapitre commence très très mal, continue ainsi pendant plus de deux plombes, et se termine de la pire des manières, dans un grand n'importe quoi épouvantable qui réussit à dépasser toutes les saloperies scénaristiques, toutes les épreuves visuelles et auditives subies précédemment. J'éprouve un sincère et immense respect à tous les courageux qui ont subi, du début à la fin, ce spectacle interminable et d'une laideur inouïe sur grand écran, sans perdre leur calme ni quitter la salle prématurément. Ce film dure 2h49. Deux heures et quarante-neuf minutes. Vous m'avez bien lu. C'est intenable. D'autant plus que cela ne s'enfonce pas de façon progressive dans la nullité la plus crasse, ça l'est immédiatement, d'entrée de jeu. J'ai utilisé la très pratique fonction de mon lecteur qui me permet de faire des bonds dans le temps de 15 secondes. Puis 30. Puis 1 minute, etc. Je le reconnais. C'était trop pour moi, désolé. Ça reste bénévole tout ce que je fais là, faut pas pousser, d'autant plus que mon intérêt initial était déjà très relatif et ne tenait à pas grand chose. Ma curiosité morbide, encore et toujours... Et, pour être tout à fait honnête avec vous, peut-être la présence de Jessica Chastain, qui ici se ridiculise totalement.
Alors qu'ils étaient des gamins vaguement attachants et sympatoches dans le premier film, les Losers sont à présent des adultes méprisables qui rivalisent de connerie et dont les échanges sont une vraie épreuve pour les nerfs. Leurs retrouvailles dans un resto chinois miteux annoncent parfaitement la couleur. Ils sont tous hystériques, chacun enfoncé dans le stéréotype qu'il est supposé incarner, la palme revenant sans doute à Bill Hader, dont on se met à souhaiter la mort immédiate (de son personnage). Avant cela, on s'était déjà farci une succession de scènes minables et grotesques où le black de la bande, le seul à être resté dans la ville où frappe Ca, appelle ses anciens potes les uns après les autres pour leur demander d'honorer une promesse dont aucun ne se souvient. Ces petits coups de fil occasionnent vomissements, accidents de bagnole, crises de panique... Tout y passe. Le spectateur découvrant ainsi les situations de chaque personnage, 27 ans plus tard. Andrés Muschietti donne dans la psychologie de bas étage, c'en est désespérant. Beverly qui, gamine, se faisait battre par son père, vit désormais sous la domination d'un mari hyper violent, évidemment, et l'appel de son vieil ami occasionne une correction impressionnante dont elle ne devrait pas pouvoir se relever. Comme elle reste une rebelle dans l'âme, elle porte tout de même encore des jeans troués. Tout ces portraits d'adultes au marteau-piqueur viennent probablement du bouquin de King, mais ils auraient pu être plus finement amenés.
Cette mise en place laborieuse est ponctuée de flashbacks inutiles qui ont le don de nous montrer que Muschietti prend son audience pour une masse d'imbéciles complets. Malgré la longueur extrême, le scénario est truffé de raccourcis, d'incohérences, de facilités. La séquence qui nous retrace les origines de Ça est particulièrement douloureuse, pour l'intellect comme pour les sens. Pour nous réveiller, on se paye de temps en temps une scène de trouille complètement foirée qui donne systématiquement lieu à un déluge d'effets spéciaux hideux. Fort du succès retentissant du chapitre 1, Muschietti a semble-t-il bénéficié d'un free pass de ses producteurs, il a pu se faire plaisir et mettre en scène toutes ses visions. Il ne fallait pas... Cette imagination qui se veut débridée, imprévisible, accouche simplement de choses très laides et de situations répétitives. Cela impressionnera peut-être les enfants, fera, au mieux, rire les ados et exaspérera les plus grands. Andy Muschietti confirme qu'il est un guignol XXL du cinéma d'horreur actuel en nous resservant des motifs dont il abusait dès son tout premier long métrage. Ce type-là a dû être traumatisé par une vieille sorcière décharnée dans son enfance et nous en payons les pots cassés.
Le film étale sa richesse en nous proposant aussi quelques guest stars de pacotille. Dans l'ordre, on se tape donc Xavier Dolan, dans le rôle de la première victime, un homosexuel pris pour cible par des péquenauds et achevé par le clown tueur (l'acteur-réalisateur québécois a dû être enchanté de jouer dans la suite d'un film qu'il avait ardemment défendu sur instagram via un post dispensable et ridicule où il mettait sa notoriété au service d'une production qui jouissait déjà d'une visibilité hors norme). C'est ensuite le revenant Peter Bogdanovitch qui joue son propre rôle, un vieux metteur en scène à la ramasse qui adapte un des scénarios pourris inventés par le perso campé par McAvoy, pour une apparition qui n'ajoute rien à sa légende... Et c'est enfin le King himself, Stephen de son prénom, qui vient faire son petit numéro en brocanteur mal luné, preuve en images que cette adaptation est totalement adoubée par l'écrivain. On se rappelle alors que cela n'a jamais été un gage de qualité, bien au contraire : il n'y a qu'à jeter un coup d'œil à ses tops annuels ou juste l'écouter un peu dès qu'il l'ouvre et donne son avis sur le cinoche pour s'en assurer. Le type est dans le gaz complet. Reconnaissons tout de même qu'il est la créature la plus flippante que l'on croise ici... non mais quel freak ! Je sais qu'il ne faut pas s'en prendre au physique, encore moins quand il s'agit d'un vieillard sénile au bout du rouleau, mais connaissant l'animal, peut-être ressent-il une espèce de plaisir malsain à être devenu lui-même si effrayant. L'écrivain s'adonne à l'autodérision quand il reproche à son interlocuteur et alter ego à l'écran (McAvoy) de ne jamais réussir les fins de ses livres. Ce clin d’œil lourdaud et métadébile pourrait nous faire sourire s'il ne correspondait pas à la stricte vérité, que nous confirme ce si pénible Ça chapitre 2, dont la puanteur contamine et fait définitivement oublier les modestes et à peine décelables qualités du précédent opus.
Ça : chapitre 2 d'Andrès Muschietti avec Jessica Chastain, James McAvoy et Bill Hader (2019)
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