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15 mai 2018

Kodachrome

Une création originale Netflix. Toujours un beau moment de rigolade ! Elizabeth Olsen déclarait lors d'une récente interview que la plateforme VOD devait servir à "mettre en lumière et donner une chance à des films issus du cinéma indépendant". La bonne blague... Kodachrome est un étron indé comme il en sort en pagaille, au cinéma, en VOD ou ailleurs. Le très mauvais épisode d'une série télé qu'on stopperait net, sans se poser de question. Un tel film met donc encore à mal la crédibilité de Netflix que l'on aimerait effectivement pouvoir considérer comme un distributeur nécessaire, participant effectivement à offrir une plus large audience à des propositions risquées et surprenantes. On est bien loin du compte. Le bilan est à ce jour très négatif et ce minable Kodachrome en est une nouvelle preuve affligeante. Mark Paso signe ici son deuxième long métrage et ne nous donne guère envie de nous intéresser à son premier, pourtant auréolé d'une assez bonne réputation, ni de lui jeter quelques pièces si nous le croisions un triste jour au coin d'une rue. Il met en image le plus platement du monde un scénario qui aurait mérité d'être jeté au feu, un scénar d'outre-tombe qui s'appuie sur un article du New York Times consacré à l'arrêt définitif du développement des pellicules Kodachrome paru en 2009. Passionnant.




Ed Harris incarne Benjamin Ryder, un photographe de renom atteint d'un cancer du colon en phase terminale. N'ayant plus que quelques semaines à vivre, il demande à son fils Matt (Jason Sudeikis), par l'intermédiaire de son infirmière (Elizabeth Olsen), de l'accompagner jusqu'au dernier laboratoire traitant encore le film Kodachrome, au fin fond du Kansas, afin d'y faire développer de vieilles pellicules. En très mauvais termes avec son père, qu'il n'a pas vu depuis plus de 10 ans, Matt refuse mordicus de faire le voyage. Mais la charmante infirmière insiste, trouve un stratagème et, après un quart d'heure d'hésitation au suspense insoutenable, Jason Sudeikis accepte, la mort dans l'âme, bien décidé à profiter du voyage pour envoyer chier son vieux père à la moindre occasion. Et nous voilà partis pour un road trip de la pire espèce aux côtés de trois personnages dont on aimerait voir la route coupée nette par un camion-citerne lancé à pleine vitesse. Hélas... Tout est cousu de fil blanc, du début à la fin, et le film ne surprend strictement jamais. Oui, Ed Harris et Jason Sudeikis finiront par se rabibocher avant la mort du premier. Oui, Jason Sudeikis réussira à s'envoyer Elizabeth Olsen avant qu'ils se fâchent pour mieux se remettre ensemble à la toute fin. Un programme putride et trop bien connu, suivi à la lettre par Mark "Old El" Paso.




Tout est à chier là-dedans. On se demande bien ce que le pauvre Ed Harris vient foutre là. Il pète la forme, ça se voit, il a le regard vif et le poil soyeux, il n'est pas crédible une seconde en vieux malade aux portes du trépas. Il est pathétique à plus d'une reprise, notamment quand il sort de grands discours moisis, l'un sur le fait que tous les vrais artistes sont soit des connards, des dépressifs, des drogués ou que sais-je (ceci pour se justifier d'être lui-même une ordure) ; l'autre sur la photographie et la nécessité de capturer le temps qui passe blablablabla. Quel poète, quel philosophe... Elizabeth Olsen montre quant à elle toutes les limites de son acting misérable, on croirait une zonarde de sitcom qui a eu pour seules profs de comédie Jennifer Aniston et ses petites sœurs jumelles camées. Elle singe chacune des pires postures et des intonations ridicules de la star de Friends. Et quand elle copie également son look et son style vestimentaire, à savoir ce long tie and dye qui traîne, ce débardeur blanc un peu lâche et ces seins qui pointent, elle achève de nous exaspérer. Mais le pire élément de ce trio de malheur est évidemment le si pénible Jason Sudeikis. Avec lui, c'est viscéral. Je ne peux pas. Depuis le premier regard... Je n'aime pas sa tronche. Il me sort par les yeux. Il roule tout le temps des mécaniques, se prenant pour un bogoss, c'est insupportable. Ici, il joue un agent de label musical, sur la sellette, à la recherche de nouveaux talents. Sur le point de se faire virer au début du film, où les emmerdes lui tombent sur le coin de la gueule en cascade, il demande à son patron pour lui rappeler sa valeur : "Et cette cassette de démo de Coldplay que je vous ai passée en 99 et que vous n'avez pas daigné écouter ?", "Et ce groupe, nommé Arcade Fire d'après mes souvenirs, que j'avais vu en live et que je vous avez conseillé en 2001 ?". Le gars est visiblement très fier d'avoir repéré avant tout le monde les plus gros groupes de merde actuels, le premier polluant toutes nos ondes radio, le second ayant accéléré la mort du rock indé. Joli.




Question musique, le moment le plus douloureux du film survient sans doute dans la chambre d'adolescent de Jason Sudoku, où l'un de mes groupes fétiches se voit traîné dans la boue par le simple fait d'être cité dans un tel immondice. Sudeikis et Olsen échange sur la musique, la véto-pour-vieux inspectant le bac à vinyles du tocard-en-chef (il faut croire qu'à 15 ans, notre mélomane de pacotille s'était déjà mis au microsillon, mais bien sûr...). "Pearl Jam, Nirvana, Radiohead... tu étais un ado torturé ?" demande la jeune femme, avec un ton insupportable de psychiatre inquiète. Quelques minutes plus tard, Sudeikis se veut séducteur et s'impose l'idiot défi consistant à tenter de deviner ce qu'Olsen écoutait dans sa jeunesse. Il cite de la chienlit pour la provoquer, en lui suggérant qu'elle devait écouter des trucs "mainstream" (rappelons qu'il est super bien placé pour se montrer condescendant, lui qui regrette des guignols comme Coldplay et Arcade Fire, c'est un expert en la matière). Avec une moue boudeuse qui pourrait rendre violent n'importe qui, Olsen fait la maligne en lui répondant "Tututut, moi j'adulais les Smiths, les Pixies... ça c'était mon truc, ma came". Faux pas notable pour Sudoku. Dans son élan, Olsen continue à fouiller le bac à vinyles et en sort un disque de Galaxie 500, This is Our Music. Bonne pioche, crevarde. "Oh, Galaxie 500..." dit-elle, et Sudeikis d'ajouter simplement "Obscur...". Qui a écrit ces dialogues ?! Puis la zonarde met un morceau au hasard. Quelle souffrance ! Dean, colle un procès à tous ces cons !




Un peu plus tard, les trois clowns diaboliques vont assister au concert d'un groupe que Sudeikis espère faire signer sur son label : les Spare Sevens, ou les Seven-Up, ou les Seven Plaies d’Égypte, bref, je ne sais plus, un nom à la con en tout cas. Le groupe est infâme, jouant une mélasse à gerber à un public en transe, une musique de stade de bas étage, vraisemblablement inspirée par les pires hymnes miteux d'Arcade Fire. La foule tend des briquets solennellement, Sudeikis et Olsen se regardent le sourire aux lèvres, en lâchant un commentaire puant tout en dodelinant de la tête en rythme. "Ils sont bons hein ?", "Ouais ils sont bons"... Un supplice. Plus tard, nous verrons Sudeikis et Olsen chanter du +LĪVE+ à tue-tête, un groupe ultra ringard mais qu'il est désormais trop cool de kiffer, au second degré. A ce moment-là, le film creuse encore davantage, on a vraiment envie de se tirer une balle. Le passage chez le frère d'Ed Harris s'éloigne de la scène musicale mais atteint aussi un autre abîme dans l'horreur. Également en froid avec son cadet, le vieux Edgar Harris ne trouve rien de mieux à faire que de lui révéler, en plein repas dominical, qu'il s'est tapé sa bonne femme, sous les yeux éberlués de celle-ci, ne démentant guère l'énormité des propos tenus. "Et elle en redemandait, la salope...", précise le réalisateur de Pollock, habitué à se servir de son cobra comme d'un pinceau inspiré. Juste après, Sudeikis, au bon goût de brebis, faisant la vaisselle à l'écart, sort alors le seul dialogue un peu censé du lot "Le fait de crever bientôt ne donne pas tous les droits à ce vieil enfoiré ! Il est encore plus con qu'avant, lui qui a toujours été un déchet humain. J'ai honte d'être issu de ses vieilles couilles, elles ont fait tant de dégât...". Charmant... Ed Harris essaie ensuite lamentablement de sauver les meubles en déclarant "Rooooooh, mais c'était pour le charrier, c'est tout !". Trop tard, son frère est déjà sorti de table, il se tient debout, dehors, devant sa grande baraque, les mains sur les hanches, contemplant l'horizon, essayant de digérer tout ça. J'ai eu la même réaction après m'être enfilé cette saloperie de film. J'suis sorti, j'ai pris l'air, j'ai essayé de décompresser, de penser à autre chose. L'effet Netflix quoi.


Kodachrome de Mark Paso avec Jason Sudeikis, Ed Harris et Elizabeth Olsen (2018)

14 novembre 2017

Wind River

Le corps d'une jeune fille est retrouvée dans la réserve indienne de Wind River, Wyoming. Cory Lambert (Jeremy Renner), un chasseur connaissant ce vaste territoire enneigé comme sa poche, se met au service de Jane Banner (Elizabeth Olsen), une jeune agente du FBI inexpérimentée, pour enquêter sur le meurtre. Ils devront faire équipe, dans un milieu hostile et délaissé, ravagé par la violence et l’isolement. C'est un nouveau scénario simple, limpide et efficace que nous propose encore Taylor Sheridan, après le déjà remarquable Hell or High Water (Comancheria). Parce qu'il traite d'un sujet, la cause amérindienne, qu'il jugeait trop délicat pour le laisser entre les mains d'un autre, Taylor Sheridan s'est cette fois-ci également chargé de la réalisation. Wind River marque donc son retour derrière la caméra, lui qui n'avait signé qu'un petit film d'horreur méconnu en 2011. Un retour marqué de succès puisque ce thriller gelé a été très chaleureusement accueilli à sa sortie et, pour une fois, les éloges étaient tout ce qu'il y a de plus mérités !




Alors certes, Taylor Sheridan pourrait oser davantage, en tirant notamment mieux partie des décors somptueux du Wyoming, vastes étendues immaculées particulièrement cinégéniques et propices à toutes les inventions. Il pourrait chercher plus franchement à développer une ambiance marquante, en nous faisant plus ressentir l'isolement des personnages, en nous rapprochant de leurs sensations. Mais Taylor Sheridan atteste d'autres qualités, bien rares aujourd'hui et d'autant plus appréciables. Sa mise en scène se révèle à l'image de son écriture : simple et épurée. Il fait preuve d'un véritable talent pour nous raconter son histoire avec efficacité, clarté, concision et sobriété. Il ne s'éparpille pas, se concentre sur l'essentiel et s'intéresse réellement à des personnages qu'il parvient à faire exister sans souci, bien aidé par un duo d'acteurs irréprochables.




Jeremy Renner, que je ne portais pas spécialement dans mon cœur pour sa filmographie trop chargée en blockbusters sans âme, trouve ici son meilleur rôle dans la peau de cet homme introverti et endeuillé. Quant à la belle Elizabeth Olsen, elle est parfaite en agente du FBI sortant de l'école qui se découvre un courage et une assurance insoupçonnés alors qu'elle mène sa toute première enquête. On a aucun mal à s'attacher à ces deux-là, nous les suivons avec plaisir. On se met même presque à espérer les revoir bientôt pour de nouvelles aventures, comme s'ils étaient les héros d'une série de polars teintés de nature writing parus chez Gallmeister auxquels le film fait penser. Taylor Sheridan a également le mérite de ne pas parasiter son scénario d'une romance factice entre les deux vedettes. Celle-ci s'amorce à peine à la toute fin, c'est à dire à un moment où le spectateur s'en acoquine parfaitement, tant le couple a fait preuve jusque là d'une jolie alchimie et que leur rapprochement paraît naturel. 




Wind River se distingue également par une vraie intelligence dans sa construction. Choisissant de ne pas créer un suspense artificiel qu'il n'aurait pas pu tenir bien longtemps, Taylor Sheridan lève le voile sur la mort de la jeune fille de façon assez inattendue, lors d'un flashback idéalement placé. Cette scène adroite et très bien gérée débouche qui plus est par un brutal retour au présent et une fusillade aussi soudaine qu'impressionnante, où les corps ont vite fait de tomber sur la neige. A noter également une apparition saisissante quand, en pleine traque, le chasseur campé par Jeremy Renner tombe sur le terrier de trois couguars majestueux, venant nous rappeler la bassesse des hommes de par leur seule présence tranquille et supérieure. Avec cet excellent film, Taylor Sheridan s'impose donc définitivement comme un auteur à suivre de très près.


Wind River de Taylor Sheridan avec Elizabeth Olsen, Jeremy Renner, Jon Bernthal, Kelsey Chow et Graham Greene (2017)

17 décembre 2012

Martha Marcy May Marlene

Commençons par un petit portrait du cinéaste en hipster de première. Sean Durkin, qui signe là son premier long métrage, est bien décidé à nous en foutre plein la vue, et ça passe d'abord par un look irréprochable à base de lunettes noires à montures épaisses, de bonnets et autres écharpes en tweed, de cabans noir ébène, de souliers en daim, de cheveux coiffés, décoiffés, surcoiffés collés sur le front, de barbe fournie taillée au millimètre et de poses énigmatiques bien calculées. C'est le Benjamin Gibbard de la mise en scène, un de ces types dont on connaît la playlist Spotify et la wishlist Deezer de Noël rien qu'au premier coup d’œil. Mais ça ne peut pas suffire, car Sean Durkin est quand même metteur en scène en plus d'être un cliché humain, et il a donc également voulu nous épater dans son premier film, dont le titre, version féminine et indiecute du très suffisant Tinker, Taylor, Soldier, Spy (aka Das Taupe en France), inspire déjà la méfiance. Martha Marcy May Marlene évoque le nom d'un joueur de foot africain, mais le charisme, la carrure et la longue vue en moins. Ce titre de génie fait référence aux deux fois deux noms de l'héroïne du film, partagée entre deux existences, deux vies dans lesquelles on l'appelle tantôt Martha Marlene, tantôt Marcy May, ce deuxième patronyme étant ingénieusement logé dans le premier, telle une identité secrète et cachée, plus profonde qu'un simple nom de baptême... Dès le titre on voit se pointer les grosses idées de Sean Durkin. Son héroïne est une jeune femme paumée qui, après avoir fugué dans une sorte de communauté communiste sectaire et après s'en être échappée, retourne auprès de sa grande sœur et tâche de s'adapter de nouveau à une vie bien rangée.




L'épisode sectaire de la vie de l'héroïne est une sorte de parenthèse déterminante dans son existence déréglée. Durkin tarde à nous révéler les tenants et les aboutissants de ce parcours dont on a pourtant tout compris au bout d'un quart d'heure, et en étant certain de ne pas se tromper. En effet, le film déroule tranquillement sa petite idée de génie, selon un schéma très attendu. A base de flashbacks enchâssés dans la continuité du récit par des raccords souvent très malheureux, qui nous rappellent sans cesse que le réalisateur se prend pour un gros malin, on devine que l'héroïne est hantée par son souvenir de la communauté, traumatisée même, notamment par les viols initiatiques perpétrés par le gourou de la bande, incarné par John Hawkes, cet acteur si gonflant abonné aux rôles de mecs étranges dans le petit univers du ciné indé contemporain. Mais Martha déteste tout autant, voire davantage, la vie bien structurée de sa soeur et de son mari. En gros le film joue le capitalisme, avec son petit confort matériel bourgeois, son american way of life, son couple coincé et sa réussite financière obligatoire, contre le communisme, qui trouve ici son expression dans l'esclavagisme des femmes, le viol de ces dernières par un dictateur mal intentionné, sorte de Charles Manson sans folie, le cambriolage organisé, le meurtre de sang froid et l'endoctrinement absolu de chaque membre à coup de promesses d'amour fallacieuses, embrigadement allant jusqu'à convaincre les demoiselles que le viol leur est nécessaire et que c'est même un idéal. Voilà la grande idée du réalisateur. Et Martha tangue entre ces deux modes de vie infernaux, ne trouve pas sa place, est inadaptée, voire carrément sociopathe, d'où, in fine, l'internement dans un centre spécialisé, même si on doute qu'elle y reste très longtemps puisque les dangereux criminels communistes la traquent sans relâche pour lui faire payer sa trahison. Voilà donc le discours de Durkin, rabâché mollement pendant une heure et quarante minutes qui en paraissent le triple, et en abusant de ce montage pour les nuls qui nous crève l'âme.




On s'attendait à voir éclore un cinéaste digne d'intérêt dans le petit monde assez moribond du cinéma indépendant américain. Certaines critiques nous avaient laissé espérer. Et on se retrouve à nouveau nez à nez avec l’œuvre d'un nazebroque qui pète plus haut que son cul, qui se prend très au sérieux alors qu'il n'a pas deux idées, et dont on a comme la certitude qu'il n'ira que difficilement plus loin qu'il n'est déjà allé. Pour ce qui est de nous révéler une nouvelle grande actrice, car c'est aussi ça qui a contribué à susciter l'intérêt de certains critiques, Elizabeth Olsen a beau rouler ses yeux globuleux dans tous les sens et nous gratifier de son regard de chien battu, on a du mal à croire qu'on la reverra un jour ailleurs que dans le pieu de Sean Durkin, qui visiblement en pince à mort pour elle et a pourtant des difficultés terribles à nous faire croquer sa passion pour ce minuscule bout de femme. L'actrice est saluée car elle a fait mieux que ses deux sœurs jumelles réunies, devenues cocaïnomanes, cleptomanes, héroïnomanes et alcooliques. Mais l'insuccès de nos frères et sœurs suffit-il à faire de nous des Dieux vivants ? Nos frères respectifs par exemple sont des ramassis d'ordures, et en aucun cas les gens ne nous traiterons de petits princes. Peut-être est-ce parce que nos frères ne sont pas encore médiatisés comme les sœurs Olsen, qui ont joué dans Fête à la maison, mais si ça continue croyez-nous ça finira par arriver, et là on passera pour des anges de blogueurs ciné...


Martha Marcy May Marlene de Sean Durkin avec Elizabeth Olsen, Sarah Paulson et John Hawkes (2012)