20 novembre 2018

The Young Lady

Tous ceux qui ont vu Outlaw King ont forcément remarqué l'actrice qui joue la Reine d’Écosse, l'anglaise Florence Pugh. Cette jeune actrice avait été révélée il y a deux ans par Lady Macbeth (aka The Young Lady en version française...), le premier long métrage du réalisateur britannique William Oldroyd, adaptation du roman de Nikolaï Leskov, Lady Macbeth du district de Mtsensk. J'ai lancé ce film les yeux fermés et la surprise fut d'autant plus agréable, car on tient là un drame de la plus belle eau qui révèle donc une actrice aussi charmante que douée et un cinéaste au talent évident. L'action se déroule à la fin du XIXème siècle dans une région rurale de l'Angleterre. On y suit une jeune femme, Katherine, mariée par intérêt et sans le moindre amour à un homme plus âgé. Sa vie ennuyeuse et stricte est bouleversée au départ de son mari car elle découvre pendant son absence la passion amoureuse et les plaisirs de la chair avec un de ses palefreniers nommé Sebastian. Autant ne pas en dire plus.





Lady Macbeth est avant tout le portrait d'une femme désireuse de sortir de son carcan étouffant dans lequel elle est maintenue par son mari autoritaire et son beau-père acariâtre. Les personnages sont vraiment bien plantés et de façon assez subtile, les dialogues sont très réussis. On devine chez chacun d'eux des failles profondes qui nuancent le tableau qui pourrait sans ça tomber dans la caricature. Florence Pugh, qui suscite d'abord l'empathie, finit par incarner une femme presque effrayante de cruauté et d'intelligence machiavéliques, à l'aura impressionnante. Cette évolution perverse est étonnamment bien retranscrite, tout comme l'ambiguïté morale de ce personnage. Son basculement progressif se fait finement. On pourrait un temps reprocher au réalisateur de ne pas accorder assez de place à l'amour qui lie Katherine à Sebastian, mais là n'est finalement pas le sujet du film.





La mise en scène de William Oldroyd est particulièrement maîtrisée. Le cinéaste atteste d'un vrai sens du cadre et nous propose une reconstitution historique très sobre et légère, loin des productions lourdaudes qu'on nous sert parfois quand il s'agit d'adapter de telles tragédies shakespeariennes. C'est d'ailleurs presque un reproche que l'on pourrait faire à William Oldroyd : son film aurait peut-être pu prétendre à une autre envergure. On sent une forte volonté de rester dans l'épure totale, avec cette absence de musique, ces silences si présents, ces cadres au millimètres et cette durée très courte pour nous raconter une telle histoire (en 88 minutes, c'est réglé). C'est à la fois le grand charme du film et, peut-être aussi, sa petite faiblesse. Cette description pourrait vous faire craindre un résultat à l'écran trop austère et froid, nous laissant à distance, mais il n'en est rien : bien rythmé, le film est assez lumineux et avenant, la présence centrale de la belle Florence Pugh participant beaucoup à cela.





Le style intelligemment adopté par William Oldroyd dépeint parfaitement cette espèce de prison soyeuse dans laquelle vit la jeune femme. Les quelques scènes en extérieur, valorisant les beaux paysages de cette région anglaise, apparaissent d'ailleurs comme de vrais bols d'air frais, pour nous comme pour le personnage principal. On prend un grand plaisir à suivre cette terrible histoire qui parvient habilement à traiter de thèmes forts et encore très actuels comme l'émancipation féminine et les rapports de classes. On termine le film avec la certitude qu'une actrice est née et que ce cinéaste est à suivre de près. 


The Young Lady (Lady Macbeth) de William Oldroyd avec Florence Pugh (2016)

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