21 juin 2008

Bons baisers de Bruges

Tout est bizarre dans ce film. Le ton est bizarre, le duo d'acteurs est bizarre, l'intention de départ est bizarre. C'est supposé être une comédie et on ne rit presque jamais, sinon jaune, façon humour british. Le plus souvent c'est quand même une ambiance plutôt morose qui règne à Bruges, voire pathétique avec ces personnages de tueurs à gage au bout du rouleau, tantôt suicidaires, tantôt courant après la vie. Bizarrerie d'un scénario dont on ne sait jamais où il nous mène. Bizarrerie d'un rythme résolument lent qui n'ennuie jamais. Bizarrerie d'une brillante scène d'appel téléphonique qui dure 20 minutes et qui marque le tournant dramatique du film. Bizarrerie d'un buddy movie qui au lieu de baser la dualité de ses deux personnages principaux sur une différence de taille, de gabarit, de couleur, ou d'humeur (comme dans la tétralogie mythique Lethal Weapon, ou dans Die Hard 3, Le Dernier samaritain, Jumeaux, etc.), se limite à différencier ses héros par ce que j'appellerais un "sourcil d'écart". Il saute aux yeux que Colin Farrell est la nemesis sourciliaire du brave Brendan Gleeson, qui se retrouve avec un front épilé à la cire tandis que son acolyte penche vers l'avant sous le poids de ses astéro-sourcils en accent circonflexe qui, sur les plans d'ensemble comme sur les gros plans, sont utilisés comme des balises par le chef op' qui s'en sert bizarrement pour délimiter son cadre. 
 
 
 
 
Al Pacino aurait dit de Colin Farrell qu'il est l'acteur le plus doué de sa génération. Brendan Gleeson aurait dit de Brendan Fraser : "Je n'ai rien à voir avec ce con". Ces deux mercenaires de la pelloche qui ont tourné dans les plus grands pays du monde sont accompagnés d'un casting 5 étoiles, avec Ralph Fiennes, Jérémie Renier et la jolie Clémence Poésy. Malgré tout, le film repose en très grande partie sur les épaules ô combien robustes de Farrell et Gleeson qui nous en foutent plein la gueule. Et si ce film est un polar original, une carte postale au vitriol, une comédie amère, et ainsi de suite, c'est avant tout un fameux duel d'acteur et un film de vacances intriguant. Qui n'a jamais rêvé de voir Brendan Gleeson se payer des vacances à Bruges ? Au final, ce premier long de Martin McDo est un petit ovni, très original, très décalé, assez intéressant.
 
 
Bons baisers de Bruges de Martin McDonagh avec Colin Farrell, Brendan Gleeson, Clémence Poésy, Ralph Fiennes et Jérémie Renier (2008)