19 octobre 2021

Les Survivants

Un film de montagne avec Ethan Hawke... Pouvions-nous passer à côté ? Non. Je me suis donc pris Les Survivants de Frank Marshall sur le râble. Le célèbre producteur américain tourne en 1993 cette adaptation d'un fait divers : le crash, en octobre 1972, du vol 571 de la Fuerza Aérea Uruguaya transportant toute l'équipe uruguayenne de rugby, en plein cœur de la Cordillère des Andes, côté argentin, sur un glacier reculé culminant à 3600 mètres d'altitude. La cordillère, dans ce film, ne bénéficie pas vraiment du regard sensible et sensé que pose sur elle le cinéaste chilien Patricio Guzman dans son dernier film, La Cordillère des songes. Dans Les Survivants, la Cordillère des Andes, même si quelques plans d'ensemble lui font la part belle, est plutôt assimilée à un formidable merdier. Les rugbymen taillés comme des arbalètes du casting se retrouvent piégés dans les hauteurs glacées de la montagne et contraints d'y survivre pendant 70 jours en affrontant toutes les épreuves : blessures, froid, avalanche et surtout la faim, qui les conduira à prendre une décision critique. Bouffer ou ne pas bouffer les morts ? Autant ne pas lire ce qui suit si vous voulez vous taper Les Survivants bientôt, lors d'une redif sur Paramount Channel, mais vous l'avez vu venir à dix kilomètres : les survivants finiront par trancher et becqueter les macchabées.

 

Cette image d'illustration a deux défauts. Premièrement, Ethan Hawke en est absent, puisqu'il est à bord de l'hélico venu sauver les rescapés (massive spoiler), en contrechamp. Deuxièmement, elle constitue un massive spoiler. Mais Danny Nucci y est à l'honneur, les bras écartés et une chaussette sur la main droite. Notez aussi le type, en bas, heureux d'être enfin secouru mais qui n'oublie pas de finir de grailler un bout de bifteck humain.

Que dire sur ce film après ce premier paragraphe déjà bien dense, riche, complet et passionnant ? Je ne sais trop. Je pourrais m'arrêter là. En fait, j'aurais pu ne pas commencer. Mais maintenant que c'est fait, il faut bien terminer. Ah si, dans ce film au casting peu reluisant en dehors d'Ethan Hawke, beau comme un cœur dans chaque plan où il apparaît avec sa superbe gueule, et qui embellit au fil du métrage contre toute logique narrative, on évitera de causer de la présence de John Malkovich en début et fin de film, anecdotique dans le rôle du survivant vieilli qui raconte son histoire, mais on peut citer Danny Nucci, qui fait partie de la fine équipe. On a tous entendu parler de ces femmes ou de ces hommes qui se sont retrouvés impliqués sur les lieux de toute une série de catastrophes ou d'attentats, victimes d'un destin malicieux s'acharnant à leur faire frôler et renéguer la mort de près. Danny Nucci est de ces gens-là. Il était donc des rescapés de ce deuxième vol 571 de la Fuerza Aérea Uruguaya. Deux ans plus tard il grimpait à bord de l'USS Alabama de Tony Scott, coincé entre la glotte de Gene Hackman et la moustache de Denzel Washington à bord d'un sous-marin proche de l'implosion en pleine guerre froide. Deux ans après il embarquait à bord du Titanic de James Cameron la fleur au fusil, dans le sillage de son égérie Leo Dicaprio lui-même dans le sillage de Kate Winslet elle-même dans le sillage du gros paquebot bientôt coupé en deux, rameutant avec lui sa grinta pas possible, sa chatte à Dédé. Et en 2005 il errait par hasard dans l'un des biplans lancés à toute berzingue sur le World Trade Center d'Oliver Stone au moment de l'attaque terroriste. Danny la Nucci... ce vieux chat noir, cette jaunasse... Sur tous les plateaux où il est passé, les décors se sont cassé la gueule. Depuis, l'acteur américain natif de Klagenfurt se déplace à pied, et, plus grave, il est refoulé par tous les directeurs de casting. Pauvre Danny Nucci. 


Les Survivants de Frank Marshall, avec Ethan Hawke, John Malkovich, Josh Hamilton, Illeana Douglas et Danny Nucci (1993)

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