28 avril 2020

Le Voyage fantastique

Sorti en 1966, Le Voyage Fantastique nous narre les mésaventures d'une équipe de scientifiques rétrécie et injectée à bord d'un sous-marin dans le corps d'un vieux savant pour le guérir d'une blessure mortelle au cerveau à l'aide d'un pistolet laser haute précision. Il s'agit de l'ancêtre de L'Aventure Intérieure, comédie réalisée par Joe Dante en 1987, ce film si sympathique qui sut marquer les esprits de la chanceuse génération ayant grandi avec les divertissements de qualité que produisait encore Hollywood dans les années 80. Si le film de Richard Fleischer suscite encore notre sympathie, il paraît finalement inférieur à son faux remake. Il faut avouer que l'on a connu Richard Fleischer bien plus inspiré. Ici, le cinéaste se contente un peu d'assurer le service minimum, en s'appuyant notamment sur un pitch forcément captivant et un visuel particulièrement soigné pour l'époque, qui fait passer l'intérieur du corps humain pour une sorte d'immense boule à facettes multicolores mystérieusement éclairée de l'intérieur...


Quitte à être réduit à la taille d'un microbe et injecté dans l'artère carotide d'un humain, on préférerait un hôte un peu plus accueillant...

Malheureusement, le film est très lent (le seul rétrécissement des aventuriers doit bien durer 20 minutes), et si l'idée de faire du corps humain et de sa fragile mécanique le lieu de toutes les angoisses est non seulement intéressante mais tristement pertinente, on se désintéresse peu à peu de péripéties répétitives et sans grands enjeux (après la récupération laborieuse d'oxygène dans des poumons aux alvéoles psychédéliques, et la traversée d'un conduit auditif dans la peur d'être réduit en miette au moindre bruit extérieur, le climax implique le débarquement d'anticorps dégueulasses et d'immondes globules blancs fluorescents...). Le film est peut-être aussi trop sérieux, trop platement documenté. Même si l'intérieur du corps est représenté avec une certaine fantaisie, on se croirait parfois devant un cours de SVT un rien monotone.


Raquel Welsh fait partie du voyage. Seule femme à bord, elle subit immédiatement la connerie d'un de ses coéquipiers, incarné par Stephen Boyd, qui se réjouit qu'elle soit là pour lui faire à bouffer.

On devine par ailleurs que le film de Fleischer se déroule dans le contexte de la Guerre Froide (le savant doit être sauvé parce qu'il détient le secret pour perfectionner la technique du rétrécissement, indispensable en vue d'une attaque armée future) mais l'ennemi n'est jamais clairement nommé, l'un des personnages évoque seulement "les autres", une seule fois, ce qui donne intelligemment un aspect atemporel au film et le distingue de nombreux films de science-fiction de cette période.  


Où l'on découvre que nos poumons, même encrassés, ont la splendeur des carrières de lumière (un site à visiter, aux Baux-de-Provence, lors de vos prochaines vacances dans le sud).

Richard Fleischer donne hélas l'impression de ne pas exploiter tout le potentiel de son idée de départ et il ne parvient pas véritablement à nous faire ressentir le vertige de l'infiniment petit. Parmi les acteurs, au service de personnages sans grand intérêt, seul Donald Pleasance tire son épingle du jeu, les autres se contentant eux aussi de répondre présent à l'appel et de débiter leurs dialogues avec une conviction factice. Le Voyage Fantastique fait donc partie de ces rares films dont on peut se dire qu'un nouveau remake pourrait être bienvenu (le film de Joe Dante s'en étant seulement inspiré et s'en éloignant très nettement), car il aurait de vraies chances d'être supérieur à l'original, à condition qu'une même liberté soit gardée pour inventer les décors (ce qui hélas semble difficilement imaginable aujourd'hui).  


Michel Polnareff en live ? Non, l'attaque des globules blancs géants.

Néanmoins, le film de Richard Fleischer a su nous intriguer sur un point a priori tout à fait anodin mais qui a mis notre imagination en ébullition. On nous précise que le rétrécissement des scientifiques est limité dans le sens où il ne peut durer que 60 minutes (l'action du film se déroule quasiment en temps réel), 60 minutes au bout desquelles ils retrouveront progressivement leur taille normale. Évidemment, le film se termine bien, les scientifiques parviennent à sauver le savant sur le fil, et s'échappent de son corps par une larme, mais on ne peut s'empêcher d'imaginer ce que ça aurait donné si l'équipe de scientifiques, constituée de 4 hommes et 1 femme, s'était mise à grandir pour que chacun retrouve sa taille normale à l'intérieur même d'un autre homme. Vous voyez le tableau ? Ça aurait donné une scène affreusement gore, un truc vraiment abominable...


Le Voyage Fantastique de Richard Fleischer avec Stephen Boyd, Donald Pleasance, Raquel Welch et Edmond O'Brien (1966)

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