12 décembre 2017

Evil Dead III - L'Armée des Ténèbres

Des effets spéciaux artisanaux conçus avec amour, un acteur vedette au sommet de sa forme dans la peau d'un héros iconique, des hommages sincères et des références de classe disséminés ici ou là pour les amoureux du genre, des situations et des dialogues pleins d'humour et d'inventivité, un scénario ingénieux, sans temps mort et, pour couronner le tout, un doublage français aux petits oignons : le troisième volet de la saga Evil Dead de Sam Raimi, préférant l'humour à l'horreur, n'a pas volé son statut de film culte ! Sorti en 1992, cette Armée des Ténèbres constitue pour moi le point culminant de la carrière de son auteur. Un petit film d'horreur comique, humble, terriblement attachant et plein de charme.

Plus charismatique que jamais, Bruce Campbell, acteur fétiche et grand ami de Sam Raimi, reprend donc son rôle de Ash, rendu célèbre par les deux premiers volets de la saga. Attaqué par la "chose" qui l'aspire dans une autre dimension, il se retrouve cette fois-ci bloqué dans une époque médiévale fantastique. Après une scène d'introduction d'une efficacité redoutable et littéralement décoiffante, Ash est contraint de s'amputer la main droite, aussitôt remplacée par une bonne vieille tronçonneuse. Egalement armé d'un fusil à pompe porté en bandoulière dans un étui en cuir, Ash se transforme dans cet épisode en un véritable personnage de comic book, doté d'une allure terrible, immédiatement reconnaissable et d'une cinégénie indiscutable. On n'est pas étonné de constater que le film a effectivement donné lieu à une adaptation en bandes dessinées. Ash est la plus grande attraction d'Evil Dead III et Bruce Campbell se fait plaisir en enchaînant les tronches pas possibles, dignes d'un dessin animé Tex Avery. 





Après un accueil difficile, Ash passera pour le Messie tant espéré auprès d'une petite peuplade en proie aux forces démoniaques. Mais en réalité, Ash est plutôt un imbécile arrogant qui n'a strictement rien d'un sauveur. Il veut simplement retourner dans sa fichue époque ! Il devra, pour cela, mettre la main sur le fameux Necronomicon (pour une fois, le nom de l'ouvrage maudit inventé par Lovecraft n'est guère sali !), ce qui permettra également d'éradiquer les forces du Mal. Hélas, rien ne se passera comme prévu ! Ash étant incapable de se souvenir de la formule magique à absolument prononcer avant de récupérer le Necronomicon ("Klaatu barada nikto", une phrase pour la première fois entendue dans le classique de la SF des années 50, Le Jour où la Terre s'arrêta de Robert Wise), ce qui nous vaudra l'une des plus tordantes scènes du film.





Véritable héros de jeux vidéos ou de comic book, Ash traverse ici une série d'étapes, d'épreuves, permettant à Sam Raimi de déployer des idées de mise en scène plus ou moins heureuses, mais toujours audacieuses. Un long passage pratiquement muet durant lequel Ash affronte des doubles maléfiques dans un moulin abandonné s'avère particulièrement réussi et bluffant. Tout au long du film, et tout particulièrement lors du passage évoqué, le cinéaste en roues libres se permet des clins d’œil et des citations qui raviront les spécialistes, en allant du cinéma d'horreur des années 30 (les Frankenstein de James Whale) aux animations image par image de Ray Harryhausen. Des références variées qui attestent d'un amour sincère et communicatif pour le cinéma de genre et ne parasitent jamais le film, bien au contraire. Evil Dead III dégage une fraîcheur, une humilité, une sincérité et une légèreté qui l'éloigne de toute lourdeur et le rend infiniment sympathique. Le film est aussi cool et amusant que le personnage qu'il met en scène !





La beauté des effets spéciaux du film se déploie notamment lors de l'assaut final des "cadavéreux" (l'armée des ténèbres du titre, des squelettes belliqueux réveillés de leur cimetière par le maladroit Ash !). Le travail sur le look des squelettes est des plus minutieux, au même titre que l'animation image par image. Pour ne rien gâcher au plaisir, un thème musical inspiré, signé Danny Elfman, vient accompagner ce chouette moment. En version française, le film est farci de petites phrases marrantes, prononcées avec des voix et des intonations terribles. Les doubleurs s'en sont donné à cœur joie, très inspirés par une oeuvre particulièrement propice à cela. On garde aussi un souvenir ému de cette scène, survenant juste avant l'arrivée des cadavéreux, durant laquelle un Ash aux abois essaie de remotiver ses troupes puis invente une série de machines pour le combat. Le personnage fait alors enfin preuve d'ingéniosité, prenant son rôle de héros au sérieux, et finit par gagner l'adhésion des autres hommes. "Je te suivrai où que tu ailles !", "Mon épée est tienne !", "Tu peux compter sur moi", toutes ces phrases sont alors dites avec des voix plus débiles les unes que les autres. Un moment d'anthologie dans un film qui en comporte plus d'un... On adore également le monologue prononcé au début du film par un Ash tout juste ressorti victorieux d'une bagarre avec quelques démons, qui se montre plus arrogant que jamais et se met à haranguer avec son fusil une foule complètement médusée. Encore une bien belle scène dans un pur régal de cinéphage !





J'ai découvert Evil Dead 3 aux alentours de 10 ans et j'en suis immédiatement tombé sous le charme. Un de mes classiques instantanés ! J'ai dû le revoir une bonne dizaine de fois depuis. J'y reviens régulièrement. Des situations et des dialogues sont gravés en moi à jamais. Je repense souvent à ce pauvre personnage qui, lors d'un combat avec une sorcière, reçoit une marmite d'eau bouillante dans la tronche et s'écrie "Aaaaaaaah, mes yeux ! Ça brûle ! Je n'y vois plus ! Je suis aveugle !" dans une plainte pathétique. Ce film est à mes yeux une vraie pépite dans le genre trop souvent galvaudé du cinéma d'horreur comique. Je le connais si bien que j'en appréhende désormais les temps un peu plus faibles, trop impatient d'arriver à mes scènes, mes gags et mes répliques préférés. J'envie les personnes qui ont encore à découvrir ce chef-d'oeuvre intemporel. 


Evil Dead III - L'Armée des Ténèbres de Sam Raimi avec Bruce Campbell, Marcus Gilbert et Embeth Davidtz (1992)

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