28 janvier 2009

Donnie Darko

Je voudrais m'attarder sur une scène de ce film dont vous trouverez par ailleurs d'autres critiques sur google, si vous êtes du genre à aimer entendre parler de l'intégralité des films. Dans ce film, Jake Gyllenhaal (qu'on a décidé de laisser tranquille avec son nom, pour la première fois, lui qui ouvre toujours plusieurs boîtes à lettres dans le hall de son immeuble pour qu'au final tous les noms de ses voisins réunis puissent ressembler vaguement à son patronyme d'outre-tombe), acteur dont c'était la première apparition importante au cinéma (il avait déjà joué le fils de Billy Crystal dans La Vie, l'amour, les vaches), incarne un jeune étudiant qui rédige un exposé de chimie sur les particules élémentaires si chères à Michel Houellebecq. Dans son petit mémoire il tend à prouver que l'Homme se nourrit partiellement de l'air qui l'entoure et qu'il respire, et par extension du domaine de la lutte, de tout ce qui est précisément contenu dans cet air. Il démontre par A+B que l'Humain ingère, comme il fait des aliments, les molécules contenues dans l'air et leurs spécificités. En somme il nous explique que l'on avale, dans une quantité infinitésimale, un peu de ce que l'on sent. Ce à quoi son professeur et directeur de recherche Patrick Swayze (c'est la première fois que cet acteur joue un rôle de vivant, et non plus des fantômes de danseurs morts) ne trouve rien à redire.

Depuis ce film, une expression courante s'est fait jour et court le monde. Quand quelqu'un est assis à côté de vous, et qu'il expulse un cube fait de méthane et d'ammoniac, en d'autres termes quand votre voisin de métro chie tous ses morts en se tenant à un bras de distance de vous, et que vous sentez cette odeur de merde grimper comme un rongeur le long de votre flanc pour foncer vous hanter les narines et imprégner vos habits autant que votre gorge, quand vous sentez ce parfum de grande mort se répandre sur votre langue telle la grande faucheuse, et que vous sauriez presque dire ce que le horla à vos côtés a dîné avant de sauter dans le subway pour parcourir la ville et y partager son mal, alors, à cet instant précis, où vous cherchez la possibilité d'une île, et où vous tâchez de rester vivant, contre le monde, contre la vie, alors vous venez de subir une "Donnie Darko". Vous venez littéralement de manger de la merde, en quantité minuscule certes, mais suffisante pour pouvoir dire et affirmer que vous venez de manger un peu de merde. Sachez que si un jour les rôles s'inversent, et ne détournez pas le regard, on sait tous très bien que les rôles se sont déjà inversés pour chacun d'entre nous, on sait tous très bien qu'on n'est pas toujours au parfum de ce qu'on a dans le slip, alors vous pourrez dire que vous aurez, vous aussi, fait une "Donnie Darko".


Donnie Darko de Richard Kelly avec Jake Gyllenhaal et Maggie Gyllenhaal (2002)