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12 janvier 2022

Wedding Nightmare

Voici donc LE film des gargouillis de sang. Vous le cherchiez ? C'est celui-ci ! Et ça lui fait une belle médaille à la con ! Un nombre incalculable de scènes nous donnent à voir le spectacle forcément savoureux des derniers instants d'un des tristes individus en présence, bêtement zigouillé par un autre à l'aide d'une arme spectaculaire : du vieux pistolet imprécis occasionnant des dégâts impressionnants à l'ancienne hallebarde à la lame toujours bien aiguisée, tout y passe. Les deux réalisateurs du film doivent avoir, au mieux, 13 ans d'âge mental. Ils se sont bien éclatés, entre eux. Les pénibles agonies qu'ils se sont tant plu à filmer sont excessivement bruyantes et gores à souhait, et si nos yeux sont désormais habitués à la laideur de tels films, nos oreilles le sont un peu moins... Il s'agit là de véritables épreuves pour nos tendres feuilles. On imagine aisément, derrière tout ça, des petits rigolos, ces as du bruitage qui se sont bien amusés, eux aussi, à produire tel ou tel répugnant son de gorge en studio pour en caler un maximum au montage. Cette sordide caractéristique, cette performance unique, est peut-être ce qu'il y a de plus remarquable dans le premier succès de Matt Bettinelli-Olpin et Tyler Gillett, leur film breakthrough, celui qui a convaincu les executives de les laisser réaliser un cinquième opus à la saga Scream. On n'a pas forcément hâte de voir ça... 
 
 
 
 
Ready or Not, devenu Wedding Nightmare dans nos contrées anglophones, joue sur plusieurs tableaux et échoue dans strictement tous. D'un côté, il ne cherche jamais suffisamment à faire peur pour être un film d'horreur ou un thriller efficace, malgré les hectolitres de sang déversés à l'écran et une violence très soutenue, grand-guignolesque, pas vraiment sérieuse. De l'autre, il n'est pas assez drôle pour être une comédie horrifique digne de ce nom et recommandable, en dépit d'un humour noir omniprésent, que l'on pratique ici avec d'énormes sabots, et d'une succession de situations rocambolesques qui s'enchaînent à bon rythme. Peut-être s'agit-il d'un film à voir en groupe, entre copains, dans un contexte propice à la déconnade, pour une soirée d'Halloween ratée par exemple. C'est un film d'ambiance en quelque sorte, à condition de se trouver entre amateurs peu exigeants de délires sanguinolents et de supporter les gargouillis en fond sonore. C'est à regarder d'un seul œil, et du coin de cet unique œil. Car en tant que tel, si l'on considère le film pour ce qu'il est, quel supplice, que c'est fatigant ! Les personnages sont tous plus détestables les uns que les autres, mais c'est fait exprès, car le but est de se réjouir de les voir trépasser tour à tour, de rire de leurs morts stupides et éclaboussantes. Il n'y a hélas pas grand chose de jouissif dans tout ça, l'imagination et le talent des cinéastes sont bien trop limités pour surprendre, captiver, intéresser. Malgré tout, Wedding Nightmare semble avoir trouvé son public. C'est que les bobines horrifiques gores à tendance comique se font rares, c'était plutôt la mode il y a 40 ans, et il doit falloir aujourd'hui se contenter de peu. 
 
 
 
 
Que peut-on bien sauver là-dedans ? Peut-être Samara Weaving. Elle incarne l'héroïne, une jeune mariée contrainte à devoir participer, le temps de sa nuit de noces, à la partie de cache-cache traditionnelle de sa richissime belle-famille. Un véritable jeu de massacre où tous les coups sont permis, le but caché de cette famille au moins aussi fortunée que timbrée étant de faire de la mariée la victime du rituel sacrificiel qui renouvellera son pacte avec le Diable (ou d'un individu approchant : cet élément fantastique n'est ici qu'un prétexte, qui aboutit juste à une apparition fantomatique finale ignoble en CGI et, par ailleurs, le scénario est trop bêta pour que Wedding Nightmare puisse être associé à la vague d'horreur sectaire si florissante, et parfois inspirée, de ces dernières années). En plein carnage, transfigurée par son instinct de survie, l'héroïne devient une Rambo au féminin et l'actrice se démène, véritablement, nous proposant elle aussi une large gamme de bruits gutturaux, qui vont du hurlement de rage au hoquet de surprise en passant par le petit cri de panique. C'est du boulot ! Cette actrice venue d'Australie, déjà croisée dans Three Billboards ou Mystery Road, est la nièce d'Hugo Weaving, et cela se voit : même front proéminent, mêmes yeux exorbités, même sourire carnassier, même regard inquiétant comme animé par une folie intérieure qui ne demande qu'à exploser. Samara Weaving a un certain potentiel, mais son physique ambivalent, dont elle joue plutôt bien, était nettement mieux exploité dans le pourtant très médiocre The Babysitter. C'est dire... Malgré tous leurs très voyants efforts, je pense notamment à ce travelling qui remonte de ses Converse crados à son visage ensanglanté et ahuri en passant par sa robe de mariée déchirée et son fusil de chasse fermement tenu, les réalisateurs ne parviennent pas à l'imposer comme cette icône du genre dont ils rêvaient, comme la nouvelle scream queen issue de leurs seuls fantasmes adolescents. Espérons que nous la verrons un jour devant des caméras plus fiables et dans des rôles moins débiles.


Wedding Nightmare (Ready or Not) de Matt Bettinelli-Olpin et Tyler Gillett avec Samara Weaving (2019)

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