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27 mars 2022

Fandango

Sorti en janvier 1985 aux États-Unis (et beaucoup plus confidentiellement, trois ans plus tard, en France, sous le triste titre Une Bringue d'enfer), Fandango marque la rencontre entre deux BFFL (Best Friends For Life), Kevin Costner et Kevin Reynolds. C'est durant le tournage de ce film que Costner et Reynolds se sont découvert une passion commune pour la musique country et ont formé leur duo, 2K. Duo devenu trio lors de l'intégration de Kevin Kine, avec lequel Costner a vécu une histoire d'amitié intense ("no touching" selon lui) pendant la réalisation de Silverado. Ils modifièrent leur nom de scène en KKK, connaissant un vif et inexplicable succès lors de leur tournée inaugurale dans les états du Sud, jusqu'à ce qu'un rabat-joie leur rappelle la signification historique de ce sordide acronyme. Au zénith de son succès, quand il remporta le "Big Three" aux Oscars pour Danse avec les loups, Kevin Costner se retrouva plus d'une fois face à des journalistes accusateurs qui s'étaient renseignés sur son passé et lui demandèrent des comptes. C'est à ce moment-là que la star changea de bord et passa des Républicains aux Démocrates, pour montrer patte blanche, en pensant que ça enterrerait définitivement cette affaire, "a vast quid pro quo" selon ses propres termes. 



 
Cette anecdote étonnante et méconnue a en commun avec Fandango l'insouciance de la jeunesse. En effet, le premier long métrage de Kevin Reynolds nous narre la dernière virée d'un groupe de potes sur les routes du Texas. Nous sommes en 1971 et ces étudiants fraîchement diplômés viennent chacun de recevoir une convocation de l'armée, direction le Vietnam. Sachant qu'ils se situent à un moment charnière de leurs existences et vivent sans doute leurs derniers instants de pleine liberté, ils se lancent à la quête d'un trésor qu'ils avaient caché quelques années plus tôt dans le désert, à la frontière avec le Mexique. Cette chasse au trésor n'est en réalité qu'un prétexte pour passer du temps ensemble, vivre à fond, se laisser dériver vers de folles péripéties, quitte à mettre le groupe à rude épreuve...


 
 
"Un des meilleurs premiers films de l'histoire du cinéma" dixit Quentin Tarantino, qui est tout sauf une référence en matière de cinéma, Fandango brille par sa fraîcheur, sa candeur, son énergie et ses jeunes personnages attachants campés par des acteurs au poil. Sort évidemment du lot, avec une insolence naturelle et un charme qui ne demandait qu'à s'imprimer sur nos rétines et à s'épanouir encore, Kevin Costner. Son charisme fou manque de transformer le film en un one man show. Kevin Reynolds admet avoir eu une érection massive quand il a serré pour la première fois la main virile de Kevin Costner, et cela suinte littéralement de chaque plan. Toutes les occasions sont bonnes pour lui faire tomber le haut et mieux révéler un torse qui, s'il ne correspond pas aux critères dégénérés sous créatine de notre sombre époque, évoque l'art statuaire gréco-romain le plus classique et intemporel. Il ne fallait pas s'appeler Spielberg pour déceler tout le potentiel cinégénique de celui qui, paradoxalement, enchaînait alors les castings sans succès et les apparitions fugaces dans des téléfilms érotiques. 


 
 
De ce film éminemment sympathique, nous retenons sa douce mélancolie, présente de la première à la dernière image, malgré toutes les péripéties parfois puériles que nous avons vécu entre temps. Âgé de 33 ans au moment du tournage, Kevin Reynolds semble clore sous nos yeux attendris le chapitre de sa propre jeunesse. La délicatesse de son regard parvient à toucher n'importe quel trentenaire un peu nostalgique (ou simple amateur de bons films) n'ayant pas un cœur de pierre. Temps fort parmi les temps forts, parenthèse aérienne au milieu de leur road trip frivole, la séquence du saut en parachute marque durablement les esprits. Calquée presque plan par plan de son court métrage Proof qui la fait connaître aux yeux les plus avertis d'Hollywood, cette séquence décoiffante et franchement réussie nous tient en haleine par son mélange de tons alliant un suspense qui fonctionne à plein tube à un humour parfois outrancier (le pilote lunaire) et un comique de situation efficace. Une séquence pleine d'idées, dont on sent qu'elle a longtemps mûrie dans l'esprit d'un cinéaste débutant, plein de fougue et désireux de montrer tout son talent. 


Fandango (Une Bringue d'enfer) de Kevin Reynolds avec Kevin Costner, Judd Nelson, Chuck Bush, Sam Robards et Suzy Amis (1985)

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