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6 septembre 2018

Printemps tardif

Pour qui ne se lasse pas des nombreux films de Yasujirō Ozu, aux titres très similaires et portés par la même bande d'acteurs, évoquant les relations familiales au milieu du 20ème siècle dans un Japon tiraillé entre le poids de la tradition et l'essor vers la modernité, et pour qui même éprouve une immense joie à la découverte de chaque film du cinéaste, la rétrospective en dix films proposée par de nombreuses salles cet été fut une bénédiction. J'ai pu donc découvrir ce Printemps tardif de 1949, dont la beauté tient évidemment à l'art de Yasujirō Ozu, et à l'immense sensibilité dont il fit preuve tout au long de sa carrière, posant sur ses personnages un regard d'une grande humanité, quitte à critiquer à travers certains d'entre eux les mœurs de son temps, mais aussi à la simplicité et à l'originalité de son scénario. Si la jeune Noriko (Setsuko Hara) refuse de se marier et de laisser son père veuf Shukichi (Chishū Ryū) vivre seul, ce n'est pas seulement parce qu'elle redoute les effets de cet abandon sur la santé de ce dernier, c'est aussi, comme elle tente de le lui confesser à plusieurs reprises, finissant par y parvenir dans une scène bouleversante, parce qu'elle est réellement et tout simplement heureuse de vivre à ses côtés et qu'elle n'est pas sûre de mener une vie plus épanouissante auprès d'un autre.




Il faudra que le père et la fille fassent un ultime voyage ensemble, à Kyoto, que soit raconté le possible bonheur succédant aux premières années difficiles d'un mariage forcé, et il faudra que le père promette de se remarier, pour que sa fille, Noriko, consente à son tour au mariage. Mais sous ses dehors d'homme serein, heureux, confiant et convaincu de devoir marier sa fille pour son bien et pour faire les choses comme il faut, le père, à la perspective de plus en plus concrète du mariage approchant, vacille sur ses bases. Ce qui donne non seulement un très beau dialogue entre lui, le père, Shukichi, et son vieil ami (quant à lui remarié à une jeunette), où il est dit la cruauté de ce rôle de parent qui consiste à élever une enfant pour que, à peine devenue la femme que l'on espérait, elle se marie à un autre (les deux vieux n'oublient quand même pas qu'ils étaient bien heureux d'en épouser, eux aussi, des femmes accomplies), mais aussi cette séquence finale, où l'on se surprend à pleurer devant un homme seul qui pèle une pomme.


Printemps tardif de Yasujiro Ozu avec Setsuko Hara et Chishū Ryū (1949)

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